– Les contraintes inhérentes à la compensation. – Nous avons vu dans nos développements précédents (V. supra, nos
et s.) que la compensation environnementale, dernier moyen d'obtenir une autorisation administrative de construction ou d'aménagement au titre de la séquence Éviter-Réduire-Compenser, devenait un enjeu majeur en matière d'aménagement du territoire. Nous avons pu voir également que les techniques de compensation, qu'elles soient par l'offre ou par la demande, contraignent fortement les opérateurs, notamment en raison de l'obligation de résultat pesant sur le maître d'ouvrage et le caractère incessible de sa qualité de débiteur de l'obligation. Certes, nous avons pu relever avec l'ORE que des solutions innovantes ont pu être imaginées par le législateur afin de faciliter l'exécution de cette obligation. Par ailleurs, si le maître d'ouvrage choisit de procéder à la compensation grâce à l'acquisition de parcelles qu'il affectera à cet usage, ces parcelles constitueront un élément de son patrimoine, et seront susceptibles de faire l'objet de cessions ou de poursuites par ses créanciers, ce qui a pour effet de précariser l'opération de compensation.
La fiducie à caractère environnemental en matière de compensation
La fiducie à caractère environnemental en matière de compensation
– La fiducie au service de l'obligation de compensation. – En ayant recours à la technique fiduciaire, le maître d'ouvrage deviendrait alors le constituant en transférant au fiduciaire les parcelles foncières siège de la compensation, à charge pour celui-ci de mener les opérations et travaux nécessaires à l'exécution de la compensation. Cela permettrait, selon nous, de pérenniser la compensation, car il faut ici rappeler que :
- le patrimoine affecté au fiduciaire échappe aux créanciers, tant du constituant que du fiduciaire, sauf en ce qui concerne les créances nées de la conservation ou de la gestion de ce patrimoine. Ce patrimoine affecté fonctionne donc en vase clos. Une limite demeure cependant : les créanciers du constituant titulaires d'un droit de suite attaché à une sûreté publiée antérieurement au contrat de fiducie pourront toujours appréhender le bien dans le cadre de la mise en œuvre de leur sûreté ;
- le contrat de fiducie doit établir les droits et obligations du fiduciaire, et un manquement de ce dernier à ses obligations engage sa responsabilité. En matière de compensation, les engagements contractuels souscrits par le maître d'ouvrage vis-à-vis de l'autorité administrative constitueront la matrice du contrat fiduciaire, afin de cerner la mission du fiduciaire. La durée qui sera obligatoirement fixée par le contrat devra également être compatible avec la durée nécessaire à l'obligation de compensation qui doit, rappelons-le, s'étendre autant que durent les dommages environnementaux générés par le projet de l'opérateur.
En matière de compensation par l'offre, on pourrait également imaginer qu'un opérateur de compensation puisse avoir la qualité de fiduciaire, afin de limiter ses acquisitions foncières, n'ayant plus alors à porter le financement de telles acquisitions. Mais il pourrait dans un tel cas émettre et céder des unités de compensation portant sur des propriétés foncières dont il ne serait pas propriétaire, mais simplement détenteur au titre d'un contrat de fiducie.
– Perspectives. – Il nous apparaît donc qu'en matière environnementale, la fiducie constitue une technique de gestion et de protection révélant de vastes potentialités. Pour autant, il nous semble que le droit commun de la fiducie pourrait être complété par des dispositions prévoyant explicitement la possibilité de constituer une fiducie à caractère environnemental, évolution que nous souhaitons proposer dans le cadre des travaux de ce congrès.