- Des soins prudents, diligents et avisés dans le seul intérêt du mineur. - L'héritage constitue une opération patrimoniale capitale dans la vie d'un mineur. Lorsque les formalités juridiques et fiscales de cette transmission sont réalisées, son représentant doit administrer ses biens en y apportant des « soins prudents, diligents et avisés, dans le seul intérêt du mineur »
. Que signifie cette directive de gestion dans le contexte économique actuel ? Même si elles prescrivent la sagesse, ces formules obscures présentent l'avantage d'une grande souplesse d'interprétation. Et la question très concrète qui se pose au représentant du mineur est de déterminer si sa mission est de conserver et préserver en l'état les biens transmis à cet héritier où s'il doit restructurer complètement ce patrimoine.
La réponse varie naturellement en fonction de la nature des biens transmis et de l'âge du mineur. Cette réponse de principe ne résout pas les cas concrets. Que faire d'un portefeuille de valeurs mobilières transmis à un mineur ? Ces actifs présentent un risque de dépréciation élevé, mais leur liquidation s'impose-t-elle automatiquement dès lors qu'ils sont transmis à un mineur alors qu'ils ont pu constituer la fortune de ses parents ? Cette question se pose dans les mêmes termes pour une entreprise familiale recueillie par un mineur. Est-il de l'intérêt du mineur de s'en débarrasser sous prétexte de son inaptitude à la gérer et du risque de décote ? Un dernier exemple permet d'illustrer les difficultés de gestion d'un patrimoine pour le compte d'un mineur. Quel sort réserver à un immeuble nécessitant des travaux, spécialement s'il s'agit d'un bien de famille ?
La prescription de la prudence et de la diligence conduit souvent, par simplicité, à la liquidation des actifs et au remploi des fonds sur des produits de placement exempts de risque. Ce profil de gestion, très sécuritaire, peut pourtant heurter l'intérêt de l'enfant surtout à une époque où les taux d'intérêt sont très faibles. Même si l'inflation reste elle-même contenue, elle demeure supérieure au taux d'intérêt et il en résulte une érosion du capital, ce qui peut engendrer une perte importante sur une longue durée. L'intérêt de l'enfant peut au contraire, parfois, requérir la recherche d'autres solutions. Par exemple le portefeuille de valeurs mobilières peut, selon sa composition et sa prépondérance dans le patrimoine du mineur, être conservé en tout ou partie et sa gestion confiée à un professionnel. La direction de l'entreprise et la répartition de son capital peuvent également être adaptées à la présence d'un associé mineur afin de conserver l'entreprise familiale. Enfin, pour conserver un patrimoine immobilier, des solutions financières peuvent être trouvées et mises en ?uvre sans faire courir de risques inconsidérés au mineur.
La simplicité et l'absence totale de risque sont souvent privilégiées, car derrière ces choix de gestion se profile la responsabilité du décideur. L'administrateur légal et tous les organes de la tutelle sont responsables de tout dommage résultant d'une faute quelconque commise dans l'exercice de leur fonction
. Lorsque la faute à l'origine du dommage a été commise par le juge des tutelles, le directeur des services de greffe judiciaire ou le greffier, l'action en responsabilité est dirigée contre l'État. Ces menaces de recours expliquent l'absence totale de risque dans la gestion des biens du mineur même si cela le prive d'un certain dynamisme.