La publicité de la mesure

La publicité de la mesure

- L'existence de la mesure. - Si la fonction première de la publicité est de rendre opposable la mesure de protection erga omnes, elle sert aussi à la connaissance effective par les professionnels concernés des effets de la mesure. Cette connaissance joue également en faveur de la personne protégée, ainsi assurée, dans un souci de protection, de la diffusion de la mesure dont elle fait l'objet. Or, toutes les habilitations familiales ne donnent pas lieu à publicité.
Seule est soumise à cette formalité, à l'instar d'une tutelle ou d'une curatelle, l'habilitation familiale générale (C. civ., art. 494-6, al. 8). Un extrait de la décision est transmis par tout moyen au greffe du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est née la personne faisant l'objet de l'habilitation familiale, aux fins de conservation au répertoire civil et de publicité en marge de l'acte de naissance (CPC, art. 1233).
Lorsqu'elle est spéciale, l'habilitation familiale ne fait l'objet d'aucune publicité. L'absence de publicité de la mesure est un facteur d'insécurité juridique, maintes fois dénoncé , car la personne protégée perd alors la capacité d'exercer les droits confiés à la personne habilitée (C. civ., art. 494-8, al. 1er). Or, les actes qu'elle effectue au mépris de cette incapacité d'exercice sont entachés d'une nullité de plein droit « sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un préjudice » (C. civ., art. 494-9, al. 1er), à moins que le contractant de la personne protégée établisse l'utilité de l'acte pour celle-ci ou le profit qu'elle en a retiré (C. civ., art. 1150 et 1151). La sanction est du reste la même dans le cas d'un acte conclu par la personne habilitée qui n'entre pas dans le champ d'application de l'habilitation (C. civ., art. 494-9, al. 5). À défaut de toute publicité, le notaire n'aura pas toujours les moyens d'être informé et il aura tout intérêt, en cas de doute sur la capacité du contractant, à interroger le greffe du tribunal d'instance pour savoir si le juge n'a pas ordonné une habilitation spéciale en vue de passer l'acte concerné. C'est ici un des défauts majeurs du mécanisme, qui oblige le praticien à la prudence.
- Le périmètre de la mesure. - Une fois la mesure connue, encore faut-il savoir quelles en sont les modalités. La loi permet au juge de mettre en ?uvre une mesure individualisée, à plusieurs degrés, plus adaptée, ce qui est intéressant pour la personne protégée mais dangereux pour le professionnel, et notamment pour le notaire appelé à passer un acte avec une partie qui fait l'objet d'une habilitation familiale. Comment connaître l'étendue de la mesure ? La publicité de la mesure, toujours défaillante s'agissant de l'habilitation spéciale, sera-t-elle aménagée en conséquence ? En l'état, la solution consiste pour le notaire à obtenir obligatoirement copie de l'ordonnance du juge, en espérant que celle-ci soit claire. À cet égard, le rapport Caron-Déglise constatait que les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et les familles se plaignaient de ce que les jugements étaient souvent peu motivés, les juges utilisant des trames préétablies. À l'évidence, les décisions judiciaires doivent être précises sur le contenu de l'habilitation familiale et indiquer expressément dans quels cas l'habilitation est générale ou spéciale, et pour quels actes la personne habilitée sera amenée à assister ou à représenter la personne protégée. À défaut, dans les faits, les professionnels se trouvent souvent contraints d'adapter le niveau de la mesure en fonction du cadre d'assistance ou de représentation fixé par le juge, avec tous les problèmes de responsabilité, de sécurité juridique et de validité de l'acte induits.