Les propriétaires

Les propriétaires

– De la difficulté de devenir propriétaire. – Paradoxalement, l'augmentation régulière des prix de l'immobilier depuis les années 1970 (V. n° ) se déroule dans une période économique terne, peu propice à une hausse équivalente des revenus 1504557096460. Cette décorrélation entre les perspectives macro-économiques et la valeur des biens immobiliers crée, pour les primo-accédants, une véritable difficulté à devenir propriétaires de leur habitation 1501355587144.
Pourtant, l'immense majorité des Français rêvent toujours de posséder leur logement 1500123166080, et 62 % d'entre eux ont atteint leur rêve. Certains l'ont même dépassé, possédant une ou plusieurs résidences secondaires 1501014594521. Cependant, ces logements occasionnels sont rarement situés dans les villes compactes 1504457471452.
La majorité des propriétaires immobiliers possèdent leur résidence principale (§ I). Cependant, une partie non négligeable de ces propriétaires donne des logements en location (§ II).

Des surprises en Europe

Être propriétaire de sa résidence principale est souvent appréhendé comme une preuve de richesse ou comme une garantie contre les coups du sort.
Pourtant, selon une étude de décembre 2016 diligentée par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) 1500125481073, les pays d'Europe comptant le plus de propriétaires sont aussi les plus pauvres. Ainsi, 96,5 % des Roumains sont propriétaires de leur habitation. Ce pourcentage dépasse les 80, voire les 90 % pour les citoyens des pays de l'ex-URSS. Sa moyenne atteint 71 % pour les Espagnols, Italiens, Grecs et Portugais.
En revanche, les pays européens connaissant la plus forte croissance économique sont aussi ceux où le taux de propriétaires est le plus faible, comme l'Allemagne avec 45 % ou les Pays-Bas avec 56,2 %, mais avec seulement 9,2 % de propriétaires sans emprunt en cours.
Ces chiffres vont à l'encontre des idées reçues, mais cachent une très grande disparité quant à la qualité des logements.

Les résidences principales

– La « gentrification ». – L'augmentation constante des prix de l'immobilier se traduit de facto par une « gentrification » des cœurs des villes compactes. Cet embourgeoisement des cités correspond, selon Wikipédia, à « un phénomène urbain par lequel des personnes plus aisées s'approprient un espace initialement occupé par des habitants ou usagers moins favorisés, transformant ainsi le profil économique et social du quartier au profit exclusif d'une couche sociale supérieure » 1498384982185.
Dès que la mixité n'est pas imposée, que ce soit par des contraintes physiques 1498385470776ou réglementaires 1499533866324, la nature humaine conduit inexorablement à ce phénomène 1498496331213.
– Un frein à la mixité sociale. – La « gentrification » agit comme un cercle vicieux. Lorsque les groupes sociaux aisés migrent vers un quartier dont ils (re)découvrent les avantages, ils réhabilitent les bâtiments et contribuent à un accroissement des valeurs immobilières, n'hésitant pas à mettre la pression sur les pouvoirs publics pour une amélioration de l'environnement général, notamment scolaire. Les plus défavorisés n'ont pas les moyens de régler les loyers en hausse et sont souvent contraints de quitter le quartier. Ainsi, la gentrification est-elle un processus contribuant positivement à la réhabilitation des quartiers et négativement à la ségrégation sociale.
Ce phénomène urbain est intimement lié aux villes compactes, voire aux métropoles 1498386625363. La tertiarisation des villes accentue le processus, en attirant des populations nouvelles souvent cultivées, désireuses d'un cadre de vie adapté à leurs attentes.
Sauf à craindre un renouvellement des populations trop important modifiant les équilibres électoraux 1498387556589, les maires des grandes villes ont tendance à favoriser cette gentrification, permettant de jeter une lumière éclatante sur la qualité de leur bilan urbanistique. Mais n'est-ce pas une vision à court terme ? Ne fait-on pas perdurer, par l'absence de mixité, les tensions existant autrefois entre la ville et sa banlieue, en leur permettant d'avancer plus profondément dans la cité au risque d'opposer demain les quartiers entre eux ?
– Un frein à la mixité générationnelle. – Lorsque les logements de centre-ville sont inabordables, les jeunes ménages désireux de devenir propriétaires sont contraints de se délocaliser en périphérie. En terme d'accession à la propriété, la mixité sociale est ainsi quasi inexistante au cœur des villes, mais la mixité générationnelle souffre également 1500113786280.

Les logements donnés en location

– La mixité sociale, ennemie du bailleur. – Dans l'immense majorité des cas, l'objectif principal des bailleurs est de maximiser la rentabilité de leur propriété. La hausse sensible du prix de l'immobilier ces dernières années les conduit à augmenter les loyers dans une période de déficit de logements.
Bien évidemment, au cœur d'une législation rendant les expulsions compliquées, la solvabilité des locataires est primordiale. Dès lors, un locataire aisé présentant au surplus des garanties de paiement du loyer constitue le Graal du bailleur. Dans ce contexte, tout ce qui risque de déranger ce locataire d'une manière ou d'une autre apparaît comme dangereux. C'est notamment le cas de la mixité sociale, le risque aux yeux du bailleur étant que le preneur souhaite rester au milieu des membres de sa classe sociale.
Il n'est pas certain que, de l'autre côté du bail, le locataire ait les mêmes attentes.