Les impératifs du règlement national d'urbanisme

Les impératifs du règlement national d'urbanisme

– Variété des dispositions. – Plusieurs principes du règlement national d'urbanisme (RNU) sont à prendre en compte dans le cadre de la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en vue de l'exploitation d'une énergie renouvelable.
En particulier, il convient de mentionner la règle selon laquelle :
  • le projet est susceptible d'être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie (C. urb., art. R. 111-5) 1490733117034 ;
  • lorsque le bâtiment est édifié en bordure d'une voie publique, la distance comptée horizontalement de tout point de l'immeuble au point le plus proche de l'alignement opposé doit être au moins égale à la différence d'altitude entre ces deux points (C. urb., art. R. 111-16) 1490733748147.
Deux dispositions du RNU méritent une attention particulière dans le cadre des énergies renouvelables 1491299818927. Elles sont applicables y compris dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (C. urb., art. R. 111-1). Il s'agit, d'une part, de l'absence d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques (A) et, d'autre part, de l'absence d'atteinte à l'environnement (B).

L'absence d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques

– Principe légal. – Le Code de l'urbanisme prévoit que : « Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations » (C. urb., art. R. 111-2). Sur le fondement de ce texte, la jurisprudence administrative reconnaît un pouvoir de contrôle au juge 1490652258210. Le juge ne peut toutefois censurer l'autorisation d'urbanisme qu'en cas d'erreur manifeste d'appréciation par l'autorité l'ayant délivrée 1490652201583. En pratique, l'erreur manifeste d'appréciation est caractérisée par un faisceau d'indices tenant compte de l'étude d'impact et des avis des différents services compétents. Il n'est cependant pas nécessaire que le porteur du projet obtienne une certification d'innocuité de la part d'un tiers extérieur 1490653009466. Par ailleurs, le juge a le pouvoir d'estimer que la sécurité est déjà suffisamment prise en compte au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) 1490653628614ou des prescriptions spéciales imposées par l'autorité délivrant l'autorisation d'urbanisme 1490653633107.
– Application aux éoliennes. – L'absence d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques est un principe général. Il s'applique à toute forme de construction destinée aux énergies renouvelables 1490735447942. Plusieurs arrêts y font référence en matière de valorisation énergétique des déchets. La jurisprudence l'utilise également s'agissant de silos de stockage de céréales destinées à produire des biocarburants 1490735444716. Mais ce texte est surtout utilisé dans le cadre du contentieux en matière d'éoliennes 1490875312283. D'abord, il est admis que les éoliennes présentent des risques d'accident, même s'ils sont limités. Il s'agit en particulier de rupture du mât et de détachement de tout ou partie de la pale. Sur le fondement du RNU, la jurisprudence a imposé une distance de 500 mètres environ entre une éolienne et les habitations alentour, en fonction de la topographie des lieux 1490737184400. Cette règle prétorienne a inspiré le législateur. Les éoliennes relevant de la catégorie des ICPE doivent être éloignées de 500 mètres par rapport aux constructions à usage d'habitation, aux immeubles habités et aux zones destinées à l'habitation (C. env., art. L. 553-1). Ensuite, il est admis que les éoliennes présentent des risques de perturbation du fonctionnement des radars de l'aviation civile, de la défense nationale ou de Météo France 1490735440676. La doctrine administrative considère qu'il ne faut pas autoriser une éolienne à moins de cinq kilomètres d'un radar et que l'avis de l'autorité en charge du radar exige d'être sollicité pour une installation située à moins de trente kilomètres 1490738773348. Si le risque de perturbation est avéré, le permis est susceptible d'être refusé sur le fondement de l'article R. 111-2 du Code de l'urbanisme 1490738965322.

L'absence d'atteinte à l'environnement

– Prise en compte de l'environnement par l'urbanisme. – Les conséquences environnementales d'un ouvrage sont prises en compte par le droit de l'urbanisme 1491299888536. Il convient néanmoins de respecter le droit de l'environnement. À ce titre, le Code de l'urbanisme édicte deux principes.
D'une part, le projet doit respecter les préoccupations environnementales les plus essentielles, et notamment :
  • le principe de précaution ;
  • le principe d'action préventive et de correction. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes n'ayant pu être ni évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées 1517250308934 ;
  • le principe pollueur-payeur selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de lutte et de réduction de la pollution sont supportés par le pollueur ;
  • le principe de participation en vertu duquel toute personne est informée des projets de décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ;
  • le principe de complémentarité entre l'environnement, l'agriculture, l'aquaculture et la gestion durable des forêts 1491299362422.
En conséquence, le projet peut être accepté sous réserve de prescriptions spéciales s'il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement (C. urb., art. R. 111-26).
D'autre part, le projet est susceptible d'être refusé si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur sont de nature à porter atteinte aux lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales (C. urb., art. R. 111-27).
Ces deux textes sont applicables y compris en présence d'un PLU (C. urb., art. R. 111-1).
– Prescriptions spéciales pour la protection de l'environnement. – Postulant une indépendance des législations, le Conseil d'État estimait initialement que le principe de précaution du droit de l'environnement ne pouvait fonder un refus d'autorisation d'urbanisme 1491314187794. Le renvoi légal du droit de l'urbanisme au droit de l'environnement contredit cette solution prétorienne antérieure. La jurisprudence nuance cependant la portée de l'article R. 111-26 du Code de l'urbanisme en jugeant que ce texte ne permet pas de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve de prescriptions spéciales 1491314207823. Le juge ne contrôle que l'erreur manifeste d'appréciation de l'autorité administrative ayant délivré l'autorisation d'urbanisme 1491314222076. Ainsi, un projet d'éoliennes respectant une distance suffisante entre les rangées et permettant aux oiseaux d'éviter les machines grâce à l'orientation des pales dans le sens de la migration a été admis 1491314241320.
– Prévention des atteintes aux environs. – La jurisprudence se fonde sur deux critères pour déterminer si une construction porte ou non atteinte au caractère des lieux avoisinants au regard de l'article R. 111-27 du Code de l'urbanisme 1491421396749. Le premier est l'importance de l'altération des lieux, en quantité ou en qualité 1491416324918. Le second est le caractère réellement remarquable ou non des lieux avoisinants 1491416337726. Ont ainsi été refusés des permis de construire concernant des éoliennes portant une atteinte caractérisée, soit au paysage d'un parc naturel régional 1491416425152, soit à la vue de plusieurs monuments historiques à la fois 1491416438911. Inversement, des éoliennes ont été admises dans un site déjà traversé par le TGV Méditerranée et l'autoroute A7 1491416451874. Le juge assure un équilibre des intérêts en cause. Par exemple, des éoliennes portant une atteinte visuelle à un site remarquable sont admises si le dommage reste proportionné et si leur installation satisfait un intérêt public 1491416465197.