Les contrats d'achat

Les contrats d'achat

Les contrats d'achat concernent tous les moyens de production d'énergie renouvelable 1494683092115.
D'abord soutenu par une obligation d'achat à un prix déterminé par arrêté tarifaire (Sous-section I), le législateur souhaite faire entrer les filières matures dans le marché de gros par le mécanisme du complément de rémunération (Sous-section II).

Le dispositif initial : l'obligation d'achat

L'obligation d'achat de l'électricité produite grâce aux énergies renouvelables a pour objectif d'assurer une rentabilité normale aux investisseurs. L'électricité injectée sur le réseau est systématiquement achetée au producteur (C. énergie, art. L. 314-1) 1489327191660.
– Le principe. – L'obligation d'achat impose à EDF ou aux distributeurs d'électricité non nationalisés de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par les sources d'énergies renouvelables raccordées au réseau et répondant à certaines conditions 1493456435758.
Les installations et leurs puissances éligibles à l'obligation d'achat sont fixées par voie réglementaire (C. énergie, art. D. 314-15).
Chaque filière fait l'objet d'un arrêté tarifaire propre déterminant le tarif d'achat, la durée de l'obligation d'achat et les conditions d'attribution (C. énergie, art. R. 314-12).
Afin d'inciter l'investissement dans les énergies renouvelables, l'électricité produite est achetée par le distributeur a un prix supérieur à celui du marché.
Ce mécanisme est qualifié de « guichet ouvert », le contrat étant attribué sur demande du producteur sans sélection particulière.
L'obligation d'achat bénéficie également aux départements, régions et établissements publics en dépendant 1489922097330.
– Les formalités de contrôle par la DREAL. – Afin de permettre à l'administration de contrôler l'éligibilité de l'installation, l'exploitant sollicitait un certificat ouvrant droit à l'obligation d'achat (CODOA). Ce certificat était actualisé après contrôle de la DREAL en cas de changement d'exploitant ou de modification de l'installation. Ce contrôle a été supprimé, même pour les contrats en cours 1500112524028.
– La durée du contrat. – La durée du contrat est fixée par l'arrêté tarifaire. Elle varie de douze à vingt ans selon la filière visée.
Afin d'éviter la constitution d'une rente au profit du producteur, les installations ne bénéficient du mécanisme de l'obligation d'achat qu'une seule fois (C. énergie, art. L. 314-2, al. 1).
En cas de changement de producteur, le contrat se poursuit avec le nouveau producteur pour la durée restante. Un avenant est établi en ce sens (C. énergie, art. R. 314-10).
Par exception, certaines installations définies par décret bénéficient plusieurs fois d'un contrat d'obligation d'achat. Il s'agit :
  • des installations existantes situées en zone non interconnectée (C. énergie, art. L. 314-2, al. 2, 1°) 1492952290162 ;
  • et des installations amorties dont le coût d'exploitation reste supérieur aux recettes, aides financières et fiscales incluses, situées sur le territoire métropolitain continental (C. énergie, art. L. 314-2, al. 2, 2°) 1494770605707.
– Le tarif du contrat. – Le tarif d'achat est garanti pendant toute la durée du contrat.
Les tarifs et les durées de chaque filière sont revus régulièrement par arrêté pour tenir compte de l'évolution des coûts de production.

La fin des primes aux installations photovoltaïques intégrées au bâti

Les pouvoirs publics ont favorisé le développement d'une filière solaire innovante intégrée au bâtiment.
Auparavant, les arrêtés tarifaires propres à la filière solaire ne distinguaient pas entre les procédés photovoltaïques et thermodynamiques 1492953419181.
L'arrêté tarifaire du 10 juillet 2006 relatif aux installations utilisant l'énergie radiative du soleil a majoré le tarif d'achat des installations photovoltaïques intégrées au bâti (IAB). Il profite aux installations remplissant également une fonction technique ou architecturale essentielle à la construction.
Cette orientation a été confirmée avec l'arrêté tarifaire du 12 janvier 2010 créant un troisième tarif propre aux installations simplement « surimposées » (ISB).
Le dernier arrêté tarifaire publié supprime la prime d'intégration simplifiée au bâti. Il réduit chaque trimestre le tarif majoré des installations intégrées au bâti pour le supprimer à compter du 30 septembre 2018 1499178923921.
– Les inconvénients du dispositif. – L'obligation d'achat permet d'accompagner le développement des énergies renouvelables. Elle est néanmoins critiquée à plusieurs titres :
  • le producteur n'est pas incité à diminuer sa production, ce qui provoque des perturbations du réseau électrique en période creuse ;
  • le producteur n'est pas incité à autoconsommer sa production, le prix de vente de l'énergie au tarif d'achat étant nécessairement supérieur au prix de l'électricité achetée pour ses propres besoins ;
  • la révision des tarifs d'achat est généralement trop tardive par rapport à la baisse des coûts d'investissements 1486593318108 ;
  • elle contribue à la distorsion entre les différents producteurs d'électricité ;
  • elle constitue un poids indéniable sur les finances publiques et les consommateurs 1498472416530.
Outre les inconvénients du dispositif, la réforme de l'obligation d'achat était devenue inévitable au regard du droit européen.
En effet, elle fut qualifiée d'aide d'État aux termes d'un contentieux portant sur le tarif d'achat de l'électricité éolienne 1486596300126.

Le nouveau dispositif : le complément de rémunération

La réforme des mécanismes de soutien résulte de la publication par la Commission européenne des lignes directrices concernant les aides d'État à la protection de l'environnement et à l'énergie pour la période 2014-2020 1486597304298. Les États membres ont été invités à transformer leur régime de soutien au plus tard au 1er janvier 2016, en incitant les producteurs à vendre leur électricité directement sur le marché en contrepartie d'une aide sous forme de prime s'ajoutant au prix de marché.
La refonte impulsée par la Commission européenne vise l'ensemble des filières d'énergies renouvelables à partir d'une puissance de 500 kilowatts 1499507903361.
La France s'est ainsi dotée d'un nouveau mécanisme de soutien : le complément de rémunération, destiné à se substituer partiellement à l'obligation d'achat (C. énergie, art. L. 314-18 à L. 314-27) 1490451823614.
Ce dispositif est entré en vigueur le 1er janvier 2016. Il impose exclusivement à EDF de conclure un contrat offrant un complément de rémunération avec les producteurs d'énergie verte (C. énergie, art. L. 314-18), l'objectif étant d'assurer un niveau de rentabilité satisfaisant aux installations basculant sur le marché de gros 1490466096771.
– Une réforme progressive. – Les dispositifs du complément de rémunération et de l'obligation d'achat coexistent.
La loi prévoit une période de transition. À ce titre, les installations existantes conservent le bénéfice de l'obligation d'achat obtenu avant l'entrée en vigueur du nouveau dispositif 1490454780054.
L'obligation d'achat est également maintenue pour certaines filières en fonction de leur localisation géographique et de leur puissance (C. énergie, art. D. 314-15).
Il s'agit notamment :
  • des installations photovoltaïques sur bâtiment d'une puissance inférieure ou égale à 100 kilowatts crête ;
  • des installations de méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d'une puissance inférieure à 500 kilowatts ;
  • des installations hydroélectriques d'une puissance inférieure à 500 kilowatts ;
  • des éoliennes flottantes situées dans le domaine public maritime métropolitain continental quelle que soit leur puissance ;
  • des installations de cogénération implantées sur le territoire métropolitain continental d'une puissance inférieure ou égale à 300 kilowatts, etc.
– Les installations concernées par le complément de rémunération. – Les filières implantées sur le territoire métropolitain continental ayant droit au complément de rémunération sont notamment les suivantes (C. énergie, art. D. 314-23) :
  • les installations hydroélectriques d'une puissance inférieure à un mégawatt ;
  • les installations de traitement thermique de déchets ménagers ;
  • les installations de méthanisation de matières non dangereuses d'une puissance comprise entre 500 kilowatts et douze mégawatts ;
  • les installations utilisant l'énergie de gîtes géothermiques ;
  • les installations de cogénération à partir de gaz naturel d'une puissance inférieure à un mégawatt ;
  • les installations éoliennes terrestres ne possédant aucun aérogénérateur de puissance supérieure à trois mégawatts et dans la limite de six aérogénérateurs.
– Le maintien du guichet ouvert. – Le mécanisme du guichet ouvert est maintenu. Le producteur doit adresser sa demande de contrat de complément de rémunération à EDF.
La délivrance du certificat ouvrant droit à l'obligation d'achat (CODOA) par la DREAL n'est plus nécessaire dans ce mécanisme. Les démarches du producteur sont simplifiées et les délais de mise en service des exploitations sont raccourcis.
Cependant, un nouveau contrôlea posterioriest substitué au contrôle de la DREAL. Le producteur a en effet l'obligation de fournir à EDF une attestation d'éligibilité établie par un organisme agréé. Le respect de cette obligation conditionne la prise d'effet du contrat de complément de rémunération.
Cette nouvelle procédure s'applique également aux contrats d'achat conclus depuis le 1er janvier 2016.
– Montant du complément de rémunération. – Le complément de rémunération s'ajoute au prix de vente du marché perçu par le producteur (C. énergie, art. R. 314-33 à R. 314-42). Il est versé mensuellement par EDF 1490464725879. Les entreprises locales de distribution ne participent pas à ce mécanisme.
Le calcul du complément de rémunération est complexe. Il prend en compte plusieurs éléments :
complément de rémunération = prime à l'énergie – valorisation des garanties de capacités + prime de gestion 1490644919118.
La prime énergie compense la différence entre le tarif d'achat de référence et un prix de marché de référence observé, et cela pour chaque filière.
Les garanties de capacité se définissent par la capacité des fournisseurs à satisfaire la consommation de pointe de leurs clients. Les producteurs d'électricité déclarent leurs capacités de production sur le registre tenu par Réseau de transport d'électricité (RTE). Elles sont ensuite échangeables ou monnayables auprès des fournisseurs sur le marché de capacité et procurent donc aux producteurs un revenu complémentaire.
La prime de gestion est l'estimation des coûts supportés par le producteur pour valoriser sa production sur le marché de l'énergie et celui de capacité.
Les producteurs ne produisant pas pendant les périodes de prix négatifs reçoivent une compensation partielle déterminée par les arrêtés tarifaires de chaque filière (C. énergie, art. R. 314-39) 1506778816601.
La prévisibilité du complément de rémunération étant faible, le producteur s'expose à un risque de marché.
– Durée du complément de rémunération. – La durée des contrats de complément de rémunération est propre à chaque filière. En toute hypothèse, elle ne peut excéder vingt ans (C. énergie, art. L. 314-22).
Les installations relevant du complément de rémunération bénéficient, en principe, une seule fois du mécanisme. Par exception, certaines installations définies par décret en bénéficient plusieurs fois (C. énergie, art. L. 314-21). Il s'agit :
  • des installations hydroélectriques s'engageant à réaliser un programme d'investissement ;
  • et des installations amorties dont le coût d'exploitation reste supérieur aux recettes, aides financières et fiscales incluses 1492956514658.
Comme pour l'obligation d'achat, les caractéristiques de l'installation, les conditions du complément de rémunération et ses modalités de mise en œuvre résultent d'un arrêté propre à chaque filière (C. énergie, art. R. 314-27, al. 2 renvoyant à C. énergie, art. R. 314-12).
– La transition entre obligation d'achat et complément de rémunération. – Les installations ayant bénéficié d'un contrat d'obligation d'achat n'ont pas la faculté de souscrire au régime du complément de rémunération, sauf dérogation, définie par décret (C. énergie, art. L. 314-19).
La dérogation s'applique :
  • aux installations existantes hydrauliques et de cogénération à partir de gaz naturel d'une puissance inférieure à un mégawatt, n'ayant jamais bénéficié d'un complément de rémunération, sous réserve de la réalisation d'un programme d'investissement (C. énergie, art. D. 314-23-1 et R. 314-27) ;
  • aux installations de méthanisation provenant de déchets non dangereux d'une puissance supérieure ou égale à 500 kilowatts n'ayant jamais bénéficié d'un complément de rémunération, amorties, et dont le coût d'exploitation reste supérieur aux recettes, aides financières et fiscales incluses (C. énergie, art. D. 314-24 et R. 314-28) ;
  • aux installations bénéficiant d'un contrat d'achat et demandant sa suspension afin de bénéficier du complément de rémunération sur la durée restant à courir. Le contrat d'achat est suspendu pendant un maximum de trois ans et est résilié à l'issue de cette période sans indemnité. Pendant la suspension, le producteur peut résilier le contrat de complément de rémunération sans indemnité sous réserve de reprendre le contrat d'achat initial (C. énergie, art. R. 314-29).
Cette dérogation ne concerne pas les installations de biomasse dans les départements d'outre-mer.
– Un mécanisme assuré. – Le législateur, soucieux de rassurer les producteurs et les organismes prêteurs face à un aléa plus important que par le passé, a mis en place un système d'assurance.
Il crée un acheteur de dernier recours (C. énergie, art. L. 314-26 et R. 314-51).
L'acheteur de dernier recours est désigné pour une durée maximale de cinq ans. Il est obligé de conclure un contrat d'achat avec tout producteur en faisant la demande. Ce contrat remplace le complément de rémunération. Le producteur doit démontrer préalablement l'impossibilité de vendre son électricité directement sur le marché ou par l'intermédiaire d'un agrégateur (C. énergie, art. R. 314-52) 1499180102487.
Ce système assurantiel est subsidiaire et temporaire :
  • sa durée est de trois mois maximum, renouvelable à la demande du producteur démontrant qu'il n'a pas contracté avec un agrégateur ;
  • la rémunération est plafonnée à 80 % du tarif de référence employé dans le calcul du complément de rémunération.
Il convient néanmoins de nuancer l'effectivité de ce dispositif, la désignation de l'acheteur de dernier recours n'étant qu'une faculté pour l'administration et non une obligation 1490559869957.
Les installations non éligibles automatiquement à l'obligation d'achat ou au complément de rémunération en bénéficient parfois après mise en concurrence.