Nous détourons ici des règles qui pourront être applicables à la nouvelle forme de société proposée, tant sur les plans fiscal que social.
Sur les plans fiscal et social : ouvrir des options récurrentes
Sur les plans fiscal et social : ouvrir des options récurrentes
– Sur le plan de sa fiscalité. – La Société Libre sera de plein droit soumise à l'impôt sur les sociétés. Mais, au-delà de ce régime par défaut, la Société Libre pourra opter pour le régime de translucidité fiscale, quelle que soit son activité.
Ce paramètre sera très original puisque, comme nous l'avons vu plus haut, une SARL patrimoniale ne peut, en l'état actuel, être éligible au régime de translucidité.
Le choix fiscal de la Société Libre s'exercera de manière récurrente. À l'issue d'un certain nombre d'exercices sociaux (une durée de cinq exercices paraît être un point d'équilibre), il lui sera possible de notifier son changement de régime fiscal pour basculer vers l'autre. Ce changement de régime fiscal aura un impact direct sur les associés, et devrait donc être décidé à l'unanimité. À défaut, elle restera soumise pour une durée indéterminée à son régime antérieur.
Il est vrai que le changement régulier de régime fiscal peut paraître étonnant, voire effrayant pour le praticien. Nous avons évoqué ci-dessus le régime startup
qui a créé une cause automatique de changement de régime fiscal (à l'expiration ou lors de la renonciation à l'option). Par ailleurs, l'article 50 de la loi du 28 décembre 2018 permet à certaines sociétés qui ont opté pour leur assujettissement à l'IS de renoncer à cette option jusqu'au cinquième exercice suivant celui au titre duquel l'option a été exercée.
Ainsi, force sera de constater que notre législation a bien ouvert la porte à ces changements de régimes fiscaux, et qu'ils font désormais partie intégrante des choix « classiques » lors de la constitution et la vie des sociétés.
Conformément aux dispositions du 2 de l'article 221 du Code général des impôts, les conséquences fiscales de la cessation d'entreprise sont applicables lorsqu'une société change de régime fiscal : il en est ainsi lorsque des sociétés cessent d'être soumises à l'IS, par option pour le régime des sociétés de personnes. En outre, l'article 202 ter du Code général des impôts prévoit, en miroir, l'hypothèse d'une société translucide devenant passible de l'IS.
En principe, le changement de régime fiscal rend imposables immédiatement la société et/ou ses associés à raison :
- des bénéfices d'exploitation non encore taxés ; ces résultats s'entendent de ceux réalisés depuis la fin de la dernière période d'imposition effective ;
- des bénéfices en sursis d'imposition ; ils comprennent les provisions constituées en franchise d'impôt ainsi que les plus-values dont l'imposition avait été différée ;
- des plus-values latentes incluses dans l'actif social. Les plus-values incluses dans l'actif social et résultant de la différence entre la valeur réelle des éléments compris dans cet actif et leur valeur comptable sont passibles de l'impôt selon le régime fiscal défini aux articles 39 duodecies et suivants du Code général des impôts.
En vertu de l'article 111 bis du Code général des impôts, lorsqu'une personne morale soumise à l'IS cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés en proportion de leurs droits.
L'assiette de la distribution est constituée par toutes les sommes qui, en fin de société, n'auraient pas le caractère d'apports réels remboursables en franchise (bénéfices ou plus-values du dernier exercice dont les résultats sont soumis à l'impôt sur les sociétés, réserves provenant des bénéfices des exercices antérieurs, libérées en principe de l'impôt sur les sociétés, qu'elles aient ou non été intégrées au capital), lesdites sommes diminuées du report à nouveau déficitaire figurant au bilan.
Cette logique devra être conservée puisqu'à l'inverse d'un passage à l'IS, le passage à un régime de translucidité permettra aux associés de prélever l'intégralité des profits non encore distribués sans impôt spécifique de distribution.
– Des options applicables en pratique. – Le changement de régime fiscal peut s'avérer peu pénalisant, si tant est qu'il soit compris et anticipé, au moyen notamment des conseils que le notaire ne manquera pas de délivrer.
Il résulte des dispositions du Code général des impôts (articles 202 ter en cas de passage à l'IS, et 221 bis en cas de passage au régime de translucidité) qu'en l'absence de création d'une personne morale nouvelle, les bénéfices en sursis d'imposition, les plus-values latentes incluses dans l'actif social et les profits non encore imposés sur les stocks ne font pas l'objet d'une imposition immédiate, à la double condition (i) qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et (ii) que l'imposition desdits bénéfices, plus-values et profits demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à la société concernée.
Les déficits, y compris pour leur fraction correspondant à des amortissements réputés différés en période déficitaire, et les moins-values nettes à long terme encore reportables, et non imputés ne peuvent plus être reportés.
– Sur le plan social. – La nouvelle société que nous proposons devra bénéficier d'une organisation sociale adaptée. Il y aura lieu de distinguer selon que le dirigeant est une personne physique ou une personne morale.
Dans la seconde hypothèse, la personne morale sera rémunérée via une facturation classique du mandat social ; et elle se chargera elle-même de rémunérer, le cas échéant, son propre mandataire social.
Dans la première hypothèse, la question est plus délicate puisqu'il s'agit de savoir sous quel régime le dirigeant personne physique sera placé. Il nous semble là encore nécessaire d'ouvrir au maximum le champ des possibles en nous inspirant, mais en dépassant, les modèles actuellement bâtis pour les SARL et les SAS :
- si le dirigeant, directement ou par personne et société interposées, dispose du pouvoir, statutaire ou conventionnel, de se nommer seul (ou d'un veto pour sa révocation, si son mandat n'a pas de limite de temps) : il aura le choix de dépendre de l'un ou l'autre des régimes sociaux précités (assimilé salarié ou SSI).Choix qui s'exercera lui aussi de manière récurrente. Ainsi, après une période de cinq exercices sous l'empire d'un régime, le dirigeant pourra notifier son changement pour basculer vers l'autre. À défaut, il restera soumis pour une durée indéterminée à son régime antérieur.Cette bascule de régime est tout à fait envisageable en pratique, puisque de nombreux entrepreneurs disposent de structures de formes diverses, soumettant ainsi leurs rémunérations à des régimes distincts. Et il est coutumier de procéder à des transformations vers une forme de SARL ou de SAS, qui sont parfaitement maîtrisées par les organismes sociaux concernés ;
- si le dirigeant, directement ou par personne et société interposées, ne dispose pas du pouvoir, statutaire ou conventionnel, de se nommer seul (ni de veto pour sa révocation, si son mandat n'a pas de limite de temps) : il devrait être assimilé salarié puisqu'il sera véritablement dans une situation de dépendance vis-à-vis des autres associés.