L'économie générale de la tutelle du mineur

L'économie générale de la tutelle du mineur

- Cas d'ouverture de la tutelle. - Une tutelle s'ouvre lorsque le mineur est dépourvu de parents capables d'assurer son éducation et sa protection. La loi distingue quatre cas d'ouverture .
La tutelle s'ouvre lorsque :
  • le père et la mère sont tous deux décédés ;
  • le père et la mère sont tous deux privés de l'exercice de l'autorité parentale ;
  • l'enfant n'a pas de filiation légalement établie ;
  • le juge des tutelles estime que l'administration légale ne protège pas suffisamment les biens du mineur.
- La tutelle : une protection familiale sous le contrôle de l'État. - Les principaux organes de la tutelle sont le tuteur, le subrogé tuteur et le conseil de famille. Ces différents organes exercent leur mission sous la surveillance et le contrôle du juge des tutelles et du procureur de la République.
- Le tuteur. - En principe confiée à une personne physique, la charge de tuteur est essentielle.
La désignation du tuteur. Le survivant des père et mère peut, par testament ou déclaration notariée spéciale, choisir un tuteur, parent ou non, qui entrera en fonction après sa mort . À défaut de tutelle testamentaire, le tuteur est alors désigné par le conseil de famille et l'on parle alors de tutelle dative.
Le choix du tuteur est en principe libre. Cependant, ne peuvent pas exercer les charges de la tutelle les mineurs non émancipés, les majeurs qui bénéficient d'une mesure de protection, les personnes à qui l'autorité parentale a été retirée et les personnes à qui l'exercice des charges tutélaires a été interdit en application de l'article 131-26 du Code pénal. De même, toute charge tutélaire peut être retirée en raison de l'inaptitude, la négligence, l'inconduite, la fraude ou la contradiction d'intérêts avec le mineur.
En fonction de la situation familiale et de la composition du patrimoine du mineur, plusieurs tuteurs peuvent être nommés pour exercer conjointement la mesure de protection. À l'égard des tiers, chacun est réputé avoir le pouvoir de faire seul les actes pour lesquels un tuteur n'a besoin d'aucune autorisation. Il peut également être nommé un tuteur à la personne et un tuteur aux biens ou un tuteur et un tuteur adjoint chargé de la gestion de certains biens particuliers.
Le tuteur est désigné pour la durée de la tutelle. Sauf cas particulier, notamment en raison d'un changement important dans sa situation, il ne peut renoncer à sa mission.
Les missions du tuteur. Le tuteur est investi d'une charge publique, personnelle et en principe gratuite. Le tuteur a une double obligation de prendre soin du mineur et de gérer ses biens.
En ce qui concerne la protection de la personne du mineur, le tuteur est surtout un organe d'exécution, car c'est le conseil de famille qui fixe les conditions générales de l'entretien et de l'éducation de l'enfant.
En ce qui concerne la gestion de ses biens, le tuteur doit apporter des soins prudents, diligents et avisés dans le seul intérêt du mineur. Le tuteur a l'obligation d'établir un inventaire du patrimoine du mineur dans les trois mois qui suivent sa nomination et d'actualiser cet inventaire tout au long de la tutelle. Le tuteur doit également arrêter le budget de la tutelle en déterminant les sommes annuellement nécessaires. Il est encore tenu de déposer les fonds du mineur sur un compte ouvert exclusivement à son nom et mentionnant l'existence de la tutelle. Il doit encore employer les capitaux et l'excédent de revenu du protégé.
Le tuteur a par ailleurs l'obligation de rendre compte de sa gestion chaque année et à la fin de sa mission. Il doit établir un compte de gestion auquel sont annexées les pièces justificatives.
Le tuteur demeure responsable des fautes commises dans l'exercice de sa mission.
- Le subrogé tuteur. - Le subrogé tuteur constitue l'un des organes de contrôle du tuteur. Il est choisi parmi les membres du conseil de famille. Si le tuteur est parent ou allié du mineur dans une branche, le subrogé tuteur est choisi de préférence dans l'autre branche. En dehors de cette prescription, le choix du subrogé tuteur demeure libre. Il subit cependant les mêmes interdictions et empêchements que le tuteur.
La principale mission du subrogé tuteur est de surveiller l'exercice de la mission tutélaire. S'il constate des fautes de gestion du tuteur, il doit en informer immédiatement le juge des tutelles. À défaut, il engage sa responsabilité. Il doit notamment assister à l'établissement de l'inventaire des biens du mineur, attester auprès du juge des tutelles de l'emploi ou du remploi des capitaux reçus conformément aux prescriptions du conseil de famille ou du juge des tutelles, vérifier le compte annuel de gestion établi par le tuteur avant de le transmettre avec ses observations au greffier en chef du tribunal de grande instance.
Le subrogé tuteur a également pour mission de remplacer le tuteur en cas d'opposition d'intérêts entre le tuteur et le mineur. S'il est lui-même en conflit d'intérêts, un tuteur ad hoc devra alors être nommé par le conseil de famille.
La mission du subrogé tuteur cesse avec la fin de la mesure de protection. Elle cesse également si les fonctions du tuteur prennent fin. Dans ce cas, le subrogé tuteur est tenu de provoquer le remplacement du tuteur sous peine d'engager sa responsabilité.
- Le conseil de famille. - Manifestation d'une conception familiale de la tutelle, le conseil de famille, organe collégial, constitue l'autorité supérieure de la tutelle. Sauf lorsque la tutelle est vacante, toute tutelle concernant un mineur est organisée avec un conseil de famille.
Cet organe comporte au moins quatre membres, y compris le tuteur et le subrogé tuteur. Il n'y a pas de nombre maximum de membres. Sous réserve des exclusions prévues à l'article 395 du Code civil, peuvent être membres du conseil de famille les parents ou alliés des père et mère de l'enfant ainsi que toute personne qui manifeste un intérêt pour lui. Le juge des tutelles choisit les membres du conseil de famille en considération de l'intérêt du mineur et en fonction de leur aptitude, des relations qu'ils entretenaient avec les parents du mineur, des liens qu'ils ont avec lui et de leur disponibilité. Le juge doit éviter de laisser l'une des deux branches maternelle ou paternelle non représentée.
Le rôle du conseil de famille est capital et ses attributions multiples.
Il doit d'abord désigner les agents tutélaires (tuteur, tuteur adjoint, subrogé tuteur). Il statue également sur les empêchements, les retraits et les remplacements qui intéressent le tuteur et le subrogé tuteur.
C'est également un organe de décision concernant la direction de la personne du mineur et la gestion de son patrimoine. Ainsi le conseil de famille règle les conditions générales de l'entretien et de l'éducation du mineur. Il est également compétent pour autoriser le tuteur à réaliser les actes de disposition, pour déterminer la somme à partir de laquelle commence l'obligation pour le tuteur d'employer les capitaux liquides du mineur et l'excédent de revenus et pour arrêter le budget en cas de difficultés du tuteur.
Le conseil de famille est également un organe de contrôle et de surveillance de la bonne exécution de la charge tutélaire par le tuteur.
- Le juge des tutelles. - Le juge des tutelles est un magistrat du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est située la résidence habituelle du pupille ou le domicile du tuteur. Dans le fonctionnement de la tutelle des mineurs, il exerce plusieurs fonctions. À titre principal, il exerce une surveillance générale de la tutelle . Il dispose de la faculté de convoquer le tuteur, le subrogé tuteur ou les membres du conseil de famille afin de leur demander des éclaircissements ; il peut exiger d'eux la communication de toute information qu'il estime utile et leur adresser des injonctions.
Le juge des tutelles dispose en outre de pouvoirs spéciaux. Il peut décider d'ouvrir une tutelle. Il désigne les membres du conseil de famille, convoque cet organe et le préside. Il peut également adopter des mesures urgentes si l'intérêt de l'enfant le commande.
Les dommages subis par le pupille par suite d'une faute commise par le juge des tutelles dans l'organisation ou le fonctionnement de ce régime de protection peuvent être indemnisés. L'action en responsabilité doit être dirigée contre l'État. Cette action se prescrit par cinq ans à compter de la majorité du pupille.
- Le greffier en chef du tribunal de grande instance. - Une mission de vérification des comptes de gestion a été attribuée au greffier en chef du tribunal de grande instance. Le tuteur doit établir chaque année un compte de gestion qui contient les pièces justificatives. Le subrogé tuteur doit vérifier ce compte avant de le transmettre au greffier en chef, accompagné le cas échéant de ses observations. Si le greffier en chef refuse d'approuver les comptes de gestion, il dresse un rapport des difficultés rencontrées qu'il transmet au juge des tutelles. Il revient alors à ce dernier de statuer sur la conformité des comptes.
Une faute commise par le greffier en chef dans l'exercice de cette mission de vérification des comptes de gestion peut engager la responsabilité de l'État si cette faute cause un préjudice au pupille. Cette action se prescrit également par cinq ans après la majorité.
- Le parquet. - Le parquet est chargé de certaines missions dans le fonctionnement de la tutelle. À l'instar du juge des tutelles, le procureur de la République exerce une surveillance générale des mesures de protection dans son ressort .
- Le notaire. - Le notaire a-t-il un rôle à jouer dans le fonctionnement de la tutelle ? Il ne fait pas partie des personnes investies de charge tutélaire et la loi ne lui assigne aucun rôle particulier dans le fonctionnement de la tutelle. Il doit cependant être vigilant sur deux points particuliers lors de la réalisation d'actes pour le compte de mineur en tutelle.
D'une part, il doit vérifier les pouvoirs du représentant du mineur. Il doit donc obtenir la décision de nomination du tuteur et vérifier les autorisations nécessaires à la passation de l'acte envisagé.
D'autre part, l'article 499 du Code civil dispose que : « Les tiers peuvent informer le juge des tutelles des actes ou omissions du tuteur qui leur paraissent de nature à porter préjudice aux intérêts de la personne protégée. Ils ne sont pas garants de l'emploi des capitaux. Toutefois, si à l'occasion de cet emploi ils ont connaissance d'actes ou omissions qui compromettent manifestement l'intérêt de la personne protégée, ils en avisent le juge ». Le notaire fait partie de ces tiers qui peuvent être amenés à alerter le juge s'il constate des opérations non conformes à l'intérêt du mineur.