L'acceptation d'une libéralité au profit d'un mineur

L'acceptation d'une libéralité au profit d'un mineur

- Capacité de recevoir et représentation du mineur. - Frappé d'une incapacité d'exercice mais non de jouissance, le mineur peut parfaitement être le bénéficiaire d'une libéralité. Les modalités de sa représentation et l'acceptation pour son compte de cette libéralité varient selon sa nature .
- La donation simple sans charge. - L'acceptation d'une donation sans charge constitue un acte d'administration. En cas d'administration légale exercée conjointement par les deux parents, la donation simple sans charge peut être acceptée par l'un ou l'autre des administrateurs. En cas d'administration légale exercée par un administrateur unique, la donation est acceptée par cet administrateur seul. Précisons que si l'administrateur est également le donateur, l'acceptation devra être réalisée soit par l'autre administrateur si l'administration est conjointe, soit par un administrateur ad hoc, soit par un autre ascendant du mineur (C. civ., art. 935). Si le mineur est sous tutelle, le tuteur peut accepter seul une donation simple sans l'autorisation du conseil de famille.
- La donation avec charges. - L'acceptation d'une donation avec charges constitue un acte de disposition, mais qui n'est pas soumis à l'autorisation préalable du juge des tutelles. En cas d'administration légale exercée conjointement par les deux parents, la donation avec charge doit être acceptée par les deux administrateurs conjointement. Si l'un des administrateurs est également donateur, l'autorisation du juge est nécessaire pour autoriser l'autre parent non donateur à représenter seul le mineur pour l'acceptation de la donation avec charge (C. civ., art. 383, al. 2).
En cas d'administration légale exercée par un administrateur unique, cet administrateur peut accepter seul une donation avec charges. Si cet administrateur est également le donateur, l'acceptation devra être réalisée soit par un administrateur ad hoc, soit par un autre ascendant du mineur (C. civ., art. 935).
Si le mineur est sous tutelle, le tuteur ne peut accepter une donation avec charges qu'avec l'autorisation préalable du juge des tutelles ou du conseil de famille (C. civ., art. 505, al. 1 ; D. no 2008-1484, 22 déc. 2008, ann. 1).
- La donation-partage. - La donation-partage est un acte qui réalise à la fois une libéralité entre vifs et un partage anticipé de succession . Les règles et formalités d'acceptation d'une donation et d'un partage devraient donc s'appliquer cumulativement. Depuis l'ordonnance du 15 octobre 2015 pour l'administration légale et la loi du 23 mars 2019 pour la tutelle, le partage n'est plus subordonné à l'autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille. Le partage fait partie des actes qui peuvent être régularisés librement par les administrateurs ou le tuteur.
Ainsi, pour la donation-partage simple ou conjonctive, les solutions qui ont été exposées précédemment pour l'acceptation d'une donation simple, avec ou sans charge, s'appliquent. La pratique des « acceptations croisées » suivant laquelle le père accepte la donation faite par la mère et inversement même lorsque la donation porte sur un bien commun demeure valable.
La gratification d'un mineur aux termes d'une donation-partage transgénérationnelle obéit aux mêmes règles. Si l'administrateur légal est simultanément l'enfant intermédiaire donataire, cela ne constitue pas par principe une opposition d'intérêts nécessitant automatiquement la désignation d'un administrateur ad hoc.
Cependant, la participation d'un mineur à une donation-partage cumulative nécessite la désignation d'un administrateur ad hoc pour le représenter. Dans cette situation, le parent survivant donateur ne peut représenter son enfant donataire.
- L'incorporation à une donation-partage par le mineur d'une donation antérieure. - Une donation antérieurement consentie peut être utilement incorporée à une donation-partage . Cette incorporation est assimilée à une opération de partage. Réalisée pour le compte d'un mineur, elle est soumise aux mêmes règles de représentation et de pouvoir que la donation-partage.
On peut cependant s'interroger sur la liberté de l'administrateur ou du tuteur du mineur pour réaliser une telle incorporation lorsque celle-ci constitue une aggravation de la situation du mineur. L'incorporation de donations antérieures présente de multiples avantages pour sécuriser une transmission et un partage anticipé et elle est souvent conseillée par les notaires. Il est cependant des cas où l'avantage individuel de l'incorporant ne va pas de soi. Il en est notamment ainsi lorsque la donation initialement hors part successorale devient en avancement de part successorale. Il en est également ainsi parce que la donation initiale perd un rang privilégié dans l'ordre d'imputation des libéralités. Il en est encore ainsi lorsque l'incorporation génère une réaffectation des lots et se traduit par la réattribution du bien à un autre copartageant et l'attribution d'un autre bien au mineur. En synthèse, lorsque l'incorporation constitue, de fait, une révocation ou une novation de la donation antérieure et donc une aggravation de la situation du mineur, le représentant de ce dernier, administrateur ou tuteur, peut-il agir librement ? Compte tenu des enjeux, la réponse nous semble négative et l'autorisation du juge des tutelles devrait être sollicitée. La balance entre les avantages de l'incorporation (sécurité du partage et fixation de la valeur de réunion fictive) et les inconvénients ci-avant mentionnés n'est pas évidente. Ce n'est qu'au décès du donateur que les liquidations définitives pourraient être réalisées pour les comparer.
- Le legs particulier. - Il convient de distinguer le legs avec charge et sans charge.
Le legs particulier sans charge. L'acceptation d'un legs particulier sans charge constitue un acte d'administration. Par conséquent, dans l'administration légale exercée conjointement, il est accepté par un l'un ou l'autre des administrateurs agissant seul, sauf opposition de l'autre. Dans l'administration légale unique, il est accepté par l'administrateur. En cas de tutelle, le tuteur accepte le legs sans autorisation particulière.
Le legs particulier avec charge. L'acceptation d'un legs particulier avec charges constitue un acte de disposition. Dans l'administration légale conjointe, les deux administrateurs acceptent ensemble le legs . Dans l'administration légale unique, l'administrateur accepte seul, sans autorisation particulière. En cas de tutelle, le tuteur doit être préalablement autorisé par le juge des tutelles ou le conseil de famille.
- Le legs universel ou à titre universel. - Le régime de l'acceptation varie selon sa nature.
L'acceptation pure et simple. Dans l'administration légale, l'acceptation pure et simple d'un legs universel ou à titre universel doit préalablement être autorisée par le juge des tutelles en application de l'article 387-1, 5o du Code civil. La requête adressée au juge doit contenir en annexe un état liquidatif de la succession et l'inventaire. En cas de tutelle, le tuteur peut, depuis la loi du 23 mars 2019, accepter le legs universel ou à titre universel, sans l'autorisation préalable du conseil de famille. Il n'a plus à être autorisé préalablement (C. civ., art. 507-1).
L'acceptation à concurrence de l'actif net. Dans l'administration légale, l'administrateur unique ou l'un seul des administrateurs légaux conjoints peut accepter à concurrence de l'actif net un legs universel ou à titre universel (C. civ., art. 382-1). En cas de tutelle, le tuteur peut réaliser cette acceptation sans autorisation préalable (C. civ., art. 507-1).