L'allégement du poids du foncier grâce aux droits réels temporaires

L'allégement du poids du foncier grâce aux droits réels temporaires

L'utilisation de contrats spécifiques conférant au preneur un droit réel temporaire facilite la construction de nouveaux immeubles en dissociant le foncier et le bâti. La charge foncière se trouve ainsi réduite.
Ces contrats sont le bail emphytéotique, le bail à construction, le bail réel immobilier et le bail réel solidaire. Le bail à réhabilitation permet également la construction ou la rénovation lourde 1503390749577.
Outre la diminution de la charge foncière, ces contrats présentent des particularités fiscales incitant à leur utilisation pour la construction de nouveaux immeubles. Elles portent sur :
  • l'enregistrement et la taxe de publicité foncière (§ I) ;
  • la taxe foncière (§ II) ;
  • l'impôt annuel sur la fortune immobilière (§ III) ;
  • et la remise des constructions au bailleur à l'extinction du bail (§ IV).

La formalité de l'enregistrement et la taxe de publicité foncière

– Une dispense d'enregistrement. – Les baux à durée limitée d'immeubles sont dispensés de la formalité de l'enregistrement 1506161418774. La présentation volontaire à la formalité de l'enregistrement de l'acte par les parties donne lieu à la perception du droit fixe de 25 € (CGI, art. 739).
– Une exonération de taxe de publicité foncière pour les baux avec obligation de construire. – Les baux à construction sont exonérés de taxe de publicité foncière (CGI, art. 743, 1°).
L'administration fiscale étend cette exonération aux baux emphytéotiques concourant à la production d'immeubles, ainsi qu'aux baux réels immobiliers consentis à un preneur avec obligation de construire 1503391961105. S'ils ne comportent pas d'obligation de construire, le bail emphytéotique et le bail réel immobilier supportent la taxe de publicité foncière au taux de 0,70 % sur le prix exprimé augmenté des charges imposées au preneur, ou sur la valeur locative réelle des biens loués si elle lui est supérieure (CGI, art. 689 et 742) 1503393068082.
Dans tous les cas, l'exonération ne s'étend pas à la contribution de sécurité immobilière (CGI, art. 879).
– La singularité du bail réel solidaire. – Les baux réels solidaires consentis à un opérateur professionnel chargé de construire les logements puis à un preneur accédant agréé par l'organisme foncier solidaire (OFS) sont exonérés de taxe de publicité foncière (CGI, art. 743, 5° et CCH, art. L. 255-3). Cette exonération profite à la fois au bail initial consenti à l'opérateur professionnel et au bail utilisateur signé avec le particulier 1503394348857. L'exonération ne s'étend pas à la contribution de sécurité immobilière.
En revanche, le bail réel solidaire consenti directement par l'OFS à un preneur occupant le logement n'est pas exonéré de taxe de publicité foncière (CGI, art. 743, 5° et CCH, art. L. 255-2).
– Une exonération limitée aux baux. – L'exonération de taxe de publicité foncière profitant aux baux conférant au preneur un droit réel temporaire est de nature à favoriser leur développement. Toutefois, cette exonération est limitée exclusivement au bail. En effet, dans le cadre d'un BRS, la cession des droits réels immobiliers par l'opérateur chargé de construire au profit du ménage bénéficiaire est taxée dans les conditions de droit commun 1511124362649.
Par ailleurs, il n'existe pas de régime de faveur lors de l'acquisition de l'immeuble donné à bail. Si l'acquéreur a la qualité d'assujetti, il n'est pas assuré de bénéficier de la taxe de publicité foncière au taux fixe de 125 € en prenant l'engagement de construire (CGI, art. 1594-0 G, A), l'administration fiscale n'ayant pas admis formellement la possibilité de transférer l'engagement de construire au preneur à bail assujetti à la TVA 1503398440355.
Enfin, la cession ultérieure par le bailleur ou le preneur des droits détenus aux termes du bail est taxée dans les conditions de droit commun, peu important leur nature.

La taxe foncière

– Le report de la taxe foncière sur le preneur. – La taxe foncière est établie au nom de l'emphytéote, du preneur à bail à construction ou du preneur à bail réel solidaire (CGI, art. 1400). Par analogie, elle est supportée également par le preneur à bail réel immobilier.
– L'abattement facultatif profitant au bail réel solidaire. – Les collectivités territoriales ont la possibilité d'appliquer un abattement de 30 % sur la base d'imposition de la taxe foncière des logements faisant l'objet d'un bail réel solidaire (CGI, art. 1388 octies, al. 1). Pour bénéficier de cet abattement, le preneur adresse une déclaration spécifique accompagnée d'une copie du bail réel solidaire au service des impôts (CGI, art. 1388 octies, al. 2).

L'impôt annuel sur la fortune immobilière

– L'assujettissement à l'IFI. – Les droits réels immobiliers entrent dans l'assiette de l'impôt annuel sur la fortune immobilière (CGI, art. 965).
Le preneur supporte-t-il la totalité de cette imposition ou une répartition est-elle réalisée entre le preneur et le bailleur propriétaire ?
En principe, l'impôt est supporté en totalité par l'usufruitier ou par le titulaire d'un droit d'usage et d'habitation (CGI, art. 968). Néanmoins, le texte ne vise pas expressément les baux immobiliers conférant un droit réel au preneur. Ainsi, il convient de distinguer la valeur des droits du preneur et du bailleur.
– L'assiette d'imposition. – La valeur du droit du preneur est déterminée en appliquant une décote sur la valeur vénale de l'immeuble, tenant compte de l'origine locative, de la nature réelle du droit, ainsi que du temps restant à courir avant l'expiration du bail. Cette valeur est taxée dans le patrimoine du preneur.
La différence entre la valeur en pleine propriété de l'immeuble et la valeur des droits du preneur se retrouve dans l'assiette de l'impôt du bailleur 1503406232203.
L'administration fiscale a expressément adopté cette solution en matière de bail à construction. Elle précise que le bailleur, propriétaire du terrain, déclare la valeur vénale du terrain déterminée en tenant compte de l'existence du bail à construction dans son patrimoine imposable. Le preneur, titulaire d'un droit réel immobilier, est imposé sur la valeur vénale des droits conférés par le bail, notamment sur les constructions 1505745639829.
La répartition entre deux contribuables de la valeur de l'immeuble dans l'assiette de l'IFI est également de nature à favoriser l'utilisation de ces baux.

La remise des constructions au bailleur en fin de bail

La remise des constructions au bailleur constitue en principe un revenu taxable (A).
À ce titre, le bail à construction bénéficie d'un régime dérogatoire (B).

La taxation des constructions édifiées par le preneur

À l'issue du bail, toutes les constructions et améliorations effectuées par le preneur profitent au bailleur par le jeu de l'accession.
– Le principe : un supplément de loyer imposable. – Lorsque les constructions édifiées ont été prévues par une convention expresse du bail, leur remise gratuite au bailleur constitue un revenu imposable 1503409792314. Ce revenu est taxable l'année de l'accession par le propriétaire du sol. Il correspond à la valeur vénale des constructions, sous déduction de l'indemnité éventuellement prévue dans le bail, versée par le bailleur au preneur 1503410745536.
Ce supplément de loyer est imposable au titre des revenus fonciers, des bénéfices industriels et commerciaux ou à l'IS, selon le régime fiscal applicable au bailleur.
– L'exception relative aux constructions édifiées volontairement par le preneur.Dans le bail à construction et le bail emphytéotique, le preneur a la possibilité de procéder à des constructions et améliorations non prévues au contrat.
Le preneur à bail réel immobilier ou à bail réel solidaire n'est pas autorisé à effectuer des ouvrages ou travaux autres que ceux initialement prévus, sauf stipulation contraire du bail.
La remise gratuite au bailleur des constructions édifiées par le preneur en dehors de toute prévision contractuelle n'est pas imposable 1503412932229.
– L'absence de taxe de publicité foncière. – La remise gratuite des constructions au bailleur n'emporte pas de conséquences particulières en matière de publicité foncière. Ce transfert étant automatique, il n'est pas obligatoire d'établir un acte constatant l'accession. Si un acte est néanmoins établi, la taxe de publicité foncière au taux de 0,70 % est due 1503415165275.

Le régime spécifique du bail à construction

La remise des constructions au bailleur bénéficie d'un régime fiscal favorable dans le cadre d'un bail à construction.
– La décote de la taxation. – Le revenu taxable représenté par la valeur des constructions est calculé d'après leur prix de revient, c'est-à-dire le coût de la construction supporté par le preneur (CGI, art. 33 ter).
Lorsque la durée du bail est au moins égale à trente ans, la remise des constructions ne donne lieu à aucune imposition (CGI, art. 33 ter, II, al. 2).
Lorsque la durée du bail est inférieure à trente ans, l'imposition est due sur une valeur réduite de 8 % par année de bail au-delà de la dix-huitième (CGI, ann. III, art. 2 sexies).
Il convient néanmoins de relativiser l'avantage fiscal du dispositif 1503436108226.
En effet, l'administration fiscale distingue :
  • le prix de revient des constructions bénéficiant de la décote jusqu'à son exonération si le bail a duré au moins trente ans ;
  • et la différence entre la valeur vénale des constructions au jour de la remise et le prix de revient, cette différence constituant un revenu imposable 1503436314767.
Ce dispositif s'applique aux contribuables, quel que soit leur régime fiscal.
– L'étalement de l'imposition au titre des revenus fonciers. – Le bailleur a la faculté de répartir l'imposition de ce revenu sur quinze années (CGI, art. 33 ter, I). Cette règle du quinzième s'applique à l'ensemble du revenu imposable, c'est-à-dire tant à celui correspondant au prix de revient des constructions qu'à celui provenant de la différence entre leur prix de revient et leur valeur vénale.
– La cession du terrain au preneur. – La cession du terrain d'assiette par le bailleur au preneur en fin de bail entraîne l'imposition des plus-values immobilières.