CGV – CGU

Partie V – Les trusts
Titre 3 – La fiscalité des trusts
Chapitre II – Fiscalité applicable au décès du constituant
Section I – Principe d’imposition aux droits de mutation à titre gratuit

2613 Les parts déterminées revenant à chaque bénéficiaire sont taxables en France aux droits de mutation à titre gratuit1272. La taxation est soumise aux règles d’imposition de droit commun. Il est par conséquent possible d’appliquer les abattements selon les liens de parenté.

Dès lors, si le bénéficiaire et le constituant étaient mariés ou liés par un pacte de solidarité, la transmission sera effectuée en franchise de droits de succession. Les droits sont dus dès le décès du constituant, même si le trust n’est pas liquidé.

En qualité de notaire, lors de l’établissement de la déclaration de succession on indique l’existence du trust, son montant au jour du décès, c’est-à-dire la valeur vénale nette des biens, droits ou produits capitalisés à la date de la transmission.

À partir du décès, le trustee devient solidaire du paiement des droits vis-à-vis de l’administration fiscale. D’ailleurs en pratique, c’est lui qui paye les droits que génère la taxation de ces actifs.

L’article 750 ter du Code général des impôts définit les règles de territorialité applicables ; les droits sont dus sur l’ensemble des biens ou droits composant le trust, quelle que soit leur situation, lorsque le constituant a son domicile fiscal en France. À défaut les droits sont dus :

soit sur l’ensemble des biens ou droits composant le trust, quelle que soit leur situation, lorsque le bénéficiaire est domicilié en France au jour de la transmission et l’a été pendant au moins six ans au cours des dix dernières années ;

soit sur les seuls biens ou droits situés en France dans les autres cas1273.

La présomption de l’article 752 du Code général des impôts est applicable au trust. Rappelons qu’aux termes de ce texte, il est présumé (simplement) que les actions, obligations, parts de fondateurs ou bénéficiaires, parts sociales et toutes autres créances dont le défunt a eu la propriété, a perçu les revenus ou à raison desquelles il a effectué une opération quelconque moins d’un an avant le décès, font partie de sa succession pour le calcul des droits.

Section II – Cas particulier des droits de succession au taux de 45 %

2614 Au cas particulier d’une transmission globale d’une part déterminée à plusieurs descendants du constituant, sans qu’il soit possible de la répartir entre eux, alors les droits de succession sont dus au taux de la dernière tranche du tableau I de l’article 777, soit au taux de 45 %1274.

Dans ce cas, l’abattement en ligne directe ne s’applique pas.

Exemple

Un trust irrévocable dont les bénéficiaires sont pour moitié les petits-enfants du constituant «vivants à la date du 1er janvier 2025». Le nombre de bénéficiaires n’étant pas déterminé, ils seront imposables au taux de 45 %.

Section III – Cas particulier des droits de succession au taux de 60 %

2615 En pratique ce taux n’est applicable que si les biens restent dans le trust à la suite du décès du constituant sans être attribués, ou si la transmission est réalisée à des bénéficiaires qui ne sont pas des descendants du constituant et qu’il s’agit d’une part non individuellement déterminée. Dans ce cas, aucun abattement ne s’applique.

De même, ce taux de 60 % est applicable si le trustee est soumis à la loi d’un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du Code général des impôts, ou lorsque le trust a été créé après le 11 mai 2011 par un constituant fiscalement domicilié en France lors de sa constitution.

Exemple récapitulatif

Un trust dont l’actif net vaut 1 000 à la date du décès de son constituant :

un bénéficiaire prénommé Auguste, enfant du constituant reçoit 200. Il est également héritier du settlor et les 200 s’ajoutent à sa part successorale. La taxation va dépendre du montant de celle-ci et sera taxée selon les règles de droit commun ; droits de mutation à titre gratuit selon le barème de droit commun au profit des enfants avec application de l’abattement de 100 000 € ;

un bénéficiaire prénommé Béatrice, sans lien de parenté avec le constituant et qui n’en est pas héritier reçoit 100. Cette somme minorée de l’abattement de 1 594 € est taxée au taux de 60 % en application du barème de droit commun applicable entre non-parents ;

Auguste et sa sœur Catherine reçoivent, de manière globale 100 : il s’agit d’une transmission globale d’une part déterminée sans qu’il soit possible de la répartir entre eux. Droit de mutation sui generis, cette somme est taxée à 45 % et l’abattement de 100 000 € n’est pas applicable ;

Auguste, Catherine et leur mère Danièle (épouse du constituant) reçoivent de manière globale 300. Il s’agit d’une transmission globale d’une part déterminée sans qu’il soit possible de la répartir entre eux et l’un des bénéficiaire (le conjoint) n’est pas un descendant : droit de mutation sui generis, cette somme est taxée à 60 %. Aucun abattement ne s’applique ;

le solde de l’actif net, soit 300, demeure dans le trust ou est transmis à un bénéficiaire indéterminé. Cette somme est également taxée à 60 % : droit de mutation sui generis.

Section IV – Quel est l’impact des conventions fiscales internationales ?

2616 La convention en matière de succession et de donation est celle applicable afin d’éliminer d’éventuelles doubles impositions. L’existence du trust n’a pas d’incidence et l’on considère que les biens et droits affectés sont taxables. Lorsque la France est l’État de résidence, l’impôt acquitté à l’étranger est imputable dans la limite de l’impôt dû en France et il incombe au redevable de justifier du paiement effectif de l’impôt étranger.

Section V – Cas des transmissions successives

2617 Le bénéficiaire devient, lors du décès du constituant, un constituant substitutif. Si le trust perdure de génération en génération, le patrimoine est taxé à chaque décès des constituants substitutifs selon le degré de parenté et les taux d’imposition et abattements applicables au jour du décès (par ex., lorsque les enfants du bénéficiaire initial deviennent bénéficiaires en remplacement de leur parent, à la suite du décès de ce dernier).

Section VI – Cas d’une sortie ultérieure des biens affectés dans le trust

2618 Si les attributaires des biens sortis du trust sont les bénéficiaires identifiés lors de la dernière transmission avec une répartition entre eux des biens identique à celle opérée lors de la dernière transmission, il y a lieu de considérer que la sortie (totale ou partielle) des biens du trust ne constitue pas une nouvelle mutation ; aucun droit de mutation n’est dû. En revanche, s’il n’y a pas identité parfaite entre les attributaires des droits ou biens sortis du trust et les bénéficiaires identifiés lors de la dernière transmission, ou si la répartition diffère de celle opérée lors de la dernière transmission, une taxation aux droits de donation sera effectuée en considérant que le premier bénéficiaire a consenti une donation au profit du nouvel attributaire de ces droits ou biens.


1272) BOI-ENR-DMTG-30-2012-10-16, n° 20.
1273) BOI préc., n° 30.
1274) Ce cas ne s’applique pas en cas de transmission au conjoint ou à un ascendant.
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