La formation du mandat de protection future

La formation du mandat de protection future

- Plan. - Nous allons successivement envisager les conditions de formation (Sous-section I), l'objet (Sous-section II) et la publicité du mandat de protection future (Sous-section III).

Les conditions

- Deux types de conditions. - Le législateur soumet la formation du mandat de protection future à deux séries de conditions : des conditions de fond (§ I) et des conditions de forme (§ II).
Lors du renouvellement du contrat, le loyer ne donne lieu à réévaluation que s'il est manifestement sous-évalué .
Loyers de référence. Le texte ne définit pas la sous-évaluation manifeste, mais précise à l'alinéa 2 que le bailleur peut proposer au locataire « un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables ».
Les loyers servant de référence doivent être représentatifs de l'ensemble des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, situés soit dans le même groupe d'immeubles, soit dans tout autre groupe d'immeubles comportant des caractéristiques similaires et situés dans la même zone géographique.
La notion de voisinage n'est pas définie et les réponses ministérielles peu éclairantes . La Cour de cassation considère que les juges du fond ne sont pas tenus de fonder leurs décisions uniquement sur les loyers pratiqués par le bailleur dans le même immeuble et qu'il n'importe pas que les références du bailleur concernent des appartements lui appartenant, dès lors qu'elles sont représentatives des loyers habituellement pratiqués dans le voisinage immédiat .
La notion de comparabilité s'étend, quant à elle, à l'ensemble des éléments qui caractérisent le logement. Ceci signifie que les références doivent être prises pour des logements de qualité proche, de caractéristiques comparables (nombre de pièces, confort, environnement…) . Les références retenues doivent concerner des loyers constatés dans le voisinage pour des logements comparables au cours des trois dernières années ayant précédé la date de renouvellement du bail .
- Types de références. - L'article 17-2, alinéa 3 de la loi de 1989 précise qu'un décret en Conseil d'État définit les éléments constitutifs de ces références. L'article 1er du décret du 31 août 1990 , tel que modifié par le décret no 2019-437 du 13 mai 2019 , prévoit que les références à fournir par le bailleur mentionnent au moins , pour chaque logement loué :
a) Le nom de la rue et la dizaine de numéros où se situe l'immeuble ;
b) Le type d'habitat, individuel ou collectif, et l'époque de construction de l'immeuble ;
c) l'étage du logement et la présence éventuelle d'un ascenseur ;
d) la surface habitable du logement et le nombre de ses pièces principales ;
e) l'existence éventuelle d'annexes prises en compte pour le loyer ;
f) l'état d'équipement du logement : notamment, w.-c. intérieur, salle d'eau, chauffage central ;
g) l'indication selon laquelle le locataire est dans les lieux depuis plus ou moins de trois ans ;
h) le montant du loyer mensuel hors charges effectivement exigé ;
i) l'année de constatation des éléments constitutifs de la référence.
L'article 1-1 du décret du 31 août 1990 prévoit que « les références doivent porter non seulement sur des baux conclus récemment, mais également sur des baux conclus depuis plus de trois ans », sans que leur proportion ne soit précisée. L'article 19 de la loi du 6 juillet 1989, abrogé par la loi Alur, prévoyait qu'au moins deux tiers de ces références doivent correspondre à des locations pour lesquelles il n'y a pas eu de changement de locataires depuis au moins trois ans.
- Nombre de références. - Le bailleur doit fournir :
  • au moins trois références dans les autres zones géographiques ;
  • au moins six références dans les communes dont la liste est fixée par décret , faisant partie d'une agglomération de plus d'un million d'habitants.
- Observatoires des loyers. - Des références (période de construction d'un immeuble, typologie des logements…) peuvent être obtenues auprès du réseau des observatoires locaux des loyers ou de l'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (Olap) . Ces observatoires ont notamment pour mission de recueillir les données relatives aux loyers sur une zone géographique déterminée et de mettre à la disposition du public des résultats statistiques représentatifs sur ces données .
Les professionnels qui interviennent, à quelque titre que ce soit, lors de la conclusion du contrat de bail d'un logement, lors de la location ou pour en assurer la gestion locative, communiquent à l'observatoire local des loyers compétent des informations relatives au logement et au contrat de location. Tout bailleur possédant une part significative des locaux constituant le parc de référence , à l'échelle de la zone géographique d'un observatoire local des loyers, communique audit observatoire, des informations relatives au logement et au contrat de location .
Nous renvoyons à ce qui a été indiqué ci-avant.
Sauf disposition spéciale, l'expulsion d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux .
Les époux étant colocataires, la procédure tendant à obtenir l'expulsion d'un locataire d'un logement conjugal doit être engagée contre les deux époux . Toutefois, aux termes de l'article 9-1 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989, « les notifications ou significations faites en application du présent titre par le bailleur sont, de plein droit, opposables au partenaire lié par un pacte civil de solidarité au locataire ou au conjoint du locataire si l'existence de ce partenaire ou de ce conjoint n'a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur ». Par conséquent, un locataire à l'obligation d'informer le bailleur de son mariage, en cours de bail, pour le rendre opposable aux deux époux.

Les conditions de fond

- Dualité des conditions de fond. - Les textes posent des conditions tenant, d'une part, au mandant (A) et, d'autre part, au mandataire (B).

Les conditions relatives au mandant

- Capacité du mandant. - Le mandat de protection future étant un contrat, il ne peut être souscrit que par une personne dotée de la capacité juridique. Partant, et par principe, toute personne majeure dispose de la faculté de souscrire un tel mandat (C. civ., art. 414 et 1123). Qu'en est-il, en revanche, lorsque la personne majeure est placée sous un régime de protection ? Tout dépend alors de l'intensité de cette dernière.
Le placement sous sauvegarde de justice n'empêche pas le recours à un tel mandat, la capacité du majeur étant alors maintenue.
De la même manière, l'accès au mandat de protection future est ouvert au majeur sous curatelle, lequel ne peut toutefois conclure ce contrat qu'en étant assisté de son curateur (C. civ., art. 477, al. 2) . En cas de refus de celui-ci, le curatélaire peut solliciter l'autorisation du juge (C. civ., art. 469, al. 3 et CPC, art. 1213) . De prime abord, et en dépit du silence des textes, la solution a vocation à s'appliquer à l'habilitation familiale aux fins d'assistance, dont les règles sont calquées, par principe, sur la curatelle (C. civ., art. 494-1, al. 1er) .
En revanche, la personne majeure qui fait l'objet d'une mesure de tutelle ou d'une habilitation familiale aux fins de représentation ne peut recourir au mandat de protection future (C. civ., art. 477, al. 1er). S'agissant de l'habilitation familiale, et en dépit de cette pétition de principe, il convient en réalité de distinguer selon que l'habilitation en cause est générale, auquel cas la personne protégée ne peut effectivement conclure un tel mandat (C. civ., art. 494-8, al. 2) ou spéciale, dans la mesure où dans cette hypothèse la personne protégée conserve la faculté de conclure un mandat de protection future, lequel pourra être mis en ?uvre après l'accomplissement du ou des actes pour lesquels l'habilitation a été délivrée ou pour l'accomplissement d'autres actes que ceux couverts par l'habilitation spéciale (C. civ., art. 494-8, al. 1er).
- Mandat tardif. - La loi laisse la faculté à la personne sauvegardée et à la personne en curatelle de signer un mandat de protection future. Il en va de même a fortiori lorsqu'une procédure en vue de l'ouverture d'une telle mesure est encore pendante devant le juge des tutelles.
En droit, ces préconisations semblent parfaitement justifiées. Le mandat peut intervenir tant que la personne a « la capacité mentale de faire un acte juridique » . Or, ni la mise en place d'une mesure de protection judiciaire sans représentation, ni a fortiori le seul dépôt d'une requête à cette fin ne remettent en cause la capacité de l'intéressé. La règle consacre à la fois le respect de la volonté de la personne protégée et le principe de subsidiarité des mesures de protection judiciaire par rapport au mandat de protection future (C. civ., art. 428, al. 1er). Et puis, le juge des tutelles, agissant ainsi comme une soupape de sécurité, est susceptible d'intervenir dans de telles circonstances, lorsque le mandat de protection future ne permet pas de garantir la préservation de la personne du mandant et de son patrimoine (C. civ., art. 483, 4o).
La justification en droit de la règle n'empêche pas de s'interroger en fait sur l'opportunité de mettre en place un mandat de protection future dans ces circonstances. En effet, la tardiveté du mandat semble alors de nature à jeter la suspicion sur les circonstances ayant présidé à sa conclusion et, par suite sur son aptitude à pourvoir suffisamment aux intérêts du mandant. Bien plus, si, placé sous curatelle, le mandant bénéficie de l'assistance de son curateur pour signer le mandat, il en va différemment de celui qui, sous simple sauvegarde en justice, est livré à lui-même avec le risque évident d'un mandat extorqué par des mandataires sans scrupules. À dire vrai, le mandat de protection future est une mesure d'anticipation qui semble mal s'accommoder, de prime abord, avec l'instruction ou la préexistence avérée d'une mesure judiciaire de protection. Les doutes sur le discernement du mandant sont, dans un cas, légitimes et, dans l'autre, démontrés. Or, « pour qu'il y ait autonomie de la volonté encore faut-il qu'il y ait volonté saine et libre » .
D'une manière générale, le risque de remise en cause du mandat est évident quand on constate une proximité de sa signature et de sa mise à exécution. C'est le cas a fortiori en présence d'un mandat purement « défensif » , conclu pendant la phase d'instruction d'une requête en vue de la mise en place d'une protection judiciaire ou lorsqu'une telle mesure est déjà en place, vraisemblablement sur la suggestion de son bénéficiaire, et pour faire échec à ladite mesure. Aussi la signature d'un mandat tardif suppose-t-elle pour le notaire rédacteur de respecter un principe de précaution accru, afin de s'assurer que le mandant, en dépit du contexte, bénéficiait d'un discernement suffisant pour comprendre le sens et la portée de son acte. Le notaire prendra soin de conserver la preuve de ces diligences, sous peine de voir sa responsabilité engagée. En cas de doute avéré sur le discernement du mandant, il doit bien évidemment refuser d'instrumenter.

La jurisprudence relative à l'articulation d'une mesure de protection judiciaire avec la conclusion d'un mandat de protection future

La Cour de cassation a rendu deux décisions concernant des mandats tardifs.
Dans la première espèce, la Cour de cassation a approuvé des juges du fond d'avoir écarté, au profit d'une curatelle, un mandat de protection future signé pendant la procédure devant le juge des tutelles par une personne sous sauvegarde de justice, au motif que celle-ci se trouvait sous l'emprise de son fils, désigné en qualité de mandataire de protection future, qui l'isolait du reste de sa famille contre sa volonté, et dont la gestion était entachée d'opacité .
Dans la seconde espèce, elle a pareillement approuvé la révocation d'un mandat conclu par un jeune autiste sous sauvegarde de justice désignant son père en qualité de mandataire de protection future, au profit d'une curatelle renforcée confiée à ce dernier .
Dans ces deux espèces, faisant manifestement fi du principe de subsidiarité des mesures de protection judiciaire par rapport au mandat de protection future (C. civ., art. 428, al. 1er), les hauts magistrats ont admis (trop) facilement la mise à l'écart du second au profit des premières. Il est toutefois difficile de tirer de véritables enseignements de ces décisions dans la mesure où la question épineuse de l'application ou non du principe de subsidiarité des mesures de protection judiciaire par rapport au mandat de protection future ne lui était pas clairement posée. C'est dire que l'on attend donc toujours avec impatience que la Cour de cassation ait une occasion de devoir se prononcer explicitement sur les conditions de l'application éventuelle ou non d'un mandat de protection future tardif, conclu et ayant pris effet au cours de l'instance aux fins d'ouverture d'une mesure de protection juridique.
- Annulation du mandat. - Une altération des facultés mentales du mandant au moment de la conclusion du mandat de protection future n'entraîne pas nécessairement son annulation puisque le texte permet à une personne sauvegardée ou sous curatelle, par hypothèse atteinte d'une telle altération, de conclure un tel mandat. En définitive, l'annulation ne peut être prononcée que s'il est établi que le mandant, en raison de l'importance de l'altération de ses facultés, n'était pas en mesure de s'engager valablement au moment de la conclusion. Aucune disposition ne donnant compétence au juge des tutelles pour statuer sur une telle demande d'annulation, celle-ci relève de la compétence de droit commun du tribunal de grande instance . Contrairement à une idée reçue, le juge des tutelles n'est donc pas le juge de la validité du mandat de protection future. Il peut simplement bloquer sa mise en ?uvre s'il est démontré que l'exécution du mandat est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant (C. civ., art. 483, 4o) .

Les conditions relatives au mandataire

- Liberté de choix. - Le mandant procède librement à la désignation de la personne de son choix, sous réserve de certaines restrictions.
Ainsi le mandataire peut être une personne morale, laquelle doit cependant être choisie sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs prévue à l'article L. 471-2 du Code de l'action sociale et des familles (C. civ., art. 480, al. 1er).
Le mandataire peut également être une personne physique, ce qui est du reste généralement le cas dans les faits. Les textes imposent seulement, en pareille occurrence, que la personne choisie jouisse de la capacité civile pendant toute la durée du mandat (C. civ., art. 480, al. 2) et qu'il remplisse, pendant la même durée, les conditions requises pour l'exercice des charges tutélaires (C. civ., art. 395 et 445, al. 2 et 3).
Concrètement, ces conditions excluent la possibilité pour le mandant de désigner comme mandataire de protection future :
  • un majeur placé sous un régime de protection juridique ;
  • un mineur non émancipé ;
  • une personne à qui aurait été retirée l'autorité parentale ou à qui l'exercice des charges tutélaires aurait été interdit en application de l'article 131-26 du Code pénal (C. civ., art. 480, al. 2, qui renvoie à C. civ., art. 395) ;
  • les membres des professions médicales ou pharmaceutiques ainsi que les auxiliaires médicaux, lesquels ne peuvent être classiquement désignés mandataires de leurs patients (C. civ., art. 480, al. 2, qui renvoie à C. civ., art. 445) ;
  • enfin, le fiduciaire désigné par le contrat de fiducie (C. civ., art. 445, al. 3).
Outre ces restrictions égales, il va sans dire, au surplus, que le rédacteur de l'acte, qu'il s'agisse du notaire ou d'un avocat, ne saurait être concomitamment partie à l'acte et donc être investi de la qualité de mandataire, et ce d'autant plus, pour le notaire, que la loi lui confie au surplus la charge de contrôler a posteriori les actes de ce dernier (C. civ., art. 491).
- Pluralité de choix. - L'article 477 du Code civil autorise la nomination de plusieurs mandataires.
D'une part, la pluralité de mandataires peut être successive. Le mandant peut ainsi décider de procéder à la désignation d'un mandataire principal, normalement chargé d'exercer la fonction, et d'un ou plusieurs mandataires subsidiaires, chargés de suppléer le premier si celui-ci ne pouvait exercer sa mission pour un motif quelconque (décès, incapacité, révocation, renonciation, etc.). Il est vivement conseillé au mandant de prévoir une telle désignation en cascade, car il se pourrait qu'au moment du décès du mandataire désigné, ou de son incapacité, il ne soit plus en état lui-même de pourvoir à son remplacement. Or, dans ce cas, et parce qu'il ne lui appartient pas de pallier la volonté du mandant, le juge ne viendra pas au secours du mandat. Il ne restera plus qu'à abandonner le mandat pour en revenir aux solutions légales, ce qui serait regrettable .
D'autre part, la pluralité de mandataires peut être simultanée, ce qui appelle davantage de réserves. Le mandant peut ainsi confier la mission à plusieurs mandataires qui exerceront leur mission avec des pouvoirs alternatifs ou concurrents, en fonction des actes à accomplir. Le procédé peut être particulièrement utile lorsque des compétences spécifiques sont requises pour la gestion d'un bien déterminé ou en présence d'un patrimoine complexe. Une autre option consiste à désigner un mandataire attaché à la personne, tandis qu'un autre lui sera préféré pour la gestion du patrimoine. Le mandant peut aussi opter pour la désignation distributive d'un mandataire chargé de la gestion du patrimoine professionnel et d'un autre appelé à gérer le patrimoine personnel.
À vrai dire, toutes les formules sont envisageables. Le risque est toutefois évident en présence d'un collège de mandataires de voir naître des conflits entre eux, a fortiori lorsqu'ils se sont vu confier des pouvoirs concurrents sur les biens. C'est pourquoi, à notre sens, mieux vaut éviter la désignation simultanée de plusieurs mandataires. Si, toutefois, le mandant privilégie cette formule, il s'agit de l'encadrer strictement. Bien évidemment, et a minima, le mandant doit être attentif aux affinités de chacun et à leurs domaines d'intervention respectifs. Au-delà, le mandat doit contenir de clauses destinées à prévenir d'éventuelles situations de blocage, par exemple en donnant une prévalence à l'un des mandataires en cas de tiraillements. À défaut, et ce serait fâcheux, il appartiendra au juge des tutelles d'intervenir (C. civ., art. 484), qui n'aura d'autre choix vraisemblablement que d'ouvrir une mesure de protection judiciaire.

Conseil pratique

La double désignation d'un mandataire prioritaire et d'un mandataire subsidiaire constitue une précaution rédactionnelle élémentaire, car elle présente l'intérêt de sécuriser au maximum le contrat conclu par le mandant et de faire en sorte qu'il trouve exécution malgré les aléas qui pourraient survenir
.

- Opportunité du choix. - Bien que les textes ne l'exigent pas expressément, le choix du mandataire doit être guidé par l'aptitude particulière dont il dispose pour gérer efficacement le patrimoine du mandant. « Cette aptitude pourra être appréciée au regard de différents critères parmi lesquels la complicité qu'il entretient avec le mandant, sa qualification particulière, sa proximité géographique avec les biens objet du mandat, le fait qu'il ait été associé par le mandant à la gestion de ces biens » . Bien évidemment, les qualités requises pouvant être puisées chez divers intervenants, et en dépit des inconvénients de la formule, le choix d'une pluralité de mandataires peut parfois s'imposer au mandant.
En pratique, bien que la solution ne soit nullement imposée par les textes, et pour des raisons évidentes, c'est très souvent un proche, issu de l'environnement familial qui est choisi . On songe ici principalement aux enfants, même si l'on sait que la désignation de l'un d'entre eux peut créer des tensions et des suspicions au sein de la fratrie. Une répartition des rôles entre les uns et les autres, en fonction de leurs compétences respectives, tout en ayant conscience des risques de conflits qui en résultent, peut alors constituer une solution idoine.
La question du choix du mandataire présente une réelle particularité si le mandant est marié. Qui choisir en pareille occurrence ? De prime abord, de nombreux avantages postulent pour que le mandat de protection future soit confié au conjoint, lequel est naturellement « la personne la plus proche, la plus disponible, la plus attentive et la plus au fait, dans l'intimité du foyer, de la connaissance du mandant, de son patrimoine, de sa personne » . Au-delà, ne pas choisir le conjoint est risqué, car les pouvoirs du mandataire de protection future viendront alors en concurrence avec ceux que le conjoint tire des règles issues du régime primaire et des régimes matrimoniaux et pourront susciter autant de discordes entre les protagonistes. C'est dire que le principe de réalisme milite en faveur de la désignation du conjoint en qualité de mandataire. Les inconvénients liés à un tel choix ne doivent cependant pas être occultés. Que l'on songe principalement aux conflits d'intérêts qui peuvent surgir, d'une part, entre le mandant et son conjoint en cas de séparation et, d'autre part, entre le conjoint et les enfants du mandant, notamment, mais pas seulement, si ces derniers sont issus d'une autre union. Face à un tel risque, la désignation complémentaire d'un mandataire ad hoc peut s'avérer judicieuse. En tout état de cause, et sauf à prévoir un mandataire de substitution, le choix du conjoint est évidemment à proscrire si ce dernier a approximativement le même âge que le mandant, car le risque est alors évident que le mandataire ne voie sa santé physique et intellectuelle décliner concomitamment à celle du mandant et ne soit donc pas en mesure d'accomplir sa mission.
Dans l'hypothèse où le mandant privilégie un tiers au conjoint, et pour éviter les tensions éventuelles inhérentes à une mise à l'écart totale de ce dernier, il peut être opportun de combiner les dispositions concurrentes, en associant par exemple le conjoint dans les décisions à prendre, ou du moins certaines d'entre elles. Au rebours, dans l'hypothèse où le conjoint a été choisi comme mandataire, il est loisible de prévoir des clauses, certes contraignantes pour le conjoint, mais destinées à sécuriser et protéger les enfants, par exemple en subordonnant à leur accord tous actes de disposition à définir.
Bien évidemment, l'intérêt de toutes ces précautions rédactionnelles doit être apprécié à l'aune du contexte familial. Si ce dernier est déjà particulièrement tendu, le choix d'une personne totalement étrangère à ce contexte, tel un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, doit être privilégié.
La situation est globalement identique si le mandant entend choisir son partenaire ou son concubin en qualité de mandataire de protection future.

Une armée mexicaine? parfois indispensable !

Tout doit être prévu, c'est là toute la difficulté, afin que le mandat fonctionne harmonieusement, sans risques potentiels de conflits. Dans cette optique, et dans l'idéal, le mandat ne peut pas se contenter, dans la plupart des cas, de prévoir la seule désignation d'un mandataire, à qui l'on donnerait carte blanche.
Ainsi, outre la pluralité de mandataires, qui présente certains inconvénients, et avec des réserves globalement similaires, il peut être utilement envisagé la désignation d'un ou plusieurs tiers de confiance. Cette faculté n'est pas prévue par la loi, mais elle résulte des réflexions des praticiens qui y voient plusieurs intérêts, notamment celui d'associer, par ce biais, d'autres personnes de la famille ou d'autres proches - par exemple, les enfants - aux décisions concernant la personne protégée, pour qu'ils ne se sentent pas exclus par le mandataire .
Au-delà, parce qu'il s'agit de trouver dans le cadre du mandat de protection future des solutions qui permettent d'évacuer, autant que possible, le recours au juge, le mandant peut désigner un subrogé mandataire, qu'il s'agisse d'un autre enfant en présence d'une fratrie ou d'une tierce personne en l'absence d'enfants. Ce subrogé mandataire peut être investi, à l'instar de tout tiers de confiance, d'un pouvoir de surveillance du mandataire de protection future mais, à nos yeux, son rôle de contrepoids à l'action de ce dernier est davantage marqué. Dans la rédaction du contrat, le mandant peut évidemment s'inspirer de l'article 454 du Code civil qui prévoit le rôle alloué classiquement au subrogé curateur et au subrogé tuteur. Il peut aussi aller plus loin et prévoir que les actes de disposition soient soumis au consentement du subrogé mandataire, quitte même, on peut le suggérer, à se passer dans certains cas de l'autorisation du juge, pourtant requise par les textes .
Enfin, il peut être judicieux de désigner un mandataire ad hoc pour couvrir l'hypothèse de la survenance d'un conflit d'intérêts au cours de l'exécution entre le mandataire et le mandant, et ce d'autant plus que les textes n'offrent aujourd'hui au juge, dans le silence du mandat, qu'une faculté étroite de procéder à une telle désignation (C. civ., art. 485, 2o) .

Les conditions de forme

- Dérogation au droit commun. - Contrairement au droit commun du mandat, qui n'exige aucune forme particulière pour la conclusion d'un tel contrat, le mandat de protection future est soumis par la loi à un formalisme minutieux. Il s'agit, par ce biais, d'attirer l'attention du mandant sur la gravité de ce qu'il entreprend. Cependant, si elle n'est pas libre, la conclusion du mandat peut toutefois prendre deux formes, dont le choix est laissé aux parties : l'acte notarié ou la signature privée (C. civ., art. 489).
- Mandat notarié. - Les parties peuvent opter pour la forme authentique. Le mandat est alors reçu par le notaire choisi par le mandant et accepté par le mandataire dans les mêmes formes (C. civ., art. 489, al. 1er).
Une sous-section complète du code est consacrée au mandat notarié (C. civ., art. 489 à 491).
Les textes prévoient ainsi que le mandant a la faculté de modifier ou de révoquer le mandat donné, tant que celui-ci n'a pas pris effet. La modification du mandat doit respecter la règle du parallélisme des formes. Ainsi, par exemple, une modification des pouvoirs du mandataire nécessitera un nouvel acte notarié. En revanche, la révocation du mandat par le mandant ne nécessite pas un acte notarié, une simple lettre recommandée avec demande d'avis de réception au notaire et au mandataire suffit (C. civ., art. 489, al. 2). Quant au changement de mandataire, il nécessitera une notification de la révocation au premier mandataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et l'établissement d'un nouvel acte notarié qui devra être accepté par le nouveau mandataire.
De son côté, et là encore tant que le mandat n'a pas pris effet, le mandataire peut également y renoncer. Il doit alors simplement notifier sa renonciation au mandat et au notaire (C. civ., art. 489, al. 2).

Un mandat n'est jamais écrit une bonne fois pour toutes !

Une fois signé, et tant qu'il n'a pas été mis à exécution, le mandat de protection future n'est jamais figé dans le marbre ; il est susceptible d'être réécrit, complété et amendé. Aussi, durant cette période de latence du mandat, le notaire rédacteur doit-il être, dans la mesure du possible, en relation régulière avec son client, pour assurer un suivi personnalisé. De son côté, le mandant ne doit pas hésiter à venir le consulter pour vérifier l'adaptation constante du contrat à sa situation personnelle, familiale, patrimoniale, financière et géographique. Cette souplesse de révision du mandat tant qu'il n'est pas activé est caractéristique du mandat, qui est le produit d'une volonté, laquelle peut changer ou devoir s'adapter aux circonstances
. Ainsi le choix du mandataire ou encore les pouvoirs qui lui ont été conférés peuvent, au fil du temps, ne plus correspondre aux besoins et aux intérêts du mandant. Au rebours, c'est parfois le mandataire, eu égard à l'évolution de sa propre situation, notamment de son état de santé, qui peut désirer rompre un contrat dont il ne se sent plus d'assumer la charge. Cette liberté de mouvement des parties est d'autant plus indispensable ici qu'un laps de temps très long peut s'écouler entre la conclusion du mandat et sa prise d'effet.

- Mandat sous seing privé. - Les parties peuvent également conclure leur mandat sous seing privé. En pareille occurrence, le mandat peut être soit contresigné par un avocat, soit établi selon un modèle défini par décret en Conseil d'État (modèle Cerfa 13592-02) .
Quelle que soit la forme choisie, le mandat est alors « daté et signé de la main du mandant » (C. civ., art. 492, al. 1er). En revanche, il n'a pas à être écrit de la main du mandant si bien qu'il peut être dactylographié.
Le mandataire accepte le mandat en y apposant sa signature (C. civ., art. 492, al. 2).
Tant que le mandat n'a pas reçu exécution, le mandant peut le modifier ou le révoquer dans les mêmes formes et le mandataire peut y renoncer en notifiant sa renonciation au mandant (C. civ., art. 492, al. 3).
- Prévalence du mandat notarié. - Le grand principe qui domine l'écriture du mandat est celui de la liberté de rédaction. C'est la volonté du mandant qui fait le mandat. Mais, s'agissant d'un contrat aussi complexe, cette volonté doit être entourée et guidée. Utiliser un modèle type, tel que ceux publiés par la Chancellerie, ne permet en aucune manière de remplir l'objectif poursuivi. En présence d'un acte dont le contenu s'avère aussi étendu que celui du mandat de protection future, qui peut aller de la gestion de l'ensemble du patrimoine à la protection de la personne, il paraît « utopique » de penser qu'un cadre tout prêt, aussi précis et détaillé soit-il, peut apporter les informations nécessaires à un consentement de qualité. En réalité, le mandat de protection future est « l'exemple parfait du contrat cousu main » , c'est-à-dire élaboré très attentivement et particulièrement individualisé, pour coller au plus près à la volonté du mandant et à la configuration de son patrimoine. Le recours à un professionnel, qui fournit une information précise et adaptée aux besoins de son client, apparaît dès lors indispensable. Cette intervention remplit ici un rôle de protection, en constituant la meilleure garantie possible d'un consentement libre et éclairé.
Reste à choisir entre l'acte authentique et l'acte contresigné de l'avocat, dans la mesure où le choix entre les deux formes de mandat n'est pas neutre. À l'analyse, on constate que le mandat notarié présente a minima deux avantages par rapport au mandat sous seing privé . D'une part, et contrairement au mandat notarié, le mandat sous seing privé n'acquiert date certaine que dans les conditions prévues à l'article 1328 du Code civil (C. civ., art. 492-1), ce qui implique concrètement qu'il doive être enregistré à la recette des impôts à cette fin . D'autre part et surtout, le mandat sous seing privé confère au mandataire des pouvoirs bien inférieurs à ceux résultant du mandat notarié , ce qui limite de facto la portée du mandat de protection future et peut donc aboutir à nuire à son efficacité, au détriment des intérêts du mandant. C'est là le signe tangible de la faveur du législateur pour la forme notariée, qui se traduit du reste dans les faits, la plupart des mandats étant rédigés par acte authentique .

L'objet

- Mesure de représentation. - La loi ne définit pas le mandat de protection future. On peut considérer qu'il s'agit d'un « mandat de représentation d'une personne physique, lorsque celle-ci, hors d'état de manifester sa volonté, ne peut plus pourvoir seule à ses intérêts, dans les actes de la vie civile, personnelle et patrimoniale » .

Élargir l'objet du mandat à l'assistance pour couvrir la zone grise ?

Une piste de réflexion sérieuse concernant le mandat de protection future conduirait, sous l'influence du rapport Caron-Déglise, à « prévoir la possibilité d'une assistance dans le mandat de protection future, à l'image de l'assistance proposée dans l'habilitation familiale » .
Aujourd'hui, on peut constater et regretter que la « zone grise » de vulnérabilité ne soit pas couverte par le mandat de protection future qui, après sa signature, n'est destiné à prendre effet, sans phase de transition, qu'une fois le mandant hors d'état de manifester sa volonté. La période qui s'écoule entre la lucidité et l'inaptitude fait l'objet aujourd'hui d'une organisation parcellaire, au mieux par la signature d'un mandat ordinaire général ou, à défaut, par le recours à des procurations ponctuelles. Pendant ce temps, le mandat de protection future signé est en sommeil, au point où, si le majeur éprouve le besoin d'être conseillé et contrôlé dans les actes de la vie civile, il devra alors être placé sous le régime de la curatelle. L'idée serait donc de permettre une protection graduée progressive et adaptée dans le cadre du seul mandat de protection future, en conférant un double visage à ce dernier : un mandat-assistance, dont les règles de la curatelle constitueraient le modèle, et un mandat-représentation, qui constitue aujourd'hui le droit positif, dont les règles sont influencées par celles de la tutelle. Ce mandat-assistance permettrait de couvrir des situations où le mandant commence à constater que ses facultés déclinent sans pour autant être dans l'impossibilité d'exprimer sa volonté, ou encore celles où le mandant, doté de ses pleines facultés intellectuelles, éprouve la nécessité, au regard de handicaps physiques lourds, d'être assisté. On songe notamment, mais pas seulement, au plurihandicap, caractérisé par l'association d'atteintes motrices et/ou sensorielles de même degré (sourds-aveugles, infirmes moteurs cérébraux sourds, etc.) qui rend particulièrement délicate l'expression de la volonté.
Dans cette optique, sans s'attarder sur la faculté de prévoir une application cumulative de ces deux types de mesures, source de difficultés inextricables à nos yeux, nous pourrions songer à une graduation chronologique, qui serait fonction de l'évolution de la perte d'autonomie du mandant. Le déclenchement à double détente du mandat se ferait sur la foi d'un certificat médical témoignant, dans un premier temps, du besoin d'assistance du mandant puis, dans un second temps, de la nécessité de sa représentation. Cette procédure de déclenchement, en deux temps serait confiée au notaire, qui rédigerait un acte valant prise d'effet du mandat-assistance de protection future puis, plus tard, lorsque les facultés du mandant sont davantage altérées, un acte valant prise d'effet du mandat-représentation de protection future. Bien évidemment, la mise en ?uvre d'une mesure de publicité adaptée et efficace, témoignant de l'activation du mandat-assistance puis de son glissement vers le mandat-représentation, serait indispensable.
Serait-il envisageable, à l'instar de certains modèles étrangers, de prévoir une prise d'effet immédiate du mandat ? Parce que le mandat de protection future présente l'originalité d'être une ?uvre d'anticipation établie à une époque sereine, en prévision de temps qui le seront moins, nous serions enclins à privilégier une prise d'effet différée. Il nous semble toutefois difficile d'exclure la faculté d'une signature tardive du mandat par un majeur dont les facultés physiques et cognitives commencent à être altérées au point d'éprouver le besoin d'être assisté sans délai. En effet, cette faculté serait en tout point conforme à la possibilité actuellement allouée au majeur en curatelle de pouvoir conclure un mandat de protection future avec l'assistance de son curateur.
L'élargissement du mandat de protection future à l'assistance est séduisant, mais le rapport Caron-Déglise, qui a insinué l'idée, ne détaille pas les implications liées à l'introduction de cette technique, à l'instar du législateur qui n'a pas tout réglementé pour l'assistance en habilitation familiale. S'agissant d'une mesure de protection conventionnelle, l'obstacle n'est pas insurmontable : il trouvera sa solution dans le contrat, lequel devra prévoir dans quels cas et pour quels actes le mandataire sera amené à assister le mandant. Plus compliqué, et sur le terrain de la théorie juridique, l'élargissement de l'objet du mandat de protection future supposera « de faire évoluer la conception française du mandat » , celui-ci étant traditionnellement considéré comme un acte de représentation uniquement.
- La coexistence de pouvoirs concurrents. - Bien qu'étant une mesure de représentation, il est très généralement admis que le mandat de protection future, de manière assez troublante, ne fait pas perdre sa capacité juridique au mandant (§ I). En revanche, parce qu'il s'agit précisément d'une mesure de représentation, ce mandat peut susciter, une fois déclenché, des situations de conflits avec d'autres mesures de protection (§ II).

L'objet et la capacité du mandant

- Une mesure qui n'est pas incapacitante. - Le mandat de protection future, une fois mis en ?uvre, fait-il perdre au mandant sa capacité juridique ? Si la question a soulevé - et soulève encore - de nombreux débats doctrinaux, on peut cependant affirmer, sans guère de risque de se tromper, qu'en prévoyant la sanction des actes que le mandant est susceptible de passer une fois le mandat activé, l'article 488 du Code civil a ainsi formellement exprimé le maintien de sa capacité juridique.
À vrai dire, la solution procède de la volonté claire du législateur , guidée par les engagements internationaux pris par la France , lesquels se caractérisent par le refus d'assimiler la vulnérabilité et la perte de capacité. Elle peut s'appuyer, au surplus, sur de solides arguments juridiques. On peut notamment rappeler, à son soutien, d'une part, qu'il paraît difficile d'admettre qu'une protection conventionnellement organisée puisse, à elle seule, créer une véritable incapacité et, d'autre part, que la loi a délibérément choisi d'utiliser, s'agissant d'une mesure d'anticipation extrajudiciaire de la vulnérabilité, la technique d'un mandat conventionnel, destiné à assurer la représentation du mandant, dont on sait, en vertu du droit commun, qu'il « laisse au représenté l'exercice de ses droits » (C. civ., art. 1159, al. 2).
Évacuant la thèse d'une capacité limitée au seul domaine où le mandat n'a pas donné au mandataire un pouvoir de représentation - la sphère d'intervention accordée au mandataire par le mandat -, le législateur, si l'on en croit la lecture littérale de l'article 488, permet une libre action du mandant, à l'exception de la révocation du mandat qu'il ne peut faire lui-même .
- Une mesure qui devrait être incapacitante. - La préservation de la capacité du mandant, en dépit de la mesure de représentation dont il fait l'objet, laisse dubitatif si l'on songe que le mandat de protection future ne prend effet précisément qu'en cas de survenance d'une « altération des facultés de nature à empêcher l'expression de la volonté » du mandant (C. civ., art. 425, al. 1er), ce qui devrait pleinement justifier un statut dérogatoire par rapport au droit commun des mandats . Faut-il souligner à cet égard que les conditions de mise en ?uvre du mandat sont similaires à celles requises pour l'ouverture d'une mesure de protection judiciaire, par nature incapacitante ? À vrai dire, on perçoit difficilement comment une personne dont les facultés sont altérées au point de devoir activer le mandat de protection future peut continuer à agir dans tous les actes de la vie civile, et notamment continuer à passer des actes graves sur son patrimoine. Tout ceci n'est guère raisonnable, ni guère rassurant.
Dans les faits, le mandant disposant d'un pouvoir rigoureusement concurrent de celui du mandataire, l'hypothèse d'un conflit de pouvoirs devient alors inévitable. Les deux cocontractants peuvent se retrouver à agir de la même manière, peut-être au même moment, sur les mêmes biens. Quel charivari ! Et quelle sécurité pour les tiers à l'acte comme pour ses rédacteurs ? Et quelle protection pour la personne vulnérable, dont on peut légitimement craindre, puisque ses facultés personnelles sont par définition altérées, qu'elle ne conclue des actes inconsidérés ? En définitive, et sous couvert de respecter les droits fondamentaux de la personne vulnérable, le législateur a consacré une règle qui se révèle concrètement bien moins protectrice pour lui qu'une incapacité pure et simple. L'abrogation de l'article 488 du Code civil, associée à la mise en place d'une mesure de publicité de la mise en ?uvre du mandat de protection future, à l'instar de toute mesure de protection incapacitante, permettrait « de sortir de la contradiction dans laquelle se trouve le mandat de protection future, tout à la fois dispositif de représentation de la personne vulnérable et mesure non attentatoire à sa capacité juridique » .
- Sanctions des actes accomplis par le mandant. - Puisqu'il conserve sa capacité juridique une fois le mandat activé, le mandant peut donc continuer à accomplir des actes juridiques. Néanmoins, ces actes demeurent fragiles dans la mesure où ils peuvent être, d'une part, rescindés pour lésion ou réduits en cas d'excès et, d'autre part, annulés sur le fondement de l'article 414-1 du Code civil, c'est-à-dire lorsque le mandant a été frappé d'un trouble mental au moment de la passation de l'acte (C. civ., art. 488, al. 1). Pour mettre en ?uvre la sanction, les tribunaux prennent « notamment en considération l'utilité ou l'inutilité de l'opération, l'importance ou la consistance du patrimoine de la personne protégée et la bonne ou mauvaise foi de ceux avec qui elle a contracté ». Si le texte prévoit que l'action n'appartient « qu'à la personne protégée et, après sa mort, à ses héritiers » (C. civ., art. 488, al. 2), le pouvoir de représentation générale dont il est doté, en même temps que l'intérêt du mandant militent en faveur d'une extension de l'action en critique au bénéfice du mandataire . Enfin, l'action est soumise à la prescription quinquennale, prévue à l'article 2224 du Code civil (C. civ., art. 488, al. 2).

L'étrange absence de période suspecte préalablement au déclenchement du mandat

Parce que les conditions de déclenchement du mandat de protection future sont analogues à celles susceptibles de justifier l'ouverture d'une mesure de protection judiciaire, on perçoit difficilement les raisons qui justifient aujourd'hui que les secondes soient précédées d'une période suspecte, au cours de laquelle les actes faits par le majeur ultérieurement protégé peuvent être remis en cause (C. civ., art. 464) , cependant que les premières y échappent. Tout comme l'ouverture d'une mesure de protection judiciaire, la mise à exécution d'un mandat de protection future laisse à penser que tout acte accompli quelque temps avant peut être suspecté, en ce qu'il comporte le risque d'exploitation par un tiers de la faiblesse de la personne ultérieurement protégée. Aussi conviendrait-il, de lege ferenda, d'étendre le domaine de l'action fondée sur la période suspecte au mandat de protection future , ce qui contribuerait, aux fins de cohérence, à conforter l'existence d'un socle de droit commun des mesures de protection, quelle que soit leur nature, judiciaire ou conventionnelle.
À cette fin, il faudrait bien évidemment admettre corrélativement, dans un souci de cohérence, et contrairement aux textes actuels, que le mandant perd sa capacité juridique une fois le mandat activé , car sinon pourquoi remettre en cause les actes signés antérieurement à cette activation si l'on considère qu'il peut théoriquement continuer lui-même à signer des actes ?

L'objet et la coexistence de pouvoirs concurrents

- Principe de subsidiarité. - Outre les interférences entre les parties, rendues possibles par le maintien de la capacité à agir dont bénéficie le mandant, le mandat de protection future peut susciter, une fois déclenché, des situations de concurrence avec des tiers, dont le risque est aujourd'hui accru par l'absence de publicité dont il fait l'objet.
La loi du 23 mars 2019 a redéfini la hiérarchie des mesures qui peuvent être prises lorsqu'une personne ne peut plus subvenir seule à ses besoins en raison d'une altération de ses facultés personnelles. Renforçant le principe de subsidiarité, l'article 428 du Code civil prévoit que le mandat de protection future devient la première mesure envisagée ; suivent ensuite les règles de droit commun de la représentation, telles que la procuration, les règles tirées du droit des régimes matrimoniaux et « une autre mesure de protection moins contraignante », à savoir l'habilitation familiale ; enfin, en ultime recours, viennent les mesures de protection judiciaire traditionnelles que sont la sauvegarde de justice, la curatelle et la tutelle .
C'est à l'aune de cette hiérarchie que doivent être appréciées les situations de concurrences possibles.
- Conflits entre mandats. - Le mandat de protection future n'est pas consenti pour aujourd'hui mais pour demain, lorsque le mandant sera hors d'état de manifester sa volonté. Aussi, nous le redirons , ce mandat de protection future peut-il être précédé utilement d'un mandat général, ce chaînage organisé permettant d'accompagner astucieusement « l'accomplissement d'une réalité progressive » . Le mandant peut également, avant la signature du mandat de protection future, avoir constitué des mandataires spéciaux. Bien sûr, si le mandataire de protection future était le mandataire de l'opération antérieure, aucune difficulté n'apparaît. Dans le cas contraire, cette pluralité de mandats peut alors naturellement susciter une concurrence de pouvoirs entre les différents mandataires. Doit-on considérer que le mandat de protection future révoque implicitement les mandats antérieurs ? Il n'existe pas, dans le droit du mandat, de forme obligée de révocation, laquelle peut être seulement implicite. Les dispositions de l'article 428 du Code civil invitent à privilégier le mandat de protection future et donc à considérer que sa mise en ?uvre constitue chez le mandant une volonté de résilier tacitement les précédents mandats souscrits dans le même champ.

Conseil de rédaction

Afin d'éviter les incohérences qui pourraient survenir par la superposition de plusieurs mandats, une précaution rédactionnelle de base consiste à stipuler dans le contrat que la prise d'effet du mandat de protection future emportera révocation de tous les mandats en cours
.

- Conflits avec les mesures du droit matrimonial. - Lorsque le mandant est marié, et en dépit de l'activation du mandat de protection future, son conjoint demeure son représentant légal, tant en vertu des pouvoirs qu'il tire du régime primaire impératif (C. civ., art. 217 et 219) que des règles applicables aux différents régimes matrimoniaux (C. civ., art. 1426, 1429 et 1432 en régime de communauté ; C. civ., art. 1540 en régime séparatiste). La mission qu'il reçoit l'habilite à agir, après décision du juge, lorsque l'autre époux est hors d'état de manifester sa volonté. La question se pose alors de savoir, lorsque le conjoint du mandant n'a pas été désigné comme mandataire de protection future, si les pouvoirs accordés par la loi au premier s'imposent au second, institué par contrat. Une réponse négative s'impose : elle résulte des dispositions de l'article 428 du Code civil, dans leur version née de la loi du 23 mars 2019, qui laissent clairement entendre que les dispositions du mandat de protection future prennent le pas sur les règles légales résultant du régime matrimonial. Sachant que les règles de la représentation entre époux supposent l'intervention du juge, la solution présente précisément l'utilité de dispenser le conjoint, dès lors qu'il est investi en qualité de mandataire, de devoir solliciter des autorisations judiciaires pour agir et préserver ainsi les intérêts du mandant. En revanche, lorsque le mandant aura fait le choix d'un tiers, le conjoint et le mandataire vont être contraints de cohabiter, avec les risques de discorde qui en résultent indubitablement. En cas de mésentente concernant la gestion des biens propres ou personnels du mandant, priorité doit être donnée au mandataire. En revanche, s'agissant des questions relatives aux biens communs ou indivis, les deux acteurs sont condamnés à s'entendre car ils disposent alors de pouvoirs concurrents. Si le conjoint veut passer outre un refus du mandataire qui lui paraît injustifié, il lui reste à exciper de l'intérêt de la famille pour être autorisé par le juge aux affaires familiales « à passer seul un acte » (C. civ., art. 217) ou, de manière plus drastique, à solliciter du juge des tutelles la révocation judiciaire du mandataire (C. civ., art. 483, 4o) .
- Conflits positifs de mesures de protection. - Le principe de subsidiarité s'oppose par principe à la mise en place d'une mesure de protection judiciaire en présence d'un mandat de protection future. À l'analyse, on constate toutefois que ce n'est pas tout à fait le cas.
Ce principe de subsidiarité des mesures judiciaires de protection par rapport au mandat de protection future n'est pas absolu puisqu'il ne joue désormais, depuis la loi du 23 mars 2019, qu'à l'égard des mandats mis en ?uvre. Certes, en présence d'un mandat de protection future signé mais non encore mis à exécution, le juge, requis pour organiser une curatelle ou une tutelle, peut rechercher si la protection juridique préalablement organisée par le mandant permet de protéger suffisamment ses intérêts personnels et patrimoniaux, auquel cas il peut renvoyer le mandataire désigné à mettre à exécution le mandat . Mais, le principe de subsidiarité ne déployant pas encore ses ailes, rien ne l'empêche de privilégier l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle, en contradiction manifeste avec la volonté du mandant. À notre sens, ce dernier risque doit être relativisé. En effet, les conditions de mise en ?uvre de ces différentes mesures étant similaires, tout laisse à penser que, sauf en cas de carence du mandataire , le mandat aura été activé et que le juge n'aura donc pas besoin d'ouvrir une curatelle ou une tutelle .
Cela étant, on touche là une autre incohérence du système. En prévoyant que la curatelle et la tutelle constituent une cause de révocation du mandat mis à exécution (C. civ., art. 483, 2o), le législateur laisse clairement entendre qu'une mesure de protection judiciaire peut être ouverte, en dépit de l'activation du mandat. L'atteinte au principe de subsidiarité est ici palpable et d'autant plus incompréhensible que la mise à l'écart du mandat s'exerce, en pareil cas, de plein droit. En réalité, le juge ne devrait pas pouvoir ouvrir une mesure de protection, sauf à avoir révoqué préalablement le mandat par une décision spécialement motivée (C. civ., art. 483, 4o) .
On sait que la loi permet au juge, confronté aux lacunes du mandat, de maintenir ce dernier tout en prononçant l'ouverture complémentaire d'une curatelle ou d'une tutelle (C. civ., art. 485, al. 2) . Si tel est le cas, même si certaines tensions ne sont pas à exclure, le cumul n'est pas censé générer de sérieuses difficultés dans la mesure où il est organisé par le juge : la protection du majeur se trouve répartie entre le mandataire, pour les actes prévus dans le mandat, et le curateur ou le tuteur, pour le reste.
Enfin, et dans une logique inversée, on sait que la loi permet à la personne en curatelle de conclure un mandat de protection future avec l'assistance du curateur (C. civ., art. 477, al. 2). Dans ce cas, il n'y a pas à proprement parler de cumul, dans la mesure où le mandat, une fois mis à exécution, est destiné à prendre naturellement le relais de la curatelle, au bénéfice peut-être de la même personne qui, ayant la confiance de la personne protégée, abandonnera la casquette de curateur pour coiffer celle de mandataire.

La publicité

- Une publicité nécessaire. - Indispensable au moment de son activation , la publicité du mandat de protection future s'avère également nécessaire dès sa rédaction.
Il s'agit notamment d'éviter qu'un notaire puisse être sollicité par un mandant qui a déjà signé un premier mandat dans un autre office notarial. Il est vrai que le risque d'un double mandat peut être aisément évacué si le notaire rédacteur prend soin dans le second, par le biais d'une clause de style, de révoquer le premier.
Il s'agit surtout, au travers la mesure de publicité, d'assurer l'effectivité du principe de subsidiarité des mesures judiciaires. La publicité des mandats signés est destinée à permettre au juge des tutelles saisi d'une requête afin d'ouvrir une mesure de protection de s'assurer de l'existence d'un tel mandat. À défaut, le risque est évident que le juge ignore l'existence du mandat conclu et prononce l'ouverture d'une mesure de protection judiciaire, en contrariété avec le choix pourtant exprimé par la personne à protéger .
- Une publicité prévue. - À l'origine, et alors que le notariat avait pourtant insisté sur la nécessité d'une telle publicité et proposé d'utiliser à cet effet le Fichier central des dispositions de dernières volontés, la loi n'avait mis en place aucune publicité permettant de connaître l'existence des mandats conclus. Au soutien de sa position, la Chancellerie a longtemps considéré qu'une « publicité automatique [apparaissait] incompatible avec la nature même du mandat de protection future qui présupposerait que l'on traite ce mandat comme un régime privant la personne concernée de sa capacité juridique. La mise en place de cette publicité serait par ailleurs vécue comme stigmatisante par les intéressés et pourrait ainsi constituer un frein au développement de cet instrument » . À vrai dire, l'argumentation factuelle apparaissait surprenante lorsque l'on sait que c'est précisément ce défaut de publicité, parmi d'autres raisons, qui a freiné et freine toujours le développement du mandat . Quant au motif de droit, sans doute le temps est-il venu pour les pouvoirs publics de sortir de la contradiction dans laquelle se trouve le mandat de protection future, tout à la fois dispositif de représentation de la personne vulnérable et mesure non attentatoire à sa capacité juridique.
Toujours est-il que cette lacune a été comblée par la loi du 28 décembre 2015 , qui a créé un nouvel article 477-1 du Code civil, aux termes duquel ce mandat « est publié par une inscription sur un registre spécial dont les modalités et l'accès sont réglés par décret en Conseil d'État ». À ce jour, on peut toutefois constater - et déplorer - que le décret annoncé n'ait jamais été publié et l'on ne peut, à l'instar du rapport Caron-Déglise, qu'espérer la mise en place prochaine d'un « répertoire civil unique, national et dématérialisé assurant la publicité de toutes les mesures de protection judiciaire et des dispositions anticipées, accessibles aux juridictions, aux notaires et aux avocats » .
- Une publicité confiée au notariat ? - Il convient, une nouvelle fois, de souligner que la profession notariale propose, depuis de nombreuses années, d'assurer la publicité du mandat de protection future par l'instauration de registres dédiés. C'est une option qui a déjà été choisie par certains pays en Europe, comme l'Allemagne, la Belgique ou encore l'Autriche. Il est vrai que les notaires ont l'expérience depuis longtemps des fichiers et disposent des outils nécessaires pour assurer une publicité dématérialisée et généralisée des mandats de protection future. Ce sont des officiers publics qui pourraient sans difficulté assurer une telle mission, ce qui éviterait de faire reposer sur la collectivité publique une charge susceptible d'alourdir le travail des greffes, si la tenue du registre leur était confiée, et de répondre aux objectifs des récentes réformes visant à recentrer les juridictions et leurs services sur leurs domaines propres de compétence, à savoir les activités juridictionnelles.

Proposition du Conseil supérieur du notariat relative à la création, la tenue et le fonctionnement par la profession notariale d'un registre des mandats de protection future

La loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement a inséré après l'article 477 du Code civil relatif au mandat de protection future un nouvel article 477-1 qui prévoit que : « Le mandat de protection future est publié par une inscription sur un registre spécial dont les modalités et l'accès sont réglés par décret en Conseil d'État ».
La profession notariale propose d'apporter son expertise dans la création, la tenue et le fonctionnement de ce registre.
I. L'enregistrement
A. Quel mandat ?
Pour assurer la pleine efficacité du registre, il devrait enregistrer tous les mandats de protection future conclus, quelle que soit leur forme.
B. La notion d'enregistrement
L'enregistrement est une mesure de publicité (et non de validité ou de prise d'effet de l'acte) et consiste en l'inscription d'un mandat de protection future conclu (et non ayant pris effet) sur le registre central et automatisé.
C. La mesure d'enregistrement du mandat
Le registre devrait permettre l'inscription :
  • de la convention initiale ;
  • des modifications apportées à la convention ;
  • de la révocation du mandat par le mandant ;
  • de la renonciation du mandataire.
NB : Il s'agit de l'inscription de l'existence de l'acte (et des événements ultérieurs qui le modifient ou y mettent fin) et non de son contenu.
D. L'enregistrement du mandat par le notaire
Le mandat serait enregistré par :
  • le notaire instrumentaire du mandat de protection future. L'enregistrement pourrait alors avoir lieu sans délai après la conclusion de l'acte notarié.En cas de modification du mandat : si le notaire qui reçoit l'acte modificatif n'est pas celui qui a rédigé le mandat initial, la modification devrait être notifiée à ce dernier afin qu'il procède à l'enregistrement de l'acte modifié ;
  • un notaire quel qu'il soit, en cas de mandat sous seing privé, sur demande du mandant uniquement. La forme de cette requête doit être fixée et les mentions qui y sont incluses doivent être déterminées.
À ce sujet, trois propositions alternatives peuvent être faites :
  • la première est d'exiger, pour accomplir la formalité de l'enregistrement, que le mandat sous seing privé (et les modifications, révocation et renonciation) soit déposé au rang des minutes d'un notaire (dépôt simple).L'avantage est que le notaire assurera la conservation du mandat (ce qui évitera les risques de perte ou de destruction) ainsi que son enregistrement. Cette formalité de dépôt ne serait pas une condition de validité de l'acte ou de prise d'effet, mais seulement une modalité de conservation,
  • la deuxième est que le mandant requière du notaire de son choix d'enregistrer le mandat conclu (et les modifications, révocation et renonciation), sans procéder à une formalité de dépôt.Pour ce faire, le mandant adresserait au notaire un formulaire comprenant les mentions suivantes :
  • la troisième est que le mandant adresse directement le seul formulaire susvisé à l'Association pour le développement du service notarial (ADSN) aux fins d'enregistrer directement le mandat conclu (et les modifications, révocation et renonciation).
C'est notamment le cas en Allemagne où le registre central et automatisé peut être saisi en ligne de la demande du mandant aux fins d'enregistrement.
E. Les mentions au registre
Le registre devrait comporter au minimum les mentions suivantes :
  • l'identification du notaire procédant à l'enregistrement (informations obtenues par le biais de sa clé Real) ou au moins de l'étude notariale (par le numéro CRPCEN) ;
  • la date de conclusion de l'acte ;
  • le numéro d'enregistrement attribué à l'acte (et cela pour permettre un meilleur suivi du mandat notamment en cas de modifications ou de révocation/renonciation) ;
  • la date de l'enregistrement de l'acte sur le registre ;
  • l'identité du mandant (nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile) en cas de mandat pour soi-même ;
  • l'identité du mandant et du bénéficiaire du mandat (nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile) en cas de mandat pour autrui ;
  • l'identité du mandataire (nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile) et du ou des mandataires subsidiaires en cas de désignation ;
  • s'il s'agit de l'enregistrement de la convention initiale, d'une convention modificative ou d'une révocation/renonciation (la date de ces événements devra à chaque fois être mentionnée).
NB : Pour des raisons liées au respect de la vie privée et à la confidentialité des informations, seule l'existence du mandat (et des événements ultérieurs qui le modifient ou y mettent fin) est enregistrée, et non son contenu.
Il est ainsi évident que le registre ne doit enregistrer aucune information sur les dispositions prises par le mandant, qu'elles soient patrimoniales ou extrapatrimoniales (comme les actes à caractère personnel, la nature des soins à apporter ou d'éventuelles dispositions liées à la fin de vie, etc.).
F. Le coût de l'inscription
À l'instar des registres mis en place à l'étranger, il conviendrait que le coût de l'inscription soit minime, entre 10 ? et 15 ?.
G. Un registre centralisé et automatisé
Le registre devrait être centralisé et automatisé.
H. Un registre à caractère confidentiel
Il est nécessaire de prévoir que les notaires sont seuls habilités à enregistrer, conserver, modifier ou traiter les informations relatives aux mandats conclus, et ce afin de préserver l'intimité de la vie privée des parties à l'acte.
En ce sens, il faudrait que toute interconnexion du registre avec d'autres fichiers soit interdite.
Enfin, il faut prévoir que le droit d'accès et de rectification prévu aux articles 39 et 40 de la loi du 6 janvier 1978 pourra s'exercer auprès de l'office notarial ayant enregistré le mandat.
I. Preuve de l'enregistrement
Il serait opportun de prévoir que le notaire procédant à l'enregistrement remette au mandant un récépissé d'enregistrement.
Ce récépissé serait remis ou adressé à l'occasion de l'enregistrement de la convention initiale, de la convention modificative, de la révocation et de la renonciation du mandataire.
Reste à déterminer si cette formalité doit se faire sans délai ou avec un délai.
II. L'interrogation du registre
A. Les personnes habilitées à interroger le registre
Le registre ne devrait être consulté que par les personnes suivantes :
  • le juge des tutelles et le greffe du tribunal d'instance compétent ;
  • le procureur de la République ;
  • un notaire.
S'agissant du notaire, l'interrogation du registre lui permettra de savoir si un mandat a déjà été rédigé dans le passé, et s'il s'agit uniquement pour lui d'y apporter une modification. L'interrogation lui permettra également de savoir si un mandat a été révoqué dans l'hypothèse où il n'a pas instrumenté la convention initiale.
En définitive, il faut prendre ici en considération le fait que le notaire consulté pour modifier ou établir, après révocation, un nouveau mandat, n'est pas le même que le notaire instrumentaire de la convention initiale.
Pour information, en Belgique, le registre peut être consulté par le juge, le procureur et le notaire, mais aussi par le mandant.
B. Le coût de l'interrogation
L'interrogation du registre serait gratuite.
C. La forme de l'interrogation
Reste à déterminer sous quelle forme l'interrogation sera faite lorsqu'elle émanera d'un magistrat (courrier simple, télécopie, voie électronique?).
Le mieux serait que l'interrogation par les magistrats se fasse par le biais :
  • soit d'une interconnexion entre le réseau Real et le réseau Justice, sous condition que la Commission nationale de l'informatique et des libertés l'autorise ;
  • soit d'un portail de consultation internet avec une liste de personnes ayant un accès réservé (accès aux greffiers, par login/mot de passe). Ce serait le mode d'interrogation le moins sécurisé quant à l'échange des données.
La demande d'interrogation devra comporter au moins les informations suivantes :
  • le nom et la fonction du demandeur ;
  • la date de la demande d'interrogation ;
  • l'identité du mandant (nom, prénoms, date et lieu de naissance et domicile).