Destination au sens du Code de l'urbanisme versus usage au sens du Code de l'environnement

Destination au sens du Code de l'urbanisme versus usage au sens du Code de l'environnement

– Indépendance des législations. – Comme nous l'avons rappelé en propos introductif (V. supra, n° ), le principe d'indépendance des législations conduit à ce que la notion de destination – ou d'usage – ait une acception différente selon le régime sous lequel on se place.
Cela peut cependant soulever des interrogations lorsqu'un porteur de projet doit requérir des autorisations administratives relevant de régimes juridiques différents.
Un exemple récent est celui de la question de la compatibilité entre la notion de destination au sens du Code de l'urbanisme et celle d'usage au sens du Code de l'environnement.
– Notion d'usage en droit de l'environnement. – L'article L. 556-1-A du Code de l'environnement, créé par l'article 223 de la loi dite « Climat et Résilience » du 22 août 2021, définit l'usage au sens du droit de l'environnement comme « la fonction ou la ou les activités ayant cours ou envisagées pour un terrain ou un ensemble de terrains donnés, le sol de ces terrains ou les constructions et installations qui y sont implantées ».
– Liste des usages. – L'article D. 556-1, A, I du Code de l'environnement, introduit par le décret du 19 décembre 2022, liste les différents types d'usages possibles :
  • usage industriel, pouvant comprendre un bâti (y compris des entrepôts), des infrastructures industrielles et, le cas échéant, des aménagements accessoires, tels que des bureaux ou des places de stationnement associés à l'activité industrielle ;
  • usage tertiaire, correspondant notamment aux commerces, aux activités de service, aux activités d'artisanat ou aux bureaux ;
  • usage résidentiel, comprenant un habitat individuel ou collectif, et, le cas échéant, des jardins pouvant être destinés à la production non commerciale de denrées alimentaires d'origine animale ou végétale ;
  • usage récréatif de plein air, correspondant notamment aux parcs, aux aires de jeux, aux zones de pêche récréative ou de baignade ;
  • usage agricole, correspondant à la production commerciale (notamment au sein d'exploitations agricoles) et non commerciale (notamment au sein de jardins familiaux ou de jardins partagés) d'aliments d'origine animale ou végétale, à l'exception des activités sans relation directe avec le sol ;
  • usage d'accueil de populations sensibles, correspondant aux établissements accueillant des enfants et des adolescents de façon non occasionnelle, aux établissements de santé et établissements et services sociaux et médico-sociaux, et aux éventuels aménagements accessoires, tels que les aires de jeux et espaces verts intégrés dans ces établissements ;
  • usage de renaturation, impliquant une désartificialisation ou des opérations de restauration ou d'amélioration de la fonctionnalité des sols, notamment des opérations de désimperméabilisation, à des fins de développement d'habitats pour les écosystèmes ;
  • autre usage (à préciser au cas par cas).
Ce texte est entré en vigueur le 1er janvier 2023.
– Modalités d'application. – L'article D. 556-1 du Code de l'environnement précise également les modalités d'application de la typologie des usages, notamment leur prise en compte :
  • dans le cadre du dossier de demande d'autorisation en application des articles D. 181-15-2 ou R. 512-46-4 ;
  • dans le cadre de la détermination de l'usage futur lors des cessations d'activité encadrées par les articles R. 512-39-2, R. 512-46-26 ou R. 512-66-1 ;
  • dans le cadre de l'usage défini par un tiers demandeur en application de l'article R. 512-76 ;
  • dans le cadre des évaluations de demandes de permis de construire ou d'aménager en application des articles L. 556-1 et L. 556-2 du Code de l'environnement.
– Détermination du changement d'usage. – Cette législation n'a vocation à s'appliquer qu'en cas de changement d'usage. Constituent des changements d'usage au sens du décret les situations suivantes, nouvellement visées à l'article R. 556-1, B du Code de l'environnement :
  • lorsque l'usage projeté est différent de celui antérieurement défini lors de la demande d'autorisation ou d'enregistrement d'une ICPE ou lors de la réhabilitation du terrain par un tiers demandeur ;
  • s'agissant des projets comportant plusieurs usages, lorsque l'un au moins des usages projetés est différent de l'usage antérieur, défini lors de l'une des phases susmentionnées ;
  • lorsque l'usage projeté est identique à l'usage antérieur, mais modifie le schéma conceptuel par rapport à celui utilisé dans le mémoire de réhabilitation ou dans le mémoire présentant l'état des sols et des eaux souterraines et les mesures de gestion de la pollution ;
  • lorsque l'usage projeté et l'usage antérieur relèvent d'un « autre usage », au sens du 8° de l'article D. 556-1, A, mais sont différents l'un de l'autre.
– Superposition usage et destination. – La définition des usages est certes louable ; cependant, les différences qui peuvent exister avec la définition des destinations au sens du Code de l'urbanisme nuisent à la lisibilité des textes.
On peut par exemple relever que les commerces et les bureaux relèvent de la même catégorie au sens du Code de l'environnement, mais de catégories différentes au sens du Code de l'urbanisme.
Autrement dit, en cas de changement d'usage, une autorisation pourrait être nécessaire dans un cas mais pas dans l'autre.
Il eût été préférable d'harmoniser autant que possible ces destinations.
En toute hypothèse, le notaire se devra d'être vigilant dans la rédaction des clauses de ses actes.