CGV – CGU

PARTIE II – Du développement à la consolidation : la maturité de la société
Titre 1 – Les ressources et schémas pour développer l’entreprise
Sous-titre 3 – L’investissement en capital, gage de stabilité et de développement à long terme

Chapitre II – Quels droits sociaux émettre, et comment les émettre ?

20232 Une fois prise la décision d’ouvrir le capital de la société au profit d’investisseurs, se posera la question pour les associés d’opérer le bon choix du type des droits sociaux à émettre.
Ce choix sera éminemment stratégique. Les droits sociaux émis vont avoir des conséquences très importantes sur le devenir de la société au travers de sa gouvernance et sur le plan financier entre associés (partage des bénéfices et de la valeur). Le choix sera donc opéré en fonction des objectifs des associés en place, et des négociations avec les investisseurs.
Nous scinderons notre propos en fonction de la nature des droits sociaux émis, parts sociales (Section I) ou valeurs mobilières (Section II), avant d’exposer les techniques civiles pouvant enrichir cette boîte à outils sociétaire (Section III).

Section I – Les parts sociales offrent des libertés insoupçonnées, que le notaire doit exploiter

20233 – Peu de libertés statutaires quant aux droits politiques. – Dans l’hypothèse où la société prend par exemple la forme d’une SARL, son capital est divisé en parts sociales. Les possibilités sont donc très limitées puisque ce type de structure ne peut émettre que des parts sociales ordinaires, ou des obligations dans les conditions détaillées ci-dessus.
Comme nous l’avons indiqué dans nos précédents développements, il n’est pas possible d’émettre des parts sociales disposant de droits politiques particuliers. La gouvernance de la société sera donc réglée, dans les limites exposées plus haut324, par le champ des pouvoirs du mandataire social, et le champ et les règles de majorité fixés pour les décisions collectives.
20234 – Une réelle ingénierie ouverte sur le plan des droits financiers. – En revanche, la réglementation n’interdit pas de moduler les droits pécuniaires des associés, en fonction du cumul, ou non, de la qualité d’associé avec celle de mandataire social.
La SARL pourra tout à fait répondre à des besoins particuliers d’associés, ou d’investisseurs, sur le plan financier.
À la différence des sociétés par actions, dont les modalités seront étudiées ci-dessous, cette modulation des droits pécuniaires est très simple à mettre en œuvre et résulte d’une rédaction appropriée des statuts. Cela permettra d’affirmer que le réflexe de création de société, ou de transformation en SAS pour accueillir des investisseurs est parfaitement injustifié.
Dans la limite des clauses léonines, il serait possible de prévoir :

une distorsion entre la quotité de capital détenu et le degré de partage des bénéfices ou des pertes ;

un dividende préciputaire pour un ou plusieurs associés (prélèvement prioritaire d’un pourcentage ou d’un montant de résultat, avant répartition du solde, proportionnellement à la détention en capital) ;

un dividende spécial, représentant tout ou partie d’une plus-value de cession d’un actif social particulier et précisément désigné (fonds de commerce, marque, brevet, participation dans une autre société, actif immobilier, etc.) ;

une rémunération forfaitaire grâce à laquelle un associé garantirait à d’autres, en fonction de paramètres aléatoires et indépendants de leur volonté325, une rémunération de leur investissement par le versement de sommes, si la société n’est pas elle-même en mesure de distribuer des dividendes ;

une modulation du droit aux bénéfices pour l’associé gérant en fonction de critères financiers spécifiques (plancher de produits d’exploitation, plafond de charges d’exploitation, etc.).

20235 – Oui, « pacter » des parts sociales est utile, voire nécessaire. – Comme nous l’avons vu ci-dessus, les parts sociales sont des actifs incorporels que détient l’associé et qui peuvent faire l’objet d’un pacte d’associés. Plus rare dans les SARL, dont les relations entre associés sont largement déjà codifiées, il n’en demeure pas moins que les parts peuvent faire l’objet de contrats extrastatutaires permettant d’anticiper des situations futures, et potentiellement délicates.
Ces pactes pourront conventionnellement conférer plus de droits politiques à certains associés326, et encadrer la détention du capital de manière moins universelle que les statuts sociaux, et donc de manière plus précise. Cela semble par ailleurs tout à fait adapté pour une PME au sein de laquelle :

la stabilité du capital est très importante (clause d’inaliénabilité conventionnelle) ;

La détention du capital est consubstantielle du travail au sein de la structure(promesses unilatérales de cession en cas de fin d’un contrat de travail ou d’un mandat social) ;

la liquidité des parts sociales est moins importante (promesses unilatérales d’achat dans des délais précis et successifs permettant aux associés minoritaires de sortir de la société et de réaliser leur participation) ;

la cession de parts par le majoritaire reste une hypothèse classique (droit de sortie conjointe proportionnelle ou totale, clause de sortie forcée).

Il est conseillé de se préoccuper de ces sujets au stade de la création de la société, ou en cas d’accueil de nouveaux associés, même, voire surtout si ces associés ont des liens d’affection particuliers (familiaux, amicaux). La prévention et la pacification des relations par la rédaction d’un pacte permettront de prévoir les hypothèses conflictuelles ; lesquelles pourront entacher bien plus qu’une « simple » relation d’associés.
Nous renvoyons aux développements ci-dessous concernant le détail des dispositions pouvant être incluses dans un tel contrat.

Section II – Les valeurs mobilières, mode d’expression sans limites de l’ingénierie notariale

20236 Les valeurs mobilières sont les droits sociaux émis par les sociétés par actions (SA, SAS, SCA, SE). Face à un besoin de personnalisation des droits et obligations supportés par ces valeurs mobilières, le juriste disposera d’une liberté de choix (Sous-section I) pour déterminer si les actions dites « ordinaires » seront suffisantes (Sous-section II), ou s’il faut recourir aux actions de préférence (Sous-section III).
20237

Sous-section II – Des actions pas si ordinaires que cela
20238 – Rattacher les droits politiques à l’identité de l’associé, une stratégie efficace. – Sur le plan des droits politiques, nous serons amenés à opérer une distinction particulière concernant les SAS. Les droits politiques concernent principalement l’exercice des droits de vote (droit de vote simple, multiple, etc.).
Mais les droits politiques ne concernent pas seulement les droits de vote en tant que tels, car il peut aussi s’agir de droits politiques « fractionnés » :

de siéger au sein d’un organe de gouvernance particulier, de nommer un membre d’un organe de gouvernance ;

de prendre une décision sur une série de sujets ou sur un sujet précis (nomination, rémunération, opérations juridiques ou financières) ;

ou de disposer d’un droit de veto pour toutes ou certaines décisions329.

Un sujet fondamental sera de savoir s’il s’agit de droits politiques attachés à l’action qui est émise par la société, ou de droits politiques attachés au détenteur de cette action. L’article L. 227-9 du Code de commerce prévoit que les statuts organisent librement des conditions d’adoption des décisions collectives.
À l’exception de la suppression totale des droits de vote qui, par l’effet des dispositions générales de l’article 1844 du Code civil, ne pourrait être mise en œuvre que dans le cadre des dispositions spéciales relatives aux ADP, les statuts de la SAS peuvent, selon une doctrine autorisée330, et renforcée par les présentes, librement prévoir des aménagements conventionnels des conditions d’adoption des décisions collectives.
Cette liberté statutaire permet la mise en œuvre de droits politiques différenciés parmi les actions ordinaires émises par la SAS sans création ni procédure spécifique d’émission d’ADP. Dès lors que l’objet réside exclusivement dans des droits de nature politique331, et que ces derniers ne sont pas l’attribut de l’action mais du détenteur de cette dernière332, l’ADP n’est ni obligatoire ni souhaitable.
Cette possibilité est très singulière dans la mesure où le droit de vote apparaît comme un « droit fondamental » de l’associé, et il n’existe que très peu de situations dans lesquelles il peut être autant aménagé.
En réalité, il faut souligner que le droit fondamental de l’associé est précisément de pouvoir « participer » aux décisions collectives, c’est-à-dire a minima, y être convoqué et pouvoir être présent et s’exprimer, quand bien même il ne disposerait pas de droit de vote pour une quelconque des résolutions soumises au vote.
Sous-section III – L’action de préférence, loin de sa supposée complexité
20239 – Le cadre. – Très prisées des investisseurs financiers, les actions de préférence333, prévues par les articles L. 228-11 et suivants du Code de commerce, désignent une catégorie d’actions offrant à leurs détenteurs des prérogatives distinctes de celles associées aux actions ordinaires. Ces actions peuvent jouir de tout type d’avantages : pécuniaires, politiques, d’information. Elles peuvent être temporaires ou permanentes, liées ou non à la qualité de leur détenteur.
20240 – Rattacher des droits politiques ou financiers à l’action émise, c’est concevoir une stratégie capitalistique. – Dans l’hypothèse où un droit particulier « supra-politique » sera encapsulé dans une action émise par la société, sans dépendance de l’identité de l’associé qui en est le détenteur, l’action en question sera véritablement qualifiée d’action de préférence (ADP).
La première conséquence, logique, est que les droits spéciaux attachés à l’action seront également transmis, avec elle, dans l’hypothèse où le souscripteur la cède. C’est une conséquence qui doit faire l’objet d’un haut niveau d’anticipation puisqu’elle pourrait avoir pour effet de déstabiliser totalement les équilibres financiers ou politiques entre associés.
Par exemple, un associé pourrait devenir majoritaire grâce à l’achat d’une seule ADP à droits de vote multiple, alors qu’il serait resté minoritaire si cette action acquise n’était qu’ordinaire.
La seconde conséquence est l’instauration, dans cette circonstance, d’une procédure légale spécifique, puisque les détenteurs, multiples ou successifs d’ADP ne seront plus identifiés directement dans les statuts, à l’instar de ceux visés ci-dessus, détenteurs de droits politiques attachés à leur identité.
20241 – Des droits et obligations qui permettent une ingénierie sans limites. – Les ADP constituent véritablement un terreau idéal à l’expression de l’ingénierie. Elles peuvent être assorties d’un nombre illimité de droits ou obligations, de sorte qu’il serait illusoire de vouloir tous les inventorier.
Afin tout de même d’exposer génériquement les possibilités ouvertes au notaire pour conseiller au mieux la société émettrice, ses associés et investisseurs, il sera possible de catégoriser ces particularités, qui relèvent usuellement d’un pacte d’associés et qui présentent de facto un niveau d’exécution notoirement supérieure334.
20242 – Des droits politiques quasi entièrement paramétrables. – Toute la palette évoquée ci-dessus pourra bien entendu être mise en œuvre. Les ADP pourront conférer des droits de vote multiples, des droits de vote « fractionnés » visant certaines décisions. Au surplus, les ADP pourront avoir pour conséquence de supprimer purement et simplement le droit de vote attaché à une action, à la différence des actions ordinaires. Cependant, l’article L. 228-11 du Code de commerce prévoit la limite suivante : « Les actions de préférence sans droit de vote ne peuvent représenter plus de la moitié du capital social, et dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, plus du quart du capital social ». En outre, cette suppression de droit de vote ne peut priver l’associé de son droit à participer aux décisions tel que rappelé ci-dessus.
Il pourra aussi s’agir de droits, toujours non pécuniaires, mais que l’on peut qualifier d’« extrapolitiques » :

information renforcée au-delà de la documentation délivrée au stade des décisions collectives ;

droit de déclencher un audit de la société ;

droit spécifique concernant la gouvernance : en être partie prenante, disposer de la faculté de procéder – ou de s’opposer – à la nomination d’un dirigeant ou d’un membre d’un organe de gouvernance ;

droit à autoriser – ou de veto – pour certaines décisions excédant les pouvoirs statutaires du mandataire social ;

participation / autorisation ou blocage d’une opération qui ne serait pas du ressort des décisions collectives des associés.

20243 – Des droits financiers totalement libres. – À l’instar des droits financiers particuliers que nous avons décrits ci-dessus concernant les parts sociales335, les ADP pourront prévoir une multitude de dispositions (partage inégal des dividendes, dividendes préciputaires ou progressifs avec seuils de déclenchement, modulation du droit aux bénéfices en fonction de paramètres intrinsèques à l’exploitation, etc.).
Nous rappellerons toutefois quelques points d’attention à garder en mémoire lors de la phase de conseils aux associés et investisseurs sur la stratégie d’émission à mettre en place :

il semble tout à fait possible de supprimer totalement le droit aux dividendes aux titulaires d’ADP. Pour autant, il ne paraît pas concevable de réduire à néant les droitsfinanciers d’un associé, fût-il titulaire d’ADP, sur la base des dispositions rappelées ci-dessus portant prohibition des clauses léonines.

L’Association nationale des sociétés par actions (Ansa) a récemment admis que les ADP ne donnent pas droit à la distribution de dividendes au cours de la vie sociale, « mais seulement au partage du boni de liquidation au terme de la société »336. La question sous-jacente sera celle du solde du boni de liquidation car si la société a procédé, par exemple, à une importante réduction de son capital337, le boni pourrait avoir été amputé d’une grande partie de son montant ;

l’article L. 232-15 du Code de commerce proscrit la stipulation d’un intérêt fixe ou intercalaire au profit des associés. Cet article empêche donc la société de verser une rémunération fixe à ses associés, sans constatation de la présence d’un résultat et de la distribution de celui-ci.

Cependant, rien n’interdit que des associés, dans le cadre d’un accord extrastatutaire, puissent s’engager à de tels versements envers d’autres. Cela aboutit à un résultat assez similaire, à l’exception de la qualification du versement qui, dans ce second cas, peut être considéré comme indemnitaire du fait de la non-distribution par la société ;

l’article L. 228-18 du Code de commerce permet aux détenteurs d’ADP de se voir verser un dividende en titres de capital. Ce versement peut avoir lieu au moyen d’actions ordinaires ou au moyen d’ADP, dans l’hypothèse où la société disposerait de ses propres titres en autodétention. Cette faculté présente un grand intérêt pour les associés dans la mesure où elle évite une sortie de trésorerie trop importante pour la société distributrice.

Cependant, elle génère mécaniquement une dilution338, car jusqu’alors la société bénéficiait des droits attachés aux actions. Postérieurement à leur attribution sous forme de dividendes, ces droits seront exercés par les associés bénéficiaires de la distribution ;

l’article L. 228-13 du Code de commerce prévoit que « les droits particuliers [attachés aux ADP] peuvent être exercés dans la société qui possède directement ou indirectement plus de la moitié du capital de l’émettrice, ou dans la société dont l’émettrice possède directement ou indirectement plus de la moitié du capital ». Cette possibilité permet alors de conférer des droits pécuniaires et non pécuniaires aux titulaires d’ADP, et de voir exercer ces derniers dans une autre société que l’émettrice desdites ADP.

20244 – L’ADP, reflet d’une autre société, l’action « traçante ». – Sur le plan des droits pécuniaires, il s’agit tout particulièrement des actions dites « traçantes », ou « reflet », qui permettent à l’associé d’être directement intéressé aux résultats et aux dividendes servis par une filiale du groupe de sociétés339, ou de la société tête de groupe (holding) s’il est associé d’une filiale émettrice de l’ADP340. Les droits non pécuniaires peuvent consister à intervenir dans la gouvernance d’une filiale, ou du holding, en conférant des droitsd’information ou des droits sur ses organes de gouvernance (y siéger, désigner un de ses membres, contrôler leurs décisions), tels que rappelés ci-dessus341.
Le concept d’actions « traçantes » est apparu en 1984 à l’occasion de la prise de contrôle de la société Electronic Data Services par General Motors. La mise en place de telles actions permettait au cédant de s’assurer un paiement indexé sur les performances futures de la société. L’originalité de ces titres résidait dans la détermination de l’assiette du dividende. En effet, les droits financiers auxquels les actions « traçantes » donnaient accès reflétaient uniquement les performances financières d’une unité spécifique de la société cédée et non, comme il est d’usage, les performances financières globales de la société cible.
Malgré cela, les actions « traçantes » n’ont jamais connu un véritable développement en droit français342.
20245 – L’ADP, support d’obligations particulières. – Au-delà des droits « classiques » exposés ci-dessus, les actions de préférence vont pouvoir subir des obligations particulières, ou être exonérées de celles-ci. Ces obligations peuvent être de natures très différentes : clause d’agrément, droit de préférence, inaliénabilité, exclusion, sortie conjointe ou forcée.
Ces dispositions seront détaillées ci-dessous. Mais le lecteur comprendra immédiatement qu’à partir de l’instant où ce type de dispositions, restrictives du libre exercice du droit de propriété, peuvent s’appliquer à une catégorie spécifique de titres343, l’utilité, purement juridique, de conclure un pacte d’associés peut largement décroître344.
20246 – Une possibilité de conversion, à titre de récompense ou de sanction. – Les actions ordinaires peuvent faire l’objet d’une conversion en ADP. Les ADP peuvent être converties en actions ordinaires, ou en ADP d’une autre catégorie.
La conversion va aboutir à modifier profondément non seulement les capacités du titulaire à intervenir dans la vie sociale, ou à percevoir les fruits ou la valeur de ses titres, mais aussi à perturber totalement l’équilibre financier et politique entre associés. À ces titres, il peut autant s’agir d’une récompense que d’une sanction pour l’associé concerné… ou les autres : la « préférence » de l’ADP n’est pas toujours celle de son titulaire !
Cette mutabilité des droits, voire de la nature même des actions, doit évidemment être strictement encadrée. Les statuts de la société, ou les dispositions d’émission s’il s’agit d’ADP, devront précisément définir à – et dans – quelles conditions cette conversion (automatique, ou résultant d’un acte volontaire ou d’une lacune de l’associé) pourra intervenir.
Pour illustrer ce propos, il est possible d’imaginer les situations suivantes :

un dirigeant titulaire d’ADP à dividende préciputaire, dont le mandat s’achève, et qui voit ses ADP converties en actions ordinaires ;

un investisseur titulaire d’ADP à droit de vote multiple lui donnant une minorité de blocage, qui sont converties en actions ordinaires s’il ne souscrit pas à des augmentations de capital futures ;

un actionnaire minoritaire qui dispose d’actions ordinaires, lesquelles sont converties en ADP, s’il dépasse un certain seuil de participation qui lui conférerait un droit de veto, en vue de plafonner ses droits de vote en deçà du droit de veto ;

un cadre qui dispose d’ADP l’intéressant au résultat du holding tant qu’il siège à la gouvernance de celui-ci, et qui sont converties en actions ordinaires s’il quitte ce siège.

20247 – Une procédure d’émission d’ADP étroitement surveillée. – Eu égard aux conséquences colossales que peuvent revêtir les droits attachés aux ADP, sur la société émettrice comme ses filiales ou son holding, que cela soit sur le plan pécuniaire ou non, la procédure d’émission va être particulièrement encadrée. Cet encadrement a naturellement pour objectif d’informer et de préserver les droits des autres titulaires d’actions (ordinaires ou ADP) face à l’arrivée de ces nouvelles actions ou actionnaires titulaires de droits différents.
Les ADP peuvent être émises lors de la création de la société comme à l’occasion d’une augmentation de capital, ou par conversion d’actions ordinaires en ADP345. En outre, en cas d’émission d’ADP qui aurait pour conséquence de modifier les droits attachés à une catégorie d’actions, une décision collective des porteurs d’ADP sera nécessaire puisque l’existence ou la consistance de leurs droits pourrait être largement atteinte pour cette nouvelle émission.
Selon la doctrine346, lorsque l’émission d’ADP est réservée à une ou plusieurs personnes nommément désignées, celle-ci suivra non pas la réglementation relative aux émissions d’ADP, mais celle relative aux avantages particuliers qui est sensiblement différente347. La chronologie des contraintes juridiques pourra aussi être différente s’il s’agit d’une catégorie de personnes identifiée précisément par la décision collective des associés.
Lorsque la société émet des ADP lors de sa création, ou si elle n’est pas dotée de commissaires aux comptes, un commissaire doit être nommé à l’unanimité (des fondateurs ou des associés, ou par ordonnance du tribunal de commerce). Le commissaire établira un rapport en vue de décrire et apprécier « chacun des avantages particuliers ou des droits particuliers attachés aux actions de préférence. S’il y a lieu, il indique, pour ces droits particuliers, quel mode d’évaluation a été retenu et pourquoi il a été retenu, et justifie que la valeur des droits particuliers correspond au moins à la valeur nominale des actions de préférence à émettre augmentée éventuellement de la prime d’émission »348. Dans l’hypothèse où la société, en cours de vie sociale, est dotée de commissaires aux comptes, ces derniers devront donner leur avis sur l’émission proposée, et, surtout, sur l’incidence de l’émission sur les actions déjà émises.
Au surplus, le mandataire social devra également établir un rapport détaillé349 sur cette même incidence, sur les motifs présidant l’émission, l’identité des souscripteurs s’il y a lieu, l’incidence sur la quote-part des capitaux propres, les motifs de l’éventuelle suppression du droit préférentiel de souscription.
Une fois établis ces rapports, la décision d’émission relèvera d’une décision collective des associés, aux conditions prévues par les statuts. Cette décision pourra être soit d’acter l’augmentation de capital et l’émission d’ADP, soit de déléguer la fixation des modalités à un organe de gouvernance, soit de déléguer la décision d’augmentation de capital à un organe de gouvernance.
20248 – L’avantage particulier, à la croisée du titre et de son détenteur. – En l’absence de définition légale350, l’avantage particulier est la stipulation en vertu de laquelle une société de capitaux accorde à certains actionnaires ou tiers, au détriment des autres actionnaires, des avantages ou bénéfices, soit pour les rémunérer de services qu’ils ont rendus lors de la constitution de la société, soit de services qu’ils peuvent être amenés à rendre en cours de vie sociale. Il se caractérise par son intuitu personae dans la mesure où son bénéficiaire doit être nommé ou suffisamment individualisé par les statuts et en cas de cession de ses titres, l’avantage particulier disparaît. On considère que ces avantages particuliers peuvent être attribués, dans une société de capitaux, y compris une société par actions simplifiée (SAS), indifféremment à un actionnaire ou à un tiers351.
Ce qui distingue fondamentalement les avantages particuliers des actions de préférence, c’est que les premiers sont consentis à une personne, alors que les secondes sont attribuées à un titre de société.
S’il s’agit d’un actionnaire, il pourra se voir reconnaître tout droit ou prérogative, toute faveur pécuniaire ou autre ayant pour effet de rompre l’égalité entre associés au profit de l’un ou de certains d’entre eux.
Lorsqu’il s’agit d’un non-actionnaire, ce pourrait être une stipulation relative à une rémunération qui n’est pas justifiée par un travail accompli pour le compte de la société.
La notion d’avantage particulier trouve donc à s’appliquer essentiellement en matière pécuniaire de façon à pouvoir l’évaluer. Sur ce fondement, certains auteurs estiment que l’attribution d’une prérogative politique ne relève pas du champ d’application des avantages particuliers352.
Les articles précités définissent la procédure applicable en cas d’octroi d’avantages particuliers. Selon l’article L. 228-15 du Code de commerce, l’émission d’actions de préférence doit être réalisée selon la procédure d’approbation des avantages particuliers.
Un commissaire aux avantages particuliers, désigné à l’unanimité des associés, rédige un rapport concernant la valeur des avantages particuliers qui est déposé au siège social de la société huit jours avant la date de l’assemblée générale extraordinaire devant se prononcer sur la création des avantages particuliers.

Section III – Des techniques civiles faîtières, pour une strate supplémentaire d’ingénierie

20249 Au-delà, et même au-dessus des pratiques propres au droit des sociétés, le notaire pourra, tant en amont qu’en aval, intégrer des techniques civiles qu’il utilise depuis la création du notariat moderne lui-même (Sous-section I), jusqu’aux plus récentes (Sous-section II).
Sous-section I – Démembrer sans routine, mais pas sans questions, les droits sociaux
20250 – L’ingénierie « since 1804 ». – Technique notariale ô combien éprouvée, le démembrement de propriété deviendra un outil encore plus original dans les circonstances ici évoquées. Le démembrement de titres sociaux conférera aux porteurs de droits sociaux démembrés des droits politiques et financiers différenciés, au-delà de toute procédure purement sociétaire. Démembrer un droit social est alors logiquement possible dans tout type de société (notamment car le démembrement peut être subi dans le cadre d’un décès, le droit civil tiendra ici le droit commercial en l’état).
20251 – Paramétrer les droits de vote statutairement et conventionnellement. – Les statuts envisagent relativement fréquemment les conséquences du démembrement sur les droits politiques attachés aux titres démembrés. Ils fixent une règle précise attribuant le droit de vote pour certaines décisions à l’usufruitier, ou au nu-propriétaire. Ces dispositions sont principalement guidées par deux textes, aux implications tout à fait différentes.
20252 – Sur le plan civil, une heureuse et récente précision. – En premier lieu, l’article 1844 du Code civil prévoit353 que : « Si une part est grevée d’un usufruit, le nu-propriétaire et l’usufruitier ont le droit de participer aux décisions collectives. Le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier. Toutefois, pour les autres décisions, le nu-propriétaire et l’usufruitier peuvent convenir que le droit de vote sera exercé par l’usufruitier ». Il précise, par ailleurs, que les statuts peuvent déroger au principe de titularité des droits de vote du nu-propriétaire.
Une rédaction adéquate peut consister, sur cette question, à fixer une règle statutaire de principe qui conviendrait à la majorité des associés et des hypothèses. Envisageant prioritairement les démembrements par donation, le notaire aura souvent pour réflexe naturel, légitime et pertinent de maximiser le droit de vote de l’usufruitier (le donateur se réservant l’usufruit), pouvant aller jusqu’à la suppression totale du droit de vote du nu-propriétaire354. Mais il ne faut pas pour autant éluder l’hypothèse d’un démembrement subi, par décès, lors duquel les capacités – ou les intérêts – de l’usufruitier (conjoint survivant) pourraient parfois nuire aux nus-propriétaires.
Aller plus loin dans l’ingénierie peut consister à ce que les associés fixent conventionnellement des règles dérogatoires au principe posé par les statuts. Cette convention d’attribution des droits de vote devra bien entendu être rendue opposable à la société355.
Ouvrir cette possibilité n’est évidemment pas sans conséquences pour la tenue de la vie sociale, et il est nécessaire de les mesurer avant d’instaurer cette exception statutaire. Il peut devenir complexe et risqué de devoir gérer des droits de vote différenciés par de multiples « couples » usufruitiers/nus-propriétaires356. Il en irait en outre de sa responsabilité si la société ne recueillait pas le bon vote lors des décisions collectives des associés, notamment si les différentes résolutions présentées lors d’une assemblée ne sont pas soumises au vote unique de l’usufruitier ou du nu-propriétaire357.
20253 – Sur le plan fiscal, une contrainte maîtrisable. – Le second texte essentiel qui réglementera la répartition des droits entre usufruitier et nu-propriétaire provient du Code général des impôts en son article 787 B (dit « pacte Dutreil »). Ce dernier permet aux associés qui souhaitent transmettre, directement ou via société interposée, une entreprise industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, de bénéficier d’une réduction de l’assiette des droits de mutation à titre gratuit très importante (75 %), en contrepartie de différents engagements de conservation et de direction358.
Le texte prévoit in fine que ces « dispositions (…) s’appliquent en cas de donation avec réserve d’usufruit à la condition que les droits de vote de l’usufruitier soient statutairement limités aux décisions concernant l’affectation des bénéfices ». À défaut de ces règles fixées statutairement au moment de la transmission359, celle-ci ne pourra pas bénéficier du régime fiscal de faveur.
L’objectif bien compris du législateur a été de contraindre à une réelle transmission du pouvoir décisionnel lors de la mutation des droits sociaux, pouvoir qui ne serait qu’illusoire si l’usufruitier donateur pouvait se réserver la totalité des droits de vote.
Deux pratiques adroites peuvent être mises en œuvre pour respecter le texte sans perturber outre mesure la gouvernance de la société transmise, par l’exercice de droits de vote de donataires, moins rompus à la gestion d’entreprise.
Tout d’abord, les statuts peuvent prévoir que le démembrement contraint par l’article 787 B du Code général des impôts ne s’applique qu’aux seules transmissions réalisées avec le bénéfice de ce texte. Cette disposition permettra aux autres démembrements, existants ou futurs, qui n’auraient ou ne pourraient pas bénéficier du régime de faveur, d’en rester aux règles de principe (ou conventionnelles) qui maximisent les droits de vote de l’usufruitier.
Ensuite, cette règle de répartition statutaire des droits de vote se conjuguera nécessairement avec l’exercice des pouvoirs statutaires du mandataire social. Ainsi, si le mandataire social dispose de larges pouvoirs, il n’aura à solliciter que marginalement une décision collective des associés.
20254 – Des incertitudes encore présentes quant aux distributions. – Comme nous l’avons vu ci-dessus, la technique civile du démembrement peut être une source d’ingénierie importante lorsqu’elle est appliquée, de manière sécurisée, aux droits politiques attachés aux parts sociales. Une question latente se pose toutefois concernant les droits financiers. En effet, qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire peut prétendre à en être le bénéficiaire ? C’est en cette question que l’on va saisir toute la différence entre les institutions de droit civil et de droit des sociétés, le conflit qui peut les opposer, l’inadaptation de l’une à l’autre.
L’article 582 du Code civil, partie intégrante du « temple » de notre droit des biens, issu de la loi du 30 janvier 1804 et non modifié depuis, prévoit que « l’usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits, soit naturels, soit industriels, soit civils, que peut produire l’objet dont il a l’usufruit ». L’enjeu dans notre application aux droits sociaux sera alors de savoir précisément ce que ce droit social produit comme espèce de fruits.
Filer la métaphore fruitière tout au long de notre exposé eût sans doute été trop aisé, voire d’une triste banalité. Mais si l’on admet qu’un des fruits les plus importants produits par un droit social consiste en de l’argent, le renvoi aux dispositions de l’article 587 du Code civil – lequel traite au même titre… des grains et liqueurs – ne nous aidera guère à nous extraire de l’allégorie botanique : « Si l’usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l’argent, les grains, les liqueurs, l’usufruitier a le droit de s’en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution ».
Le juriste, et à plus forte raison le notaire ne disposeront pas… depuis 1804… de l’aide d’autres textes pour découvrir l’identité du consommateur végétal du titre social. Renaîtra ainsi le sourire ému de l’entrée fracassante de l’usufruit, traité sous l’angle notarial, au sein de la culture cinématographique française360.
Nombreux seront les lecteurs qui imagineront Didier Bourdon, Bernard Campan et Pascal Légitimus se déchirer pour déguster les fruits d’imaginaires droits sociaux. Jusqu’à intimer physiquement l’ordre à leur notaire de trouver, et expliciter de manière intelligible la règle de droit chimérique qui permettra à chacun d’entre eux d’être le seul à s’en rassasier.
Un droit social, représentatif d’une quote-part de capital, n’a, sauf exceptions361, pas pour vocation de conférer à son détenteur un droit direct sur les actifs sociaux. C’est le principe même de la personnalité morale, distincte de celle de ses associés, conférant à la société un patrimoine propre, distinct de celui de ses associés. Cette affirmation est valable tout au long du tunnel de la vie sociale, jusqu’au bout de celui-ci. Cette issue est la décision de distribution aux associés, prélevée, par principe, sur un actif : la trésorerie sociale.
20255 – Quand se pose la question de « l’origine des fonds ». – Mais cette distribution, si elle se matérialise par la remise d’argent, est plus complexe qu’il n’y paraît : il y a argent et argent.
La question provient de l’origine de celui-ci, origine qui peut être multiple : l’activité courante de la société, la cession d’actifs sociaux, la reprise d’apports précédemment réalisés par les associés. Au passif du bilan, la contrepartie de la distribution sera une diminution des capitaux propres de la société. Là encore, cette diminution peut être imputée sur des postes comptables multiples : le résultat de l’exercice362, les différents postes de réserves ou assimilés363, les postes liés aux apports des associés364.
Ces données intégrées, notre question initiale (« qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire peut prétendre à en être le bénéficiaire ? ») prend une tout autre dimension. Doit-on passer au-delà de la personnalité morale pour analyser la nature du fruit, l’origine de l’argent distribué aux porteurs de parts ? Ou respecter pleinement l’écran que constitue la personnalité morale, et considérer que tout ce qui peut être détaché d’un titre social n’est finalement qu’un fruit, quelle qu’en soit son origine ?
La distribution du résultat constitué d’un résultat d’exploitation ou financier est naturellement dirigée vers l’usufruitier, car il s’agit véritablement du fruit récolté de l’activitécourante de la société. Mais l’usufruitier bénéficie-t-il de la même légitimité à percevoir, totalement ou partiellement, une distribution d’un résultat exceptionnel365 ?
Une distribution prélevée sur les autres postes des capitaux propres fait surgir cette même question de légitimité :

sur les distributions des différents postes de réserves366 qui ont pour origine un résultat antérieur « stocké », résultat qui pouvait lui-même être d’exploitation, financier ou exceptionnel367 ;

sur les distributions prélevées sur les postes liés au capital social, ou assimilés.

20256 – Un duel jurisprudentiel dantesque. – À ce stade, ces deux conceptions s’opposent totalement. Et cette opposition se reflète parfaitement dans des arrêts récents de la Cour de cassation. Un conflit est presque naturellement apparu entre les chambres commerciale et civile.
La chambre commerciale, dans un premier temps368, a considéré que dans le cas où était distribué un dividende par prélèvement sur les réserves369, « le droit de jouissance de l’usufruitier de droits sociaux s’exerce (…) sous la forme d’un quasi-usufruit, sur le produit de cette distribution revenant aux parts sociales grevées d’usufruit ». Cette conception répond à la logique commercialiste intrinsèque à la chambre. En effet, il s’agit de la prééminence de la personnalité morale, qui aboutit à considérer que toutes les distributions ne sont que des fruits. À ce titre, ils seraient attribués en tout état de cause à l’usufruitier, certes, selon deux modalités différentes : sans entrave pour le résultat de l’exercice, et avec une dette de restitution s’il s’agit de réserves.
Cette chambre avait d’ailleurs rappelé le 5 octobre 2009 que les sommes qui font partie du bénéfice distribuable370 (à l’inverse d’une réduction du capital social par exemple, ou de la distribution d’une prime d’émission) participent de la nature des fruits.
La chambre civile, « répondant » un an plus tard371, procède d’une analyse différente, purement civiliste, en énonçant que « si l’usufruitier a droit aux bénéfices distribués, il n’a aucun droit sur les bénéfices qui ont été mis en réserve, lesquels constituent l’accroissement de l’actif social et reviennent en tant que tel au nu-propriétaire ». L’analyse de cette affirmation ne souffre aucun doute. Le bénéficiaire unique d’une distribution de réserves serait le nu-propriétaire.
Cet arrêt, pour tous les doutes exprimés ci-dessus quant à l’origine des réserves, la cause de leur distribution, le peu de finesse technique de ses conclusions372, comme pour le conflit injustifié qu’il a fait naître373, en reste encore à ce jour très critiquable.
20257 – Mais un duel pouvant être arbitré par la convention. – Les règles ci-dessus évoquées sont issues des dispositions du Code civil. Elles ont vocation à s’appliquer de manière générale à l’ensemble des sociétés civiles ou commerciales. Une source notable d’ingénierie est de relever, comme l’arrêt de la chambre commerciale l’a fait, et d’exploiter le fait que ces dispositions s’appliquent « à défaut de convention contraire ».
Il est vrai que l’arrêt de la chambre civile pourrait être de nature à jeter le doute sur la question, en raison de sa terminologie péremptoire et de l’absence de référence à la possibilité d’une dérogation conventionnelle374.
Se garder de surinterpréter relèvera de l’attitude raisonnable propre à la profession notariale, puisqu’il faut rappeler qu’aucune disposition, civile, commerciale ou fiscale n’interdit ou ne limite la possibilité d’une dérogation conventionnelle, en dehors du résultat d’exploitation, seul à revêtir objectivement le caractère de fruit.
« À défaut de convention contraire » : ces cinq mots permettront, à l’instar des droits politiques développés ci-dessus, de déployer des stratégies illimitées pour diriger telle ou telle distribution vers l’usufruitier ou le nu-propriétaire. Il sera ainsi possible pour l’habile rédacteur de prévoir :

des dispositions statutaires qui régenteraient très précisément le récipiendaire de la distribution, en fonction du poste comptable duquel elle serait prélevée, ou de la nature du résultat distribué375 ;

une attribution des sommes : (i) en pleine propriété aux récipiendaires (partage selon une clé de répartition fixe ou évolutive), (ii) avec un maintien du démembrement (sur un compte courant d’associés, ou un compte bancaire, démembré), ou (iii) soumises à un quasi-usufruit (en prévoyant les éventuelles garanties à conférer, le degré d’information à donner aux nus-propriétaires, les pouvoirs de gestion du quasi-usufruitier, le calcul et l’indexation éventuelle de la créance de restitution, et la durée) ;

tout en précisant que les porteurs de droits sociaux démembrés disposent de la liberté de fixer entre eux des règles différentes.

20258 – Sans négliger ses conséquences fiscales. – Comme rappelé ci-dessus, permettre cette « conquête de l’Ouest » conventionnelle ne sera pas sans difficulté de gestion pour la société distributrice. Elle se devra d’assumer la répartition des fonds, et en endosser la responsabilité. Au surplus, s’agissant d’enjeux financiers entre porteurs de droits sociaux démembrés376, cette liberté aura pour frontière l’abus fiscal, exclusivement377 ou principalement378, que la société elle-même ne pourra totalement ignorer…
L’administration est convenue dans sa doctrine379 qu’une convention puisse être régularisée. En l’occurrence, concernant les sociétés qui sont translucides sur le plan fiscal, cette convention doit être antérieure à la date de clôture de l’exercice social (ce qui répond à la logique puisque la fiscalité dans ce type de sociétés est déterminée en fonction des associés présents à la clôture de l’exercice).
En ce qui concerne les sociétés soumises à l’IS, c’est la date de la décision de distribution qu’il convient de retenir, ce qui laisse une souplesse supplémentaire aux associés puisquecette date est postérieure de quelques mois à la clôture de l’exercice social, d’une part, et qu’il reste possible d’affecter le résultat en réserves lors de l’assemblée générale ordinaire annuelle de la société avant de régulariser une convention, puis de distribuer ces réserves conformément à la convention, d’autre part.
Cette convention devra, naturellement, avoir date certaine pour être opposable à l’administration dans la « bonne » chronologie (acte sous signature privée enregistré, acte sous signature privée déposé au rang des minutes de l’office notarial, ou acte authentique).
20259 – Sans négliger son opposabilité. – La convention devra également être opposable à la société, dans les conditions rappelées ci-dessus concernant les droits politiques, si les porteurs de droits sociaux démembrés souhaitent avoir la garantie que la distribution soit réalisée directement par la société conformément à leur volonté.
Elle peut aussi rester occulte vis-à-vis de la société380.
Dans cette hypothèse, la société n’aura pas connaissance de la convention, et procédera au versement des fonds conformément aux dispositions statutaires.
Dans un second temps, les porteurs de droits sociaux démembrés procéderont ensuite, entre eux, à des mouvements financiers pour faire correspondre les versements à la convention. Cette seconde hypothèse permet de conserver la confidentialité des accords entre porteurs de droits sociaux démembrés, et ne complexifie pas la gestion des distributions pour la société distributrice.
Elle présente néanmoins l’inconvénient majeur de s’en remettre au bon vouloir des associés débiteurs pour respecter leur obligation de reversement, avec des difficultés évidentes de recouvrement et d’exécution s’ils tentent de s’en affranchir… ou ne disposent plus des sommes en question !
20260 – Un retour nécessaire aux origines du démembrement. – Le démembrement de propriété des droits sociaux peut résulter de multiples sources différentes. L’identification précise de l’origine du démembrement va avoir un impact important sur les droits attachés aux droits sociaux démembrés.
Dans l’hypothèse où le démembrement résulte d’un fait subi, tel que le décès de l’associé381, la répartition des droits politiques et financiers résultera par défaut des statuts sociaux. Si les porteurs de droits sociaux démembrés souhaitent y déroger, il faudra cumulativement remplir les deux conditions suivantes, qui ne sont pas toujours aisées : que les statuts permettent une dérogation conventionnelle s’il s’agit de droits politiques, et qu’une convention soit régularisée d’un commun accord entre chaque couple usufruitier/nu-propriétaire.
Dans l’hypothèse où le démembrement résulte d’un acte volontaire (mutation à titre onéreux ou gratuit d’un droit démembré), la convention de répartition des droits pourra résulter elle-même de cet acte. Il est d’ailleurs conseillé de l’y inclure, ou de la régulariser concomitamment par un document ad hoc, notamment dans l’hypothèse où cette répartition est une condition essentielle et déterminante du démembrement de propriété lui-même382.
20261 – L’ingénierie déployée grâce au croisement des modalités du démembrement avec sa nature intrinsèque. – Le démembrement conventionnel de la propriété pourra revêtir des modalités diverses : réserve d’usufruit viagère, temporaire, réversion d’usufruit, usufruit successif. Croiser ces modalités avec les paramètres d’exercice des droits financiers et des droits de vote, au sein des statuts sociaux ou d’une convention particulière, permettra au notaire de proposer une réponse parfaitement adaptée à chaque situation précise, et par exemple :

prévoir un usufruit viager, mais avec des droits politiques réservés uniquement jusqu’à un « âge de raison » de chacun des nus-propriétaires ;

constituer un usufruit temporaire, avec des droits financiers cantonnés à la distribution du résultat d’exploitation ;

anticiper un usufruit successif au conjoint, mais avec des modalités d’exercice des droits politiques ou financiers minorés comparés à ceux exercés par le donateur.

Sous-section II – Grever les droits sociaux d’un droit réel de jouissance spéciale, avec une parcimonie notariale
20262 – Du libre exercice du droit de propriété. – Dans un arrêt du 31 octobre 2012, dit Maison de la Poésie, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a reconnu la possibilité pour le propriétaire d’un bien immobilier de créer librement, conventionnellement, un droit réel de jouissance spéciale (DRJS) sur celui-ci.
Rien ne semble interdire la création de ce droit conventionnel sui generis sur les droits sociaux d’une société. La différence fondamentale avec celui consacré par la jurisprudence réside dans le fait que, contrairement à son institution sur un bien immobilier, le DRJS créé sur des droits sociaux est tripartite. Il fait intervenir le constituant du DRJS, son bénéficiaire, et la société elle-même, personne morale émettrice.
Cette donnée est essentielle à la bonne compréhension par le lecteur, car l’intervention de la société implique l’application de règles civiles jurisprudentielles d’abord, de droit spécial des sociétés ensuite, et de règles contractuelles issues des statuts sociaux enfin. Cet empilement de trois strates de règles complexifie notoirement la création d’un DRJS sur des droits sociaux. À ce titre, la précision rédactionnelle ne souffrira aucune faiblesse.
Le DRJS de droits sociaux concernera classiquement les droits politiques ou les droits financiers, à l’instar de ce qui a été développé ci-dessus au titre du démembrement de propriété. La principale différence, comme sur tout autre actif, résultera du fait que le démembrement est issu d’une réglementation, ancienne et modernisée, qui définit clairement des limites à son exercice. Le DRJS n’est assis « que » sur une construction contractuelle, qui semble illimitée (et notamment quant à sa durée, dans la limite de la durée de la société), consolidée par une reconnaissance prétorienne.
20263 – Le DRJS face au mécanisme sociétaire. – Confronter le DRJS aux droits sociaux n’est pas sans difficulté du fait de l’empilement de la triple strate de règles évoquée ci-dessus (droit des biens, droit des contrats, droit des sociétés). Si le respect des deux premières strates semble désormais bien possible, du fait des reconnaissances jurisprudentielles successives, la compatibilité avec le fonctionnement et les règles sociétaires semble bien plus délicate d’appréhension.
Sur le plan des règles d’abord, est-il nécessaire que les statuts sociaux permettent expressément l’instauration de DRJS grevant les droits sociaux émis par la société ? La question n’est pas neutre. Admettre le démembrement de propriété, comme nous l’avons vu ci-dessus, ne paraît pas poser de question dans la mesure où il s’agit d’une institution issue de la loi elle-même.
Le DRJS est dans une situation bien différente puisque, instauré par un mécanisme purement contractuel, il serait dès lors permis d’en limiter, voire d’en supprimer totalementl’accès aux associés. Il s’agira cependant de supprimer l’accès « officiel », c’est-à-dire visible par la société et ses associés. À l’instar des pactes d’associés, rien ne pourra empêcher des associés de mettre en place un dispositif occulte concernant les droits sociaux.
Et c’est la compatibilité fonctionnelle qui pose alors question. Celle-ci renvoie directement aux notions d’opposabilité et d’efficacité du DRJS. Si celui-ci n’est pas permis, s’il est limité ou interdit, les associés n’auront guère d’autre choix que de s’y conformer sur le plan des droits politiques.
En effet, si le titulaire du DRJS ne peut exercer librement son droit politique, l’existence même de son droit peut être remise en cause. À tout le moins il pourrait s’agir d’une convention de vote, mais qui serait d’une efficacité limitée puisqu’elle ne permettrait pas de faire annuler la décision sociale prise en contradiction avec le DRJS, et ne se résoudrait dès lors qu’en dommages-intérêts, ou par stipulation d’une clause pénale dont le recouvrement est incertain, en cas d’inexécution.
Sur le plan des droits financiers, la question peut se poser différemment, de la même manière que le démembrement, puisque même dans l’hypothèse où la société cantonnerait ou ignorerait le DRJS, leurs titulaires pourraient procéder aux répartitions financières directement entre eux, ou obtenir une exécution de leur engagement contractuel conforme à ce qu’il prévoit sur le plan financier (avec la question du recouvrement qui est tout aussi incertain si la société distribue des fonds à un associé, qui devrait les reverser ensuite au titulaire du DRJS).
Sur le plan de l’opposabilité, et comme nous l’aborderons similairement concernant les pactes d’associés383, il est nécessaire que la société admette la constitution de DRJS sur ces droits sociaux384, d’une part, et que le contrat entre constituant et bénéficiaire assure cette opposabilité385, d’autre part. À défaut de rendre le DRJS opposable, son efficacité en sera lourdement grevée pour le bénéficiaire : la société ne le laissera pas exercer les droits politiques, ou elle n’en tiendra pas compte au stade du versement de sommes s’il concerne des droits financiers.
Enfin, admettre la constitution de DRJS sur les droits sociaux posera les mêmes problématiques sociales que celles évoquées ci-dessus au titre des conventions spécifiques entre associés porteurs de droits sociaux démembrés, et notamment la gestion de multiples conventions et la responsabilité prise dans leur exécution correcte.
20264 – Une institution qui mérite sans doute d’être étrennée. – Les difficultés relevées ci-dessus, face aux multiples sources de paramétrages légalement encadrés des droits politiques et financiers abordés plus haut, plongeront le notaire et ses clients associés ou sociétés dans une certaine circonspection. La nature contractuelle du DRJS, consacrée par une reconnaissance essentiellement prétorienne, ne permet pas fondamentalement d’apporter la solidité et la durabilité coutumières à l’institution de droits particuliers d’une telle importance386.
Sur un actif tangible, « vif », le droit pourra librement s’exercer, et être soutenu par une opposabilité assurée par une publicité séculaire. L’intervention de la tierce personne, la société, avec ses règles spécifiques, ses aléas juridiques fondamentaux encore bien présents387, va complexifier significativement le conseil pour s’orienter vers cette solution.
D’autant que les règles statutaires, l’émission de droits sociaux à droits particuliers, le haut degré de liberté conventionnelle procuré par les pactes d’associés pourront d’ores et déjà apporter des solutions très précises et très sécurisées aux besoins exprimés, et cela sans forcer sur le « chausse-pied » !

324) V. supra, nos 20056 et s.
325) On peut citer par exemple des paramètres financiers, comme la présence d’un certain niveau de trésorerie, ou à l’inverse le passage sous un certain seuil d’endettement ; ou la survenance d’événements particuliers comme la cession d’actifs sociaux.
326) Dans le respect des dispositions d’ordre public applicables aux SARL, rien n’empêche de donner à certains associés la capacité de s’opposer à telle ou telle décision, ou de bénéficier d’une information renforcée sur le fonctionnement de l’exploitation, au-delà de la documentation annuelle fournie lors des assemblées générales. Le mécanisme, de nature contractuelle, posera la question de son exécution puisqu’il ne sera que très difficilement opposable à la société. Une sanction pour l’inexécution peut cependant être prévue contractuellement, notamment par la mise en place de promesses unilatérales de cession en cas de non-respect.
327) C. com., art. L. 228-14.
328) L’exercice du droit de vote étant devenu indifférent à ce stade.
329) Ce que la terminologie anglo-saxonne qualifie de golden share.
330) Mémento Lefebvre Sociétés commerciales 2022, no 60510.
331) Par la liberté d’organisation des décisions collectives.
332) Dans l’hypothèse où les droits politiques doivent « suivre » l’action, en quelque main qu’elle soit, les droits politiques seront attachés à cette action, qui devra en conséquence revêtir la qualification d’ADP.
333) Dénommées preferred stocks en droit anglo-saxon.
334) V. infra, nos 20268 et s.
335) V. infra/supra, no 20234.
336) Ansa, Communication no 21-027, 8 sept. 2021.
337) À laquelle les titulaires d’ADP ne sont pas forcément étrangers, en tant qu’associés de plein droit.
338) À l’exception des droits de vote des actions autodétenues, qui ne sont pas exprimés en vertu de l’article L. 225-111 du Code de commerce.
339) Ou d’une branche d’activité non filialisée, si tant est que celle-ci puisse déterminer avec précision ses performances financières intégrées, de fait dans la comptabilité globale.
340) Ce qui ne sera sans doute pas totalement aisé sur le plan purement comptable, notamment dans l’hypothèse où la filiale « tracée » ou « reflétée » réalise un résultat qu’elle distribue à un holding, qui est lui-même en perte, et donc incapable de procéder à la distribution prévue pour les titulaires d’ADP.
341) À l’exception notable de l’exercice du droit de vote en tant que tel, puisque, par définition, le titulaire d’ADP ne détient pas d’actions en direct dans la structure holding ou filiale, « tracée » ou « reflétée » par son ADP. Cette absence de droit de vote ne signifie pas pour autant un pouvoir moindre, et même souvent le contraire, puisqu’il bénéficie de droits qui ne sont pas ordinairement réservés aux actions ordinaires de capital.
342) Pour la lecture d’un des seuls art.s de doctrine sur le sujet, A. Namoun et P. Thomas, Sur la trace des tracking stocks… : RD bancaire et fin. juill. 2018, no 4, étude 14.
343) Et ce d’autant qu’il est possible d’émettre plusieurs types d’ADP distinctes, sous réserve, à tout le moins, de leur affecter une désignation différenciante.
344) Même si son caractère privé, que cela soit entre associés signataires et non signataires, ou vis-à-vis de la société ou du public, restera souvent déterminant.
345) C. com., art. L. 228-11.
346) Mémento Lefebvre Sociétés commerciales 2022, no 67806.
347) C. com., art. L. 225-8.
348) C. com., art. R. 225-136.
349) C. com., art. R. 225-13 et s.
350) Ce qui n’empêche pas le Code de commerce de prévoir les modalités de création de ces avantages particuliers : C. com., art. L. 225-10, L. 225-14, al. 2, L. 225-147, L. 228-15 et L. 236-10, III.
351) C. com., art. L. 225-8.
352) Ph. Reigné et T. Delorme, La nature nécessairement pécuniaire des avantages particuliers : Bull. Joly Sociétés 2002, p. 1117.
353) Depuis la loi de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés du 19 juillet 2019.
354) Répartition qui était sujette à débats jurisprudentiels et doctrinaux, jusqu’à une heureuse et récente clarification par la loi no 2019-744 du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés.
355) L’opposabilité serait assujettie à l’intervention de la société à cette convention, ou par toute autre modalité la permettant (acceptation du mandataire social, récépissé, dépôt au siège social, signification, etc.). À défaut d’opposabilité, la répartition conventionnelle serait illusoire, puisque la société n’aurait aucun autre choix que celui d’appliquer ses règles statutaires propres, a priori inadaptées aux associés.
356) Et a fortiori si des règles différentes sont prévues dans le cadre de transmissions successives, voire au sein d’une même transmission.
357) Ce qu’implique d’ailleurs directement l’article 1844 du Code civil repris ci-dessus, puisque l’affectation des bénéfices réservée à l’usufruitier représente dans les faits une seule résolution de l’assemblée générale ordinaire annuelle de la société, laquelle assemblée comporte d’autres résolutions (approbation des comptes, quitus au mandataire social, etc.) qui sont donc à faire voter par le nu-propriétaire.
358) V. supra, nos 20365 et s.
359) Il est hautement recommandé que ces règles soient d’ailleurs véritablement opposables aux tiers dès avant la donation, par dépôt préalable des statuts auprès du RCS.
360) Les Trois frères, 1995.
361) Sociétés d’attribution, sociétés immobilières de copropriété ou de jouissance à temps partagé.
362) Qui peut lui-même être subdivisé en résultat d’exploitation, financier et exceptionnel.
363) Report à nouveau, réserves contractuelles, statutaires, spéciales, « autres » réserves (partant du principe que les réserves légales et réglementées ne font pas l’objet de distribution dans la mesure où elles ne sont dotées que du strict nécessaire pour remplir les obligations financières de la société).
364) Capital social au premier titre, mais aussi prime d’émission, de fusion, d’apports, etc.
365) Lequel est le plus souvent issu d’une cession d’un actif social.
366) Distribution de réserves qui peut tout à fait être décidée pour maintenir un rendement annuel de leur capital aux associés, lors d’un exercice où, exceptionnellement, le résultat consiste en une perte (laquelle peut être causée non par un ralentissement de l’activité sociale, mais, par exemple, par une « simple » provision pour risque).
367) L’analyse de l’origine des réserves revêt une complexité quasi insurmontable dans la mesure où (i) elles ont pu être constituées de très longue date avec des mises en réserve et des distributions de réserves successives, et (ii) il n’est pas possible d’identifier, en cas de mise en réserve partielle du résultat de l’année, quelle quote-part de celui-ci relève, ou pas, du résultat d’exploitation, financier ou exceptionnel.
368) Cass. com., 27 mai 2015, no 14-16.246.
369) Nous précisons que la haute cour s’est arrêtée à l’origine immédiate de la distribution, à savoir un poste de réserves, sans rechercher comment ces réserves ont été constituées.
370) Fût-il porté en réserve au cours de la vie sociale.
371) Cass. 1re civ., 22 juin 2016, no 15-19.471 et no 15-19.516.
372) En ce qu’il n’envisage que la question du poste comptable, et non la source précise des résultats mis en réserve.
373) Un renvoi de la question en chambre mixte eût, en effet, été hautement souhaitable.
374) Le visa à l’article 578 du Code civil, d’ordre public, pourrait aboutir à considérer qu’il ne peut y avoir de dérogation conventionnelle en la matière.
375) À l’exception du résultat d’exploitation tel que rappelé ci-dessus.
376) Ces enjeux entraînent des transferts de valeur entre nu-propriétaire et usufruitier qui peuvent être colossaux si l’on imagine, par une « simple » convention, diriger une distribution de réserves constituées de plusieurs années de résultats sociaux cumulés, ou d’une plus-value importante de cession d’actif.
377) LPF, art. L. 64 (V. supra, nos 10199 et s.).
378) LPF, art. L. 64 A (V. supra, nos 10203 et s.).
379) BOI-BIC-CHAMP-70-20-10-20.
380) Ce qui n’est pas possible concernant les droits de vote, tel que rappelé ci-dessus.
381) Outre la question de la qualité d’associé transmise, ou non, aux ayants-droit.
382) Cela est très souvent le cas puisqu’à défaut de prévisibilité précise quant aux droits de vote ou aux droits financiers, et de sécurité des parties dans la répartition, le démembrement n’aurait sans doute pas eu lieu, ou pas dans les mêmes conditions.
383) V. infra, nos 20268 et s.
384) Ou, à tout le moins, ne les interdise pas.
385) Suivant les modes évoqués ci-dessus.
386) Sans dénigrement, cela peut avoir des conséquences immensément plus importantes pour la société et l’ensemble de ses parties prenantes, que la jouissance de tout ou partie d’un immeuble.
387) À l’heure où ces lignes sont écrites, notre système juridique n’a, par exemple, pas encore apporté de réponse claire sur la reconnaissance de la qualité d’associé… d’un usufruitier !
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