Mise en œuvre du rattachement : les correctifs
Mise en œuvre du rattachement : les correctifs
La fraude à la loi
Le renvoi
Le renvoi dans le cadre d'un décès intervenu avant le 17 août 2015
Le renvoi au premier degré
Le renvoi au second degré
Acceptation de l'offre de compétence
Refus de l'offre de compétence
- soit au droit international privé du second État, il en ressort un phénomène de va-et-vient incessant ;
- soit au droit international privé d'un quatrième État.
- d'appliquer la loi matérielle du for, en invoquant la théorie du forum necessitatis qui donne une vocation subsidiaire de la loi du for. Il sera alors fait application de la loi matérielle française à l'ensemble de la succession. L'objectif d'unicité de la succession est ainsi assuré. Certains reprochent cependant à cette solution d'être teintée d'unilatéralisme ;
- de forcer la règle de conflit, et d'appliquer ainsi la loi successorale matérielle de l'État désigné par la règle de conflit du deuxième État, lui-même désigné par la règle de conflit française. Dans cette hypothèse, le droit international privé du troisième État n'est pas appliqué. Il peut être opposé à cette solution une certaine automaticité et objectivité qui peuvent contrevenir au principe de recherche de la proximité de rattachement ;
- de « s'en remettre au système de droit international privé de la loi désignée par la règle de conflit du for. Si celui-ci écarte le renvoi, on appliquera la loi qu'il désigne. S'il accepte au contraire le renvoi qui lui est fait par la loi tierce, on appliquera sa propre loi » 1539612073663. Cette solution est préconisée par les professeurs Henri Batiffol et Paul Lagarde, elle présente l'intérêt d'être plus modérée ;
- d'appliquer la loi matérielle de l'État désignée par la règle de conflit française. Cette solution est fondée sur le principe que l'essence même du renvoi est de poursuivre un objectif de coordination. Si le jeu du renvoi n'assure pas celui-ci, il convient de l'écarter et d'appliquer ainsi la loi matérielle désignée par la règle de conflit française.
Le renvoi dans le cadre d'un décès intervenu après le 17 août 2015
- à la loi d'un État membre ; ou
- à la loi d'un autre État tiers qui appliquerait sa propre loi ».
- celle du renvoi à la loi d'un État membre.Dans ce cas, le renvoi peut être appliqué jusqu'au deuxième degré. Le jeu du renvoi peut ainsi aboutir à une application tant de la loi matérielle du for que de celle d'un autre État membre ;
- celle du renvoi à la loi d'un État tiers qui accepte sa compétence.
- en présence d'une loi de police 1539612122565 ;
- lorsque la loi désignée est celle d'un État tiers, et que celui-ci n'accepte pas sa compétence 1539612130649 ;
- en matière de validité des actes juridiques 1539612135181 ;
- lorsque la loi désignée l'a été au moyen de l'utilisation de la clause d'exception 1539612139550 ;
- quand le défunt a réalisé un choix de loi 1539612149149.
- l'État qui subit le rejet du renvoi prévu par l'article 34 du règlement accepte sa compétence de manière subsidiaire.À titre d'exemple, la Grande-Bretagne renvoie la compétence à la loi française pour les immeubles, la France rejette le renvoi du fait de l'application de l'article 34, pour le cas où le défunt a réalisé une professio juris. La Grande-Bretagne acceptera de traiter l'intégralité de la succession du défunt du fait qu'elle accepte sa compétence de manière subsidiaire dans les situations de blocage.Il n'y a alors pas de problème. On notera que l'article 34 assure ainsi son objectif d'unicité de la succession ;
- l'État qui subit le rejet du renvoi prévu par l'article 34 du règlement rejette sa compétence, car il n'est pas prévu de compétence subsidiaire dans son ordre juridique.Sur le fondement de la théorie du forum necessitatis, il sera alors permis à la loi française de trouver application en vertu de la compétence subsidiaire du for que prévoit le règlement.
Le renvoi en matière successorale : droit comparé
- exclu par les États suivants : Algérie, Brésil, Canada, Québec, Chine, Danemark, Égypte, Émirats arabes unis, Grèce*, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maroc, Norvège, Pays-Bas*, Pérou, République dominicaine, Somalie, Soudan, Suède*, Syrie, Tunisie ;
- admis au premier degré dans les États suivants : Albanie, Argentine, Belgique*, Congo, Cuba, Espagne*, Estonie*, Hongrie*, Japon, Liechtenstein, Lituanie*, Luxembourg*, Mexique, Pologne*, Portugal*, Roumanie*, Russie, Sénégal, Suisse, Thaïlande, Togo, Vietnam ;
- admis au premier et au second degré dans les États suivants : les États membres** adhérant au règlement (UE) n° 650/2012, l'Allemagne*, l'Autriche*, le Burkina Faso, la Finlande*, la France*, l'Italie*, le Royaume-Uni, la Turquie, le Venezuela.
L'application de la loi matérielle étrangère : la question de l'ordre public international
Rejet d'une loi matérielle qui viendrait contrarier l'ordre juridique du for
- qu'à l'issue du raisonnement conflictuel ;
- qu'au profit de l'application de la loi matérielle française ;
- que de façon exceptionnelle après qu'une appréciation in concreto du résultat découlant de l'application de la loi matérielle étrangère a été réalisée ;
- et par voie de conséquence, elle ne joue que contre le résultat qui découle de la loi matérielle étrangère applicable et non contre la loi étrangère elle-même.
- le principe d'égalité des époux 1539612405608 ;
- le principe d'égalité des parents 1539612410541 ;
- le principe du droit à une filiation 1539612415926 ;
- le principe d'ordre public alimentaire 1539612421126 ;
- le principe d'indisponibilité de l'état des personnes 1539612425095.
- succession dans laquelle le défunt est musulman, si la loi matérielle étrangère aboutit à exhéréder les héritiers non-musulmans par application du privilège de religion applicable dans cet État ;
- succession dans laquelle le défunt est musulman, si la loi matérielle étrangère aboutit à allotir dans une moindre proportion les héritiers de sexe féminin, sauf prise en compte de l'atténuation de l'ordre public international dont il sera question ci-après ;
- succession appliquant le droit d'aînesse : idem.
Accueil dans certaines circonstances des effets d'une loi matérielle jugée habituellement contraire à l'ordre public international du for : l'ordre public atténué
- il s'agit d'un droit acquis sans fraude ;
- à l'étranger ;
- et en conformité par rapport à la loi applicable selon le droit français.
- la géolocalisation du centre des intérêts de vie de la personne en cause ;
- la densité des liens avec la France ;
- et les mesures prises à l'intérieur du système juridique étranger pour corriger l'inégalité successorale (dot, donations, vocation successorale supplémentaire inconnue du droit français…).
Ordre public international et réserve héréditaire
- les étrangers qui vivent en France ou les Français qui s'installent à l'étranger ont potentiellement plus de liberté testamentaire que les Français résidant sur notre territoire ;
- qu'à l'avenir, la professio juris, dans le cadre d'une succession soumise à la loi française, pourra être utilisée par les binationaux ou les étrangers comme un moyen de contournement de la réserve héréditaire.
- l'atteinte à la réserve ne doit pas s'accompagner de la violation d'un principe du droit français considéré comme essentiel ;
- les juges motivent leur décision en indiquant que l'installation du défunt en Californie était « ancienne et durable », et par là même excluent le cas de l'application d'une loi étrangère résultant d'une fraude ;
- la privation de l'application de la réserve doit mettre les héritiers « dans une situation de précarité ou de besoin ».
- la Cour de cassation rend une décision en présence d'héritiers majeurs, celle-ci aurait-elle été identique en présence d'héritiers mineurs ?
- qu'est-ce qu'une situation précaire ? Comment apprécie-t-on le niveau de besoin ? Quelle est la conséquence s'il y a apparition d'une situation précaire : réinstaure-t-on la réserve ?
- comment devient-on en état de dépendance économique ? Celle-ci doit-elle être une conséquence directe de la succession, ou peut-elle lui préexister ?
- à qui incombent la recherche et l'appréciation de cet état de dépendance ? Le notaire doit-il se livrer à l'exercice périlleux que représente cette appréciation ?
Illustration
M. A est britannique. Il laisse un testament (que l'on supposera valable en la forme) dans lequel il institue M<sup>lle</sup> B, sa concubine, comme légataire universelle. Il a deux enfants d'un premier lit. Il est propriétaire d'un immeuble en France. Il réside habituellement à Londres lors de son décès intervenu le 4 août 2018.
<strong>Hypothèse 1</strong>
M. A n'a pas fait de <em>professio juris</em>. À l'issue du raisonnement conflictuel, il y a aura lieu d'appliquer à l'immeuble français la loi française.
Le notaire devra donc dans ses actes faire un exposé relatant le raisonnement ayant abouti à la détermination des lois applicables à la succession de M. A. Il donnera application au legs de M. A au profit de M<sup>lle</sup> B et avertira la veuve du risque d'action en réduction du legs par les enfants de M. A privés de leur réserve héréditaire.
L'application de la loi française aboutit à une potentielle action en réduction du legs pour atteinte à la réserve.
<strong>Hypothèse 2</strong>
M. A a fait une <em>professio juris</em> au profit de la loi britannique. À l'issue du raisonnement conflictuel, il y a aura lieu d'appliquer à l'immeuble français la loi britannique.
Le notaire devra donc dans ses actes faire un exposé relatant le raisonnement ayant abouti à la détermination de la loi applicable à la succession de M. A. Il donnera application au legs de M. A au profit de M<sup>lle</sup> B et avertira la veuve du risque « d'action en aliments » par les enfants de M. A dans l'hypothèse où la privation de leur réserve héréditaire les mettrait dans « une situation de précarité ou de besoin ».