Les aménagements statutaires adaptés à l'international

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Les aménagements statutaires adaptés à l'international

Dans un contexte international, le notaire doit analyser si les solutions juridiques qu'il propose aux Français résidant en France peuvent être utilisées pour les étrangers ou si elles doivent être adaptées selon les éléments d'extranéité. Il existe des aménagements possibles dans les statuts et des solutions externes à envisager selon les situations.
Les associés étrangers d'une société civile immobilière n'ont pas toujours les mêmes objectifs : certains privilégient la protection du conjoint survivant, d'autres la transmission de leurs biens au sein des autres membres de leur famille, et d'autres encore visent prioritairement l'optimisation fiscale en France et dans leur pays d'origine dans la préparation de leur succession. Diverses clauses peuvent être proposées aux associés étrangers lors de l'établissement de la société ou en cours de vie sociale.

La clause de tontine

Souvent prisée par la clientèle anglo-saxonne, voire demandée par elle 1546454105554, une clause de tontine peut être préconisée dans un contexte international pour converger avec la culture des investisseurs étrangers en France. Ceux-ci sont fréquemment avides de solutions qui leur permettront de transmettre leur patrimoine au conjoint survivant sans subir les contraintes de la réserve héréditaire. Cette mesure sera particulièrement adaptée aux époux mariés sous un régime de type séparatiste puisqu'ils bénéficieront des dispositions issues de la loi TEPA. Traitée fiscalement comme une transmission de biens à titre gratuit, l'application de la clause de tontine n'entraînera pas de paiement de droits de mutation à titre gratuit entre les époux.
L'adoption d'une clause de tontine est plus judicieuse dans un contrat de société que dans un acte d'acquisition immobilière en direct. Dans cette seconde hypothèse en effet, à défaut d'accord des deux époux en cas de séparation, elle subsistera jusqu'au décès. Publiée avec l'acte authentique de vente, elle ne pourra être annulée que dans un autre acte, qui devra être publié au service de la publicité foncière. En revanche, en cas de clause prévue dans les statuts de la SCI qui acquiert le bien, il peut tout à fait être prévu dans les statuts qu'en cas de divorce, cette clause prendra fin.
La clause de tontine est une disposition selon laquelle un associé est titulaire de ses parts dans la société sous la condition suspensive de sa survie et la condition résolutoire de son décès avant ses associés. Pour qu'elle soit licite, il faut que chaque associé ait réellement une chance de survie à l'autre ou aux autres associés. Il doit également exister un aléa économique : l'investissement initial et l'espérance de gain doivent être équitablement répartis entre les associés. Si l'intention libérale de celui qui a investi le plus dans la société peut être prouvée, la tontine sera remise en cause : elle sera entachée de simulation et la donation déguisée sera caractérisée 1546453310999. C'est le cas par exemple lorsqu'un associé établit un testament quelques semaines avant son décès au profit des bénéficiaires de la clause de tontine.
Il est bon de rappeler que la clause de tontine est avantageuse pour les concubins qui ne veulent pas conclure de pacte civil de solidarité et souhaitent éviter la taxation au taux de 60 %. Au décès de l'un d'entre eux, la transmission des parts sera soumise au droit de vente et non aux droits de mutation à titre gratuit.
Il existe d'autres clauses statutaires qui organisent la transmission des parts sociales et sont particulièrement intéressantes pour les personnes non mariées ayant un élément d'extranéité.

Les clauses de participations croisées

En vue de diminuer la fiscalisation de la transmission des biens situés en France entre concubins, partenaires hétérosexuels souvent exclus des dispositifs des partenariats étrangers 1546453608647ou dans le but de protéger tant le conjoint survivant non marié que les intérêts des héritiers, le notaire peut soumettre l'idée de constituer dans un premier temps une SCI entre deux personnes, en prévoyant une répartition équitable des parts sociales, puis dans un second temps de réaliser un échange de l'usufruit des parts de chaque titulaire.
Traditionnellement, le gérant d'une SCI dispose de pouvoirs d'administration mais doit obtenir l'accord des autres associés pour signer des actes de disposition. Habitués à user de pouvoirs étendus dans leurs sociétés étrangères, les investisseurs souhaitent parfois que leurs pouvoirs de décision soient étendus.

Exemple de participation croisée

Voici l'exemple d'un couple belge (A.1 et A.2) non marié avec deux enfants, acquéreur d'un bien immobilier d'une valeur de 350 000 € ; ils créent une SCI avec un capital de 1 000 € constitué de 100 parts de 10 € chacune.
 1°) Constitution de la SCI : chaque associé détient 50 parts : A.1, les parts nos 1 à 50, A.2, les parts nos 51 à 100.
 2°) Échange de l'usufruit des parts : A.1 cède l'usufruit des parts 1 à 50 et reçoit l'usufruit des parts 51 à 100 ; A.2 cède l'usufruit des parts 51 à 100 et reçoit l'usufruit des parts 1 à 50.
Un droit de mutation de 5 % est dû sur la valeur du lot le plus élevé, établie sur la base de l'article 670 du Code général des impôts.
Au décès de A.1, A.2 consolide sa propriété des parts nos 1 à 50 et conserve l'usufruit des parts 51 à 100 ; les enfants reçoivent la nue-propriété des parts 51 à 100. Au décès de A.2, les enfants héritent de la totalité des parts nos 1 à 50 et sont automatiquement propriétaires des parts 51 à 100. La succession sera taxable sur la nue-propriété transmise aux enfants et non sur la valeur des parts en pleine propriété ; la charge fiscale du conjoint survivant sera donc annulée. Les enfants devront régler la succession seulement sur la moitié des parts (nos 1 à 50), au deuxième décès.

Le renforcement des pouvoirs des gérants et l'élargissement de l'objet social

Selon l'article 1848, alinéa 3 du Code civil, il est possible d'aménager les articles des statuts des sociétés civiles relatifs aux pouvoirs du ou des gérants et à l'objet de la société. Ainsi, des pouvoirs élargis peuvent être attribués au gérant et aux cogérants.
Constitué dans un but de gestion du patrimoine, ce type de société dite « patrimoniale » présente un premier avantage : son objet social est d'ordre immobilier, mobilier et financier. Ainsi, en cas d'investissement en France par un étranger, l'ameublissement des parts sociales évoqué ci-dessus pourra permettre d'inclure la transmission des comptes bancaires et autres contrats financiers situés en France avec celle des parts sociales.
Ensuite, dans ce type de société civile, il est possible de prévoir que le ou les gérants seront titulaires de pouvoirs étendus. Ils pourront ainsi décider de la vente ou de l'affectation hypothécaire d'un bien immobilier sans avoir à convoquer une assemblée générale des associés. Ce type de clause séduit particulièrement les étrangers qui souhaitent maîtriser totalement la gestion de leurs biens, comme ils en ont l'habitude dans leur pays. Il est conseillé de prévoir que certaines décisions telles que la vente d'un bien immobilier ou la souscription d'un emprunt devront être prises par les deux cogérants.