Les règles de conflit de lois diffèrent selon qu'elles traitent les questions liées aux conditions de fond du mariage (§ I) ou aux conditions de forme (§ II). Les effets du mariage seront brièvement évoqués (§ III).
Le mariage
Le mariage
Si le notaire n'intervient pas directement dans la célébration du mariage, il peut être consulté par des clients qui épousent une personne de nationalité étrangère. Il doit être à même de leur indiquer sous quelle forme leur mariage peut être célébré et les formalités à respecter (Chapitre I). Le statut des personnes mariées entraîne en outre des conséquences, notamment au regard du régime primaire impératif dont il y a lieu de vérifier s'il s'applique à tous les époux résidant sur le territoire français quelle que soit leur nationalité (Chapitre II).
Les conditions de fond du mariage
L'article 202-1 du Code civil, modifié par la loi du 4 août 2014, édicte que : « Les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle. Quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux, au sens de l'article 146 et du premier alinéa de l'article 180.
Deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l'une d'elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l'État sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet ».
Cet article pose un principe et deux exceptions.
Le principe énonce que lorsque les deux époux ont une nationalité commune, la loi applicable est leur loi nationale. Si tel n'est pas le cas, le Code civil retient un principe d'application distributive des deux lois. Chaque époux doit démontrer qu'il remplit les conditions de sa propre loi nationale pour se marier
1544279470472.
Il existe deux exceptions :
L'une concerne le consentement : l'alinéa 1 de l'article 202-1 du Code civil introduit par la loi du 4 août 2014 exige que le consentement exprimé soit celui du droit français visé par les articles 146 et 180, alinéa 1 du Code civil.
L'autre concerne l'application distributive de deux lois : l'alinéa 2 de l'article 202-1 du Code civil prévoit la possibilité pour les couples de même sexe de se marier dès lors que la loi de l'État sur le territoire duquel l'un des époux a son domicile ou sa résidence le permet. Il faut néanmoins noter que cette possibilité n'est pas ouverte aux ressortissants de pays liés avec la France par des conventions bilatérales qui prévoient que seule la loi personnelle est applicable aux conditions de fond du mariage, sans pouvoir appliquer les exceptions prévues aux alinéas 1 et 2 de l'article. Tel est le cas par exemple du Maroc.
Concernant les mariages célébrés en France, l'ordre public peut néanmoins s'opposer à l'application de la loi étrangère. Il s'opposera par exemple au mariage avant l'âge matrimonial du droit français ou aux mariages pour des motifs religieux qui font une différence entre les femmes et les hommes
1529764219343.
Concernant les mariages célébrés à l'étranger, la notion d'ordre public est atténuée. L'arrêt Chemouni
1529764252115a tranché sur la reconnaissance en France d'un mariage polygamique, le considérant comme valable et produisant ses effets en France, à partir du moment où la loi nationale des deux époux le permettait.
Les conditions de forme du mariage
L'article 202-2 du Code civil dispose que : « Le mariage est valablement célébré s'il l'a été conformément aux formalités prévues par la loi de l'État sur lequel la célébration a eu lieu ».
Concernant les mariages célébrés en France, le mariage doit être célébré devant un officier d'état civil. La seule exception concerne le mariage consulaire qui ne peut s'adresser qu'à des époux ayant la même nationalité. Une loi du 29 novembre 1901 a ajouté deux alinéas à l'article 170 du Code civil et permet aux agents consulaires de célébrer des mariages entre des Français et des étrangers, dans certains pays définis par décret
1544280412926.
Concernant les mariages célébrés à l'étranger, le même principe est applicable. Ainsi, les formes de mariages les plus diverses sont valables à partir du moment où elles sont reconnues par les formes locales (mariages religieux ou privés…)
1544280062686. Leur validité en France est suspendue à leur transcription sur les registres français visée aux articles 171-1 et suivants du Code civil.
Les effets du mariage
Les effets du mariage concernent en principe :
- les effets personnels du mariage tels que la capacité, le nom, le domicile, les relations personnelles entre époux, la communauté de vie ;
- les contrats entre époux tels que les donations entre époux, les donations mobilières et immobilières et la responsabilité parentale ;
- les règles du régime primaire des articles 212 et suivants du Code civil ;
- les effets patrimoniaux du mariage comme l'obligation d'entretien, l'obligation aux charges du mariage.
La loi nationale commune des époux détermine les effets du mariage. Cette règle de conflit est énoncée à l'article 3, alinéa 3 du Code civil : « Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étrangers ». Si ceux-ci n'ont pas la même nationalité, la jurisprudence
1529764444107a retenu la loi du domicile commun des époux. Si les époux n'ont pas de domicile commun, la Cour de cassation applique la loi du for
1529764462233.
Cependant, les règles énoncées ci-avant sont d'application aujourd'hui restreintes. En effet, d'une part, la jurisprudence, en 1987, dans un arrêt Cressot
1529764497975, a décidé que les règles du régime primaire prévu par les articles 212 et suivants du Code civil sont très largement d'application territoriale, comme assimilées aux lois de police françaises.
D'autre part, le règlement n° 2016/1103 du 24 juin 2016 sur les régimes matrimoniaux, qui est entré en vigueur le 29 janvier 2019, a un champ d'application plus large et s'applique pour tous les effets patrimoniaux du mariage
1544287814993. D'autre part, le règlement n° 4/2009 du 18 décembre 2008 s'applique aujourd'hui sur les obligations alimentaires
1544287869437, et la convention de La Haye du 19 octobre 1996 définit les règles de l'autorité parentale
1544287944377.
La loi des effets du mariage ne concerne donc plus que les rapports personnels entre époux, les donations mobilières et immobilières entre époux, la capacité de la personne mariée, le nom des époux et l'adoption par deux époux.
Indépendamment des questions relevant du régime matrimonial, le mariage engendre des effets personnels (obligation de fidélité, de secours et d'assistance) et des effets patrimoniaux, notamment dans les contrats à titre onéreux entre époux. Par ailleurs, le régime primaire impératif est traité sous l'angle des effets du mariage et des lois de police.