Le point de départ du raisonnement est l'arrêt Bisbal
1520433305906, qui conclut que la règle de conflit – en tant qu'elle désigne une loi étrangère – ne s'impose pas au juge français. Les juges n'avaient donc pas l'obligation de relever d'office la règle de conflit et d'appliquer le droit matériel étranger désigné. L'arrêt précise que : « Les règles de conflit de lois, en tant du moins qu'elles prescrivent l'application d'une loi étrangère, n'ont pas un caractère d'ordre public, en ce sens qu'il appartient aux parties d'en réclamer l'application et qu'on ne peut reprocher aux juges du fonds de na pas appliquer d'office la loi étrangère et de faire, en ce cas, appel à la loi interne française, laquelle a vocation à régler tous les rapports de droit privé ».
En l'espèce, des époux espagnols avaient obtenu le divorce devant les juges français qui ont appliqué la loi française alors que la règle de conflit désignait le droit espagnol. Or, à l'époque, ce droit interdisait le divorce et les époux avaient volontairement omis d'invoquer la règle de conflit. Puis, insatisfait, le mari se pourvoit en cassation.
La cour rejette donc le pourvoi et précise qu'on ne peut reprocher au juge du fond de ne pas appliquer d'office la loi étrangère, et ce même si les droits en litige relèvent de l'ordre public. Cette solution avait l'avantage de faciliter la vie du praticien en visant la prééminence du droit du for. Cette solution a perduré pendant environ trente ans. Elle a cependant fait l'objet de vives critiques.
Dans un arrêt Cie algérienne de Crédit et de banque c/ Chemouny du 2 mars 1960
1520433428153, la cour a simplement admis que le juge, s'il le voulait, pouvait invoquer la règle de conflit désignant la loi étrangère. Dans cette espèce, Chemouny avait été condamné par le Tribunal de première instance de Beyrouth au remboursement d'une somme et à des dommages et intérêts envers la Compagnie algérienne de crédit et de banque. La cour d'appel française a déclaré irrecevable la demande d'exequatur du jugement libanais, au regard de la loi libanaise. La compagnie se pourvoit en cassation et reproche au juge du fond l'application de la loi étrangère. La cour rejette le pourvoi et précise « qu'il est vainement reproché aux juges français, saisis d'une demande d'exequatur, de faire application d'office d'une loi étrangère dont les parties n'avaient pas fait état devant eux et qui n'intéressait pas l'ordre public ». Finalement, face aux critiques, une solution opposée a été adoptée et a obligé le juge à appliquer d'office la règle de conflit de loi.