La reconnaissance

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

La reconnaissance

Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation 1537085858065, la décision de divorce, de séparation de corps ou d'annulation du mariage émanant d'un État tiers bénéficie en principe de la reconnaissance de plein droit en France. C'est le principe qui est également retenu par le Conseil d'État : « Les jugements rendus à l'étranger relativement à l'état et à la capacité des personnes produisent leurs effets en France, indépendamment de toute déclaration d'exequatur, sauf dans la mesure où ils impliquent des actes d'exécution matérielle sur des biens ou de coercition sur des personnes ». Dans ces conditions, les époux peuvent se remarier, sans qu'il puisse leur être imposé d'avoir, au préalable, obtenu l'exequatur de la décision.
Mais si le jugement étranger bénéficie ainsi d'une présomption de régularité internationale, celle-ci est toujours susceptible d'être contestée.
Les causes de refus de reconnaissance d'un jugement rendu dans un État non membre de l'Union européenne sont plus nombreuses en droit commun, les conditions de régularité étant plus sévères. Pour qu'un jugement soit reconnu régulier, il y a lieu de vérifier que les trois conditions suivantes sont cumulativement réunies :
  • la compétence du juge étranger ayant rendu la décision : le juge étranger doit présenter des liens caractérisés avec la situation et il ne doit pas exister de compétence exclusive des juridictions françaises 1537087444955 ;
  • le choix de la juridiction étrangère : celle-ci ne doit pas avoir été choisie frauduleusement par l'un des époux pour échapper aux conséquences d'un jugement français. La fraude est caractérisée si le demandeur organise un rattachement fictif à un ordre juridique étranger dans le but de rendre ses juridictions compétentes 1537100148113.Dans le cas où le demandeur a des liens tant avec la France qu'avec l'ordre juridique étranger, la question se pose de savoir si l'option pour la juridiction étrangère (par hypothèse plus favorable pour le demandeur) peut constituer ou non une fraude. L'existence d'une option de compétence est-elle de nature à exclure la fraude ?La Cour de cassation admet la fraude lorsque la juridiction étrangère est saisie dans l'objectif manifeste de faire échec à une saisine antérieure d'une juridiction française 1537101924239. Toutefois, il existe très peu de cas dans lesquels la fraude a été admise. En effet, lorsque le litige présente des liens également avec l'État dont la juridiction a été saisie, il est délicat d'affirmer que la saisine du juge étranger a seulement été effectuée dans un but frauduleux ;
  • la conformité avec l'ordre public international : l'exception d'ordre public est appréciée en tenant compte de l'ordre public du for et du contenu de la loi appliquée par la décision étrangère. La Cour de cassation subordonne souvent l'intervention de l'ordre public à une question de proximité : que les époux ou tout au moins l'un d'eux ait son domicile en France, ou que les époux résidant à l'étranger soient de nationalité française. La contrariété à l'ordre public international peut parfois résulter des dispositions du jugement relatives aux enfants en raison du non-respect du principe d'égalité entre les deux parents dans l'exercice de l'autorité parentale 1537103700190.
Plus généralement, toute décision qui méconnaîtrait l'égalité entre hommes et femmes est susceptible de porter atteinte à l'ordre public.

Les répudiations musulmanes

La répudiation se définit comme le droit pour l'époux de dissoudre unilatéralement le mariage, c'est-à-dire sans le consentement de son épouse ou sans avoir à prouver sa faute. Cette procédure existe dans certains pays musulmans.
En pratique, le problème se pose de la reconnaissance en France des répudiations prononcées à l'étranger et de leur compatibilité avec l'ordre public français.
Dans un premier temps, en 1983 1537623572846, la jurisprudence a accueilli favorablement les répudiations musulmanes prononcées à l'étranger au nom de l'effet atténué de l'ordre public dès l'instant où celles-ci s'accompagnaient d'un certain nombre de garanties procédurales (notamment si la femme avait été appelée à la procédure et avait pu faire valoir ses prétentions) et pécuniaires.
Dans un second temps, et à partir de cinq arrêts du 17 février 2004, la Cour de cassation a refusé d'accueillir les répudiations musulmanes au titre du principe d'égalité des époux et sur le fondement de l'ordre public de proximité, et ce même si la procédure a été « loyale et contradictoire » : l'exception de l'ordre public se déclenche si les époux ou l'épouse sont domiciliés en France 1537623852956.
Une incertitude demeure toutefois quant au critère d'intervention de l'ordre public de proximité : la Cour de cassation prend en compte le domicile de l'un ou des deux époux ainsi que leur nationalité, et ce tantôt de façon cumulative, tantôt isolement.