Les personnes physiques

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Les personnes physiques

Il s'agit d'une catégorie qui regroupe toutes les questions extrapatrimoniales liées à la personne dans la société. La catégorie de rattachement varie selon les pays. En France, seules les relations d'ordre personnel sont rattachées à cette loi. Elles regroupent le statut individuel, c'est-à-dire les actes d'état civil (§ I), le nom (§ II), ainsi que la capacité et la protection des incapables (§ III). Les relations patrimoniales, comme les régimes matrimoniaux ou les successions, sont rattachées à la famille.
Il faut avoir à l'esprit que tous les pays ne découpent pas les catégories de la même manière. Dans les pays occidentaux à tendance personnaliste, comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne, le statut personnel regroupe non seulement les relations d'ordre personnel, comme en France, mais aussi leurs relations patrimoniales. Les pays occidentaux de type common law à tendance territorialiste ont une conception plus restrictive du statut personnel. Enfin, pour de nombreux pays d'Afrique noire ou du pourtour méditerranéen, les règles applicables au statut personnel dépendent de la religion ou de l'appartenance à une communauté.
La question de la nationalité est, selon les pays, considérée comme faisant partie de la catégorie du statut personnel. Cependant, elle n'est pas assujettie à des règles de conflit de lois puisque son attribution est donnée par chaque État de façon unilatérale. Les règles qui sont applicables pour déterminer la nationalité ne seront donc pas présentées.
Par ailleurs, le domicile est un élément de rattachement retenu par une règle de conflit et non une catégorie de rattachement comme envisagé par une partie de la doctrine. Cette notion ne sera pas, en conséquence, traitée séparément dans les développements.
Pour la plupart des pays, le statut personnel dépend soit de la loi nationale, soit de la loi du domicile.
Les avantages du rattachement à la loi nationale sont pour l'essentiel la stabilité et une certaine permanence. Il offre également plus de certitudes sur la notion en tant que telle. La nationalité est donnée par la réglementation du pays qui l'octroie. Une partie de la doctrine considère que la loi nationale est la mieux adaptée au tempérament de l'individu 1543064513321.
D'autres pays rattachent le statut personnel au domicile, qui implique la prise en compte de différents critères matériels et psychologiques plus difficiles à cerner. Cependant, ce rattachement présente également certains avantages. Il peut plus facilement être commun à tous les membres d'une famille et facilite ainsi son unification. Il favorise l'intégration des individus dans le pays d'accueil et évite la multiplicité des statuts dans un même pays. Cet argument a été particulièrement mis en avant dans les pays d'immigration, notamment en France dans les années 1970 1529760484221.
Les pays occidentaux à tendance personnaliste ont retenu le rattachement à la loi nationale. Il s'agit de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne, mais aussi du Luxembourg, des Pays-Bas et de la France. Les pays de common law et les pays scandinaves ont retenu la loi du domicile. À noter par ailleurs que cette notion est différente du droit français pour être plus proche de notre conception de la résidence habituelle.
Les pays de grande immigration, tels que les États-Unis, le Canada, l'Australie, mais aussi l'Argentine et le Brésil ont cherché au maximum à intégrer les communautés étrangères à leur propre statut en retenant une théorie territorialiste.
Aujourd'hui, la plupart des traités internationaux en matière de statut personnel ne prennent en compte ni la loi nationale ni la loi du domicile, mais la loi de la résidence habituelle. C'est le cas pour les conventions de La Haye du 5 octobre 1961 sur la protection des mineurs 1544196446864ou la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur les régimes matrimoniaux 1544196526529. La Convention de La Haye est donc l'investigatrice de cette notion et, par mimétisme, les règlements de l'Union européenne l'ont très largement reprise, comme par exemple le règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012 1544196603785sur les successions. Par ailleurs, la tendance actuelle du développement du principe de l'autonomie permet dans certains cas à l'individu d'opter soit pour sa loi nationale, soit pour la loi de son domicile 1543945674395.

Les actes d'état civil

Les règles de conflit de lois en matière d'état civil sont définies par le Code civil, dans trois articles.
L'article 3, alinéa 1 du Code civil édicte que : « Les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui habitent le territoire ».
L'article 47 du Code civil prévoit que : « Tout acte d'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ».
L'article 48, alinéa 1 du Code civil ajoute que : « Tout acte de l'état civil des Français en pays étranger sera valable s'il a été reçu, conformément aux lois françaises, par les agents diplomatiques ou consulaires ».
Tous les actes d'état civil (naissance, mariage, décès) des étrangers doivent être déclarés à l'état civil français, comme c'est le cas pour les Français. L'acte d'état civil d'un Français reçu en pays étranger par les agents diplomatiques ou consulaires français est valable, mais leur compétence est facultative. En effet, ces actes peuvent valablement être établis par les autorités étrangères et doivent être transcrits au service de l'état civil de Nantes, rattaché au ministère des Affaires étrangères.
Les actes d'état civil étrangers, actes publics, doivent être légalisés ou faire l'objet d'une apostille pour être authentifiés en France. Cette question sera évoquée par la deuxième commission 1543656043088. De nombreuses conventions bilatérales ont été conclues avec divers pays.
La Commission internationale de l'état civil (CIEC) a élaboré plusieurs textes pour faciliter la circulation des actes d'état civil, et notamment la convention n° 16 du 8 septembre 1976 sur la délivrance d'extraits plurilingues d'actes de l'état civil, entrée en vigueur en France le 16 janvier 1987.

Le nom

– La transmission du nom. – Avant la loi du 18 novembre 2016, dite « de modernisation de la justice du xxi e siècle », la jurisprudence française avait déterminé que la loi applicable était celle des effets du mariage 1529761154505. Mais cette règle posait question pour déterminer la loi applicable aux enfants pour lesquels ce rattachement ne pouvait fonctionner. Ils relevaient alors de la loi des effets de la filiation établie hors mariage.
La loi du 18 novembre 2016 a alors introduit un nouvel article 311-24-1 dans le Code civil. Il est précisé qu'« en cas de naissance à l'étranger d'un enfant dont au moins l'un des parents est Français, la transcription de l'acte de naissance de l'enfant doit retenir le nom de l'enfant tel qu'il résulte de l'acte de naissance étranger ». La loi applicable est donc celle du lieu de déclaration de la naissance de l'enfant.
Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne est intervenue en matière de nom, plus particulièrement avec l'arrêt Garcia Avello 1531649698054. Dans cet arrêt, la Cour s'est fondée sur le principe de la libre circulation des personnes au sein de l'Union européenne et impose aux États membres de reconnaître le nom attribué par l'un des États membres. Les faits étaient les suivants : les parents d'enfants ayant la double nationalité belge et espagnole, nés et résidant en Belgique, se sont vu refuser par les services de l'état civil belges l'adjonction du nom de la mère à celui du père alors que cela avait été autorisé par les services espagnols. La Cour a considéré que les binationaux avaient le choix entre leurs deux lois nationales.
– La protection et le changement de nom. – La loi nationale de la personne souhaitant changer de nom est applicable par principe. Cette solution est conforme à la Convention d'Istanbul du 4 septembre 1958 ratifiée par la France avec huit autres pays. Cependant, après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme 1529761309408, l'article 61-4 du Code civil, alinéa 2 a ajouté que : « Les décisions de changement de prénoms et de nom régulièrement acquises à l'étranger sont portées en marge des actes de l'état civil sur instructions du procureur de la République ». Il faut noter que la doctrine a des positions divergentes sur cette question. La jurisprudence des juridictions internationales a une influence certaine en la matière. La loi nationale a parfois été retenue, car elle avait l'avantage de la simplicité 1529761379152. La Cour de cassation a aussi énoncé que la loi des effets du mariage est compétente pour régir la transmission du nom aux enfants nés d'un couple marié 1529761410913, mais cette jurisprudence est également très controversée.

La capacité et la protection des incapables

La loi française distingue les incapacités générales et spéciales et cette division a été reprise pour déterminer les règles de conflit de lois en droit international privé. En droit français, les incapacités générales sont celles qui atteignent les personnes pour tous les actes et recouvrent toutes les incapacités d'exercice (minorité, tutelles…), qu'elles soient d'origine légale ou judiciaire. Les incapacités spéciales gèrent quant à elles les personnes à l'occasion d'un acte particulier.
En droit international privé, les incapacités spéciales revêtent un caractère exceptionnel et sont soumises à la loi applicable à l'institution dont elles dépendent. Les incapacités spéciales de recevoir, telles les donations de biens présents, sont soumises à la loi du contrat ou à la loi des effets du mariage. Les incapacités de disposer à titre gratuit sont soumises à la loi successorale anticipée, soit la loi qui, en vertu du règlement « Successions », aurait été applicable à la succession de la personne ayant pris la disposition si elle était décédée le jour de son établissement 1543587585426.
Les règles particulières qui gèrent les incapacités générales des mineurs sont en principe aujourd'hui régies en droit français par le règlement européen n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 qui définit des règles de conflit de juridictions (A). Si l'enfant ne réside pas habituellement dans un État membre (B), les traités internationaux sont susceptibles de s'appliquer. Une convention internationale détermine également les règles de conflit de lois pour les majeurs. Enfin, lorsque l'enfant mineur ne réside ni dans un État membre ni dans un État partie ayant ratifié une convention de La Haye, il sera fait application des règles de droit français (C).

Règlements européens

Le règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, dit « Bruxelles II bis » est entré en vigueur le 1er août 2004 dans tous les États membres à l'exception du Danemark. Son applicabilité a été différée au le 1er mars 2005. Ce règlement a abrogé le règlement n° 1347/2000 dit « règlement Bruxelles II ». Il évoque donc la question des conflits de juridiction 1544196853963Cependant, il est néanmoins brièvement évoqué dans cette partie, car, en l'espèce, le notaire doit connaître le juge compétent pour autoriser les actes, indépendamment de toute action contentieuse.
Le champ de compétence du règlement est plus large que la convention de La Haye du 19 octobre 1996, notamment sur la question de la responsabilité parentale. Le règlement et la convention sont en concurrence sur la compétence, la reconnaissance et l'exécution des jugements. Le règlement prime la convention, mais pour toutes les questions non traitées par celui-ci, le notaire français devra se référer aux règles de la convention de La Haye.
L'article 8 donne une compétence générale au juge de l'État de la résidence habituelle de l'enfant. Cette notion a été définie par la Cour de justice de l'Union européenne 1529762581074. À défaut de pouvoir définir la résidence habituelle ou dans le cas de danger du mineur, c'est la juridiction de l'État sur le territoire duquel l'enfant est présent qui est compétent. Le règlement s'applique notamment en matière de responsabilité parentale, de droit de garde et de visite, mais aussi en matière de tutelle et curatelle, de placement, de désignation des personnes chargées de s'occuper de la personne ou des biens de l'enfant, de représentation, d'assistance, ou encore pour ce qui concerne les mesures de protection liées à l'administration, à la conservation ou à la disposition de ses biens.

Les conventions internationales concernant les mineurs et les majeurs

Les conventions internationales concernant les mineurs

La Convention de La Haye du 5 octobre 1961
Cette convention est entrée en vigueur dans neuf pays 1529762200556. Elle est entrée en vigueur en France le 10 novembre 1972. Elle s'applique pour les mineurs ayant leur résidence habituelle dans un État partie et est d'application universelle, c'est-à-dire qu'elle s'applique même si le mineur a la nationalité d'un État non contractant. Selon l'article 12 de la convention, elle s'applique pour tout mineur qui a cette qualité tant du point de vue de sa loi nationale que selon la loi interne du pays de résidence. La convention attribue des compétences aux autorités administratives et judiciaires de l'État de la résidence habituelle (art. 1er). Elle règle les questions de protection de la personne et des biens du mineur. Les États parties à la convention s'engagent à reconnaître les rapports d'autorité de plein droit de la loi nationale du mineur (art. 3). Par ailleurs, en cas de danger sérieux pour la personne du mineur, les autorités de l'État de la résidence habituelle peuvent prendre des mesures de protection (art. 8). La convention s'applique également lors de la mise en place de mesures de protection de l'enfant en cas de divorce des parents, si celle-ci s'applique soit parce que l'enfant est ressortissant de l'État du for, soit parce qu'il réside habituellement dans cet État. Si tel n'est pas le cas, les procédures peuvent être dispersées dans divers systèmes juridiques.
La Convention de La Haye du 19 octobre 1996
Cette convention est entrée en vigueur dans l'ensemble des pays de l'Union européenne 1529762402576.
Elle est entrée en vigueur en France le 1er février 2011 et regroupe quarante-neuf États parties. Elle est d'application universelle et s'impose dès que l'enfant à sa résidence en France. Elle pose par principe que les autorités des États contractants appliquent leur propre loi. Toutefois, dans la mesure où la protection de la personne ou des biens de l'enfant le requiert, elles peuvent exceptionnellement appliquer ou prendre en considération la loi d'un autre État avec lequel la situation présente un lien étroit. Elle remplace la convention du 5 octobre 1961 dans le rapport avec les États parties. Elle donne également la possibilité aux États de conclure d'autres accords sur le même sujet, en visant les accords régionaux, et implicitement les règlements européens. Le règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, dit Bruxelles II bis, qui a déjà été évoqué (V. supra, n° ), s'applique donc pour les États membres également parties à la convention si l'enfant réside habituellement sur le territoire de l'un d'eux.
La convention supprime le rattachement cumulatif lié à la majorité retenu par la convention de 1961 puisque son article 2 précise qu'elle « s'applique aux enfants à partir de leur naissance jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de dix-huit ans ». Elle définit soigneusement lesdomaines d'application dans son article 3. Ils portent notamment sur la tutelle, la curatelle, l'administration, la conservation ou la disposition des biens de l'enfant, le droit de garde, le droit de visite, l'attribution, l'exercice ou le retrait de la responsabilité parentale. Dans son article 4, elle exclut les matières non concernées qui sont notamment la filiation, l'adoption, les nom et prénom de l'enfant, les obligations alimentaires, les successions ou les mesures d'éducation. Par ailleurs, elle détermine le tribunal compétent pour prendre les mesures de protection et précise la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice. L'article 5 détermine le principe : « Les autorités, tant judiciaires qu'administratives, de l'État contractant de la résidence habituelle de l'enfant sont compétentes pour prendre des mesures tendant à la protection de sa personne ou de ses biens ». La convention précise, à l'article 10, que les juridictions compétentes pour connaître du divorce des parents peuvent, dans certains cas, prendre des mesures de protection de la personne ou des biens de l'enfant. Enfin, et comme les textes précédents, les autorités de tous les États contractants sont compétentes pour prendre des mesures de protection en cas d'urgence.

Le droit conventionnel concernant les majeurs

La convention de La Haye du 13 janvier 2000 comprend onze États parties. Elle est entrée en vigueur en France le 1er janvier 2009. Elle couvre toutes les mesures concernant les majeurs à compter de cette date. Elle laisse la possibilité pour les États parties, comme c'est le cas pour la convention du 19 octobre 1996 (V. supra, n° ), d'appliquer une législation spécifique régionale, laissant la place à un futur éventuel règlement européen.
Dans son article 5, la convention donne compétence aux autorités administratives et judiciaires de l'État partie de la résidence habituelle de l'adulte. L'article 7 prévoit cependant une application subsidiaire de la loi de l'État partie dont l'adulte a la nationalité, qui, selon le principe de la proximité 1543065292101, pourrait être à même de mieux apprécier l'intérêt de l'adulte.
Enfin, la convention prend en compte les législations des États parties qui permettent une certaine liberté de choix de la part de la personne protégée, choix qui aurait été effectué alors qu'elle avait encore toutes ces facultés intellectuelles. C'est le cas notamment pour les mandats d'inaptitude qui existent dans certaines législations, et notamment pour la France, avec le mandat de protection future.

Les dispositions internes

L'article 3, alinéa 3 du Code civil édicte que : « Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger ». Cette règle a été bilatéralisée 1543065556878par la jurisprudence.
Concernant les incapacités, cet article s'applique uniquement pour les mineurs qui n'ont pas leur résidence habituelle dans un État membre de l'Union européenne, ni dans un État ayant ratifié l'une des conventions de La Haye.
La loi nationale détermine l'âge de la majorité, le régime de protection, son organisation, les pouvoirs des représentants du mineur, les formalités administratives nécessaires à mettre en œuvre pour tous les actes (d'administration, de disposition), y compris pour les immeubles.