Les moyens de preuve

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Les moyens de preuve

Même si le principe réside dans une collaboration active à laquelle peuvent (et doivent) participer les clients dans la recherche du droit qu'ils entendent voir appliquer, le notaire sera bien souvent seul pour procéder aux investigations nécessaires.
Au-delà du fonds documentaire à sa disposition à l'Étude (collections desJurisClasseurs, parmi lesquelles les collectionsDroit international privé,Droit comparé ; ouvrages monographiques et autres…), le notaire français peut aussi compter sur un puissant soutien des Centres de recherche, d'information et de documentation notariale (Cridon) avec leurs propres fonds de documentation et leurs propres collaborations avec d'autres organismes ou établissements français ou étrangers.
Il pourra également mettre à profit les différents organismes et institutions qui ont été évoqués et analysés dans les travaux de la première commission 1543247289682, à l'exception toutefois du réseau judiciaire européen et des services d'information sur le droit étranger prévue par la Convention de Londres du 7 juin 1968 dont l'accès est exclusivement réservé aux services judiciaires 1543247686540.
Toutes ces recherches et possibilités ne permettront au notaire que de recueillir l'information. La preuve, quant à elle, se fait par tous moyens 1543246446777, notamment par la production d'un certificat de coutume ou d'un avis juridique (legal opinion).

Le certificat de coutume

Le certificat de coutume est un document émanant d'un juriste local qui atteste de l'existence d'un droit, en donne son contenu, et peut même en faire une interprétation 1543297109660.
Outre le fait que le notaire devra s'assurer que le certificat de coutume dont il demande la production corresponde bien à la loi applicable compétente 1543297209434, ce document est considéré comme un élément de fait, puisque sa valeur dépend essentiellement de la compétence du juriste local qui l'établit, d'une part (ce dernier devant avoir «une connaissance approfondie du droit international privé français, ainsi qu'une pratique des principes généraux de divers droits étrangers et de leurs systèmes de droit international privé») 1543736370012et que sa portée n'équivaut qu'à un simple avis, sans aucun caractère contraignant, ni aucune force probante, d'autre part. De surcroît, il ne lie ni les parties ni les autorités.
À plusieurs occasions, le Congrès des notaires de France a émis des propositions visant à renforcer la validité du certificat de coutume, en proposant la création au niveau européen d'un règlement qui donnerait les grandes lignes d'un certificat de coutume européen 1543737047015.
Le notaire doit donc rester particulièrement vigilant, et s'il juge que les informations qui lui sont données sont insuffisantes ou difficilement accessibles, il lui incombe de vérifier le sérieux du document.
Sa responsabilité pouvant se trouvée engagée dans l'instruction de son dossier, le certificat de coutume n'étant qu'un élément de fait, s'il émet des doutes sérieux sur son contenu, le notaire peut refuser d'instrumenter 1543297808018.
C'est précisément pour cette raison qu'en fonction des enjeux du dossier, le notaire préférera au certificat de coutume un document issu d'une pratique essentiellement anglo-saxonne du droit international des sociétés : l'avis juridique, autrement appelélegal opinion.

Lalegal opinion(avis juridique)

Unelegal opinionconstitue un avis émis par un juriste qui éclaire sur un point de droit particulier, spécifiquement rapporté à l'espèce soumise à examen.
Tandis qu'un certificat de coutume peut être délivré pour indiquer une situation juridique générale, lalegal opinionest plus qu'une simple consultation juridique.
Ce document, qui n'est défini par aucun texte dans notre système, a fait l'objet d'une étude fouillée par le Cridon de Paris, qui a fait ressortir certaines précautions à respecter pour le notaire qui accepte de le délivrer, au regard du statut du notariat, d'une part, et de la responsabilité attachée à sa rédaction, d'autre part 1543740243467.
Il est de principe que le juriste qui est amené à l'établir justifie non seulement de sa qualification à pouvoir le faire, mais encore, justifie, savoir :
  • de ses qualifications professionnelles qui relèvent bien d'une fonction qu'il exerce dans un ordre reconnu auquel il appartient ;
  • de son ancienneté dans cet ordre, ou dans la spécialité pour laquelle il est sollicité ;
  • parfois, de sa production intellectuelle antérieure ayant contribué à acquérir ses compétences (ou sa réputation) ;
  • de la souscription d'une assurance couvrant sa responsabilité civile professionnelle, ainsi que le plafond au-dessus duquel il pourrait y avoir exclusion de la couverture.
De ce fait, lalegal opinionremplit habituellement plusieurs critères 1543302136143 :
  • elle décrit d'abord, dans une introduction, le contexte dans lequel le juriste est sollicité : dans un exposé préalable, il analyse le contexte qui lui permet de comprendre la question posée ;
  • dans un deuxième temps, le juriste décrit et analyse les éléments de fait et de droit (étayés par la liste des documents utilisés) sur le fondement desquels il émet son avis juridique (cette partie de l'avis juridique est habituellement dénomméeAssumptions) ;
  • à la suite de cette analyse dans laquelle il décrit les différentes hypothèses de fait et de droit qu'il a retenues, le juriste émet une prise de position, de manière pouvant être plus ferme et détaillée qu'un certificat de coutume 1543301437142. La position prise par le rédacteur ( appeléeopinion), est fondée sur des références sérieuses de jurisprudence, textes de loi ou de doctrine qui peuvent être référencées avec précision ;
  • la conclusion de cet avis juridique peut être réservée à d'éventuelles réserves tout aussi référencées et détaillées que celles ayant servi à bâtir l'analyse de l'opinion. Cette dernière partie constitue lesqualificationsde lalegal opinion.
Cet avis juridique vaut en quelque sorte attestation de régularité ou certificat de conformité. Lalegal opinionpeut se limiter à confirmer que le signataire ou l'intervenant étranger a la pleine capacité ainsi que les pouvoirs pour que l'acte qu'il signe ou auquel il intervient ait sa pleine efficacité et que rien ne s'oppose à son exécution 1543303434155.
Après avoir respecté son devoir de recherche du droit étranger, après avoir accédé à son contenu au moyen de véhicules factuels et empiriques éprouvés, le notaire doit effectuer un dernier contrôle : vérifier l'absence d'obstacle pouvant empêcher l'application de la loi étrangère dans son dossier.