Les règlements jumeaux
1544956019303(respectivement Règl. [UE] n° 2016/1103 du Conseil, 24 juin 2016, mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux [Règl. «Régimes matrimoniaux» – RM –] et Règl. [UE] n° 2016/1104 du Conseil, 24 juin 2016, mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés [Règl. «Effets patrimoniaux des partenariats enregistrés» – EPPE]) sont entrés simultanément en application le 29 janvier 2019 entre les États membres qui ont décidé de participer à cette coopération
1544955471202.
Ces règlements ont été adoptés dans le cadre d'une coopération renforcée entre certains États, procédure dont l'objet est de permettre aux États membres qui le souhaitent d'adopter un instrument d'unification des règles de conflit de lois et de conflit de juridictions dans un domaine déterminé
1544956933045. Cette procédure a déjà été une première fois mise en œuvre par l'adoption du règlement Rome III (V. infra, n°).
Les articles 58 de ces deux instruments identiques prévoient les modalités permettant l'acceptation des actes authentiques entre les États membres participant à cette coopération renforcée
1544957744851.
L'article 58-1 de ce «paquet patrimoine du couple»
1544957301527prévoit qu'«un acte authentique établi dans un État membre a la même force probante dans un autre État membre que dans l'État membre d'origine ou y produit les effets les plus comparables, pour autant que cela ne soit pas manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre concerné».
Ce paragraphe premier de l'article 58 vise uniquement la force probante particulière attachée à l'acte authentique, ce qui laisse à penser que la circulation de l'acte dans le cadre de ces règlements concerne plus l'effet probatoire de l'acte que son contenu (c'est-à-dire «la situation juridique qu'il abrite»)
1544958188673.
Cette force probante renforcée de l'acte authentique permet à celui-ci de traverser les frontières entre les États coopérants sans craindre d'atténuation
1544958378989sauf difficultés résultant d'un recours ou d'une contestation pour atteinte à l'ordre public.
Concernant l'exception d'ordre public pouvant neutraliser l'effet probatoire renforcé de l'acte authentique, des décisions récentes de la Cour de Justice ont permis au juge européen de restreindre encore un peu plus la recevabilité d'une action reposant sur la base de l'exception d'ordre public soulevé dans l'État de destination
1544959033122.
L'interprétation restrictive renforce ainsi l'effet probatoire de l'acte transfrontière lorsqu'il répond à toutes les conditions de solennité requises pour être authentique.
Les juges ont pu en effet considérer qu'«en ce qui concerne la notion d'"ordre public" (...) que cette disposition doit recevoir une interprétation stricte en ce qu'elle constitue un obstacle à la réalisation de l'un des objectifs fondamentaux et qui ne doit jouer que dans des cas exceptionnels. Si les États membres restent, en principe, libres de déterminer, conformément à leurs conceptions nationales, les exigences de leur ordre public, (...) il lui incombe [à la Cour] néanmoins de contrôler les limites dans le cadre desquelles le juge d'un État membre peut avoir recours à cette notion pour ne pas reconnaître une décision émanant d'un autre État membre»
1544959500522.
L'effet probatoire déjà renforcé de l'acte authentique est pleinement reconnu par le juge européen qui exige des conditions strictes pour accepter que l'ordre public au sein de l'Union soit invoqué par l'État membre requis.
Ce récent soutien de la Cour témoigne à l'acte authentique une force transfrontière qui lui permet, par ce soutien des juges, d'assurer avec encore plus de sécurité et de faciliter son exécution au sein de l'Union européenne.