La constitution des sociétés

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

La constitution des sociétés

La reconnaissance par un État d'une société qui réside sur son territoire consiste à admettre que cette société a la personnalité morale et qu'elle a été valablement constituée dans un autre État. À défaut de reconnaissance, la société ne pourrait effectuer aucun acte juridique sur le territoire qui ne l'a pas reconnue et ne pourrait donc s'y établir. L'enjeu de la reconnaissance se définissant comme « l'autorisation d'exercer une activité » sur le territoire de cet État 1544870117463.
En principe, la personnalité juridique des sociétés étrangères est reconnue de plein droit en France pour les sociétés de personnes étrangères. Cette solution se fonde sur l'article 11 du Code civil qui subordonne la jouissance des droits civils à la réciprocité diplomatique.
Pour les sociétés de capitaux, depuis l'abrogation de la loi du 30 mai 1857 intervenue dans l'article 27 de la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit, toutes les sociétés de capitaux émanant d'autres États sont reconnues en France.
La reconnaissance d'une société comme personne morale dépend toutefois de la régularité de sa constitution. Il faut distinguer entre celles qui sont constituées en France (Sous-section I)ou à l'étranger (Sous-section II).

Constitution en France

Une société constituée en France en respect des règles posées par le droit français acquiert la personnalité morale à compter de son immatriculation : l'article 1837, alinéa 1erdu Code civil dispose que : «Toute société dont le siège social est situé sur le territoire français est soumise aux dispositions de la loi française» , et qu'en vertu de l'article 1842, alinéa 1erdu même code, les sociétés jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation.
Peu importe que certains des associés soient des étrangers : la loi française le permet 1544870294308. Toutefois, en application de l'article R. 313-16 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les dirigeants ou associés étrangers doivent être titulaires d'une carte de séjour s'ils exercent une activité nécessitant une immatriculation au registre du commerce et des sociétés.
Pour être immatriculée en France, la société doit y avoir son siège statutaire.
Il faut distinguer le siège statutaire du siège social réel. En effet, une société ayant son siège statutaire en France peut parallèlement avoir son siège social réel à l'étranger si le centre des décisions est pris en dehors du territoire français.
Cette situation n'est pas interdite. En revanche, l'immatriculation en France d'une société avec un siège statutaire hors de France n'est pas possible. Exceptionnellement l'immatriculation en France d'une société dont le siège statutaire est à l'étranger est possible si elle exerce en France une activité et si celle-ci est postérieure à sa constitution dans l'État étranger.
Cette immatriculation est réalisée à des fins de publicité 1544870406046.

Constitution à l'étranger

Une société valablement constituée à l'étranger selon la loi locale est-elle automatiquement reconnue comme telle en France ? Pour répondre à cette question de la reconnaissance des personnes morales, il faut se placer soit selon les solutions proposées en termes de conflit de lois (§ I), soit en application de la méthode de la reconnaissance (§ II).

Méthode conflictuelle

Cette méthode de droit international privé pose le principe selon lequel, par extension de la règle posée par l'article 1837, alinéa 1erdu Code civil, toute société dont le siège social est situé sur un territoire étranger est soumise aux dispositions de la loi étrangère.
On tire de cette méthode deux conséquences :
  • si le siège statutaire est en France :la société ne peut être constituée à l'étranger. Selon le point de vue français, dans un tel cas la société ne saurait être reconnue. Cette position ferme la porte à une éventuelle possibilité de mise en œuvre du principe de l'autonomie en matière de constitution des sociétés. Lorsque les associés souhaitent échapper à la loi d'un pays, ils ont la possibilité de créer la société dans un autre pays et d' y fixer le siège statutaire, alors que le siège réel se situera dans le premier pays. Cette manœuvre permet de constituer une société sous les auspices plus intéressants d'une loi étrangère. Dans un tel cas, le droit positif français refuse de reconnaître la validité d'une telle société. Elle serait considérée comme frauduleuse ;
  • si le siège statutaire de la société est à l'étranger : la société est reconnue seulement si elle a été constituée dans le pays du lieu de son siège social et en application de la loi locale.En pratique, en matière de sociétés anonymes étrangères, la reconnaissance était soumise à une condition supplémentaire tenant à l'existence d'un décret pris en Conseil d'État. Elles ne pouvaient ester en justice en France dans le cadre de la défense de leurs intérêts et de leurs biens, car elles n'étaient pas visées par ce décret. La Cour de cassation a fait prévaloir l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme afin d'autoriser ces sociétés à ester en justice en France 1544870972899.
Cette approche issue de la méthode conflictuelle est aujourd'hui discutée par une partie de la doctrine qui considère désormais qu'il est préférable d'utiliser la méthode de la reconnaissance notamment, en lien avec l'ordre juridique européen.

Exemple

Une société dont le siège social est en Italie ne pourra être valablement constituée qu'en application du droit italien.

Méthode de la reconnaissance des situations

Cette méthode, sous l'influence des règles supranationales, tend à progresser car elle est plus adaptée aux problématiques existantes. En effet, ces règles imposent parfois de reconnaître les sociétés régulièrement constituées à l'étranger (A), ou exigent une adaptation de la méthode de la reconnaissance à certaines situations afin de permettre des solutions plus adaptées (B).

La reconnaissance imposée par les règles européennes

Le principe posé par le traité de Rome est celui de la reconnaissance pleine et entière des sociétés valablement constituées sur le territoire d'un État membre. Cependant, le traité de Rome laisse aux États le soin de fixer le critère de rattachement de ces sociétés : la diversité est donc présente.
On peut ainsi dresser un état des lieux des règles applicables :
La règle française : lieu du siège social
La règle de l'incorporation : lieu du pays d'enregistrement

Adaptation de la méthode de la reconnaissance à certaines situations

Cette adaptation consiste à considérer qu'une société existant à l'étranger est reconnue dans l'ordre juridique duforpour peu que cet alignement ne soit pas inacceptable en raison d'une fraude des parties (i.e.qu'une société étrangère est reconnue du point de vue de l'ordre juridique français dès qu'elle est reconnue par cet ordre juridique étranger. Par conséquent, le juge français n'a pas à apprécier l'exactitude du siège social d'une société étrangère) 1544872167016.