Son fondement juridique

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Son fondement juridique

Le fondement légal : l'ordonnance royale de la marine d'août 1681

L'origine de cette formalité est ancienne : on la rencontre pour la première fois dans l'ordonnance royale de la marine d'août 1681, connue sous le nom de «l'ordonnance de la marine».
Dans le livre Ier, titre IX, l'article 23 disposait que : «Tous actes expédiés dans les pays étrangers où il y aura des consuls ne feront aucune foi, s'ils ne sont pas par eux légalisés» 1540093131586.
En ces temps reculés, la formalité était vraiment nécessaire compte tenu du fait que les notions de distance, d'espace et de temps se mesuraient en jours de chevauchée, de carrosse ou encore de mer, rendant impossible le contrôle sur l'origine du document au moment de sa présentation sur le sol français. Aujourd'hui, si ces difficultés semblent bien abolies avec les moyens de transport et de communication, par internet, fax ou téléphone, le principe de la légalisation demeure tout de même.
Il résultait de ce texte que les actes publics établis par une autorité étrangère devaient toujours être légalisés par des agents diplomatiques français, le plus souvent par les consuls de France accrédités dans les pays où les documents avaient été établis.
De plus, les dispositions de l'article 3 du décret n° 46-2390 du 23 octobre 1946 relatif aux attributions des consuls prévoyaient en matière de procédure que : «Les consuls sont tenus de légaliser les signatures des fonctionnaires publics de leur circonscription, que ceux-ci aient dressé l'acte ou qu'ils l'aient simplement eux-mêmes légalisé. Ils ne manqueront pas, dans tous les cas, de mentionner la qualité du signataire à l'époque où il a dressé l'acte ou l'a légalisé. Ils peuvent, d'autre part, légaliser les actes sous seing privé passés par les Français résidant dans leur circonscription».
Le développement des relations internationales et les usages diplomatiques ont considérablement évolué : il a d'abord été admis, par exemple, que les documents publics établis dans un pays étranger pouvaient être légalisés par les consuls de ce pays accrédités en France, sauf à faire, en outre, viser le document par le ministère des Affaires étrangères.
Par la suite, compte tenu de l'évolution du droit consulaire, le ministère des Affaires étrangères a renoncé, à compter du 18 janvier 1967, à viser les documents établis dans un pays étranger et légalisés en France par le consul de ce pays ainsi que ceux établis par un consul étranger en France 1540093974379.
Par ailleurs, en vertu de l'article 2 du décret n° 91-152 du 7 février 1991 relatif aux attributions notariales des agents diplomatiques et consulaires, les chefs de mission diplomatique pourvue d'une circonscription consulaire et les chefs de poste consulaire 1540199526335avaient qualité pour instrumenter à l'égard de tous les Français, dans la limite de leur circonscription consulaire sauf force majeure.
Ils étaient également compétents pour recevoir les actes destinés à être produits en territoire français par des ressortissants étrangers 1540101979170.
Depuis cette date, peuvent être acceptés en France, tant par les administrations publiques, les notaires, que par les particuliers, les documents, copies ou extraits qui sont :
  • soit légalisés à l'étranger, par un consul de France ;
  • soit légalisés en France, par le consul du pays où ils ont été établis ;
  • soit établis en France, par un consul étranger sur la base d'actes conservés par lui.
La formalité de la légalisation a beaucoup évolué depuis lexvii e, tant dans ses fondements juridiques que dans ses modes opératoires.

L'abrogation de l'ordonnance de la marine par ordonnance du 21 avril 2006

L'article 7-II-7°) de l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006, relative à la partie législative du Code général de la propriété des personnes publiques abroge expressément l'ordonnance royale d'août 1681, seul texte légal consacrant l'existence de la formalité de la légalisation en France.
Cette abrogation a soulevé des interrogations en doctrine et chez certains hauts magistrats, tant le droit positif français s'est trouvé du jour au lendemain sans aucune base légale pour fonder la formalité de la légalisation 1540110296736.
Cette abrogation s'est opérée au moyen de l'ordonnance du 21 avril 2006, ratifiée par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 1540114049887, dont aucune des dispositions n'a repris le principe légal de l'existence de la légalisation dans notre système juridique interne.
Dans son rapport annuel de 2009, la Cour de cassation précise qu'«un bon ordonnancement juridique gagnerait à voir réaffirmé, en droit positif, le principe de l'obligation de légalisation des actes de l'état civil étranger» 1540114324585.
Face à cette situation, le gouvernement, dans une réponse écrite, précise d'ailleurs qu'il «expertise la nécessité d'une évolution législative sur la question plus large de la légalisation des actes publics» 1540114847087.
Le décret du 10 août 2007 1540127693930, qui se limite à préciser les différents types de légalisations, ne rétablit pas le fondement légal de la légalisation : la voie réglementaire ne peut rétablir, au regard de la hiérarchie des normes, un principe législatif.
Malgré l'absence de base légale fondant cette formalité, la Cour de cassation estime pourtant que l'obligation de légalisation doit aujourd'hui perdurer. C'est pour cette raison qu'elle considère que la légalisation résulte désormais de l'effet de la coutume internationale.

Le transfert normatif vers la coutume internationale

Constante depuis 2006, la jurisprudence de la Cour de cassation se fonde désormais sur la coutume internationale pour exiger la légalisation 1540113456003des actes étrangers devant produire effet en France.
La doctrine s'est interrogée sur le bien-fondé de cette analyse, les éléments constitutifs pour constater une coutume à l'ordre international semblant manquer, comme par exemple la preuve d'une pratique générale acceptée comme étant le droit par plusieurs sujets de l'ordre international 1540127142728.
Si les actes authentiques établis en France font pleine foi de leur origine sur leur seule apparence, «cette présomption d'authenticité ne saurait bénéficier aux actes étrangers» 1540128381876. En effet, «si dans une législation donnée, l'acte authentique fait foi de son origine, c'est parce qu'il se présente avec un appareil de formalités extérieures qui sont connues et aisément contrôlables. Mais les signes extérieurs d'authenticité d'un acte étranger peuvent évidemment être ignorés du tribunal [ou du notaire] saisi. Ils ne suffisent donc pas à convaincre de la régularité de l'acte le juge [ou le notaire] qui n'a jamais eu sous les yeux d'autres instruments similaires» 1540128698425.
Il résulte de ce qui précède que la formalité de légalisation, connue en France depuis au moins lexvii e siècle 1540130344475et qui relève depuis le 21 avril 2006 de la coutume internationale, du fait de sa suppression par mégarde 1540200323357, demeure le principe directeur en matière de véracité des actes établis à l'étranger devant produire leurs effets en France.
L'évolution de la norme de cette formalité en France évoquée, ses définitions, tant en droit interne qu'en droit international, peuvent maintenant être abordées.