Au sein de l'Union européenne

RÉDIGER : L’acte notarié français dans un contexte international

L'acte authentique et l'institution de l'authenticité

Le statut du notaire et de l'acte authentique notarié selon le droit européen

Préparation et rédaction de l'acte : enjeux et méthodologie

La circulation internationale de l'acte

La fiscalité internationale

Rémunération et protection sociale : les enjeux de l'international

Les trusts

L'assurance vie dans un cadre international

Au sein de l'Union européenne

Avant l'entrée en vigueur du traité de Tampere qui, par le pouvoir normatif reconnu au Parlement et au Conseil de l'Europe quant à l'établissement de règles de droit international privé et de droit matériel, permet l'adoption de règlements européens (Sous-section II)avec application immédiate dans les systèmes internes, deux conventions européennes ont pour objet la simplification de la circulation des actes publics (Sous-section I).

Les conventions européennes

La Convention de Londres du 7 juin 1968

La convention du 7 juin 1968 signée à Londres est relative à la suppression de la légalisation des actes établis par les agents diplomatiques ou consulaires. Elle s'applique à tous les actes établis en leur qualité officielle par des agents diplomatiques ou consulaires d'un des États contractants, qui exercent leurs fonctions sur le territoire de tout État et qui doivent être produits sur le territoire d'un autre État contractant, ou devant des agents diplomatiques ou consulaires d'un autre État contractant exerçant leurs fonctions sur le territoire d'un État qui n'est pas partie à la convention 1541333031241.
Cette convention s'applique également aux déclarations officielles, telles que les mentions d'enregistrement, visas pour date certaine et certifications de signature apposés par les agents diplomatiques ou consulaires sur des actes autres que ceux visés ci-dessus 1541333138151.

La Convention de Bruxelles du 25 mai 1987

La convention faite à Bruxelles le 25 mai 1987 concerne la suppression de la légalisation d'actes publics dans les États membres des Communautés européennes.
Cette convention prévoit que tout État contractant dispense de toute forme de légalisation ou de toute autre formalité équivalente ou analogue les actes publics 1541344438455.
Elle a été signée par la France le 11 juillet 1990, et le décret portant publication de ladite convention a été signé le 1er avril 1992, et publié auJournal officielle 8 avril 1992 1541344257159.
Les États liés par cette convention sont 1541347408045 : l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, la France, la Grèce, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, et l'Irlande.
Elle est entrée en vigueur dans les États suivants :
  • la Belgique depuis le 28 avril 1997 ;
  • Chypre depuis le 29 avril 2005 ;
  • le Danemark depuis le 12 mars 1992 ;
  • l'Estonie depuis le 21 juin 2013;
  • la France depuis le 12 mars 1992 ;
  • l'Irlande depuis le 9 mars 1999 ;
  • l'Italie depuis le 12 mars 1992 ;
  • la Lettonie depuis le 21 juin 2004.
En vertu de l'article 10, cette convention remplace entre les États contractants les dispositions des autres traités, conventions ou accords relatifs à la simplification ou la suppression de la légalisation des actes (sauf exception telle que pour les actes non visés par la convention, ou les actes établis dans des États dans lesquels la convention de 1987 n'est pas applicable).
Les conventions établies par le Conseil de l'Europe les 7 juin 1968 et 25 mai 1987 ont été complétées, remplacées, voire supprimées par de nouveaux instruments européens, dont le caractère normatif s'impose à l'ensemble des États membres depuis l'adoption du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

À retenir : relations entre la convention de Bruxelles et le règlement (UE) n° 2016/1191 du 6 juillet 2016 «Documents publics»

En vertu de l'article 19-2 du règlement «Documents publics» (V.supra, n°), le règlement prévaut pour les questions auxquelles les États membres sont parties à la date d'adoption du présent règlement et qui portent sur des matières relevant de celui-ci.
Dit autrement, la convention de Bruxelles qui n'était en vigueur que dans huit États membres ne s'applique plus, au profit du règlement «Documents publics» dont les règles sont entrées en vigueur dans les vingt-sept États membres de l'Union 1541349038056.

Les règlements européens

En matière de droit patrimonial de la famille

Règlement «Bruxelles IIbis»

L'article 52 – intitulé «Légalisation ou formalité analogue» – du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000 (Règl. «Bruxelles II bis») prévoit qu' «aucune légalisation ni formalité analogue n'est exigée en ce qui concerne les documents visés aux articles 37, 38 et 45, ou le cas échéant, la procurationad litem».

Règlement «Aliments»

L'article 65 – intitulé «Légalisation ou formalité analogue» – du règlement (CE) n° 4/2009 du 18 décembre 2008, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires (Règl. «Aliments») prévoit qu' «aucune légalisation ni formalité analogue n'est exigée dans le contexte du présent règlement».

Règlement «Successions»

L'article 74 – intitulé «Légalisation ou formalité analogue» – du règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen (Règl. «Successions») prévoit qu'«aucune légalisation ni autre formalité analogue n'est exigée pour les documents délivrés dans un État membre dans le contexte du présent règlement».
Le règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen prévoit un régime encore différent de ceux déjà évoqués dans Bruxelles I, Bruxelles I biset Bruxelles II bis : alors que ces trois règlements envisagent une procédure de simplification tendant à recevoir l'exécution de l'acte dans l'État de destination, y compris en cas de recours ou de contestation, le règlement «Successions» érige à nouveau en principe la procédure d'exequaturlorsque la déclaration constatant la force exécutoire est contestée.
Le principe dégagé par le règlement «Successions» est en effet le suivant :
L'article 60 du règlement prévoit qu'un «acte authentique qui est exécutoire dans l'État membre d'origine est déclaré exécutoire dans un autre État membre, à la demande de toute partie intéressée, conformément à la procédure prévue aux articles 45 à 58».
En d'autres termes, en vertu de l'article 509-3, alinéa 2 du Code de procédure civile, issu du décret du 28 décembre 2016, le notaire qui conserve la minute délivre avec la copie authentique, à la partie qui le requiert, l'attestation selon le formulaire II de l'annexe II du règlement d'exécution (UE) n° 1329/2014 de la Commission du 9 décembre 2014, établie en vue de l'acceptation et de l'exécution à l'étranger de l'acte authentique qu'il a reçu 1544355376314.
Une fois munie de la copie authentique et de l'attestation, la partie diligente pourra alors solliciter de l'autorité compétente de l'État de destination la déclaration constatant la force exécutoire de l'acte notarié établi dans l'État d'origine.
Il est toutefois à noter que contrairement au règlement Bruxelles I bis, un auteur relève que l'exequaturen cas de recours contre l'attestation de l'annexe II du règlement d'exécution redevient la norme obligatoire pour obtenir l'exécution de l'acte notarié, et remarque «qu'il n'y a aucune raison que la procédure ne soit pas la même selon que l'acte authentique porte sur telle ou telle matière. Soit la procédure d'exequaturest nécessaire, et il ne fallait pas la supprimer dans Bruxelles I [puis Bruxelles I bis]. Soit elle est inutile, et il n'y a aucune raison de la maintenir dans le règlement Successions. Le principe de confiance, sur lequel repose la suppression de l'exequatur, serait-il moins fort en matière successorale que dans les autres matières de droit privé ?» 1544357507611.

Règlement «Régimes matrimoniaux»

L'article 61 – intitulé «Légalisation et formalités analogues» – du règlement (UE) n° 2016/1103 du Conseil du 24 juin 2016 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions en matière de régimes matrimoniaux (Règl. «Régimes matrimoniaux») prévoit qu'«aucune légalisation ni autre formalité analogue n'est exigée pour les documents délivrés dans un État membre dans le cadre du présent règlement».

Règlement «Partenariats enregistrés»

L'article 61 – intitulé «Légalisation et formalités analogues» – du règlement (UE) n° 2016/1104 du Conseil du 24 juin 2016 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la compétence, de la loi applicable, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions en matière d'effets patrimoniaux des partenariats enregistrés (Règl. «Partenariats enregistrés») prévoit qu' «aucune légalisation ni autre formalité analogue n'est exigée pour les documents délivrés dans un État membre dans le cadre du présent règlement».

En matière d'acte authentique exécutoire et en matière judiciaire

En matière d'acte authentique exécutoire

L'article 25 – intitulé «Actes authentiques» –, paragraphe 2 du règlement (CE) n° 805/2004 du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées (Règl. «Titre exécutoire européen») prévoit : «Un acte authentique certifié en tant que titre exécutoire européen dans l'État membre d'origine est exécuté dans les autres États membres sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans qu'il soit possible de s'opposer à son exécution».
Le titre exécutoire européen (TEE) n'est donc pas soumis à légalisation ou à apostille.

En matière judiciaire

Règlement «Bruxelles Ibis»
L'article 36 – placé sous la section intitulée «Reconnaissance» – du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Règl. «Bruxelles I bis») prévoit dans son paragraphe 1 : «Les décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres sans qu'il soit nécessaire de recourir à aucune procédure».
Règlement «Insolvabilité»
L'article 20 – intitulé «Effets de la reconnaissance» – du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015, relatif aux procédures d'insolvabilité (Règl. «Insolvabilités») prévoit dans son paragraphe 1 que : «La décision d'ouverture de la procédure d'insolvabilité visée à l'article 3 paragraphe 1, produit, sans aucune autre formalité, dans tout autre État membre les mêmes effets que ceux prévus par la loi de l'État d'ouverture, sauf disposition contraire du présent règlement et aussi longtemps qu'aucune procédure visée à l'article 3, paragraphe 2, n'est ouverte dans cet autre État membre».
Les seuls règlements européens relatifs au droit international privé qui ne contiennent dans leurs dispositions aucune dispense ou suppression de légalisation sont :
  • le règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Règl. «Rome I») ;
  • le règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (Règl. «Rome II») 1541354853071 ;
  • le règlement (UE) n° 1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps (Règl. «Rome III»).
En tout état de cause, ces manques constatés dans ces trois instruments sont très largement comblés par l'entrée en application depuis le 16 février 2019 du règlement «Documents publics».

Règlement (UE) n° 2016/1191 du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 2016 (Règl. «Documents publics»)

Le règlement (UE) n° 2016/1191 du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 2016 visant à favoriser la libre circulation des citoyens en simplifiant les conditions de présentation de certains documents publics dans l'Union européenne, et modifiant le règlement (UE) n° 1024/2012, autrement appelé règlement «Documents publics» est entré en application le 16 février 2019, ainsi qu'il a déjà été indiqué.
Sans revenir sur le détail de cet instrument qui a été analysésupra, n°, il est seulement rappelé que son article 1er, paragraphe 1 prévoit, pour certains documents publics qui sont délivrés par les autorités d'un État membre et qui doivent être présentés aux autorités d'un autre État membre, un système de dispense de légalisation ou d'une formalité similaire, ainsi que la simplification d'autres formalités.

À retenir : suppression de toute légalisation et apostille au sein de l'Union européenne

Dit autrement, depuis le 16 février 2019, sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, il n'existe plus aucune obligation de légaliser ou d'apostiller entre les États membres les actes publics parmi lesquels figurent les actes notariés, ainsi que les actes sous seing privé sur lesquels est apposée une attestation officielle (comme par exemple une certification de signature par un notaire).