Dans cet arrêt, en examinant les attributions notariales des capitaines et seconds de navire de marine marchande, la Cour a pu développer une réflexion sur les notions d'administration publique et d'exercice direct ou indirect de la puissance publique.
En premier lieu, la notion d'administration publique semble être une notion autonome du droit européen, la Cour estimant que cette notion « doit recevoir une interprétation et une application uniformes dans l'ensemble de la Communauté et ne saurait dès lors être laissée à la totale discrétion des États membres »
1516618374678.
En second lieu, le même arrêt se prononce sur la question de savoir si la condition de nationalité des capitaines et seconds de navire battant pavillon espagnol est justifiée.
La construction du raisonnement est la suivante : l'article 39, § 4 du Traité instituant la Communauté européenne (TCE)
1547377290564(« Liberté de circulation et non-discrimination ») peut être écarté, pour la nomination des capitaines et seconds de navires espagnols, dans la mesure où :
- ils accomplissent des missions publiques qui leur sont dévolues ;
- ce faisant, ils agissent en qualité de représentants de la puissance publique, au service des intérêts de l'État du pavillon ;
- parce qu'ils participent à l'exercice de la puissance publique et occupent des fonctions ayant pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'État, il existe nécessairement entre les officiers et l'État qu'ils représentent un rapport particulier de solidarité, dont la réciprocité des droits et devoirs est le fondement d'un lien de nationalité 1516620191260 ;
- le tout, à la seule condition que ces prérogatives soient effectivement exercées defaçon habituellepar lesdits titulaires et qu'elles ne représentent pas une part très réduite de leurs activités ;
- de plus, la portée de cette dérogation doit être limitée à ce qui est strictement nécessaire à la sauvegarde des intérêts généraux de l'État membre concerné.
La Cour constate que l'exercice direct ou indirect de missions publiques n'étant qu'occasionnel pour les capitaines de navire, la condition de nationalité doit par conséquent être écartée en vertu du principe de libre circulation et de non-discrimination du traité.
Pourtant, le statut d'agent participant à l'exercice direct et spécifique de l'autorité publiquen'a pas encore été reconnu au notaire depuis les arrêts « Nationalité » du 24 mai 2011 et ceux subséquents (nombreux sur ce thème (V. supra, n°).
Cependant, les lignes semblent enfin bouger depuis les arrêts récents qui font l'objet de l'analyse qui suit.
Prémices d'une définition de l'officier public par l'arrêt
Si l'on transpose ce raisonnement à la question du notariat, force est de constater que le notaire, dans sa fonction et son statut, remplit bien toutes les conditions énumérées dans l'arrêt pour être reconnu comme participant à l'exercice direct ou indirect de l'administration publique.
En effet, le notaire :
- accomplit bien une mission publique qui lui est dévolue en assumant directement le service public de l'authenticité ;
- agit bien en qualité de représentant de la puissance publique, au service des intérêts de l'État qui l'a nommé ;
- parce qu'il participe à l'exercice de la puissance publique et occupe une fonction ayant pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'État, il existe bien entre cet officier public et l'État qu'il représente un rapport particulier de solidarité, dont la réciprocité des droits et devoirs est le fondement d'un lien de contrôle et de surveillance par l'État sur son activité ;
- enfin le notaire exerce bien cette mission publique de façon habituelle, ce qui fonde sa fonction au regard de l'intérêt général.