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2021 – Rapport du 117e congrès – Commission 3 – Chapitre II – Les opportunités d’encadrement des smart contracts

PARTIE I – L’adaptation du droit des contrats au monde numérique
Titre 2 – L’exécution du contrat dans le monde numérique
Sous-titre 2 – Les limites de l’automatisation de l’exécution du contrat

Chapitre II – Les opportunités d’encadrement des smart contracts

3346 – Construction d’un droit du smart contract. – « La construction d’un droit des blockchains est une nécessité car ce serait une folie que de laisser une technologie aussi disruptive et envahissante gagner toutes les sphères de la vie économique et sociale sans encadrement juridique »649. Le smart contract est l’application logicielle la plus avancée sur une blockchain. Ses caractéristiques se révèlent être à la fois ses points forts et ses limites. Il est autonome, déterministe et traçable. Autonome car dès sa programmation, il s’autoexécute sans l’intervention ultérieure des parties. Déterministe, il s’applique selon les conventions des parties sans regard sur l’éventuelle évolution de la situation. Lié à la blockchain, il est traçable, immuable, mais aussi international. Construire le droit interne autour d’un mécanisme régissant l’exécution de transactions internationales peut sembler vain. C’est pourquoi l’encadrement du smart contract est d’abord l’affaire des parties (Section I). Mais, l’idéologie libertarienne sous-jacente à la blockchain et au smart contract et l’apparente complexité à réguler un mécanisme dépassant nos frontières ne doivent pas dissimuler les possibilités d’encadrement du smart contract extérieures au contrat (Section II).

Section I – L’encadrement interne au contrat

3347 – Exprimer ses choix. – Les arguments à l’appui du smart contract sont sa simplicité, sa rapidité, son faible coût. Ces avantages relèvent peut-être plus d’une perception que de la réalité.
Rapide et peu coûteux dans son utilisation : certes, mais le discours serait sans doute différent quant à son développement. Développer un logiciel n’est pas une œuvre désintéressée. Atteindre une rentabilité motive l’étude, la conception, la mise au point, la transformation, la maintenance et l’amélioration d’un logiciel et chaque étape engendre des coûts matériels et humains.
La simplicité provient plus de la facilité d’adhérer à un programme prêt à l’emploi sur la blockchain que du mécanisme lui-même. Éviter toute discussion rend le processus simple. En revanche, cette vision réductrice du smart contract ajoutée à l’absence de régulation aboutit à stéréotyper la relation contractuelle. « Code is law », selon les mots de Lawrence Lessig650. Le code informatique s’impose aux parties et plus particulièrement au débiteur, le créancier étant généralement la partie forte à l’origine de sa conception.
Pour renforcer le smart contract, le raisonnement doit être inverse. Il ne doit pas s’imposer aux parties. Ce sont elles qui doivent prendre l’initiative d’un encadrement contractuel. Le smart contract doit être le résultat de leurs choix quant à la blockchain hébergeant leur accord (Sous-section I), quant à la rédaction d’un contrat fiat (Sous-section II) et encore quant à l’oracle permettant la mise en œuvre de l’accord (Sous-section III).

Sous-section I – Le choix de la blockchain

3348 – Blockchain publique ou privée651. – Avant de préférer un type de blockchain, les parties doivent faire le choix de la blockchain. Utiliser une blockchain, c’est utiliser un registre. Sauf à avoir besoin d’une base de données partagée, la blockchain est inutile. Si les participants ont une parfaite confiance les uns envers les autres et travaillent dans un but commun, la blockchain est également superflue. La blockchain établit la confiance entre des utilisateurs ne se connaissant pas ou dont les intérêts divergent. Le smart contract peut exister en dehors de la blockchain.
La blockchain publique est la seule à porter les valeurs chères aux partisans du libertarianisme que sont l’absence de gouvernance, la décentralisation, l’anonymat et l’irréversibilité, sans tolérer d’exception. Mais de plus en plus d’acteurs économiques font le choix des blockchains dites « privées » ou « de consortium ». Elles induisent la réintroduction d’une autorité de contrôle chargée d’en surveiller le bon fonctionnement. Dans les blockchains privées, les droits d’écriture sont détenus de manière centralisée. Les utilisateurs peuvent uniquement les consulter. Dans les blockchains de consortium, les rédacteurs sont multiples mais choisis. La décentralisation est donc maîtrisée.

Sous-section II – Le choix de la rédaction d’un contrat fiat653

3349 – Le contrat entièrement algorithmé. – Rédiger un smart contract sans référence à un accord préalable ou concomitant pose plusieurs questions. Le smart contract n’est pas un contrat. Il n’est que la digitalisation de l’accord passé dans le monde physique654. Comment vérifier la corrélation entre l’algorithme et la volonté des parties si elle n’a pas été exprimée en langage naturel ? Comment affermir l’efficacité d’un accord dont rien n’atteste la pleine compréhension par les cocontractants ? Les promoteurs du smart contract prétendent tarir le contentieux grâce à l’automatisation de l’exécution du contrat. Mais un langage aussi obscur que le bytecode n’est-il pas vecteur d’un autre contentieux dont aura à connaître le juge655 ?
3350 – Le contrat fiat. – La confiance dans le mécanisme smart contractuel provient de la certitude qu’il procure. Le smart contract validé sera exécuté. Écarter le juge du contrat a pour objectif de réduire le risque d’insécurité juridique inhérente à son interprétation. Mais ce raisonnement omet le fait que l’algorithme est lui-même le résultat d’une interprétation : celle du programmeur656. Dans ce contexte, il est difficile de retrouver au travers du code la véritable intention des parties. Traduction opérationnelle de l’accord des parties, il est clair et précis mais rigide et sans âme. Faire le choix d’un contrat fiat n’est pas nier l’importance du mécanisme smart contractuel. Au contraire, il s’agit de le renforcer. Conformément à l’idéologie smart contractuelle, clarifier la norme au moyen du contrat fiat doit permettre d’éviter le recours au juge ou d’encadrer son pouvoir d’interprétation657. Il revient aux parties de déterminer ce qui est acceptable, dans le respect de l’ordre public contractuel.

Sous-section III – Le choix de l’oracle

3351 En totale adéquation avec l’idéologie de la blockchain dont elle est l’émanation, l’automatisation smart contractuelle semble dispenser le contrat de toute intervention extérieure. Mais son étude approfondie démontre le besoin de juristes impliqué par les choix que nécessite le contrat. Le mécanisme seul est insuffisant à faire naître un contrat intelligent. Le milieu dans lequel il évolue limite également le smart contract. Se borner aux informations contenues dans la blockchain limiterait fortement l’utilisation de cette application. Cette technologie présentée comme trustless658 nécessite souvent de faire appel à un tiers de confiance dénommé « oracle » (§ I). Il inscrit sur la blockchain les informations nécessaires à la réalisation du smart contract. Il se présente comme le lien entre la blockchain et la réalité physique659. Élément extérieur à la blockchain, il est à la fois une éventuelle faille du smart contract et le gage de sa réussite. Différentes formes d’oracle existent (§ II). Le choisir est une autre étape importante.

§ I – Le rôle de l’oracle

3352 – L’ancrage de données extérieures. – L’oracle renseigne des données sur la blockchain servant à l’exécution du smart contract. Exactes ou erronées, ces informations déterminent le devenir du smart contract. Les événements inscrits sur la blockchain sont indélébiles. Le smart contract enclenché par les éléments renseignés est inarrêtable. L’oracle décide donc seul du sort du smart contract.
L’oracle est un acteur puissant du processus smart contractuel. Son choix doit être réfléchi. On imagine aisément l’oracle sous la forme d’une personne physique ou morale neutre sur laquelle les parties appuient leur transaction en l’absence de confiance mutuelle. Il peut néanmoins prendre bien d’autres formes et notamment celles d’une base de données, d’un objet connecté ou d’une communauté.

§ II – Les différentes formes d’oracle

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3354 L’oracle est un intervenant extérieur tendant à assouplir le mécanisme du smart contract. Son choix permet aux parties de réintroduire une forme de tiers de confiance. Elles décident de soustraire leur accord au juge en lui substituant la technique mais ne s’en remettent pas au seul logiciel. Elles autorégulent leur relation contractuelle. Dans ce contexte, se pose la question de l’utilité d’un autre encadrement du smart contract,institutionnel cette fois.

Section II – L’encadrement externe au contrat

3355 – Les enjeux. – « Le dilemme est toujours le même face à une innovation technologique : faut-il réguler ? Cette première question est suivie d’une seconde : comment la réguler ? »675. Les évolutions sociétales précèdent le droit. Mais il lui incombe de les accompagner en leur donnant un cadre juridique. Malgré la promesse du code informatique de supplanter le droit jusqu’à disrupter un juge devenu inutile, code is not law. Le succès de la technique ne justifie pas qu’elle devienne la norme.

Il appartient au droit – non aux codeurs – de poser les valeurs et les règles qui dirigent le code676.

Laisser s’installer un vide juridique est dangereux. Il importe dès lors de réfléchir à l’adaptation du droit des contrats (Sous-section I) et du droit de la responsabilité civile (Sous-section II) au smart contract. Dans la mesure où l’ouverture de la blockchain est propice au développement du smart contract au-delà des frontières d’un État, il convient de s’interroger également sur un encadrement par le droit international (Sous-section III).

Sous-section I – Des réflexions sur l’adaptation du droit des contrats au smart contract

3356 « Percer l’écran de fumée autour de la blockchain suppose que le juriste déplace son regard de la technique vers les activités. Si la blockchain est l’autoroute des transactions, il va falloir très certainement réglementer ces transactions permises ou facilitées par cette nouvelle technique »677.
Le rôle de l’État, dans son pouvoir souverain, est de fixer des règles et d’en contrôler la bonne application. Dans cette perspective, le législateur pourrait doter le smart contract d’un régime propre (§ I) et de nouveaux rôles pourraient être reconnus au juge (§ II).

§ I – Un régime propre au smart contract

3357 – Encadrement légal du smart contract. – La qualification de contrat spécial doit être écartée puisque le smart contract n’est pas un contrat. En revanche, le smart contract peut intégrer le droit commun des contrats comme un fait juridique participant à son exécution ou une forme de paiement678.
Les cadres doivent être posés. Le droit doit s’imposer face au processus technique.
Le smart contract ne doit pas être détaché du cadre social qu’est le contrat679, dont il est l’accessoire680. Dans un premier temps, le vide juridique peut susciter l’engouement. Mais développer une technologie nécessite la confiance681, c’est pourquoi l’omission de tous les garde-fous juridiques au profit de la technique pourrait aboutir à un délaissement vis-à-vis de cette technologie. Accorder au smart contract une place dans le Code civil comme une possible modalité d’exécution du contrat lui donne une certaine légitimité. Cela nécessite d’adapter le droit existant.
Tant que le législateur n’aura pas tranché la question de la qualification juridique du smart contract, le juge devra le faire et en tirer les conséquences682. L’attention des parties doit être attirée sur l’inflexibilité du mécanisme. Une réflexion doit être menée sur l’instauration d’une obligation d’information683.
3358 – Un encadrement a minima. – Il s’agit d’encadrer le smart contract et non de le rejeter. L’encadrer légalement de manière stricte pourrait le condamner. Il faut laisser une chance à ce mécanisme innovant de démontrer son intérêt.
3359 – Reconnaissance juridique du smart contract comme un effet des seuls contrats conclus entre des parties disposant d’une puissance économique équivalente. – Poser un cadre juridique du smart contract au sein du Code civil a déjà fait l’objet de propositions. Mme Barreau envisage notamment une alternative quant au type d’encadrement à apporter684. Lister limitativement les contrats dont l’exécution pourrait faire l’objet d’un smart contract est une possibilité. Sur le plan juridique, la liberté contractuelle s’en trouverait atteinte. Sur celui de l’innovation, on risquerait d’anéantir tout espoir de développement d’une technologie prometteuse. Mme Barreau propose une seconde voie en préconisant l’ajout d’une sous-section 3 à la section du Code civil consacrée aux effets du contrat entre les parties et propose de délimiter le champ de reconnaissance du smart contract sous deux aspects.
D’une part, en mettant le smart contract au même niveau que la force obligatoire et l’effet translatif du contrat, Mme Barreau en fait un mécanisme concurrent puisque de son point de vue, lorsque les parties font le choix d’utiliser un programme informatique d’exécution, elles écartent le droit commun des contrats. Elle précise que seuls les contrats consensuels portant sur des prestations simples à exécuter et soumises à peu de conditions peuvent s’exécuter au moyen d’un smart contract.
À tout le moins, seules les dispositions supplétives de volonté devraient pouvoir être écartées.
D’autre part, le champ de reconnaissance du smart contract devrait, selon Mme Barreau, être limité aux contrats conclus entre des parties disposant d’une puissance économique équivalente. L’expression de puissance « économique équivalente »685 fait écho aux relations B to B686.
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3361 – Reconnaissance juridique du smart contract comme un mode de paiement indifférent à la qualité du créancier ou du débiteur. – La proposition de Mme Barreau suscite l’intérêt, mais appelle toutefois des réserves et des contre-propositions. Le smart contract n’est pas un contrat687. Il n’est pas non plus un effet du contrat en ce sens qu’il ne crée pas lui-même des obligations. Il se contente d’automatiser leur exécution. À cet égard, il se rapproche plus du paiement688 défini comme l’exécution volontaire de la prestation due (C. civ., art. 1342).
Reconnaître légalement le smart contract comme un mode de paiement a principalement deux vertus. Cela permet de limiter la confusion entre le contrat et le smart contract et de gagner en cohérence en admettant la preuve du smart contract par tout moyen (C. civ., art. 1342-8). La blockchain pourrait être considérée comme un mode de preuve de l’existence du smart contract sans avoir à lui donner une portée générale. Cela concorde avec la position actuelle des autorités. Conscientes qu’il serait prématuré, compte tenu de la multitude de ses fonctionnalités, de qualifier la blockchain en mode de preuve universel, elles la retiennent comme un dispositif d’enregistrement électronique partagé fiable par touches successives689.
Au surplus, cela présenterait l’avantage de pouvoir utiliser le smart contract pour automatiser l’exécution des obligations contractuelles mais aussi des obligations extracontractuelles, comme celles résultant d’une condamnation judiciaire en responsabilité délictuelle.
S’agissant du champ d’application ratione personae de nouvelles règles encadrant le smart contract, l’écarter purement et simplement des relations entre professionnels et consommateurs (B to C) est une première option. À cette fin, le smart contract pourrait être ajouté à la liste des clauses présumées abusives de manière irréfragable dans le contrat de consommation (C. consom., art. R. 212-1). Mais cette position inflexible n’est pas souhaitable. Le smart contract a déjà prouvé son efficacité en faveur du consommateur690. Or, dans un certain nombre de cas, refuser catégoriquement aux parties le droit de choisir l’exécution automatique nuira au consommateur. Ainsi le voyageur subissant un retard d’avion ne pourra pas prétendre à une indemnisation automatique.
3362 – Une obligation d’information. – La plupart des utilisateurs ne comprennent pas la transcription codée du contrat. Son intelligibilité n’est pas essentielle dès lors qu’il n’est ni le contrat lui-même ni un mode de preuve littérale de celui-ci. En revanche, le smart contract est un programme indélébile, intangible et déterministe. Enregistré sur la blockchain, le programme est comme gravé dans le marbre. Il s’exécute entièrement selon les modalités préalablement décidées. Aucune place n’est laissée au hasard. Seul ce qui est prévu s’applique. Tout semble réuni pour éviter une ultime discussion des parties en cours d’exécution. L’utilisation d’un smart contract limite le champ d’action du juge en ce que l’exécution ne peut être interrompue ou modifiée. Son pouvoir se trouve donc réduit à accorder une réparation à la partie lésée lorsque l’exécution est dommageable694. L’exécution n’est pas le temps de la discussion. Les parties doivent donc avoir une parfaite conscience de l’inflexibilité du mécanisme dès la conclusion du contrat pour accepter ou refuser le risque.
Le trait se durcit avec le contrat d’adhésion (C. civ., art. 1110). Comportant un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties et acceptées par l’autre, il sied parfaitement au smart contract. Une clause insérant un smart contract au sein d’un contrat d’adhésion faisant l’objet d’une information insuffisante pourrait être réputée non écrite (C. civ., art. 1171). Indépendamment du bien-fondé de l’obligation exécutée, le mécanisme smart contractuel peut créer un déséquilibre significatif dans le contrat du fait de ses caractéristiques de fonctionnement.
De manière plus générale, l’article 1112-1 du Code civil (C. civ., art. 1112-1) dispose qu’une partie détenant une information dont l’importance est déterminante du consentement de l’autre doit l’en informer. Ces informations doivent avoir un lien direct avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Le smart contract ne touche pas au fond du contrat mais à la manière dont il s’exécute. Néanmoins, sa rigidité peut être déterminante du consentement des parties. Les parties doivent être conscientes que lorsque la boucle conditionnelle tourne, elle devient inarrêtable. Aussi, même si l’article 1112-1 du Code civil (C. civ., art. 1112-1) ne trouve pas à s’appliquer, l’obligation d’information naît du seul principe général de bonne foi qui chapeaute le droit des contrats (C. civ., art. 1104). La partie proposant une exécution automatisée doit mettre l’accent sur les caractéristiques générales de fonctionnement d’un smart contract et celles spécifiquement choisies par les parties. Des sanctions analogues à celles prévues par l’article 1112-1 du Code civil (C. civ., art. 1112-1) – responsabilité extracontractuelle voire nullité du contrat fiatpour vice du consentement – pourraient être retenues en cas de défaut ou d’insuffisance d’information.
3363 – Un délai de réflexion. – La mise en place d’un délai de réflexion (C. civ., art. 1122) est également une piste à étudier. Le ralentissement du processus de formation du contrat est propice à la réflexion. Comme le calme avant la tempête, il permettrait aux parties de prendre le temps de considérer les conséquences de l’utilisation du mécanisme avant sa mise en place le rendant inarrêtable. Toutefois, la volonté de rapidité est sous-jacente dans le monde des affaires où le smart contract est prisé pour son efficacité et sa simplicité d’exécution. Un délai de réflexion pourrait donc être prévu uniquement dans le cadre du contrat de consommation695.
3364 – Un encadrement du code informatique. – Programmer une fonction permettant de stopper le smart contract particulièrement déséquilibré permettrait de réintroduire la bonne foi dans le contrat et, dans une certaine mesure, d’appréhender l’imprévision696. Plutôt que d’attendre des parties de prévoir cette possibilité dans leur contrat, ne pourrait-elle pas leur être imposée par le Code civil ?
Une telle disposition permettrait de mettre le processus en conformité avec l’article 1195 du Code civil (C. civ., art. 1195). Mais la difficulté est de déterminer le stade à partir duquel l’exécution devient « excessivement onéreuse » par rapport aux conditions initialement convenues. Le prévoir dès la conclusion du contrat nécessite de quantifier le déséquilibre, ce qui est loin d’être aisé. En outre, pour tomber sous le coup de l’article 1195 du Code civil (C. civ., art. 1195), le déséquilibre doit procéder de circonstances survenues après la conclusion du contrat, sans avoir été connues de la partie lésée qui sinon, n’aurait raisonnablement pas contracté. Elle ne doit pas avoir le contrôle de telles circonstances et ne doit pas en assumer le risque.
Le numérique nécessite de pouvoir quantifier697. Pour pouvoir arrêter automatiquement un smart contract déséquilibré, il faut avoir fixé un seuil chiffré au-delà duquel il ne se poursuit pas. La diversité rend impossible de définir de manière chiffrée le déséquilibre dans la loi. Une clause de hardship se rédige au cas par cas.
En revanche, la loi pourrait prévoir que l’utilisation d’un smart contract nécessite la nomination d’un contrôleur susceptible de stopper le contrat particulièrement déséquilibré. Son rôle se limiterait à reconnaître le déséquilibre. Les parties devraient ensuite se rapprocher pour renégocier et, à défaut de solution amiable, saisir le juge.
La perte d’automatisation et la réintermédiation sont peu compatibles à l’idéologie de la blockchain. Mais le code informatique n’est pas la loi. L’obligation de renégociation rendrait le smart contract plus conforme à l’article 1195 du Code civil.
3365 Laisser de l’espace au smart contract pour se développer est compatible avec le contrôle du juge. Le code informatique traduit le droit sur le plan opérationnel698. Réintroduire une certaine humanité permet d’appréhender le contrat au-delà du cadre technique imposé par le smart contract. Les prestations simples avec des obligations claires sont peu sujettes à interprétation. Pour les autres, le juge veillera à ce que les parties ne fassent pas abstraction des nuances du droit au profit du code.

§ II – De nouveaux contrôles judiciaires

3366 – Le contrôle du juge vecteur de confiance. – Certains prétendent que le juge est inutile lorsque le smart contract est utilisé par les parties. Le smart contract est un mécanisme coercitif garantissant invariablement l’exécution du contrat. Son inflexibilité est génératrice de confiance, notamment pour le créancier. Mais le rôle du juge est de sécuriser le contrat. La vocation du juge est d’avoir un regard impartial et indépendant. Dans le processus smart contractuel, rien ne garantit l’impartialité et la bonne foi des parties. L’indépendance affirmée par la blockchain est différente de celle du juge. Elle tient seulement à sa fonction de registre consignant les conditions initialement fixées et leur réalisation le cas échéant, sans vérification de leur conformité à la loi. En revanche, l’indépendance du juge est la garantie qu’il statue en application de la loi et des règles procédurales en vigueur. Le juge est générateur de confiance. C’est pourquoi l’accès à la justice est un droit reconnu par la Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme. Refuser d’astreindre le smart contract au contrôle du juge revient à accepter une zone de non-droit : le juge ne peut pas contrôler le contrat parce que les parties ont choisi de l’exécuter au moyen d’un smart contract. L’inquiétude générée par l’éventuelle insécurité d’une telle situation pourrait inciter les utilisateurs à se détourner du processus smart contractuel. En revanche, lui réserver une place dans le Code civil699 est une reconnaissance de son intérêt. Il s’agit également de le soumettre. Mode d’exécution du contrat, il est à son service et non l’inverse. Il ne peut se soustraire au contrôle du juge.
3367 – Le déplacement du contentieux. – Le contentieux ne disparaît pas. Il se déplace. Son objet diffère.
Dans le cadre de l’exécution classique du contrat, il est très fréquent que le juge n’intervienne qu’a posteriori. À la suite de l’ordonnance du 10 février 2016700, la doctrine a abondamment souligné que les sanctions unilatérales de l’inexécution (telles l’exception d’inexécution, la réduction du prix non encore versé, la résiliation par notification) n’évincent pas le juge, mais aboutissent à des contrôles judiciaires a posteriori (C. civ., art. 1217 et s.).
Le smart contract déjà exécuté ne peut être anéanti car la blockchain en conserve une trace indélébile. Cet aspect technique temporise encore l’intervention du juge. Même l’exécution d’une obligation paraissant infondée ou mettant en difficulté l’une des parties aboutissant à une mésentente profonde entre elles ne permettra pas au juge d’anéantir le processus smart contractuel. Par exemple, les délais de grâce, la révision de la clause pénale à la hausse comme à la baisse, la réduction du prix ne peuvent pas interrompre la boucle conditionnelle. Ce n’est qu’a posteriori que le juge anéantira les effets juridiques du smart contract en statuant sur des restitutions et/ou des dommages et intérêts. Toutefois, si l’une ou l’autre des parties a été particulièrement mise en difficulté par une situation qui a perduré dans le temps, l’anéantissement juridique même rétroactif des effets du contrat ne suffira pas toujours à réparer le dommage subi. L’intervention tardive du juge nécessite donc de mettre en place des garde-fous.
Le juge doit contrôler l’exécution du contrat sur ses qualités comme sur sa légitimité. Les clauses automatisées s’exécutent sans considération d’un éventuel abus. La livraison d’une commande s’évalue en quantité mais pas en qualité. Il en est de même pour la réalisation d’une prestation. Le contrôle portera donc sur la traduction du contrat en langage informatique. Reflète-t-elle la volonté des parties ? Est-elle suffisante pour réaliser pleinement le contrat ? La réponse à la première question nécessite des compétences informatiques sans lesquelles le contrôle sera inefficace. Le juge sera sans doute amené à nommer un expert pour rechercher le sens du code informatique. Apporter une réponse positive à la seconde question serait admettre que tous les éléments du contrat sont transposables en langage informatique et donc quantifiables, ce qui semble impossible.
Afin de conserver la confiance, il est en outre nécessaire de soumettre le smart contract à un régime de responsabilité efficient.

Sous-section II – Des réflexions sur l’adaptation du droit de la responsabilité civile au smart contract

3368 L’immatérialité du smart contract le rend difficile à appréhender par le droit. À juste titre, le législateur s’est bien gardé de créer un droit des responsabilités spécifique aux biens immatériels. La construction d’une responsabilité spéciale serait périlleuse. Mais il ne faut pas non plus fermer les yeux sur l’immatérialité au risque d’accepter l’existence d’une res nullius, échappant à toute responsabilité. Quel qu’il soit, un outil doit être appréhendé par le droit de la responsabilité. Le non-respect des engagements doit aboutir à la sanction des uns et à l’indemnisation corrélative des autres pour générer la confiance.
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3370 – La confiance. – Les promoteurs du smart contract rattachent la question de la confiance à son automaticité et à son irréversibilité. Le contentieux disparaît en gravant le smart contract sur la blockchain. Res nullius, le smart contract échappe au droit de la responsabilité, considéré comme inutile. Mais l’automaticité du processus n’exclut pas qu’il soit à l’origine d’un préjudice. Quelle confiance accorder à une technique dont l’exécution peut être impunément dommageable ? La responsabilité est donc un facteur majeur de confiance.
3371 – Les risques liés au smart contract. – La réussite d’un contrat n’est pas nécessairement son application pleine et entière. Le smart contract est l’image codée du contrat. Qui est responsable si ce reflet est imparfait au regard de la volonté des parties, soit qu’elle n’ait pas été transcrite correctement, soit qu’elle ait évolué en cours d’exécution ?
L’absence d’exécution ne peut pas être ignorée. Un bug informatique, l’information erronée d’un oracle, etc., peuvent retarder voire empêcher l’autoexécution du contrat. Qui est responsable du dommage en résultant ? Pourra-t-on l’identifier ? En l’absence d’identification, la victime pourra-t-elle tout de même être indemnisée ?
Le droit doit répondre à ces questions pour accroître la sécurité et la confiance attachées à la technologie smart contractuelle. Un processus ne pouvant être arrêté ou modifié doit donner lieu à réparation s’il dysfonctionne. La réparation des fautes est un principe reconnu constitutionnellement703. Le principe d’une responsabilité pour faute incite à rechercher un responsable (§ I). Toutefois, le besoin de sécurité légitime l’évolution du droit de la responsabilité vers la réparation. Cette seule logique indemnitaire a le pouvoir de susciter la confiance (§ II).

§ I – La recherche de l’auteur d’une faute

3372 – Une personne responsable. – Socialement, rendre une personne responsable a un effet prophylactique. Juridiquement, une personne doit être responsable pour être débitrice d’une indemnisation. Le smart contract est un mode d’exécution du contrat. Les cocontractants sont responsables de l’exécution de leurs obligations. Mais l’exécution leur échappe du fait de l’automaticité du smart contract704. Son autonomie d’exécution interroge sur la responsabilité du smart contract lui-même. Le smart contract s’exécute lorsque les conditions préalablement fixées sont implémentées sur la blockchain. En tant qu’organisation, elle pourrait être tenue pour responsable des informations qu’elle contient. Cela pose la question de la gouvernance, résolue dans les blockchains privées et de consortium mais exclue dans les blockchains publiques705. Les informations entrées sur la blockchain pour déclencher le smart contract le sont souvent par des oracles. La question de leur responsabilité se pose également. S’agissant de personnes ou d’entités, les parties pourront la régler dans le contrat lui-même. Enfin, le programmeur a un rôle essentiel. Le smart contract est un logiciel informatique. Il peut être développé sous licence open source ou libre. Ses modalités de conception et de programmation sont en principe neutres et doivent répondre à l’utilisation finale recherchée. S’agissant d’un smart contract, seul le programmeur transcrivant un contrat rédigé au préalable en langage naturel peut anticiper l’utilisation qui en sera faite. Généralement, aucun auteur ne sera identifié comme programmeur d’un smart contract open source utilisé par des parties n’ayant pas mis en place un contrat au préalable. Les parties sont seules responsables de son utilisation.
3373 – La responsabilité des parties. – Les parties peuvent organiser la sanction de l’exécution dommageable au sein du contrat lui-même. Toutefois, exiger des parties la prévision de l’ensemble des dysfonctionnements éventuels dus à l’utilisation du smart contract est irréaliste. L’aspect déterministe du smart contract suppose que chaque cas soit anticipé. L’exécution dommageable doit pouvoir être appréhendée en dehors des obligations contractuelles automatisées.
Dans les relations entre les parties, soit des clauses limitatives de responsabilité ont été prévues, soit le juge peut être saisi. Les clauses limitatives de responsabilité peuvent limiter le montant dû au titre de la réparation du dommage, voire stipuler une absence totale de responsabilité. Le contrat fiat pourrait donc prévoir que le non-respect des clauses non automatisées par le smart contract ne sera pas sanctionné, leur importance étant secondaire pour les parties. Néanmoins, un juge pourrait en décider autrement. Les parties peuvent saisir le juge pour rechercher la responsabilité de leur cocontractant même si le contrat s’est autoexécuté. L’exécution pleine et entière du contrat n’interdit pas l’accès à la justice.
3374 – La responsabilité des tiers au contrat. – Un tiers peut être à l’origine du dommage. Un mauvais codage du smart contract autorise la partie subissant un dommage à engager une action en réparation. La jurisprudence reconnaît une action en responsabilité contractuelle au bénéfice de la partie lésée à l’encontre du tiers à l’origine du dommage lorsque des contrats successifs emportent transfert de propriété706. Si tel n’est pas le cas, la Cour de cassation rappelle le principe de l’effet relatif des contrats (C. civ., art. 1199) et considère que la partie lésée n’a contre le tiers qu’une action en responsabilité délictuelle. Ce tempérament a été apporté par la Cour de cassation dans le cadre d’une affaire où un maître d’ouvrage demandait réparation, sur le fondement contractuel, à un sous-traitant chargé de l’exécution d’une obligation contractuelle par son entrepreneur principal707. Or il n’existait pas de lien entre le maître de l’ouvrage et le sous-traitant. Par analogie, lorsqu’une partie met en place un smart contract accepté contractuellement par son cocontractant, ce dernier n’a aucun lien avec le programmeur. Il semble donc exclu de reconnaître à ce cocontractant une action en responsabilité contractuelle contre le programmeur. Au surplus, le smart contract proposé ou imposé par une partie à l’autre n’a pas nécessairement été conçu spécifiquement pour ce contrat. Généralement, il s’agit d’un smart contract existant, disponible en open source, programmé par un codeur la plupart du temps non identifiable. Reconnaître une action en responsabilité contractuelle à la partie lésée contre le programmeur ne serait guère protecteur de ses intérêts. Sans identification du programmeur, retenir sa responsabilité ne permet pas d’obtenir réparation. Il semble plus efficace, dans une logique indemnitaire, de faire peser la réparation sur la partie à l’origine de l’utilisation du smart contract. Cela l’incitera à vérifier son bon fonctionnement dans le cadre du contrat proposé.
La perte d’autonomie due au protocole smart contractuel pourrait cependant justifier d’ouvrir une action récursoire à la partie ayant indemnisé le cocontractant victime de l’exécution automatisée, permettant à cette partie condamnée en responsabilité sans avoir commis de faute de se retourner contre le fabricant, le concepteur, le programmeur708 à l’origine du dommage. La difficulté consistant, le cas échéant, à identifier le responsable de l’erreur de codage, voire à répartir les responsabilités entre les différents intervenants pèserait ainsi sur la partie forte ayant imposé le recours au smart contract.
Le programmeur peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle si l’on fait appel à ses services, ou extracontractuelle lors de l’utilisation d’un smart contract disponible en open source sur la blockchain.
Lorsque le programmeur prend le rôle de traducteur du contrat, il bâtit le smart contract sur le fondement d’un contrat exprimé en langage naturel. Il réalise une prestation à la demande des parties ou de l’une d’elles. L’inexécution de son obligation contractuelle de traduire le contrat fiaten langage codé engage sa responsabilité dans les conditions des articles 1231 à 1231-7 du Code civil (C. civ., art. 1231 à 1231-7). Dans la mesure où l’erreur de traduction ou le codage défectueux serait reconnu comme une inexécution du contrat709 à l’origine du dommage subi par ses cocontractants, sa responsabilité contractuelle serait retenue. Si le contrat n’est conclu qu’avec l’une des parties, il pourra également engager sa responsabilité délictuelle envers l’utilisateur final.
Lorsque les parties utilisent un smart contract open source, aucun contrat ne les lie au programmeur. La responsabilité est nécessairement recherchée sur un fondement extracontractuel. Le dommage peut être attribué à une faute du programmeur. Les éléments nécessaires pour actionner la responsabilité sont réunis (C. civ., art. 1240). Mais la problématique constante de l’identification rendra de nouveau la responsabilité inefficace.
3375 – La responsabilité à l’égard des tiers. – Inversement, un tiers peut être victime du dommage causé par un smart contract. En vertu du principe de non-cumul des responsabilités contractuelles et extracontractuelles et du principe de l’effet relatif des contrats, la responsabilité contractuelle est réservée aux parties au contrat. Les tiers peuvent faire valoir leur droit à réparation sur le fondement de la responsabilité délictuelle. La proposition de loi portant réforme de la responsabilité civile du 29 juillet 2020 prévoit d’insérer un nouvel article 1234 dans le Code civil aux termes duquel un tiers au contrat a la possibilité d’invoquer un manquement contractuel si celui-ci lui a causé un dommage. Le tiers demandeur fonde sa demande sur la responsabilité contractuelle. L’inconvénient réside dans le fait que les clauses limitatives de responsabilité éventuellement prévues au contrat lui seront opposables. L’avantage est de le dispenser de la preuve d’une faute (requise en matière de responsabilité délictuelle, C. civ., art. 1240). Indifférent à son environnement, le smart contract peut causer un dommage à un tiers ou aggraver une situation sans pour autant cesser de s’exécuter. Il n’est pas capable de discernement. L’anticipation du dommage par les parties est irréaliste. La conscience du dommage en cours d’exécution ne leur permet pas d’interrompre le smart contract. Les tiers n’auront d’autre choix que de demander une réparation amiablement ou de saisir le juge sur le fondement de la responsabilité délictuelle pour obtenir une indemnisation de la part des parties ou du programmeur, sous réserve de son identification.
3376 – La responsabilité de l’oracle. – Un oracle peut enregistrer sur la blockchain une information erronée. Pour déterminer sa responsabilité, il est nécessaire de déterminer la nature de son obligation.
La nature de l’obligation de l’oracle peut être qualifiée par les parties au contrat. Selon qu’elle est de moyens ou de résultat, les preuves à réunir pour qu’une réparation soit due ou, au contraire, pour s’en exonérer en tout ou partie, diffèrent. Les conséquences du déclenchement de l’exécution en suite de l’entrée de la mauvaise information sur la blockchain doivent être convenues avec l’oracle. S’il s’agit d’une obligation de résultat, les parties doivent seulement apporter la preuve que l’information renseignée était mauvaise pour donner lieu à réparation. À l’inverse, s’il s’agit d’une obligation de moyens, la seule erreur est insuffisante. La réparation est suspendue à la preuve de la négligence, l’inattention ou l’imprudence de l’oracle.
En matière de smart contract, il ne semble pas y avoir de demi-mesure. Lorsque l’oracle entre une information sur la blockchain, le smart contract s’exécute ou non. L’exécution partielle n’est pas envisageable. Le système se veut efficace car tranché. Dans cette logique, l’oracle devrait être tenu d’une obligation de résultat. Les conditions sont remplies ou non. La conséquence est l’application du contrat ou non. Mais la simplicité n’est qu’apparente.
Reconnaître une responsabilité n’a de sens que si elle engendre une réparation effective. Rendre obligatoire la souscription d’une assurance par les acteurs de la blockchain se proposant de jouer le rôle d’oracle a plusieurs vertus. D’une part, cela permettrait de reconnaître les oracles sérieux et de les professionnaliser en les responsabilisant pour cette fonction. D’autre part, l’assurance est un vecteur de confiance pour les utilisateurs. Toutefois, souscrire une assurance n’est pas envisageable pour tous les oracles. Le choix de faire un oracle de la base de données d’un aéroport ou d’un thermomètre710 exclut cette possibilité.
3377 – La responsabilité de la blockchain publique. – En l’absence d’assimilation de la blockchain publique à une organisation bénéficiant de la personnalité morale, il est impossible de retenir sa responsabilité. Mais la responsabilité des acteurs intervenant sur la blockchain pourrait être retenue. La corruption de la chaîne par les mineurs empêchant l’exécution du contrat ou la déclenchant à mauvais escient pourrait être sanctionnable. Toutefois, la problématique de l’identification perdure.
3378 – La responsabilité du smart contract. – La proposition est audacieuse. Imaginer une responsabilité du code informatique revient à le considérer comme un sujet de droit.
Dans une première résolution du 16 février 2017711, le Parlement européen préconise « la création, à terme, d’une personnalité juridique spécifique aux robots, pour qu’au moins les robots autonomes les plus sophistiqués puissent être considérés comme des personnes électroniques responsables, tenues de réparer tout dommage causé à un tiers ; il serait envisageable de conférer la personnalité électronique à tout robot qui prend des décisions autonomes ou qui interagit de manière indépendante avec des tiers ».
Le Parlement européen ne vise pas directement la personnalité juridique de l’algorithme, mais celle du robot. La différence entre les deux se limite à l’enveloppe. Le robot est l’incarnation de l’algorithme. Il lui donne une matérialité. Il permet de le saisir. Le contenant diffère mais le contenu est le même. Le traitement doit donc être similaire.
La faculté d’autonomie est déterminante dans l’attribution de la personnalité électronique. L’autonomie d’un algorithme peut être de deux ordres. L’algorithme d’apprentissage est susceptible de prendre des décisions. L’algorithme d’exécution autoexécute les décisions prises par ailleurs. Le smart contract appartient à ce dernier modèle. À première vue, l’intelligence de l’algorithme d’apprentissage s’oppose à la docilité de l’algorithme d’exécution. Cette interprétation évince le smart contract de la liste des algorithmes pouvant prétendre à la personnalité électronique. Mais la réalité est plus nuancée. Même un algorithme exerçant un pouvoir de décision est déterministe. Au même titre qu’un algorithme d’exécution, il se rapporte à un cahier des charges fixé par l’homme. Il fera ce que l’homme lui a dicté.
L’algorithme peut indifféremment apprendre la vertu ou le mensonge. Il est ce que son programmeur veut qu’il soit. Dès lors, il devient complexe d’être catégorique sur le degré d’autonomie à atteindre pour prétendre à la personnalité juridique. Se profile le danger d’une telle ouverture compte tenu des dérives possibles.
La personnalité juridique proposée par le Parlement européen est une personnalité technique. À l’image de la personnalité morale, elle a vocation à faire de l’algorithme un sujet de droit par le biais d’une fiction juridique. Ainsi sa responsabilité peut être engagée.
Mais il s’agit d’un premier pas vers la reconnaissance d’une égalité entre l’algorithme et la personne physique. Affirmer le contraire serait présomptueux face au constat sans appel des droits reconnus à une personne morale. Elle aussi était justifiée par un besoin technique. Elle est aujourd’hui l’équivalent de la personne physique712. Sur le plan éthique, ce serait inacceptable713.
La personnalité juridique implique d’être un sujet de droit et exclut par là même d’être un objet de droit. Un sujet de droit n’appartient à personne. Il a un patrimoine. Un algorithme est un objet de droit714. Dans ces conditions, il est permis de s’interroger sur la finalité de la création d’une personnalité électronique715.
Ce positionnement sur l’opportunité de créer une personnalité juridique des robots a été ignoré dans une résolution du Parlement européen portant notamment sur l’intelligence artificielle et la robotique, en date du 12 février 2019716. Plus récemment, un rapport du Parlement européen contenant des recommandations à la Commission européenne sur un régime de responsabilité civile pour l’intelligence artificielle l’exclut expressément. Elle considère que : « Les systèmes d’IA modernes sont des systèmes comme les autres et n’ont rien à voir avec les robots humanoïdes de science-fiction. Toute discussion dont l’objectif serait de donner une personnalité juridique aux systèmes d’IA est donc vaine »717.
Les débats européens témoignent de la difficulté de concilier l’éthique et les besoins pratiques du droit de la responsabilité. Mais reconnaître la personnalité juridique au smart contract ne rendrait pas l’indemnisation plus facile. Sans patrimoine, aucune indemnisation n’est possible. Aucune assurance ne peut être souscrite. La reconnaissance d’une personnalité électronique est donc indifférente au regard du droit de la responsabilité.
La réflexion du Parlement européen a évolué en ce sens. En témoignent deux nouvelles résolutions respectivement relatives aux principes éthiques relatifs au développement, au déploiement et à l’utilisation de l’intelligence artificielle, de la robotique et des technologies connexes718 et à leur régime de responsabilité719.
Il y est fait une distinction entre les systèmes d’intelligence artificielle à haut risque et les autres. Ces textes ne font que dresser les contours de la notion de « haut risque ». Il en ressort que le risque doit être plus important que celui raisonnablement attendu par les utilisateurs en termes de probabilité ; le dommage doit être grave ; et le système d’intelligence artificielle utilisée doit être particulièrement autonome. Cette notion abstraite devrait être précisée par une liste des systèmes à haut risque.
À partir de cette summa divisio, les deux textes organisent leur proposition d’un nouveau régime spécial de responsabilité autour de trois axes :

la responsabilisation éthique des concepteurs vis-à-vis de certaines applications d’intelligence artificielle susceptibles d’avoir de graves conséquences ;

la volonté de réguler les systèmes d’intelligence artificielle à haut risque sur un plan éthique dès leur développement ;

la reconnaissance d’une responsabilité objective (et donc sans faute) des opérateurs, déployeurs et exploitants si le risque se réalise720.

3379 À la question de savoir s’il existe une responsabilité de l’intelligence artificielle ou, au contraire du fait de l’intelligence artificielle721, le Parlement européen semble avoir répondu.
L’autonomie du smart contract tient à son exécution automatique. Elle est insuffisante pour faire entrer le smart contract dans le champ d’application des résolutions du Parlement européen précitées. Mais, deux remarques peuvent être faites :

il est possible de s’interroger sur l’intérêt de transposer le système de gradation du risque au smart contract. Certains smart contracts justifient-ils une protection accrue au regard du type d’utilisateurs, du risque technique, de la matière dans laquelle ils sont utilisés, etc., comme cela semble être le cas pour les systèmes d’intelligence artificielle « à haut risque » ?

le Parlement européen ne limite pas le jeu de la responsabilité à la faute. Il reconnaît une responsabilité objective des opérateurs, répondant par là même à une logique indemnitaire. De même, admettre une responsabilité sans faute du fait du smart contract déjouerait la difficulté liée à l’identification de l’auteur.

§ II – La réponse à une logique indemnitaire par une responsabilité sans faute

3380 La responsabilité sans faute existe déjà. L’autonomie naissant de l’évolution des nouvelles technologies est propice à son développement.
Le raisonnement est analogue en matière de smart contract. Le développer nécessite de déplacer la responsabilité de son fonctionnement défectueux vers son programmeur. Les cocontractants ne comprennent pas nécessairement le code informatique et n’ont pas d’emprise sur son exécution. Ils en perdent le contrôle.
3381 – La responsabilité du fait des produits défectueux. – Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime (C. civ., art. 1245). Sans faute, la seule défectuosité le rend responsable de plein droit. La preuve de l’absence de faute ne l’exonère que dans des cas limitativement définis (C. civ., art. 1245). La notion de dommage est large. Il peut s’agir d’un dommage à la personne ou aux biens autres que le produit défectueux (C. civ., art. 1245-1) Un lien de causalité entre le dommage et le défaut doit être établi (C. civ., art. 1245-8). La responsabilité du fait des produits défectueux ne peut pas être écartée contractuellement (C. civ., art. 1245-14).
Pour retenir la responsabilité du programmeur de smart contract, il faut :

assimiler le smart contract à un produit et le programmeur à un producteur ;

prouver un dommage directement lié à la défectuosité du smart contract.

Le produit n’est pas une notion de droit. Le vocabulaire évoque plutôt une notion commerciale ou industrielle. Le smart contract est un logiciel. Dans une même approche, il peut s’analyser comme un service. Le logiciel sert le contrat. Sa défaillance se mesure au degré de divergence entre la volonté des parties exprimée à l’origine en langage naturel et le résultat finalement obtenu.
Le logiciel n’est pas défini juridiquement. Seul l’article L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle (CPI, art. L. 112-2) le considère comme une œuvre de l’esprit. Dans sa transposition de la directive de 1985 relative à la responsabilité des produits défectueux, le Code civil définit le produit comme un bien meuble (C. civ., art. 1245-2). À première vue, le smart contract pouvant être qualifié de meuble incorporel n’est pas exclu. La qualification de « produit » a été admise expressément pour l’électricité, également meuble incorporel. Mais encore faut-il qu’il y ait un producteur. Il est défini comme le fabricant (C. civ., art. 1245-5). Le vocabulaire tend vers le matériel. Sauf à viser expressément le smart contract dans la loi à l’instar de l’électricité, il semble difficile de l’assimiler à un produit en tant que tel. Le logiciel peut être inséré dans le produit pour assurer son bon fonctionnement, mais il n’est pas le produit lui-même.
Appréhender le smart contract au moyen du droit de la responsabilité des produits défectueux sans adaptation du droit positif au préalable est impossible. Au surplus, la marge de manœuvre laissée aux États membres pour la transposition de la directive de 1985 est restreinte. La Cour de justice a déjà eu l’occasion de rappeler à la France que l’objectif poursuivi par la directive est « une harmonisation totale des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres »726. L’extension systématique de la notion de producteur au distributeur avait alors été reprochée à la France au prétexte qu’elle n’était reconnue par la directive qu’en cas d’impossibilité d’identification du fabricant727. L’extension de la notion de producteur au programmeur serait probablement censurée.
En revanche, la directive ne porte pas atteinte aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre du droit de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ou au titre d’un régime spécial de responsabilité existant au moment de la notification de la directive de 1985728. La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes729 limite considérablement l’application d’autres régimes de responsabilité que celui propre aux produits défectueux : le cumul est interdit. Un autre régime de responsabilité que celui propre aux produits défectueux ne peut jouer que si les conditions de la responsabilité spéciale du fait des produits défectueux ne sont pas réunies.
3382 – La responsabilité du fait des choses. – La préexistence de la responsabilité du fait des choses à la directive de 1985 justifie sa cohabitation avec la responsabilité du fait des produits défectueux. Classée au rang des responsabilités délictuelles, elle est par principe applicable uniquement lorsque la responsabilité contractuelle ne l’est pas730. Indifférent à cette scission traditionnelle (C. civ., art. 1245), le champ d’application de la responsabilité des produits défectueux semble plus large au premier abord. Toutefois, la jurisprudence de la Cour de cassation est plus tempérée. La responsabilité du cocontractant a été retenue pour des dommages causés « non seulement par sa faute mais encore par le fait des choses qu’il met en œuvre pour l’exécution de son obligation contractuelle »731. En définitive, la responsabilité du fait des choses tend à dépasser le clivage traditionnel entre responsabilités contractuelle et délictuelle.
S’il répond à la définition d’une chose, le smart contract défectueux pourrait donc engager la responsabilité de son propriétaire. Une chaîne de responsabilité pourrait alors être mise en place. La partie se sentant lésée engagera la responsabilité de son cocontractant. Lui-même usera d’une action récursoire (C. civ., art. 1251) contre la personne à l’origine du mauvais « encapsulage » du contrat dans le smart contract732. Le juge devra alors répartir les responsabilités entre le programmeur et les parties selon leur niveau d’intervention. Le cas échéant, le jeu de la solidarité permettra à la victime d’obtenir l’entière réparation de son dommage733.
On est responsable de plein droit des choses que l’on a sous sa garde (C. civ., art. 1242). Il s’agit d’une responsabilité sans faute734. Pour cela, le smart contract doit pouvoir être qualifié de « chose ».
La chose a une définition plus large que le produit. Elle peut être un bien corporel ou non. Elle a indifféremment un caractère inoffensif ou dangereux735. Elle peut être ou non atteinte d’un vice736. Elle est à l’état solide, liquide ou gazeux. Elle peut même prendre la forme d’ondes sonores ou d’impulsions électromagnétiques737. Sanctionner le fonctionnement anormal du smart contract est à la portée de l’article 1242 du Code civil (C. civ., art. 1242). Son immatérialité est sans incidence au regard de la conception jurisprudentielle de la chose. En revanche, des discussions doctrinales tendent à restreindre cette définition aux choses matérielles uniquement. Entendant ces voix, la proposition de réforme du 29 juillet 2020 prévoit de limiter la responsabilité du fait des choses aux « choses corporelles »738. Dans le cas où il serait adopté en l’état, le smart contract serait définitivement exclu de ce cas de responsabilité.
La garde suppose l’usage, le contrôle et la direction de la chose739. Ici encore la notion est large. La jurisprudence admet que le propriétaire puisse ne pas être le gardien si la preuve est faite de sa perte de contrôle sur la chose. Toutefois, elle reconnaît aussi que remettre la chose à autrui n’exclut pas d’en conserver le contrôle. Ainsi, confier la mise à exécution du contrat au programmeur du smart contract n’exclurait pas que le propriétaire en conserve la garde. Une fois encore, cette analyse permettrait la mise en œuvre d’une chaîne de responsabilité garantissant l’indemnisation du contractant subissant le dommage.
Reste que l’autonomie pose la question du lien de causalité. Selon la nature du fait dommageable, la qualité de gardien est discutable. Déterministe, le smart contract réalise toutes les tâches programmées et rien que celles-ci. Il n’a pas d’autonomie dans la prise de décision de réaliser les tâches fixées. Seule l’exécution est autonome. Si l’exécution dommageable résulte d’une erreur de programmation, la responsabilité du gardien peut être retenue. Mais qu’en est-il en cas de bug informatique ou d’exécution du contrat par le smart contract aveugle en dépit de nouvelles circonstances ?
S’agissant du bug informatique, la théorie doctrinale de la causalité adéquate retient qu’un fait n’est causal que lorsque le dommage était prévisible au moment où il s’est produit. La jurisprudence fait preuve de souplesse en la matière. Le juge ne recherche pas le fait à l’origine du dommage. Il effectue un tri afin de sélectionner les faits lui paraissant être les plus à même d’en être la cause. L’objectif est davantage d’aboutir à une décision lui semblant juste qu’établir l’enchaînement réel des faits ayant mené au dommage. Retenir une responsabilité quelle que soit la cause de l’exécution dommageable répond à une logique indemnitaire, à l’instar de la responsabilité du conducteur d’un véhicule autonome740. Il faut un responsable pour indemniser la victime. Il est incontestable qu’une fois le smart contract enclenché, le propriétaire comme le programmeur n’en ont plus le contrôle.
L’absence de discernement du smart contract peut également entraîner le dommage mais aussi contribuer à l’aggraver. Il s’agit d’une conséquence directe de l’utilisation du smart contract. Garantir le juste équilibre entre les parties requiert au minimum d’assurer une information sur l’automaticité et l’inéluctabilité du smart contract741. La confiance est à ce prix.
3383 – L’articulation des responsabilités. – Reconnaître le smart contract comme un produit est une première solution pour instaurer une responsabilité. Si le smart contract relève du champ d’application matériel et temporel de la responsabilité des produits défectueux, la responsabilité du fait des choses est écartée742. En revanche, la responsabilité du fait des choses pourra s’appliquer chaque fois que les conditions de la responsabilité du fait des produits défectueux ne seront pas réunies.
La chose est plus large que le produit. La prescription de l’action en responsabilité du producteur est enfermée dans un délai de dix ans à compter de la mise en circulation du produit (C. civ., art. 1245-15) et de trois ans à compter du moment où la victime aurait dû en avoir connaissance (C. civ., art. 1245-16). La responsabilité du fait des choses est soumise à la prescription de droit commun de cinq ans à compter du moment où le fait à l’origine du dommage a dû ou aurait dû être connu (Code civil – Article 2224). Elle est donc plus longue que celle de la responsabilité du fait des produits défectueux. L’état des connaissances scientifiques et techniques doit être suffisamment avancé au moment de la mise en circulation pour déceler l’existence du défaut. Compte tenu des évolutions de l’intelligence artificielle, il est fort probable que les smart contracts programmés machine to machine se développent743. Le producteur pourra se dégager de sa responsabilité en prouvant que l’état de la technologie ne permettait pas de déceler le degré de prise de décision par la machine au moment de son développement.
3384 – Les assurances. – Les divers conseils, avocats, notaires… intervenant dans la conception d’un contrat sont assurés. En effet, la logique indemnitaire est toujours sous-jacente. Reconnaître la responsabilité d’un intervenant est inutile s’il n’est pas en mesure d’indemniser la victime du dommage. Le programmeur de smart contract devrait également être contraint de souscrire une assurance professionnelle. Une réflexion pourrait également être menée sur la création d’un fonds de garantie744. Son utilisation pourrait notamment être liée à l’impossibilité d’identification du programmeur du smart contract.
3385 La technologie smart contractuelle ne doit pas faire l’objet d’un désengagement sur le plan du droit interne. Le caractère mondial de la blockchain publique n’exclut pas qu’elle puisse être appréhendée localement, par la loi nationale. La loi est parfois inefficace mais elle a une fonction protectrice. En revanche, l’absence d’encadrement international conduit au pluralisme des autorités internes compétentes. Une même question peut recevoir des réponses divergentes. Ce constat mène à s’interroger sur le rôle du droit international en la matière.

Sous-section III – Des réflexions sur le rôle du droit international

3386 La technologie blockchain semble rétive à toute forme d’encadrement. Le droit international privé n’y fait pas exception (§ I). En raisonnant par analogie avec internet, réglementer les actions enregistrées sur la blockchain – et non la blockchain elle-même – est une piste de réflexion méritant d’être approfondie. Le smart contract est considéré comme l’une des applications les plus prometteuses. L’encadrer semble être un moyen pour le droit d’appréhender la blockchain (§ II).

§ I – Les points d’achoppement entre blockchain et droit international privé

3387 – Un débat éprouvé. – Le débat n’est pas nouveau. La « régulation apparaîtrait vaine en raison de l’autosuffisance de la technique « disruptant » toute régulation juridique de cette technique par essence internationale »745. Face aux nouvelles technologies, le droit international privé est mis à l’épreuve. Dès 2001, une certaine perplexité s’installe face au réseau internet746.
3388 – Le droit international est un droit de localisation. – Il désigne la loi dans laquelle la solution de fond doit être recherchée et le juge compétent pour en connaître. Des critères existent pour rattacher le contrat à l’État avec lequel il entretient les liens les plus étroits. Nationalité, domicile des parties, lieu de situation des biens, des actes ou faits juridiques en question sont généralement retenus. L’indice de rattachement à un État varie selon qu’il s’agit d’une question de validité ou de preuve du contrat ou encore de responsabilité.
La blockchain est propice au développement des relations transnationales748. Comme internet, elle défie la logique de localisation du droit international privé.
3389 – Blockchains privée, de consortium ou publique749. – Dans les blockchains privées, tous les acteurs sont connus. La gouvernance est centralisée. Les droits d’écriture sont réservés à certains utilisateurs. Dans les blockchains de consortium, le dispositif est partagé entre plusieurs entités. Une gouvernance existe. Le nombre d’utilisateurs est restreint. Certains d’entre eux sont sélectionnés pour vérifier et diffuser les transactions. Ces blockchains sont permissioned. Contrôlées et utilisées par des utilisateurs connus et autorisés, elles ne sont pas un obstacle à l’application des règles de conflit de lois du droit international privé. Le smart contract enregistré sur ces blockchains doit être traité comme le mode d’exécution d’un contrat « entre absents ».
La discussion porte uniquement sur la blockchain publique. Par définition, son architecture est ouverte et accessible à tous. Elle est la seule forme de blockchain répondant pleinement à l’idéologie sous-jacente au système. Les acteurs peuvent tant participer aux transactions qu’au consensus permettant de les valider. Elle est permissionless. Les utilisateurs n’ont pas besoin d’être identifiés et autorisés pour y participer. Sans frontière, elle est propice au développement des relations transnationales750. Mais sans autorité de contrôle ni représentant désigné, avec des utilisateurs anonymes, trouver des points d’ancrage fiables s’avère délicat.
3390 – L’autosuffisance de la technique. – Le postulat est simple. Déterminer la loi applicable et le juge compétent est inutile sur la blockchain où le code informatique est la loi. La loi et le juge ne font pas partie de l’équation. La technique se suffit à elle-même. Donc, la gouvernance de la blockchain permet une autorégulation fondée sur ses propres règles751. Seules des règles a-nationales ont la légitimité suffisante pour saisir des situations dont l’internationalité se caractérise par l’impossibilité de les localiser. La blockchain serait donc un exemple d’ordre juridique spontané752.
3391 – La régulation des applications de la blockchain. – La réalité est tout autre. « Le Code n’est certes pas dénué de valeurs, mais elles [ces valeurs] n’ont aucune légitimité démocratique »753. L’expérience d’internet prouve la possibilité de réguler les nouvelles technologies. Internet est un réseau ouvert, décentralisé, sans frontière. La régulation a pu se faire de manière indirecte en agissant sur les applications et non sur le réseau insaisissable lui-même. À l’image d’internet, la blockchain semble difficilement saisissable par le droit. Réguler les applications paraît plus raisonnable. Il s’agit donc de s’interroger sur les possibilités pour le droit international privé d’appréhender le smart contract en dépit de ses principales caractéristiques qui semblent s’y opposer.

§ II – L’encadrement du smart contract par le droit international privé

3392 – La problématique de localisation. – Le smart contract a été imaginé indépendamment de la blockchain754. Néanmoins, le regain d’intérêt est lié au fait qu’il s’appuie sur cette infrastructure. Cette notion de support a tendance à nous faire oublier que la blockchain n’est pas un lieu mais un outil755. Le contrat entre absents existait avant l’avènement de la blockchain. L’absence de lieu de rencontre physique des parties lors de la conclusion ou de l’exécution du contrat n’est pas un obstacle en lui-même en droit international privé. Il ne s’agit pas d’éluder la question de la localisation, laquelle peut s’avérer obscure, le processus évoluant dans un espace numérique immatériel756. Les difficultés se révèlent lorsque les éléments résultant de la blockchain ne suffisent pas à localiser le contrat alors qu’il s’agit du critère de détermination de la loi applicable ou du juge compétent.
La question est donc plus ardue lorsque le smart contract est enregistré directement sur la blockchain où il s’exécute ensuite. Pour autant, aucune disposition internationale ne réglemente spécifiquement le smart contract. Un rapport parlementaire de 2018 considère d’ailleurs que c’est inutile757. Les solutions doivent être recherchées dans les règlements Rome I758 désignant la loi applicable au contrat759 et Bruxelles I760 et Bruxelles I bis761 fondant la compétence du juge. Le principe est simple. La loi applicable aux contrats internationaux est laissée au choix des parties. À défaut, les règles de conflit de lois du droit international privé trouvent à s’appliquer.
3393 – Les règles de conflit de lois. – Les lieux de situation ou de résidence de chacune des parties déterminent la loi applicable à la formation du contrat (Règl. Rome I, art. 4, 11).
Les modalités d’exécution et les mesures à prendre par le créancier en cas de défaut d’exécution dépendent de la loi du pays où l’exécution a lieu (Règl. Rome I, art. 12.2). La validité formelle du contrat est tantôt soumise à la loi applicable au fond, tantôt à la loi de résidence des parties (Règl. Rome I, art. 4, 11). Si le contrat est conclu entre absents, le lieu où les parties se trouvent au moment de la conclusion du contrat peut également être retenu. La compétence du juge est soumise à l’alternative entre le lieu du domicile du défendeur et le lieu d’exécution du contrat (Règl. Bruxelles I, art. 2 et 5)766.
La question de la preuve de l’existence du contrat, de son contenu et de sa bonne exécution pose celle de l’admissibilité de la blockchain comme mode de preuve767. Pour juger de l’admissibilité de la preuve, les règles de droit international privé sont multiples. La qualification du smart contract est une nouvelle fois un préalable obligatoire768. En matière de faits juridiques, la loi du for est retenue. En matière d’actes juridiques, c’est alternativement la loi du for et celle du lieu de l’accomplissement de l’acte qui trouvent à s’appliquer769. La force probante est soumise à la loi du for, mais la jurisprudence admet parfois la loi du lieu de conclusion du contrat.
En matière de responsabilité civile, le règlement Bruxelles I bis770 ou les articles 42 et 46 du Code de procédure civile déterminent la juridiction compétente. Mais, en pratique, contre qui agir ? « [C]ette règle est inadaptée à l’environnement immatériel et non territorial des blockchains »771.
Les règles de conflit de lois sont nombreuses et nécessitent de situer les parties, le contrat et de qualifier les situations. De manière générale, les lois de police déterminées par chaque État nécessitent de localiser le lieu d’exécution afin de vérifier si l’application du smart contract est légale.
Dans toutes les matières où la lex contractus a vocation à s’appliquer, les parties ont intérêt à désigner la loi applicable. Elle peut néanmoins être écartée par d’autres lois sur les questions de capacité, de pouvoirs des parties ou encore lorsque d’autres lois ont une vocation concurrente774. Cela soulève également la question de la qualification du smart contract. Les lois applicables aux actes et aux faits juridiques diffèrent. De même, la loi applicable à une DAO775 pourrait diverger en fonction de la nature juridique retenue. Une déclaration ou un enregistrement permet parfois leur reconnaissance par un État. Il est possible d’y voir un critère de rattachement. Certains auteurs proposent de leur appliquer une solution similaire à celle ayant vocation à être retenue en matière de sociétés776, soit en droit français celle du siège social.
3394

649) M. Mekki, Le juge et la blockchain : l’art de faire du nouveau vin dans de vieilles outres, in Le juge et le numérique : un défi pour la justice du XXIe siècle, ss dir. N. Blanc et M. Mekki, Dalloz, 2019, p. 50, no 3.
650) L. Lessig, Code is law : Harvard magazine 2000 (https://harvardmagazine.com/2000/01/code-is-law-html, consulté le 19 mai 2020).
651) V. supra, no 3217.
652) J.-G Dumas, P. Lafourcade, A. Tichit et S. Varrette, Les blockchains en 50 questions, comprendre les fonctionnements et les enjeux de cette technologie innovante, Dunod, 2018, p. 10.
653) V. Glossaire : « Fiat ».
654) V. supra, no 3241.
655) M. Mekki, Le juge et la blockchain : l’art de faire du nouveau vin dans de vieilles outres, in Le juge et le numérique : un défi pour la justice du XXe siècle, ss dir. N. Blanc et M. Mekki, Dalloz, 2019, p. 50 et s., no 16.
656) V. supra, no 3242.
657) G. Chantepie, L’exigence de clarté dans la rédaction du contrat : RDC 2012, p. 989.
658) « Sans confiance ».
660) V. infra, nos 3498 et s.
661) V. supra, no 3254.
662) Projet collaboratif, Wikipédia est une encyclopédie à laquelle tous les internautes sont invités à contribuer.
663) https://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia : Principes_fondateurs, consulté le 27 mai 2020.
664) V. Rabesandratana et N. Bacca, L’Oracle hardware : la couche de confiance entre les blockchains et le monde physique, in Réalités industrielles : Annales des Mines 2017, p. 91 et s.
665) V. supra, no 3258.
666) V. Rabesandratana et N. Bacca, L’Oracle hardware : la couche de confiance entre les blockchains et le monde physique, in Réalités industrielles, préc.
667) L. Lessig, Code is law : Harvard magazine 2000 (https://harvardmagazine.com/2000/01/code-is-law-html, consulté le 19 mai 2020).
669) Mise à jour majeure changeant les règles du protocole et devant être approuvée par l’ensemble de la communauté.
670) B. Jean et P. de Filippi, Les smart contracts, les nouveaux contrats augmentés, Conseils et entreprises, Avocats conseils d’entreprise, 2016, hal-01676878.
671) V. infra, no 3383.
672) www.youtube.com/watch?v=SoFMMqEn9Ag, consulté le 13 nov. 2020.
673) Token de ChainLink.
674) V. Glossaire : « Jeton ».
675) C. Barreau, La régulation des smart contracts et les smart contracts des régulateurs, in Réalités industrielles, Blockchains et smart contracts, des technologies de la confiance : Annales des Mines août 2017, p. 74 et s.
676) L. Godefroy, Le code algorithmique au service du droit : D. 2018, p. 734.
677) E. Treppoz, Quelle régulation internationale pour la blockchain ? Code is Law v. Law become Code, in Blockchain et droit, ss dir. F. Marmoz, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 56 et s.
678) V. supra, no 3279.
679) V. supra, no 3254.
680) V. supra, no 3256.
681) V. infra, nos 3428 et s.
682) V. supra, no 3265.
683) V. infra, no 3363.
684) C. Barreau, La régulation des smart contracts et les smart contracts des régulateurs, préc., p. 74 et s.
685) C. Barreau, ibid., p. 76.
686) Business to Business.
687) V. supra, nos 3252 et s.
688) V. infra, no 3374.
689) Ord. no 2016-520, 28 avr. 2016, relative aux bons de caisse : JO 29 avr. 2016, no 0101, texte no 16 ; Ord. no 2017-1674, 8 déc. 2017, relative à l’utilisation d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers : JO 9 déc. 2017, no 0287, texte no 24.
690) V. supra, no 3247.
691) Business to Business.
692) Consumer to Consumer.
693) V. supra, no 3246.
694) V. infra, nos 3368 et s.
695) Certains auteurs s’interrogent également sur la possibilité d’admettre le jeu du droit de rétractation offert au consommateur qui conclut un contrat à distance (https://ecan.fr/Smart-Contracts-Etudes.pdf, consulté le 15 janv. 2021) ; V. supra, nos 3116 et s.
696) V. supra, no 3310.
697) V. supra, no 3240.
698) V. supra, no 3241.
699) V. supra, no 3361.
700) Ord. no 2016-131, 10 févr. 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations : JO 11 févr. 2016, no 35, texte no 26.
701) M. Kranzberg, Presidential address to the society for the history of technology, 1985, partiellement reproduit sur http://thefrailestthing.com/2011/08/25/kranzbergs-six-laws-of-technology-a-metaphor-and-a-story/, consulté le 14 juill. 2020.
702) V. supra, no 3242.
703) Cons. const., 22 oct. 1982 : D. 1983, no 189, note F. Luchaire.
704) V. supra, nos 3256 et 3276.
705) V. supra, no 3348.
706) Cass. ass. plén., 7 févr. 1986, no 84-15.189 : Bull. civ. 1986, ass. plén., no 2 ; JCP G 1986, II, 20616, P. Malinvaud ; RTD civ. 1986, p. 605, obs. P. Rémy ; D. 1986, jurispr. p. 293, note A. Bénabent.
707) Cass. ass. plén., 12 juill. 1991, no 90-13.602 : Bull. civ. 1991, ass. plén., no 5 ; D. 1991, p. 549, note J. Ghestin ; D. 1991, somm. p. 321, obs. J.-L. Aubert ; JCP G 1991, II, 21743, note G. Viney.
708) É. Caprioli, B. Charpentier, V. Chavanne, J. de Labriffe, D. O’Kane, C. Roquilly, A. Touati et É. Viguier, Blockchain – Blockchain et smart contracts : enjeux technologiques, juridiques et business : CDE mars 2017, no 2, entretien 2.
709) A. Saint-Paul, Smart contracts et droit commun des contrats, ss dir. M. Bourassin, Mémoire de recherche soutenu le 5 juill. 2019, non publié, no 111.
710) V. supra, nos 3240 et 3246.
711) Parlement européen, rés. no 2015/2103(INL), 16 févr. 2017.
712) Cons. const., 4 juill. 1989, no 89-254 DC : JO 5 juill. 1989 ; Rev. sociétés 1990, 27, note Y. Guyon ; Rép. civ. Dalloz, Vo Personne morale, 66.
713) G. Loiseau et A. Bensamoun, Droit de l’intelligence artificielle, Lextenso, coll. « Les Intégrales », 2019, p. 39 et s., nos 78 et s.
714) Dans le même sens, la personnalité juridique est refusée aux animaux.
715) G. Loiseau, La personnalité électronique des robots : une monstruosité juridique : JCP G 2018, no 598.
716) Parlement européen, rés. 12 févr. 2019, 2018/2088 (INI).
717) Rapport contenant des recommandations à la Commission européenne sur un régime de responsabilité civile pour l’intelligence artificielle, 5 févr. 2020, 2020/2014 (INL).
718) Parlement européen, rés, 20 oct. 2020, 2020/2012 (INL).
719) Parlement européen, rés, 20 oct. 2020, 2020/2014 (INL).
720) J. Sénéchal, Responsabilisation ab initio, régulation ex ante et responsabilités a posteriori : le cœur des débats européens sur les systèmes d’intelligence artificielle, hors et dans le secteur du commerce électronique : Dalloz IP/IT 2020, p. 667.
721) Ch. Lachièze, Intelligence artificielle : quel modèle de responsabilité ? : Dalloz IP/IT 2020, p. 663.
722) L. no 85-677, 5 juill. 1985, tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation.
723) F. G’Sell, Vers l’émergence d’une « responsabilité numérique » ? : Dalloz IP/IT 2020, no 153.
724) Parlement européen, rés. 2018/2088(INI), 12 févr. 2019, § 91.
725) S.J. Childers, Don’t Stop the Music : No Strict Products Liability for Embedded Software, 19 U. Fla. J.L. & Pub. Pol’y 125, 161 (2008).
726) CJCE, 25 avr. 2002, aff. C-52/00, Commission c/ République française, ECLI :EU :C :2002 :252, pt 24.
727) Cons. CE, dir. 85/374/CEE, 25 juill. 1985, art. 3, § 3.
728) Cons. CE, dir. 85/374/CEE, 25 juill. 1985, art. 13 ; C. civ., art. 1245.
729) CJCE, 25 avr. 2002, aff. C-52/00, Commission c/ République française, ECLI :EU :C :2002 :252, pt 24.
730) Par application du principe de non-cumul des deux ordres de responsabilité civile, V. supra, no 3375.
731) Cass. 1re civ., 17 janv. 1995 : Bull. civ. 1995, I, no 43, p. 29.
732) É. Caprioli, B. Charpentier, V. Chavanne, J. de Labriffe, D. O’Kane, C. Roquilly, A. Touati et É. Viguier, Blockchain – Blockchain et smart contracts : enjeux technologiques, juridiques et business : CDE mars 2017, no 2, entretien 2.
733) La proposition de loi du 29 juill. 2020 prévoit la rédaction suivante (C. civ., art. 1267) : « Lorsque plusieurs personnes sont responsables d’un même dommage, elles sont solidairement tenues à réparation envers la victime. Si toutes ou certaines d’entre elles ont commis une faute, elles contribuent entre elles à proportion de la gravité et du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable. Si aucune d’elles n’a commis de faute, elles contribuent à proportion du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable, ou à défaut par parts égales ».
734) Cass. civ., 29 juin 1896, Teffaine : D. 1997, I, 433, note Saleilles.
735) Cass. ch. réunies, 13 févr. 1930, Jand’heur : GAJ civ., 11e éd., no 193 ; S. 1930, 1, 121, note P. Esmein.
736) Cass. ch. réunies, 13 févr. 1930, Jand’heur : GAJ civ., 11e éd., no 193 ; S. 1930, 1, 121, note P. Esmein.
737) Cass. 2e civ., 27 sept. 2012, no 11-11.762. – TGI Paris, 27 févr. 1991 : JCP G 1992, II, 21809, note P. Le Tourneau.
739) Cass. ch. réunies, 2 déc. 1941, Franck : GAJ civ., t. II, no 200.
740) V. supra, no 3378.
741) V. supra, no 3363.
742) CJCE, 25 avr. 2002, aff. C-52/00, Commission c/ République française, ECLI :EU :C :2002 :252.
743) L’IoT permet aux machines d’interagir entre elles sans intervention humaine. Par exemple, il existe des places de stationnement connectées capables de communiquer avec des véhicules également connectés pour leur indiquer qu’elles sont disponibles. Il est permis d’imaginer qu’à l’avenir la place et le véhicule concluront directement un contrat de réservation sans intervention humaine.
744) Pour un autre exemple de l’enjeu des assurances, V. supra, nos 3356 et s., sur la question du BIM ; V. infra, nos 3458 et 3459.
745) E. Treppoz, Quelle régulation internationale pour la blockchain ? Code is Law v. Law become Code, in Blockchain et droit, ss dir. F. Marmoz, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 56 et s.
746) E. Brousseau, Régulation de l’Internet. L’autorégulation nécessite-t-elle un cadre institutionnel ? : Rev. éco. 2001, no hors-série, « Économie de l’internet », p. 349 et s.
747) B. Haftel, Droit international privé et numérique, in Le juge et le numérique : Un défi pour la justice du XXIe siècle, ss dir. N. Blanc et M. Mekki, Dalloz, 2019, p. 11 et s.
748) A. El Mejri, Le droit international privé face aux nouvelles mobilités : LPA 7 avr. 2020, p. 9.
749) V. Glossaire : « Blockchain » ; V. supra, nos 3217 et 3348.
750) A. El Mejri, Le droit international privé face aux nouvelles mobilités : LPA 7 avr. 2020, p. 9.
751) N. Devillier, Jouer dans le « bac à sable » réglementaire pour réguler l’innovation disruptive : le cas de la technologie de la chaîne de blocs : RTD com. 2017, 1037.
752) F. Jault-Seseke, La blockchain au prisme du droit international privé, quelques remarques : Dalloz IP/IT 2018, p. 544.
753) E. Treppoz, Quelle régulation internationale pour la blockchain ? Code is Law v. Law become Code, in Blockchain et droit, ss dir. F. Marmoz, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 55 et s.
754) V. supra, no 3242.
755) E. Treppoz, Quelle régulation internationale pour la blockchain ? Code is Law v. Law become Code, in Blockchain et droit, ss dir. F. Marmoz, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 55 et s.
756) B. Haftel, Droit international privé et numérique, in Le juge et le numérique : un défi pour la justice du XXIe siècle, ss dir. N. Blanc et M. Mekki, Dalloz, 2019, p. 11 et s.
757) L. de la Raudière et J.-M. Mis, Rapport d’information sur les chaînes de blocs (blockchains), Rapp. AN no 1501, déc. 2018, p. 88.
758) PE et Cons. CE, règl. (CE) no 593/2008, 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles.
759) V. supra, nos 3102 et s.
760) Cons. CE, règl. (CE) no 44/2001, 22 déc. 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.
761) Cons. UE, règl. (UE) 1215/2012, 12 déc. 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.
762) M. Mekki, Les mystères de la blockchain : D. 2017, 2160, no 28.
763) Pour des exemples de saisines automatiques : V. supra, no 3293 concernant la saisine automatique en matière de convention d’arbitrage et no 3341 concernant l’automatisation de la déclaration de créance ; www.dalloz-actualite.fr/flash/dematerialisation-des-procedures-saisine-d-une-juridiction-par-portail-du-justiciable#.X1uOQ3kzbD4, consulté le 11 sept. 2020.
764) En Europe, la saisine du juge dématérialisée directement par le justiciable se développe sous l’impulsion de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (Cepej) (cf. https://rm.coe.int/1680748154#_ftn5, consulté le 14 sept. 2020) ; Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Commission juridique et des droits de l’Homme, rés. no 2081 (2015), L’accès à la justice et internet : potentiel et défis, § 1 et 2. Outre la France, la Norvège, l’Estonie, la Grèce, le Portugal et la Turquie notamment développent la saisine du juge dématérialisée. Le déploiement est disparate. Cf. Y. Meneceur, Le numérique, levier essentiel d’une meilleure efficacité et qualité de la justice en Europe, in Enjeux numériques, Les métiers du droit au défi du numérique : Annales des Mines sept. 2018, p. 11 et s.
765) L’objectif est de localiser le contrat au lieu où le droit applicable et le juge compétent sont les plus susceptibles d’accueillir favorablement la proposition faite par le rédacteur de l’acte.
766) V. supra, no 3103.
767) V. supra, no 3223.
768) V. supra, no 3265.
769) Cass. 1re civ., 24 févr. 1959 : Rev. crit. DIP 1959, p. 368, note Y. Loussouarn ; D. 1959, note Ph. Malaurie.
770) Cons. UE, règl. (UE) no 1215/2012, 12 déc. 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, art. 4 et 7.
771) T. Douville, Blockchains et droit international privé : état sommaire des questions : Rev. Lamy dr. aff. 2019, no 3.
772) V. supra, no 3097 ; V. Glossaire : « Cryptographie asymétrique ».
773) V. supra, no 3387.
774) V. supra, no 3114 : en matière de forme du contrat (loi du lieu de conclusion du contrat ou loi du for sont alternativement applicables) ; V. infra, no 3394.
775) V. Glossaire : « DAO ».
776) Th. Douville, Blockchains et droit international privé : état sommaire des questions : Rev. Lamy dr. aff. 2019, no 2, p. 385 et s., no 6.
777) https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01625285/document, consulté le 16 sept. 2020.
778) Cass. 1re civ., 28 janv. 2009, no 07-11.729 : Bull. civ. 2009, I, no 15 (à propos de la proportionnalité d’une astreinte). – Cass. 1re civ., 1er déc. 2010, no 09-13.303 : Bull. civ. 2010, I, no 248 (à propos de l’exequatur d’une décision californienne prévoyant des dommages et intérêts punitifs). – Cass. 1re civ., 7 nov. 2012, no 11-23.871 : Bull. civ. 2012, I, no 228 (à propos de la proportionnalité entre la condamnation d’une partie et le préjudice subi par l’autre et du principe de personnalisation des peines).
779) Cass. 1re civ., 1er févr. 2005, no 02-15.237 : Bull. civ. 2005, I, no 53. – Cass. 1re civ., 16 mars 1999, no 97-17.598 : Bull. civ. 1999, I, no 92. – Cass. soc., 25 janv. 2005, no 04-41.012 : Bull. civ. 2005, V, no 16.
780) Cass. 1re civ., 14 oct. 2009, no 08-16.369 : Bull. civ. 2009, I, no 207 ; Gaz. Pal. 28 nov. 2009, no 332, p. 34, obs. M.-L. Niboyet ; D. 2010, p. 177, note S. Bollée.


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