CGV – CGU

2021 – Rapport du 117e congrès – Commission 3 – Titre 1 – La confiance

PARTIE II – La sécurisation de la pratique du contrat numérique

Titre 1 – La confiance

3398 Sur le plan juridique, la confiance peut se définir comme la croyance en la bonne foi, loyauté, sincérité et fidélité d’autrui ou en ses capacités, compétences et qualifications professionnelles786. Appliquée au contrat, la confiance est un puissant facteur d’exécution des obligations contractuelles, partant de sécurité juridique entre les contractants. Il est ainsi toujours plus sécurisant d’établir une relation avec une personne que l’on pense exécuter ses obligations avec loyauté, sincérité et fidélité. Une confiance réciproque accentuera d’ailleurs la sécurité juridique attendue des parties. Le contrat est ici entendu de façon très large, du début des pourparlers précontractuels jusqu’à l’exécution de la dernière des obligations contractuelles. La confiance est donc une notion transversale présente tout au long de la relation contractuelle.
Quel est alors l’impact des nouvelles technologies sur la confiance contractuelle ?
L’évolution disruptive issue des nouvelles technologies787 repose sur plusieurs déterminants. D’une part, elles se caractérisent par l’usage de techniques informatiques et numériques innovantes en totale rupture avec celles des outils existants à ce jour. La rapidité des échanges d’informations, la fluidité de communication, la conservation des données, le tout à moindre coût, bousculent le rapport contractuel. D’autre part, les nouvelles technologies sont nées d’une idée simple de défiance des acteurs du monde numérique à l’égard des acteurs habituels du monde économique. Cette défiance à l’égard de l’État et de ses corps intermédiaires, des banques, des professions réglementées, impacte nécessairement la relation contractuelle. Finalement, les nouvelles technologies proposent de substituer à la confiance humaine une confiance technologique et technique. En 2020, elles ne semblent pas y être totalement parvenues, selon une récente étude de l’Association de l’économie numérique (Acsel).
Le taux de confiance stagne ces dernières années (40 % en 2015, 37 % en 2016, 40 % en 2017) et baisse substantiellement chez les plus connectés. Pour l’e-administration (78 %) ou l’e-commerce (58 %), les niveaux de confiance sont assez élevés. En revanche, dans le secteur spécifique des réseaux sociaux où la confiance reste difficile à créer789, le niveau est assez bas (26 %). Le piratage des données ou du compte, la consultation et l’utilisation abusive des données personnelles et l’usurpation de l’identité constituent des obstacles que le numérique doit surmonter790. Pour un spécialiste de ces nouvelles technologies, l’explication est plus simple791, c’est « l’explicabilité » de la nouvelle technologie qui est l’origine de la confiance. Le facteur de confiance est basé sur l’explication et la connaissance du risque que l’on en a. Les risques seront d’autant plus acceptés qu’ils seront identifiés et leurs niveaux de dangerosité établis. C’est l’une des raisons vraisemblablement pour laquelle la blockchain et l’intelligence artificielle (IA)792 souffrent d’une certaine défiance aujourd’hui.
Ceci étant, s’il est trop tôt pour parler de « substitution » de confiances, les nouvelles technologies proposent à tout le moins aujourd’hui une véritable « concurrence » de confiances : la confiance humaine versus la confiance technologique et technique.
Comment ces évolutions se traduisent-elles en matière contractuelle ?
La confiance des contractants paraît menacée par les technologies numériques (Sous-titre I). Dès lors, les acteurs traditionnels du monde juridique tentent de réagir. Leurs atouts pour susciter un regain de confiance et par là même de sécurité contractuelle restent efficients (Sous-titre II).

786) G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, coll. « Quadrige », 13e éd., 2020, Confiance, p. 227.
787) V. glossaire : Nouvelles technologies.
789) J. Gossa, Les blockchains et smart-contracts pour les juristes : Dalloz IP/IT juill.-août 2018, p. 393 et s. – E. Netter, Numérique et grandes notions du droit privé, Ceprisca, coll. « Essais », 2019, p. 261 et s.
790) Lorsque l’on connaît l’usage des réseaux sociaux chez les jeunes d’aujourd’hui, il faut néanmoins reconnaître que la défiance envers ces réseaux ne constitue pour autant pas un frein à son usage et à son développement (www.journaldunet.com/media/publishers/1489031-les-reseaux-sociaux-chez-les-16-25-ans-en-2019).
791) L. Julia, Entretien en visioconférence, Paris, 9 oct. 2020. Luc Julia est un ingénieur et informaticien franco-américain né en janvier 1966 à Toulouse, spécialisé dans l’intelligence artificielle. Il est l’un des concepteurs de l’assistant vocal Siri et est depuis 2012 vice-président chargé de l’innovation chez Samsung.
792) V. glossaire des termes numériques & juridiques complexes : « Intelligence artificielle ».


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