CGV – CGU

PARTIE I – L’ingénierie notariale au service de la mutation de l’immeuble
Titre 1 – Ingénierie notariale et préparation du contrat immobilier
Sous-titre 2 – Proposer et anticiper le contrat immobilier

Chapitre I – Ingénierie notariale et modalités de cession et d’acquisition

10104 – Plan. – Lorsqu’il analyse avec son client les détails d’une opération immobilière, le notaire doit être en mesure :

d’envisager avec lui les différentes modalités et structures d’acquisition ou de cession qui s’offrent à lui ;

d’attirer son attention sur les avantages, conditions et limites de chacune des solutions et de déterminer celles à privilégier.

Nous concentrerons nos développements sur les points suivants :

l’ingénierie notariale en matière de cession immobilière : sur la temporalité de la cession en matière d’impôt sur la plus-value et sur certains types particuliers de cession, telle celle d’un immeuble démembré (Section I) ;

l’ingénierie notariale en matière d’acquisition immobilière : sur certains mécanismes d’acquisition pouvant être conseillés (Section II).

Section I – Modalités de cession immobilière et ingénierie notariale

10105 – Plan. – Anticiper et conseiller les parties dans le processus immobilier conduit notamment à optimiser la cession immobilière en agissant sur sa temporalité et ses modalités. Nous aborderons ici la question des plus-values immobilières sous l’angle des recommandations et réflexes en la matière (Sous-section I) et certaines modalités particulières de cession ou celles pouvant être privilégiées (Sous-section II).

Sous-section I – Cession immobilière et problématiques de plus-value

10106 – Plan. – L’ingénierie notariale trouve un large domaine d’application en matière d’impôt sur la plus-value immobilière, que ce soit concernant les régimes d’exonération ou les techniques juridiques d’optimisation (donation avant cession, quasi-usufruit, démembrement de propriété, combinaison de ces techniques, etc.). Sans vouloir dresser ici un panorama exhaustif, nous axerons les développements qui suivent sur les réflexes, les difficultés et sources de contentieux pour anticiper et conseiller au mieux nos clients dans ce domaine, notamment en matière de temporalité de la cession (§ I) ou de cession d’immeuble démembré (§ II).

§ I – Impôt sur la plus-value et temporalité de la cession

10107 – Point de vigilance : promesse synallagmatique et plus-value. – Nous soulignerons ici l’importance d’être vigilants sur la détermination de la date de cession pas toujours maîtrisée en cas d’acquisition suite à une promesse synallagmatique en matière de calcul de l’impôt sur la plus-value.
10108 – Détermination de la date de cession et consensualisme. – La date de cession constitue le fait générateur de plusieurs impositions, notamment en matière d’impôt sur la plus-value. La question de sa détermination précise se pose particulièrement lorsque l’acte authentique est précédé de la signature d’une promesse synallagmatique.
La formation de la vente résulte en principe du consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix, et entraîne un transfert immédiat de la propriété de l’immeuble85. Ce n’est que si les parties ont entendu faire de la signature de l’acte authentique une condition de leur consentement que la formation du contrat sera différée à l’accomplissement de l’acte notarié. Mais, en pratique, les parties choisissent la plupart du temps (ou l’on choisit pour elles) de dissocier la formation du contrat et ses effets, retardant la date du transfert de propriété à la date de signature de l’acte authentique. Ces notions sont abordées dans les développements sur le consensualisme et la vente solennelle (V. infra, nos 10316 et s.).
10109 – Application en matière de plus-value. – La fixation de la date de la cession va notamment déterminer la durée de détention. Il est donc primordial d’établir si la cession a eu lieu lors de la signature de la promesse synallagmatique ou lors de la signature de l’acte authentique. Le Conseil d’État s’est prononcé sur cette question dans un arrêt du 29 décembre 2020 particulièrement important, pris en chambres réunies86 ; en l’absence de dispositions fiscales particulières, il fait une stricte application des règles civiles : lorsque l’avant-contrat révèle le consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix, le transfert de propriété, qui détermine le fait générateur de la plus-value imposable, est réputé avoir lieu à compter de la signature de la promesse87.
10110 – Inefficacité des énonciations de l’acte authentique si les termes de la promesse sont clairs. – Le Conseil d’État précise que lorsque les termes de la promesse sont clairs (promesse synallagmatique de vente sans condition suspensive révélant clairement le consentement réciproque des parties sur la chose et sur le prix), le caractère immédiat du transfert de propriété (et donc le début du délai de détention de l’acquéreur pour la détermination de la plus-value (ou sa fin pour le vendeur) n’est pas remis en cause par des énonciations contraires de l’acte authentique (qui mentionnerait un transfert de propriété au jour de sa signature) ou des éléments postérieurs. En synthèse, en présence de deux actes contradictoires (mais chacun suffisamment clair) sur la date du transfert de propriété, le premier est constitutif du fait générateur et le second demeure sans effet. Si les parties souhaitent différer les effets de la vente (et donc allonger le délai de détention du vendeur notamment), leur intention doit résulter de l’avant-contrat88.
10111 – Conséquences pratiques et ingénierie notariale. – Au regard des explications précédentes, nous relèverons :

qu’il conviendra d’être particulièrement vigilants sur la date de signature d’une promesse synallagmatique de vente sans condition suspensive concernant un bien soumis à l’impôt sur la plus-value immobilière, pour le calcul du nombre d’années de détention ;

que le recours à une promesse unilatérale de vente, notamment en cas de promesse de longue durée, aura un impact non négligeable sur la durée de détention, puisqu’il n’y a pas vente tant qu’il n’y a pas eu de levée d’option de l’acquéreur ;

qu’une intervention du notaire dès la signature de l’avant-contrat, prenant notamment la forme d’une promesse synallagmatique authentique, serait de nature à atténuer le risque. En effet, le report à la signature de la vente définitive du transfert de propriété est une pratique bien établie chez les notaires, qui s’explique notamment par le report corrélatif du transfert des risques de la chose. Le Conseil d’État faisant dans ce cas une stricte application des règles civiles, l’intervention du notaire dès l’avant-contrat synallagmatique permettrait d’éviter ce risque d’un aléa sur le délai de détention si tel n’est pas le souhait des parties.

10112 – Schéma récapitulatif. – Nous résumons dans le schéma ci-dessous l’importance de la rédaction de l’avant-contrat sur le calcul du délai de détention en matière d’impôt sur la plus-value.
Résumé de l'importance de la rédaction de l'avant-contrat sur le calcul du délai de détention en matière d'impôt sur la plus-value

§ II – Impôt sur la plus-value et vente d’un immeuble démembré

10113 – Ingénierie notariale et vente de l’immeuble démembré. – Les notaires sont très régulièrement confrontés à la vente d’un immeuble détenu en démembrement de propriété, que le démembrement de propriété ait une origine successorale ou conventionnelle. Toutefois, cette opération courante nécessite souvent plus qu’une autre d’être anticipée et réfléchie avec les parties, et l’ingénierie notariale trouve ici à s’exprimer pleinement. En pareille hypothèse, il convient de s’interroger notamment sur le sort du prix de vente (A) et sur la fiscalité en matière de plus-value générée par l’opération (B), ces questions étant partiellement liées (C).
10114 – L’accord de l’usufruitier et du nu-propriétaire. – Rappelons ici que la vente de la pleine propriété de l’immeuble démembré ne peut avoir lieu que si usufruitier et nu-propriétaire y consentent tous deux, puisque contrairement au régime de l’indivision, l’un ne peut obliger l’autre à vendre.
A/ Vente d’un immeuble démembré et sort du prix de vente
I/ L’ingénierie notariale : questionnaires, comparatifs chiffrés et convention de répartition du prix
10115 – Le sort du prix de vente et les trois options possibles. – Préalablement à la vente de l’immeuble démembré (et juridiquement en principe avant toute décision de mise en vente ou mandat de vendre et, a fortiori, avant toute signature d’avant-contrat), l’usufruitier et le nu-propriétaire doivent opérer un choix entre trois solutions :

la répartition du prix de vente conformément au principe édicté par l’article 621 du Code civil89 ;

la constitution d’un quasi-usufruit par report de l’usufruit sur le prix également prévu à l’article 621 du Code civil90 ;

le maintien du démembrement et le remploi du prix de vente en application de la théorie de la subrogation réelle91.

10116 – L’importance d’une convention prévoyant le sort du prix de cession. – En vertu de l’article 617 du Code civil92, la cession d’un bien démembré emporte consolidation et extinction du démembrement de propriété. Dès lors, sauf convention contraire, le prix de cession doit être réparti entre usufruitier et nu-propriétaire, en application de l’article 621 du Code civil. Il devrait être conseillé de prévoir, préalablement à toute signature d’un mandat de vente, une convention entre usufruitier et nu-propriétaire, aux termes de laquelle les parties conviendront du sort du prix de cession. Les termes de la convention varieront selon la volonté des parties, mais aussi la raison d’être, les motifs de la cession et les conséquences fiscales y attachées.
10117 – Les questions à poser aux parties. – Au titre de l’ingénierie notariale, et afin d’atteindre les objectifs poursuivis par les clients vendeurs, le notaire, pour établir une convention réglant le sort du prix de vente, se doit d’interroger les parties et de leur poser notamment les questions suivantes :
À l’usufruitier : quelles sont les raisons de la cession et ses attentes en termes de perception du prix de cession :

réinvestissement en pleine propriété dans un bien immobilier / un produit financier ? Quel est le montant nécessaire ?

réinvestissement avec le nu-propriétaire, en maintenant le démembrement de propriété ?

besoin de trésorerie, pourquoi et pour quel montant ? (nouveaux projets, départ en maison de retraite, installation à Ibiza, location… ?)

choix d’un usufruit fiscal, d’un usufruit économique ou d’un quasi-usufruit ?

Au nu-propriétaire : de la même façon, quelles sont les raisons de la cession et ses attentes en termes de perception du prix de cession ? Besoin de trésorerie, en pleine propriété et à quelle hauteur ?
Les intérêts de chacun étant parfois divergents, le notaire ingénieur du droit deviendra parfois médiateur des parties afin de dégager une solution acceptable pour tous, et non porteuse d’un différend ou d’une contestation futurs.
10118 – Comprendre et analyser la situation des vendeurs de l’immeuble démembré. – Afin de bien cerner les attentes et contraintes de chacun, il pourra être opportun d’adresser aux parties un questionnaire spécifique, qui permettra de formuler ensuite des propositions ciblées et anticipées.
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10120 – Envisager les conséquences de chaque hypothèse avant de décider. – Dans la convention de répartition du prix de vente, il sera utile d’exposer systématiquement toutes les solutions possibles afin que chacun puisse choisir et connaître les avantages et les inconvénients et déterminer in fine les arbitrages effectués. La convention exposera également les conséquences en matière d’impôt sur la plus-value, qui est, avec la répartition du prix de vente, l’autre sujet à bien analyser et anticiper lors de la vente de l’immeuble démembré, comme nous le détaillons ci-après.
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II/ Analyser et anticiper les conséquences de l’extinction de l’usufruit
10123 Lors de la vente de l’immeuble démembré, il sera également nécessaire d’analyser les conséquences de l’extinction du démembrement :

sauf convention de quasi-usufruit, la quote-part du prix de vente remise à l’usufruitier deviendra taxable chez le nu-propriétaire lors de l’ouverture de la succession de l’ancien usufruitier (si la somme n’a pas été dépensée sans contrepartie). La vente du bien peut donc annihiler partiellement les intérêts fiscaux du démembrement originel.

Ainsi, le choix de la répartition du prix de vente ne permet pas de bénéficier d’un des intérêts majeurs du démembrement de propriété dans une optique de stratégie d’optimisation de la transmission, puisqu’elle peut empêcher le bénéfice de l’article 1133 du Code général des impôts (qui permet, au décès de l’usufruitier, une réunion de l’usufruit à la nue-propriété sans taxation) ;

conséquence fiscale au titre de l’impôt sur la plus-value (analysée ci-après).

III/ Évaluation fiscale ou économique de l’usufruit
10124 – Réfléchir à la méthode d’évaluation de l’usufruit à choisir. – Le barème fiscal de l’article 669 du Code général des impôts ne s’impose que pour le calcul des droits d’enregistrement et de la taxe de publicité foncière dans le cadre d’une mutation à titre gratuit, et non en matière de répartition du prix de vente. Pour conseiller au mieux nos clients, il nous appartient dans chaque cas de déterminer avec eux s’il est préférable de procéder, en fonction de leur situation, à une évaluation fiscale ou économique de l’usufruit93. En effet, pour le calcul de l’impôt sur la plus-value, il sera souvent préférable d’opter pour une évaluation économique94 quand elle conduit à majorer la valeur de l’usufruit, si les droits correspondants peuvent être cédés avec le bénéfice d’une exonération d’impôt sur la plus-value. Cela sera notamment le cas quand l’immeuble démembré constitue la résidence principale de l’usufruitier. L’évaluation économique de l’usufruit est notamment basée sur le taux de rendement du bien et l’espérance de vie (précise) de l’usufruitier. Ce sont les critères retenus par M. le Doyen Aulagnier pour élaborer sa méthode de calcul des droits démembrés95. Des simulateurs de calcul ont également été développés par la profession notariale.
Lien vers le portail NotAccess via l’accès ID.not pour utiliser le simulateur Hectaur de calcul de l’usufruit économique :
Lien vers le portail NotAccess via l'accès ID.not pour utiliser le simulateur Hectaur de calcul de l'usufruit économique
B/ Sort du prix de vente d’un immeuble démembré et impôt sur la plus-value
10125 Lors de la vente d’un immeuble détenu en démembrement de propriété, la question du redevable de l’impôt sur la plus-value générée par la cession doit être analysée en parallèle de celle de la répartition du prix de vente évoquée ci-dessus. Qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire sera redevable de l’impôt sur la plus-value ? Il n’existe aucun texte en la matière à ce jour.
10126 – Rappel de la doctrine administrative. – Lors de la vente d’un immeuble démembré, et particulièrement lors de la cession conjointe de l’usufruit et de la nue-propriété, la doctrine administrative énonce ce qui suit :
« En cas de cessions conjointes par le nu-propriétaire et l’usufruitier de leurs droits démembrés respectifs avec répartition du prix de vente entre les intéressés, l’opération est susceptible de dégager une plus-value imposable au nom de chacun des titulaires des droits démembrés.
Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu’il est stipulé dans l’acte. Le prix global doit être ventilé de façon à faire apparaître distinctement le prix de cession de la nue-propriété et celui de l’usufruit, en fonction de la valeur réelle au jour de la vente.
À titre de règle pratique, il est admis que cette ventilation puisse être effectuée en appliquant le barème prévu par l’article 669 du CGI, en tenant compte, bien entendu, de l’âge de l’usufruitier au jour de la vente »96.
10127 – Une absence de solution pour deux des trois options de sort du prix de vente. – La doctrine administrative rappelée ci-dessus n’envisage donc expressément qu’une des trois options possibles du sort du prix de vente de l’immeuble démembré vues ci-dessous : celle de la répartition du prix de vente entre l’usufruitier et le nu-propriétaire. Qu’en est-il en cas de remploi du prix de vente en démembrement ou en cas de constitution d’un quasi-usufruit sur le prix de vente ?
Ou faut-il considérer que la doctrine administrative, en prévoyant que « le prix global doit être ventilé de façon à faire apparaître distinctement le prix de cession de la nue-propriété et celui de l’usufruit » souhaite imposer cette « méthode » dans les deux autres options possibles, même s’il n’y a pas répartition proprement dite ?
Il existe ici une incertitude, qui n’est pas tranchée par l’administration fiscale ni par la loi. À défaut de répartition effective du prix de vente, l’usufruitier doit-il être seul redevable de l’impôt sur la plus-value totale ? Ou le prix de cession doit-il être ventilé malgré le quasi-usufruit et l’impôt sur la plus-value payé d’une part par l’usufruitier et d’autre part par le nu-propriétaire ? La doctrine est partagée97. Il est tentant d’appliquer les mêmes règles qu’en matière de plus-values sur valeurs mobilières et droits sociaux, rappelées ci-après. Mais si l’administration fiscale avait voulu prévoir un même traitement, pourquoi ne l’a-t-elle pas précisé ? La jurisprudence ne semble pas avoir apporté de réponse de son côté à ce jour, et « les contribuables qui souhaiteraient retenir, en cas de cession conjointe de droits démembrés sur un immeuble avec remploi du prix et report du démembrement ou constitution d’un quasi-usufruit sur le prix, la position selon laquelle un seul titulaire des droits démembrés serait taxable sur la plus-value seraient bien avisés d’accompagner leur déclaration d’une mention expresse afin d’éviter les pénalités éventuelles en cas de divergence d’interprétation avec l’administration »98.
10128 – Schéma récapitulatif. – Nous récapitulons dans le schéma ci-après le sort du prix de vente d’un immeuble démembré et les incidences quant au redevable de l’impôt sur la plus-value.
Schéma récapitulatif du sort du prix de vente d'un immeuble démembré et les incidences quant au redevable de l'impôt sur la plus-value
10129 – Le cas particulier des titres sociaux démembrés. – Il n’en va pas de même en cas de cession conjointe par l’usufruitier et le nu-propriétaire de titres sociaux démembrés. Dans cette situation, la solution est prévue par une doctrine administrative stable. Outre le cas particulier du démembrement d’un portefeuille de valeurs mobilières, la plus-value est imposable soit au nom du nu-propriétaire en cas de remploi, soit au nom de l’usufruitier en cas de quasi-usufruit, soit au nom des deux respectivement à hauteur de leur quote-part, en cas de partage du prix de cession99. Les parties peuvent donc conventionnellement anticiper la situation et convenir d’un choix.
10130 – Cession de titres sociaux démembrés et calcul de plus-value. – En cas de cession de titres sociaux démembrés, le premier terme de la plus-value de cession est toujours constitué par le prix de cession de la pleine propriété des titres cédés. Pour la détermination du prix d’acquisition, il faut distinguer deux hypothèses :

en cas de répartition du prix, une double plus-value est calculée et le prix d’acquisition respectif est calculé à raison des droits respectifs (sauf si l’un des cédants a disposé de la pleine propriété avant leur démembrement, car dans ce cas il est admis que le prix d’acquisition du droit démembré soit calculé en appliquant le barème de l’article 669 du Code civil au prix d’acquisition en pleine propriété) ;

en cas de constitution d’un quasi-usufruit ou de report du démembrement, le prix d’acquisition des titres est constitué :

par leur valeur en pleine propriété quand l’acquisition a été réalisée à titre onéreux,

par leur valeur globale retenue pour la détermination des droits d’enregistrement quand l’acquisition a été réalisée à titre gratuit100.

10131 – Ingénierie notariale et redevable de l’impôt de plus-value lors de la vente de l’immeuble démembré. – Dans l’attente d’une clarification législative, le notaire devra :

soumettre et expliquer la controverse à ses clients lorsqu’il s’agira de déterminer le procédé suivi ;

déterminer, par convention préalable entre usufruitier(s) et nu-propriétaire(s), qui aura la charge finale de l’impôt de plus-value, et dans quelles proportions.

Le tout notamment quand, selon le cas d’espèce, la question a un impact financier important (par ex., si le bien constitue la résidence principale de l’usufruitier, impliquant une exonération de plus-value si l’on considère que l’usufruitier est le seul redevable de l’imposition).
C/ Vente d’un immeuble démembré, plus-value et questions connexes
I/ Vente d’un immeuble démembré, plus-value et usufruit successif
10132 En cas de cessions conjointes par le nu-propriétaire et l’usufruitier de leurs droits démembrés respectifs avec répartition du prix de vente entre les intéressés, l’opération est susceptible de dégager une plus-value imposable au nom de chacun des titulaires des droits démembrés. Mais qu’en est-il dans le cas particulier de la cession d’un bien grevé d’un usufruit successif ?
La question a été posée au ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance par le sénateur Malhuret101. Dans une contribution récente, Michel Leroy analyse l’imposition devant être supportée par l’usufruitier successif en fonction des différents sorts du prix de vente de l’immeuble démembré102.
II/ Vente d’un immeuble démembré et usufruit temporaire
10133 – Confirmation de la doctrine administrative et précision. – Confirmant la doctrine administrative, la cour administrative d’appel de Marseille, dans une décision du 18 février 2021, vient tirer les conséquences d’une cession concomitante de l’usufruit temporaire et de la nue-propriété d’un bien (en ce qu’elle entre dans le champ d’application et la taxation des dispositions de l’article 13, 5 du Code général des impôts, qui dispose que le produit de la cession à titre onéreux d’un usufruit temporaire est imposable à l’impôt sur le revenu dans la catégorie de revenus à laquelle elle se rattache, écartant ainsi le régime des plus-values immobilières des particuliers)103.
L’arrêt apporte une précision intéressante : la cession d’un premier usufruit temporaire sur un actif immobilier sera ainsi taxée au titre des revenus fonciers, même si elle s’accompagne de la cession concomitante de la nue-propriété du même actif, dans le cadre d’une opération globale fiscalement cohérente.
Une vigilance accrue sera dès lors nécessaire au moment de la régularisation de ce type d’opération, puisque ni son caractère « global » ni l’absence d’abus ne feront échec à la taxation de l’article 13, 5 du Code général des impôts.
Le 112e Congrès des notaires de France avait proposé à cet égard d’exclure du champ d’application de l’article 13, 5 du Code général des impôts les cessions à titre onéreux d’usufruit temporaire consenties concomitamment à la cession de la nue-propriété, à la condition que le cédant ne conserve aucun droit réel sur l’immeuble cédé, directement ou indirectement104.
III/ Vente d’un immeuble démembré, plus-value et exonération pour résidence principale
10134 – Pas d’exonération pour première cession d’un logement autre que résidence principale quand on détient un droit démembré sur sa résidence principale. – Nous mentionnons ici l’arrêt du Conseil d’État du 15 juillet 2021 ayant décidé que la détention par le cédant d’un droit démembré (ou d’un droit indivis) sur sa résidence principale fait obstacle au bénéfice de l’exonération de plus-value réalisée lors de la première cession d’un logement autre que sa résidence principale (prévue par l’article 150 U, II, 1o bis duCode général des impôts)105. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité à cet égard, le Conseil d’État a jugé que cette différence de situation était justifiée et en rapport direct avec l’esprit de la loi106.

Sous-section II – Cession et techniques d’ingénierie immobilière

10135 Lorsqu’une vente immobilière est envisagée par nos clients, différentes modalités peuvent leur être suggérées afin d’optimiser l’opération. Nous mentionnerons ici les opérations de donation-cession (§ I) et la vente en viager ou avec réserve du droit d’usage et d’habitation (§ II).

§ I – La cession précédée d’une donation : les opérations de donation-cession

10136 – La donation-cession comme technique d’ingénierie notariale. – Les opérations dites de « donation-cession » consistent à procéder à la donation préalable du bien avant la vente de ce dernier. Nous les abordons ci-après (V. infra, no 10217) sous l’angle des limites de l’abus de droit et du mini-abus de droit. Nous les mentionnons ici puisqu’elles constituent une des techniques d’ingénierie notariale à connaître dans le cadre de l’anticipation et des conseils délivrés à nos clients en amont d’une opération de cession immobilière. Elles ont en effet pour conséquence fiscale de purger la plus-value latente sur l’immeuble du chef du donateur, avant sa cession (la donation étant hors champ d’application du régime des plus-values immobilières). La vente ne générera pas de plus-value imposable, car cette plus-value aura été purgée à l’occasion de la donation. En conséquence, le prix de cession sera équivalent au prix d’acquisition, la donation préalable ayant permis de « revaloriser » le bien dans le patrimoine du nouveau vendeur et ainsi de purger la plus-value latente.
10137 – Donation-cession et date de cession. – L’arrêt précité du Conseil d’État du 29 décembre 2020107 en matière d’impôt sur la plus-value appelle également notre vigilance en matière d’opération de donation-cession : pour que l’opération ne soit pas considérée comme abusive, la donation doit intervenir avant la cession. En pratique, l’acte de donation est souvent dressé, régularisé entre l’avant-contrat et la vente. Si la date de la cession peut être considérée comme étant celle de la promesse synallagmatique, la donation interviendra juridiquement après la cession et l’opération pourrait être remise en cause (conduisant à une donation de liquidités issues de la cession, après déduction de l’impôt sur la plus-value à charge du donateur, sans qu’il dispose alors forcément des liquidités nécessaires). Nous renvoyons à cet égard à nos explications ci-dessus (V. supra, nos 10105 et s.).
En cas de vente sous condition suspensive, il convient également, d’une part, d’être attentif à la date de donation, qui ne doit pas être postérieure à la date de levée de la dernière condition et, d’autre part, de vérifier qu’elle n’a pas de caractère rétroactif.

§ II – La vente en viager ou avec réserve du droit d’usage et d’habitation

10138 La vente en viager ou la vente avec réserve du droit d’usage et d’habitation constituent également des techniques de cession optimisée à conseiller dans une optique d’ingénierie notariale et d’anticipation des modalités possibles de cession. Nous renvoyons ici aux développements en la matière (vente en viager ou avec réserve du droit d’usage et d’habitation) par le 116e Congrès des notaires de France108 :
Nous renvoyons ici aux développements en la matière (vente en viager ou avec réserve du droit d'usage et d'habitation) par le 116e Congrès des notaires de France

Section II – Modalités d’acquisition immobilière et ingénierie notariale

10139 Sans prétendre dresser un panorama exhaustif des différentes modalités possibles d’acquisition, nous présentons dans le schéma ci-après celles sur lesquelles nous axerons nos développements, afin d’en souligner les points d’attention et réflexes essentiels d’ingénierie notariale.
schéma sur lesquelles nous axerons nos développements, afin d'en souligner les points d'attention et réflexes essentiels d'ingénierie notariale

Sous-section I – Acquisitions en démembrement de propriété

10140 – Les acquisitions directes de la pleine propriété sont les plus courantes et les plus généralement souhaitées par nos clients. Elles correspondent aux besoins de la majorité des investissements immobiliers. Des aménagements de l’acquisition en direct peuvent toutefois être proposés, et notamment une acquisition en démembrement de propriété. Ce type d’acquisition permettra de concilier, d’une part, le souhait d’acquérir un bien immobilier et d’autre part, celui de le transmettre immédiatement en nue-propriété aux descendants, tout en conservant un usufruit viager. Pour réaliser cet objectif, le notaire ingénieur patrimonial pourra proposer des stratégies aux conséquences juridiques et économiques étendues. Nous envisagerons les acquisitions en démembrement de propriété dans un cadre sociétaire (§ II) ou en dehors (§ I).

§ I – Les acquisitions en démembrement de propriété hors cadre sociétaire

10141 Afin de présenter les acquisitions en démembrement de propriété, technique d’ingénierie notariale, nous proposerons, en parallèle de nos développements et en commençant par un cas pratique comparatif (A), les clauses pouvant être utilisées en la matière (E). Nous aborderons également la fiscalité de l’opération (B), la présomption de l’article 751 du Code général des impôts (C), les questions de réversion d’usufruit et usufruitsuccessif (D) ainsi que le simulateur « Hectaur » en matière d’évaluation économique de l’usufruit (F).
A/ Acquisition en démembrement de propriété : cas pratique comparatif
10142 – Cas pratique et schéma récapitulatif. – Nous proposons ci-dessous un cas pratique destiné à comparer :

une acquisition d’un bien immobilier suivi d’une donation de la nue-propriété ;

avec la technique d’une acquisition ab initio en démembrement de propriété.

Ces deux techniques sont schématisées ci-dessous.
Schéma d'acquisition et donation en démenbrement de propriété
10143 Le cas pratique ci-après met en évidence l’intérêt de procéder à un démembrement de propriété ab initio, c’est-à-dire à une acquisition de la nue-propriété par les enfants et de l’usufruit par les parents.
B/ Acquisition en démembrement de propriété : optimisation de la fiscalité
10144 – Un démembrement ab initio avantageux à un double titre. – Ainsi que démontré de façon chiffrée dans le cas pratique ci-dessus, une acquisition en démembrement de propriété permet de diminuer la fiscalité à supporter dans le cadre de la transmission du bien immobilier. La méthode d’acquisition en démembrement de propriété ab initio a ainsi un double avantage :
1) si, dans les deux hypothèses (donation de la nue-propriété ou acquisition par les enfants de la nue-propriété au moyen d’une donation de somme d’argent), la taxation n’interviendra que sur la valeur de la nue-propriété ainsi donnée/acquise, la méthode d’évaluation de cette nue-propriété sera différente. En cas de donation, elle aura lieu sur la base du barème prévu par l’article 669 du Code général des impôts, sans tenir compte du taux de rentabilité du bien ou de l’espérance de vie différente d’un homme ou d’une femme. Cette évaluation sera donc décorrélée de la réalité économique et entraînera une surévaluation de la nue-propriété. En revanche, en cas d’acquisition ab initio en démembrement, il sera possible de valoriser économiquement le démembrement, ce qui permettra de diminuer l’assiette d’imposition de l’opération ;
2) en outre, une donation de somme d’argent (plutôt que celle d’un bien immobilier) permet de bénéficier dans certaines hypothèses d’un abattement supplémentaire111. Le coût d’une donation de somme d’argent (permettant l’acquisition en démembrement ab initio) sera donc moins élevé que celui d’une donation de bien immobilier, d’autant plus que la taxe liée à la publicité foncière ne sera pas applicable (ainsi qu’avec des émoluments plus avantageux pour le client)112.
10145 – Un démembrement de propriété permettant une optimisation de la fiscalité de transmission du bien ainsi qu’une économie sur la plus-value latente du bien. – Le schéma du démembrement de propriété permettra en outre, effet ultime, une économie sur la plus-value latente potentielle du bien. En effet, en figeant la valeur de transmission, les nus-propriétaires ne seront soumis à l’imposition qu’au-delà de la valeur retenue lors de la transmission : toute prise de valeur du bien ne sera plus taxée aux droits de succession (notamment en cas de travaux sur le bien réalisés par l’usufruitier de son vivant et à ses frais, qui augmentent la valeur du bien sans donner lieu à taxation).
C/ Acquisition en démembrement de propriété et présomption de l’article 751 du Code général des impôts
10146 – La présomption de l’article 751 du Code général des impôts. – Le recours à un démembrement de propriété doit toujours se faire en gardant présente à l’esprit la présomption édictée par l’article 751 du Code général des impôts113, qui prévoit une taxation du bien immobilier dans sa totalité dans le patrimoine de l’usufruitier sauf si la sincérité de l’opération est démontrée, et notamment la sincérité des donations survenues moins de trois mois avant le décès. La finalité du texte est d’éviter que certaines personnes ne se privent ou ne se dépouillent de leur vivant de la nue-propriété de tout ou partie de leurs biens en faveur de leurs présomptifs héritiers ou de leurs légataires pour éviter le paiement de l’impôt de mutation par décès114. Il n’y a pas lieu de distinguer ici selon que le démembrement provient d’une vente consentie par le défunt à son héritier avec réserve d’usufruit ou d’une acquisition conjointe de l’usufruit par le défunt et de la nue-propriété par l’héritier115.
10147 – La preuve contraire de la présomption de l’article 751 du Code général des impôts. – L’article 751 du Code général des impôts prévoit expressément en son deuxième alinéa que la preuve contraire peut résulter d’une donation de deniers en vue de financer l’acquisition de tout ou partie de la nue-propriété du bien, sous réserve des conditions suivantes :

la donation de fonds doit être constatée par un acte ayant date certaine ;

les fonds doivent être employés dans l’acquisition de la nue-propriété d’un bien plus de trois mois avant le décès (du donateur acquéreur de l’usufruit) ;

l’origine des fonds doit être mentionnée dans l’acte d’acquisition du bien.

D/ Acquisition en démembrement de propriété et réversion d’usufruit
10148 – La réversion de l’usufruit en cas de démembrement ab initio. – Lors d’une acquisition en démembrement de propriété, les acquéreurs de l’usufruit vont classiquement souhaiter pouvoir bénéficier de celui-ci jusqu’au décès du survivant d’entre eux.
10149 – Le rejet de la tontine en usufruit. – Une réponse ministérielle du garde des Sceaux en date du 19 octobre 1998117 a rejeté la validité de la tontine en usufruit, et ne semble pas avoir été remise en cause.
10150 – Privilégier l’utilisation des usufruits successifs. – Il est conseillé de prévoir la constitution d’un usufruit successif par le vendeur qui cédera donc l’usufruit du bien à une personne, tout en consentant, dans le même temps, un second usufruit, successif celui-là, au profit d’une tierce personne. La constitution d’usufruits successifs nécessite la mise en place de plusieurs usufruits ne s’exerçant qu’à l’extinction du précédent. Cette constitution peut être le fait soit du plein propriétaire dans l’acte de vente, soit du nouveau nu-propriétaire (mais qui ne pourra le faire que par la suite, dans un acte complémentaire, lorsqu’il sera effectivement nu-propriétaire). Il est donc préférable d’opter pour la constitution d’un usufruit successif directement par le propriétaire de l’immeuble lors de la vente en démembrement de propriété118. Dans le cas d’une cession d’usufruit à deux époux, le propriétaire cédera l’usufruit actuel aux deux conjoints : il s’agira tantôt d’un usufruit commun (s’ils sont mariés sous un régime communautaire), tantôt d’un usufruit indivis (s’ils sont mariés sous un régime séparatiste)119. Nous renvoyons ici à la formule proposée par un auteur120.
E/ Acquisition en démembrement de propriété et proposition de clauses
10151 Nous proposons ci-dessous des clauses à utiliser dans le cadre d’une acquisition en démembrement de propriété ab initio, par une personne se portant acquéreur de l’usufruit (ou un couple en tant qu’usufruitiers), avec ses/leurs enfants se portant quant à eux acquéreurs de la nue-propriété. Il appartient au vendeur de créer la réversibilité, ou plus précisément l’usufruit stipulant la réversibilité.
F/ Acquisition en démembrement de propriété et calcul de l’usufruit économique, le simulateur Hectaur
10152 – Évaluation économique de l’usufruit et simulateur Hectaur. – En cas d’acquisition en démembrement de propriété, il est possible (et souvent conseillé) de procéder à une évaluation économique (et non fiscale sur base de l’article 669 du Code général des impôts). Le simulateur « Hectaur » pourra être utilisé à cet effet.
Nous renvoyons à cet égard à nos développements ci-dessus (V. supra, no 10122).
Lien vers le portail NotAccess via l’accès ID.not pour utiliser le simulateur Hectaur de calcul de l’usufruit économique :
Lien vers le portail NotAccess via l'accès ID.not pour utiliser le simulateur Hectaur de calcul de l'usufruit économique

§ II – Les acquisitions en démembrement de propriété dans un cadre sociétaire

10153 – L’intérêt de la société. – Le démembrement de propriété, en tant qu’outil d’anticipation patrimoniale lors d’une acquisition immobilière, prendra une dimension supplémentaire lorsque cette acquisition intégrera la création d’une société immobilière. La technique de la constitution d’un usufruit sur les droits sociaux permet de bénéficier des avantages conférés par la réserve d’usufruit121, tout en évitant l’indivision entre les titulaires de la nue-propriété. Elle sera utilement couplée avec une rédaction adaptée des statuts, afin de répartir les droits respectifs de l’usufruitier et du nu-propriétaire. L’usufruitier pourra conserver les revenus (préserver ses droits en cas de distribution du capital, et se réserver le contrôle par les droits de vote), tout en anticipant la transmission successorale aux nus-propriétaires dans les meilleures conditions fiscales.
10154 – Plan. – Utile notamment entre concubins non pacsés pour assurer la jouissance du bien au survivant dans des conditions fiscales optimisées (A), le démembrement de propriété dans un cadre sociétaire nécessite précision et ingénierie notariale lors de sa mise en place (B).
A/ Concubins non pacsés, démembrement de propriété et société
10155 – Le recours à la société en faveur du concubin non pacsé. – Dans une optique de maintien dans les lieux du partenaire non pacsé survivant (avec des droits de succession diminués), il pourra être opportun de recourir à une acquisition via une société, avec démembrement croisé des parts (afin de remédier à l’absence de droits légaux efficaces sur le logement au bénéfice du partenaire ou du concubin survivant). Il s’agit de permettre qu’au décès de l’un d’eux, le survivant puisse continuer à occuper le logement, sans ingérence des héritiers, et sans être soumis à une taxation dissuasive de 60 % (taux applicable en cas de transmission entre concubins non pacsés conformément à l’article 677 du Code général des impôts, tableau III)122.
Les concubins constituent une société civile immobilière qui procède à l’acquisition du logement de la famille. Le démembrement croisé, intervenant postérieurement à l’immatriculation de la société aux termes d’un acte d’échange (le démembrement ab initio des parts sociales étant impossible), portera sur les droits sociaux et non directement sur le bien acquis. Le capital de la société sera in fine réparti entre eux de façon à ce que l’un détienne la moitié des parts en nue-propriété et l’autre moitié en usufruit (et inversement pour l’autre).
10156 – Schéma. – Le schéma ci-après récapitule le processus décrit ci-dessus (constitution d’une société puis échange pour obtenir un démembrement croisé des parts sociales), puis ce qu’il se passera au décès de chacun.
Schéma récapitulant le processus de constitution d'une société puis échange pour obtenir un démembrement croisé des parts sociales, puis ce qu'il se passera au décès de chacun
10157 – Clause d’échange de parts de société en démembrement. – Nous proposons ci-après une clause d’un acte d’échange de parts de société en démembrement (aux termes duquel les associés se cèdent réciproquement l’usufruit de leurs parts respectives).
Au décès de l’un, l’autre aura la pleine propriété de la moitié des parts qui était détenue par le défunt en usufruit et conservera l’usufruit sur l’autre moitié des parts (la nue-propriété étant transmise aux héritiers du premier défunt), ce qui lui conférera la pleine jouissance de l’immeuble social (ou plus exactement la totalité des droits de vote donnant droit statutairement à la jouissance de l’immeuble ou le bénéfice d’une décision ante mortem ayant prévu cette jouissance gratuite).
• Le survivant pourra donc continuer à occuper le logement (en prévoyant par une délibération de la collectivité des associés que le bien acquis constituera la résidence principale ou secondaire, sans paiement de loyer, des associés fondateurs et/ou du survivant d’eux)123.
• Et il sera plein propriétaire de la moitié des parts sans fiscalité par la réunion de l’usufruit et de la nue-propriété (conformément à l’article 1133 du Code général des impôts).
Pour permettre à l’usufruitier de disposer de droits de vote majorés, lui assurant ainsi la maîtrise des décisions au sein de la société, il conviendra impérativement de prévoir dans le pacte social une clause dérogeant aux règles des droits de vote de parts sociales démembrées (C. civ., art. 1844)124.
10158 – Application aux familles recomposées. – Cette stratégie trouverait également à s’appliquer de manière opportune pour les époux mariés en secondes noces, en présence d’enfants d’une première union. La fiscalité ne serait pas ici l’objectif du montage, mais il s’agirait surtout d’assurer au conjoint survivant la maîtrise des décisions au sein de la société (droits de vote majorés de l’usufruitier) et par voie de conséquence la jouissance certaine de l’immeuble social.
B/ Ingénierie notariale, démembrement de propriété et société
10159 Le cadre sociétaire permet de diversifier et d’optimiser les techniques de transmission et de cession d’un immeuble.
10160 – Apport à une société d’un bien détenu en pleine propriété (avec éventuellement donation des parts consécutive, voir ci-après). – Lorsqu’un bien est détenu en pleine propriété et qu’il s’agit d’anticiper sa transmission successorale, il sera possible d’apporter le bien à une société civile immobilière. Cette technique permettra d’éviterl’indivision entre les enfants nus-propriétaires de l’immeuble et la conservation de la liberté de disposer pour les parents (mais aussi d’anticiper la situation de la société et la prise de décision après le décès des parents)125. Les parents seront nommés gérants de la société et il sera prévu des pouvoirs larges à leur profit, notamment celui de revendre l’immeuble social (afin de pouvoir, s’ils le souhaitent, revendre seuls, sans l’accord de leurs enfants nus-propriétaires) et d’acquérir un nouvel actif. Les statuts prévoiront également en faveur des usufruitiers le droit de modifier les statuts. Après apport de l’immeuble à la société, les parents consentiront à leurs enfants une donation de la nue-propriété des parts de la société, s’en réservant l’usufruit, afin de pouvoir notamment continuer à habiter le bien.
Il y a lieu de noter toutefois, comme rappelé ci-après dans le tableau comparatif entre détention via une société ou en indivision (V. infra, no 10172), que la détention de l’immeuble via une société fera perdre, dans le cadre de la détermination de l’impôt sur la fortune immobilière, le bénéfice de l’abattement de 30 % sur la valeur vénale de l’immeuble occupé à titre de résidence principale de l’article 973, alinéa 2 du Code général des impôts.
10161 – Ne pas omettre de prévoir conventionnellement l’affectation de la plus-value à l’usufruitier. – Comme précédemment évoqué, lorsqu’il s’agira de la résidence principale de l’usufruitier, il conviendra de prévoir dans les statuts ou par convention dûment enregistrée que la plus-value bénéficiera à l’usufruitier (qui sera exonéré lorsqu’il s’agira de sa résidence principale).
10162 – Réinvestissement du prix de vente d’un bien démembré dans une nouvelle acquisition réalisée dans un cadre sociétaire. – En cas de vente d’un immeuble détenu en démembrement de propriété, il peut être prévu une nouvelle acquisition par l’usufruitier et les nus-propriétaires (notamment dans le cas fréquent du conjoint usufruitier pour lequel la maison est devenue trop grande et qui souhaite vendre et racheter un appartement plus fonctionnel). À une acquisition en direct, pourra alors être préférée une acquisition par le biais d’une société constituée entre l’usufruitier et le ou les nus-propriétaires. Cela permettra notamment d’éviter certaines règles de droit civil contraignantes (comme l’impossibilité pour l’usufruitier de vendre la pleine propriété sans l’accord du nu-propriétaire)126 et, par une rédaction adaptée des statuts, la dissociation de la détention du capital et du pouvoir de gestion de l’actif de la société. Il pourra ainsi être prévu que le parent gérant ne sera révocable que par décision unanime des associés et aura la faculté de vendre l’immeuble social. L’indivision entre les nus-propriétaires sera par ailleurs évitée. En revanche, comme indiqué ci-dessus, l’abattement d’assiette de 30 % sur la résidence principale en matière d’impôt sur la fortune immobilière ne sera pas applicable.
10163 – Réinvestissement du prix de vente d’un bien démembré dans un cadre sociétaire pour la seule nue-propriété. – Il peut également être prévu que la société ne comprendra que la nue-propriété du nouveau bien (les enfants ayant apporté leur quote-part du prix de vente du premier bien à la société), les parents se portant directement acquéreurs de l’usufruit du nouveau bien.
Pour éviter une contestation au titre de l’abus de droit, il faudra que cette stratégie réponde à des objectifs qui surpassent significativement l’intérêt fiscal : éviter une indivision entre associés, conserver le pouvoir chez l’usufruitier (notamment nommer un gérant aux pouvoirs étendus comme celui de vendre le bien).
Ces objectifs se matérialiseront notamment au travers d’un fonctionnement normal de la société (tenue d’assemblées, d’une comptabilité, etc.) ou, à plus forte raison, de la gestion d’autres actifs, qui donneront de la consistance au patrimoine social, détenus en pleine propriété127.
10164 – Apport de la nue-propriété d’un bien suivi de la donation des parts sociales. – La transmission d’un immeuble en nue-propriété à une société (civile immobilière en l’espèce) suivie de la donation des parts reçues en rémunération de l’apport est un schéma validé par la Cour de cassation128, sous certaines conditions.
Nous renvoyons au cas pratique comparatif ci-après (V. infra, no 10170).
10165 – Les dangers du double usufruit. – Il est plus que jamais déconseillé d’utiliser la technique du « double usufruit » ou « double démembrement », afin de ne pas s’exposer au risque d’abus de droit (apport de la nue-propriété d’un immeuble à une société civile [notamment avec évaluation économique de l’usufruit] puis donation de la seule nue-propriété des parts pour diminuer, via une valorisation économique de l’usufruit, l’assiette de la donation).
10166 – Le démembrement des parts de la société par apport de l’immeuble démembré. – Il pourra également être prévu de reporter l’usufruit des biens apportés par subrogation réelle et conventionnelle (dans le cas où l’immeuble est déjà détenu en démembrement de propriété) vers les titres souscrits. Cette technique a été contestée par certains auteurs130. D’autres auteurs en revanche admettent que l’apport conjoint de l’usufruit et de la nue-propriété puisse être rémunéré par des parts ou actions soumises à usufruit131. Une réponse ministérielle a tranché et admis que l’usufruit affectant les biens apportés peut se reporter, par le jeu de la subrogation réelle conventionnelle, sur les titres de la société132. On regrettera toutefois qu’une telle technique souvent conseillée et utilisée ne dispose pas d’un appui légal ou jurisprudentiel.
10167 – Cadre sociétaire et présomption de l’article 751 du Code général des impôts. – L’acquisition de la nue-propriété réalisée via une société et non en direct permet de combattre la présomption de l’article 751 du Code général des impôts. Cet article ne s’applique pas quand la nue-propriété du bien appartient à une société civile, même lorsque les parts sont détenues par un héritier présomptif de l’usufruitier (le tout sous réserve de l’abus de droit)133.
10168 – Avantager le nu-propriétaire sans donation. – Différentes techniques permettront d’augmenter les avantages du démembrement de propriété dans un cadre sociétaire134. Il s’agit notamment :

de la mise en réserve des bénéfices.

Il appartient à l’usufruitier de décider de l’affectation des bénéfices, ce droit est d’ordre public. Il pourra ainsi décider de mettre lesdits bénéfices en réserve. À l’extinction de l’usufruit, le nu-propriétaire deviendra plein propriétaire des droits sociaux et verra ainsi distribués à son profit les montants mis en réserve (mais une telle distribution au profit exclusif du nu-propriétaire avant extinction de l’usufruit est actuellement sujette à discordance de position entre la chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation). La décision de mise en réserve prise par l’usufruitier ne constitue pas en tant que telle une donation, a répondu la Cour de cassation dans un arrêt du 10 février 2009135 ;

de la répartition des résultats.

Par un arrêt du 18 décembre 2012136, la chambre commerciale de la Cour de cassation a considéré qu’une répartition inégale des bénéfices ne constitue pas une donation indirecte taxable ;

et du financement des gros travaux par l’usufruitier (des parts sociales).

En principe, les gros travaux sur un immeuble démembré sont à la charge du nu-propriétaire. Hors cadre sociétaire, le financement des gros travaux par les parents usufruitiers de l’immeuble peut être (en fonction des circonstances de l’espèce) considéré comme une donation taxable.
Mais, dans un cadre sociétaire, il pourra être utilement conseillé que l’usufruitier des parts sociales finance ces derniers par des apports en compte courant d’associé. Ce compte courant d’associé subsistera toutefois en actif de succession de l’usufruitier, mais la plus-value apportée par les travaux bénéficiera au(x) nu(s)-propriétaire(s) sans taxation.
10169 – Rédaction ingénieuse des statuts de la société, et répartition des droits de vote et des droits financiers. – Enfin, par une rédaction ingénieuse des statuts en matière de répartition des droits de vote137 et des droits financiers entre usufruitier et nu-propriétaire des parts sociales de la société propriétaire de l’immeuble démembré, l’usufruitier pourra avantager le nu-propriétaire sans taxation. L’ingénierie rédactionnelle des statuts permettra d’aménager certaines règles contraignantes du Code civil en matière de démembrement d’un actif immobilier. Nous renvoyons ici à la clause proposée à cet égard ci-avant (V. supra, nos 10157 et s.).
10170 – Démembrement de propriété dans un cadre sociétaire : cas pratique. – Nous proposons ci-après un cas pratique à trois options permettant d’allier transmission optimisée et organisation de la détention.

Sous-section II – Les acquisitions indivises

§ I – Acquisition en indivision ou en société ?

10171 Outil privilégié de gestion et de transmission du patrimoine, la société civile est souvent recommandée pour éviter les inconvénients de l’indivision et assurer la transmission optimisée du patrimoine aux descendants. Elle peut toutefois présenter des inconvénients, et une réflexion doit être menée en fonction de la situation de chaque client.
10172 Nous proposons ici un tableau comparatif entre le choix de l’indivision ou de la société civile, tant d’un point de vue civil que d’un point de vue fiscal.
10173

§ II – Les limites de la fixation des quotités d’acquisition et les pièges de la liquidation de l’indivision

10174 – Les limites de la fixation des quotités d’acquisition et les pièges de la liquidation de l’indivision. – La pratique courante conduit à fixer dans l’acte d’acquisition les quotités de propriété en considération de la participation de chacun dans le financement du bien. Il conviendra à cet égard d’être attentifs149 :

notamment en cas de financement pour partie au moyen d’un emprunt bancaire, avant de fixer des proportions d’acquisition sur la base d’une anticipation des années futures et des modalités de remboursement qui seront effectivement suivies, contrairement à ce qui avait été planifié au départ.

En effet, ainsi qu’il est démontré dans l’article précité au moyen d’exemples chiffrés, lorsque la liquidation de l’indivision intervient avant remboursement complet du prêt et que les indivisaires n’ont pas procédé au remboursement conformément à leurs accords initiaux, la liquidation et le partage de l’actif conduisent (en présence d’une plus-value) à sur-avantager celui qui a financé la plus grande partie du prix150 151. Il nous appartient donc d’être vigilants et de remplir notre devoir d’information et d’anticipation du contentieux en attirant l’attention de nos clients sur ces conséquences lors de la détermination et du calcul des proportions d’acquisition ;

à ne pas prévoir simultanément une reprise des apports au nominal lors de la liquidation de l’indivision152 ;

à éviter de porter, lors de la liquidation de l’indivision, le solde du prêt au passif du compte général de l’indivision (qui ne doit comprendre que les soldes de comptes individuels en faveur d’un indivisaire)153.

§ III – Des hypothèses de prise en compte d’un droit de créance au sein du couple de plus en plus rares

10175 Les hypothèses de prise en compte d’une créance pour les dépenses engagées afin de financer l’acquisition indivise sur le fondement de l’article 815-13 du Code civil ont été régulièrement limitées par la Cour de cassation au cours des dernières années, que ce soit sur le fondement de la contribution aux charges du mariage pour des époux mariés en régime séparatiste ou sur celui de la contribution aux dépenses de la vie commune pour une acquisition réalisée par des concubins154 ou des pacsés155. Nous renvoyons ici aux développements ci-après de la Commission « Famille » (V. infra, Commission 3, nos 30074 et s.).

Sous-section III – Acquisition avec clause d’accroissement. Le pacte tontinier

10176 Lorsque des clients souhaitent procéder à une acquisition à plusieurs avec pour objectif que le survivant soit à terme le seul détenteur du bien, il est possible de recourir à la tontine, ou clause d’accroissement. Chaque acquéreur sera juridiquement supposé être le seul propriétaire du bien depuis l’acquisition d’origine, mais à condition d’être le seul survivant. Il n’y a donc pas de transmission et le bien échappe aux règles de la réserve héréditaire et des libéralités. Il pourra être transmis au-delà de la quotité disponible, avec un intérêt notamment dans le cas de personnes non mariées. Il conviendra toutefois de bien appréhender les règles fiscales de la tontine (§ I), et de recourir en fonction de la situation au pacte tontinier dans le cadre sociétaire (§ II).

§ I – Maîtriser l’intérêt fiscal de la tontine

10177 Nous baserons nos développements sur les données du cas pratique suivant : « Acquisition avec clause d’accroissement ».
10178 Deux concubins non pacsés souhaitent se porter acquéreurs de leur résidence principale, d’une valeur de 500 000 €. Ils n’ont pas d’enfants (ou ne désirent pas que le bien leur soit transmis en cas de décès). Ils souhaitent que le bien revienne au survivant d’entre eux.
Solution 1 : le testament.
= Désignation par testament du coïndivisaire comme légataire universel (ou légataire particulier du bien immobilier concerné).
Problème : le coût de la transmission, avec une taxation à 60 % sur la part transmise (supposée ici de la moitié).
Coût de la transmission = [(500 000,00 / 2) – 1 594] × 60 % = 149 044 €.
Solution 2 : le pacte tontinier.
10179 – Régime fiscal. – Même si le bien acquis en tontine échappe civilement à la succession du premier défunt, des droits de mutation à titre gratuit seront dus à chaque décès : en application des dispositions du premier alinéa de l’article 754 A du Code général des impôts, les biens recueillis en vertu d’une clause de tontine insérée dans un contrat d’acquisition en commun sont, au point de vue fiscal, réputés transmis, à titre gratuit, à chacun des bénéficiaires de l’accroissement. Il y aura donc application des droits de succession selon le régime de droit commun, c’est-à-dire d’après le lien de parenté entre le défunt et le ou les bénéficiaires de la clause et sur la valeur de la part transmise à chacun d’eux.
Exception : pour les immeubles affectés à l’habitation principale commune d’une valeur inférieure à 76 000 € au moment du premier décès, la part transmise au survivant est passible des seuls droits de vente d’immeuble (soit 5,80 %, en vertu de l’article 754 A, alinéa 2 du Code général des impôts, sans condition de validité liée au lien de parenté).
10180 – Limites du pacte tontinier. – En raison du faible montant de l’abattement prévu par l’article 754 A, alinéa 2 du Code général des impôts et de la fiscalité actuellement applicable entre personnes ni mariées ni pacsées, le coût de la transmission du bien acquis via une clause de tontine reste très élevé. Il peut alors être proposé d’insérer la clause de tontine dans les statuts d’une société qui se portera acquéreur du bien immobilier.

§ II – Le recours au pacte tontinier dans un cadre sociétaire

10181 Solution 3 : le pacte tontinier inséré dans les statuts d’une société constituée entre les acquéreurs.
Afin de permettre, d’une part, une transmission avec clause d’accroissement dans le cadre d’une fiscalité réduite et, d’autre part, la souplesse du cadre sociétaire dans un objectif d’anticipation successorale, il pourra être conseillé (notamment à des concubins non pacsés) de procéder à l’acquisition par l’intermédiaire d’une société, dont les statuts prévoiront que les parts sociales sont attribuées à chacun des concubins sous la condition suspensive de sa survie et sous la condition résolutoire de son prédécès. Conclure un pacte tontinier sur des parts sociales est une pratique qui peut s’avérer très avantageuse mais doit être maniée avec précaution.
10182 – Régime fiscal. – Dans l’hypothèse d’une clause de tontine insérée dans les statuts d’une société, seuls sont dus les droits de mutation à titre onéreux. L’application de l’article 754 A du Code général des impôts (conduisant à la perception des droits de mutation à titre gratuit, actuellement au taux de 60 % entre concubins) est écartée, la clause de tontine n’étant pas insérée « dans un contrat d’acquisition en commun », mais dans les statuts d’une société constituée entre les acquéreurs. Une réponse ministérielle de 1979156 et un arrêt rendu par la cour d’appel de Chambéry du 18 novembre 2003157 ont confirmé ce régime fiscal158. Le survivant est assujetti à des droits de mutation à titre onéreux sur les parts reçues par effet du décès, au taux de 5 %. Les droits de mutation sont liquidés au tarif en vigueur au décès et sur la valeur appréciée à cette date qui est celle de la réalisation de la condition suspensive159.
10183 – Les clauses de participations croisées. – Après avoir constitué une SCI entre deux personnes avec une répartition équitable des parts sociales, il peut être dans un second temps réalisé un échange de l’usufruit des parts de chaque titulaire (A cédant l’usufruit de ses parts et recevant l’usufruit des parts de B et inversement).
Au décès de A, B consolide sa propriété sur ses parts initiales et conserve l’usufruit sur les parts initiales de A (les enfants recevant la nue-propriété des parts de A). Au décès de B, les enfants deviennent pleins propriétaires des parts initiales de A et reçoivent les parts de B (leur nue-propriété) ; ils ne sont imposés que sur la transmission de la nue-propriété des parts de B. La taxation n’aura donc concerné que la moitié des parts, au second décès160.
10184 – Applications pratiques. – Ce type de clause peut être utilisé pour transmettre un bien entre concubins non pacsés (comme dans l’exemple ci-dessus, pour diminuer le coût de la transmission) ou entre époux (mariés sous un régime séparatiste), notamment pour contourner la réserve héréditaire, mais également entre parents et enfants : les parents (ou l’un d’eux) constituent une société avec leurs enfants ou certains d’entre eux et prévoient dans les statuts une clause d’accroissement par laquelle, en cas de prédécès de l’un d’eux, les autres associés deviendront rétroactivement propriétaires de leurs droits sociaux. Le survivant des associés est réputé propriétaire de la totalité des parts ou actions.
10185 – Précautions et limites :

la tontine est un carcan dont il est impossible de sortir sans l’accord des cotontiniers (à l’inverse des situations d’indivision ou de société civile immobilière classique comme envisagé ci-après) ;

attention à la qualification de donation déguisée : la Cour de cassation a récemment rappelé161 que le pacte tontinier compris dans l’acte d’acquisition d’un bien immobilier peut constituer une donation déguisée d’un époux en faveur de l’autre. Dans ce cas, il y a requalification en donation et celle-ci est soumise au rapport dans les limites et selon les modalités prévues à l’article 758-6 du Code civil (au cas d’espèce, le bénéficiaire était le conjoint survivant) ;

le risque d’abus de droit (ou de mini-abus de droit). Il conviendra d’être particulièrement attentif ici au risque de qualification d’abus de droit si la société n’était constituée que dans le but d’éviter l’application des droits de mutation à titre gratuit, et donc dans un but uniquement (ou principalement) fiscal. À défaut, la différence de fiscalité pourrait être requalifiée en libéralité et rapportée à la succession.

Solution pratique. Respect de l’aléa et du caractère onéreux du contrat :

un démembrement de propriété concomitant pourra en atténuer le risque ;

de même qu’une répartition du capital social en fonction de l’espérance de vie de chaque associé (ou des âges proches des associés et états de santé similaires puisque les conditions de survie doivent être équivalentes).

10186 – Le risque relatif à la prohibition des pactes sur successions futures. – La clause de tontine ne sera pas remise en cause sur le fondement de la nullité des pactes sur successions futures (C. civ., art. 722)162 s’il est indiqué dans l’acquisition, à titre de clause aléatoire, que le premier mourant des acquéreurs sera considéré comme n’ayant jamais eu droit à la propriété de l’immeuble ; ses héritiers ne pourront prétendre à aucun droit sur ce bien163.
10187 – Société constituée par un seul associé au décès d’un des deux acquéreurs. – Au décès d’un des deux associés de la société constituée avec insertion d’un pacte tontinier dans les statuts, et du fait de l’effet rétroactif de la clause d’accroissement, la société est réputée comme ayant été dès l’origine constituée par un associé unique.
Solutions pratiques :

régularisation : la société est certes devenue unipersonnelle, elle n’est pas pour autant dissoute de plein droit : outre le délai de principe d’un an pour régulariser, le juge (à la demande d’un tiers ayant un intérêt à agir) ne pourra pas prononcer la dissolution si, au jour où il statue, la situation est régularisée ;

une clause de tontine ne portant pas sur la totalité des parts : si l’on veut éviter que la société soit jugée nulle par l’absence d’une pluralité d’associés lors de sa constitution, il convient, comme dans l’exemple exposé ci-dessus, de ne pas faire porter la clause de tontine sur la totalité des parts, mais sur 99 % de celles-ci (sur 499 parts dans l’exemple).

À noter toutefois qu’il est préférable, pour ne pas ajouter les difficultés de l’indivision dans la société, de prévoir autant de parts hors tontine que d’héritiers.
10188 – Nullité de la tontine postérieure à l’acte d’acquisition. – Il n’est pas possible de conclure un pacte tontinier postérieurement à l’acte d’acquisition, puisque dans ce cas la clause ne rétroagirait qu’au jour de l’acte complémentaire. Le bien aurait donc appartenu, pendant la période entre l’acquisition et l’acte complémentaire, au prémourant, et la prohibition des pactes sur succession future trouverait à s’appliquer.
10189 – Autre intérêt de la tontine : protection vis-à-vis des créanciers. – Le droit de gage général des créanciers ne pouvant s’exercer que sur les biens dont le débiteur est propriétaire, si la condition suspensive de survie n’est pas réalisée à la date de délivrance du commandement aux fins de saisie immobilière, le débiteur n’est pas titulaire d’un droit privatif de propriété sur le bien ou partie du bien164. Le bien échappe alors aux créanciers des acquéreurs (sauf créanciers ayant une créance contre tous les tontiniers et sauf action paulienne).
10190 – Vigilance sur la rétroactivité de la tontine. – Le mécanisme de la tontine repose sur la rétroactivité d’une double condition : condition suspensive de la survie de chacun des acquéreurs et condition résolutoire du décès de chacun d’eux. La rétroactivité de la condition formulée de manière expresse permet d’échapper à la nullité des pactes sur succession future165. Suite à l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 prise en son article 3, dont est issu le nouvel article 1304-6, alinéa 1 du Code civil166, la réalisation d’une condition suspensive ne joue plus par principe rétroactivement. Les parties peuvent en revanche prévoir que « l’accomplissement de la condition rétroagira au jour du contrat ». Dans le cas d’une acquisition avec clause de tontine, il conviendra donc de bien prévoir cette dérogation, afin que la tontine puisse développer l’ensemble de ses effets et que le droit de propriété du survivant bénéficie bien de la rétroactivité souhaitée (pour la condition suspensive, puisque le principe de l’effet rétroactif demeure pour la condition résolutoire)167.

85) C. civ., art. 1583 : « Elle est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ».
86) CE, 9e et 10e ch. réunies, 29 déc. 2020, nos 428306, 428309 et 428315 : JurisData no 2020-021601.
87) J. Urion, Computation du délai de détention en cas d’acquisition sous promesse synallagmatique : RFP mars 2021, no 3, 6.
88) J. Urion, Computation du délai de détention en cas d’acquisition sous promesse synallagmatique, op. cit.

89) C. civ., art. 621 : « En cas de vente simultanée de l’usufruit et de la nue-propriété d’un bien, le prix se répartit entre l’usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l’usufruit sur le prix.

La vente du bien grevé d’usufruit, sans l’accord de l’usufruitier, ne modifie pas le droit de ce dernier, qui continue à jouir de son usufruit sur le bien s’il n’y a pas expressément renoncé ».
90) L’usufruitier pourra alors librement disposer du prix de vente, à charge pour lui d’en restituer la valeur au nu-propriétaire au terme du démembrement.
91) Nous renvoyons à cet égard à nos développements infra, no 10146, et notamment sur la nécessité dans ce cas de constater expressément dans l’acte d’acquisition du nouveau bien le remploi des sommes concernées, pour faire obstacle à la présomption de fictivité de l’article 751 du Code général des impôts.
92) C. civ., art. 617 : « L’usufruit s’éteint : Par la mort de l’usufruitier ; Par l’expiration du temps pour lequel il a été accordé ; Par la consolidation ou la réunion sur la même tête, des deux qualités d’usufruitier et de propriétaire ; Par le non-usage du droit pendant trente ans ; Par la perte totale de la chose sur laquelle l’usufruit est établi ».
93) Nous rappelons ici que l’administration fiscale n’interdit pas d’opter pour la solution fiscale la moins onéreuse (V. infra, no 10214).
94) Cass. 1re civ., 25 févr. 1997, no 94-20.785 : la méthode fiscale d’évaluation de l’usufruit ne s’impose pas au juge civil ; une méthode d’évaluation économique de l’usufruit peut être retenue. Elle consiste à tenir compte de l’âge exact de l’usufruitier (et non d’une tranche d’âge) et de la rentabilité du bien ; elle fait appel à une actualisation des flux, en prenant en compte le cumul des revenus perçus sur la période théorique liée à l’espérance de vie.
95) J. Aulagnier, Aspects économiques du démembrement de propriété : Dr. et patrimoine 1995, hors-série, no 1 ; La répartition du prix de cession d’un actif démembré : JCP N 2012, 1383.
96) BOI-RFPI-PVI-20-10-10, § 320.
97) Pour une imposition du chef de l’usufruitier seul : www.bornhauser-avocats.fr/fr/plus-value-immobiliere-et-quasi-usufruit-la-grande-inconnue ; pour une ventilation : V. Godron et H. Paerels, La vente d’un immeuble démembré : sort du prix de vente et plus-values immobilières des particuliers, Aurep, Newsletter 18 déc. 2020, no 367.
98) Mémento Lefebvre Patrimoine 2021-2022, no 3629.
99) BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-60.
100) Sauf si le nu-propriétaire ou l’usufruitier a disposé de la pleine propriété des titres avant leur démembrement, car dans ce cas le prix d’acquisition correspondra au prix d’acquisition initial majoré de l’accroissement de valeur du droit concerné entre l’acquisition et la transmission de ce droit, sur base du barème de l’article 669 du Code civil.
101) QE no 24124 : JO Sénat 5 août 2021, p. 479.
102) M. Leroy, Usufruit successif et plus-values : RFP oct. 2021, no 10.
103) CAA Marseille, 3e ch., 18 févr. 2021, no 19MA03657.
104) Rapport du 112e Congrès des notaires de France, Nantes, 5-8 juin 2016, La propriété immobilière. Entre liberté et contraintes, 4e commission, Prop. no 2.
105) CE, 8e et 3e ch., 15 juill. 2021, no 453490.
106) CE, 12 oct. 2021, no 454641, QPC.
107) CE, 9e et 10e ch. réunies, 29 déc. 2020, nos 428306, 428309 et 428315 : JurisData no 2020-021601.
108) CE, 9e et 10e ch. réunies, 29 déc. 2020, nos 428306, 428309 et 428315 : JurisData no 2020-021601. – Rapport du 116e Congrès des notaires de France, Paris, 8-10 oct. 2020, Protéger les vulnérables, les proches, le logement, les droits, nos 1303 à 1308.
109) Méthode proposée par M. le Professeur Jean Aulagnier.
110) Nous renvoyons ici aux développements ci-après sur la présomption de l’article 751 du Code général des impôts.
111) Exonération de certains dons familiaux d’argent (C. civ., art. 790 et s.).
112) Barème no 16, Tableau 5 pour la pour donation immobilière et Barème no 19, Tableau 5 pour donation de somme d’argent.
113) CGI, art. 751, al. 1 : « Est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu’à preuve contraire, de la succession de l’usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l’usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété, à l’un de ses présomptifs héritiers ou descendants d’eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, à moins qu’il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n’est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès ou qu’il y ait eu démembrement de propriété effectué à titre gratuit, réalisé plus de trois mois avant le décès, constaté par acte authentique et pour lequel la valeur de la nue-propriété a été déterminée selon le barème prévu à l’article 669 ».
114) BOI-ENR-DMTG-10-10-40-10-20140929.
115) Cass. com., 12 déc. 1995, no 94-11.491.
116) L’enregistrement se fera par le dépôt en double exemplaire de la donation, avec, pour les actes notariés étrangers rédigés dans une langue étrangère, une traduction certifiée par un traducteur juré (BOI-ENR-DMTG-20-10-30, no 10). Il n’existe pas d’imprimé spécifique.
117) JOAN Q 19 oct. 1998, p. 5733.
118) S. Durand, De l’utilisation des usufruits successifs lors d’une acquisition en démembrement de propriété : JCP N 22 déc. 2000, no 51, p. 1839.
119) Ibid.
120) Ibid.
121) Soumis aux règles contractuelles des statuts sociaux, et non à celles du Code civil en cas de démembrement de l’actif immobilier.
122) V. entre autres R. Mortier, Démembrement de propriété-usufruit de droits sociaux, stratégies fondées sur le droit commun : JCl. Ingénierie du patrimoine, Fasc. 930.
123) Droits sur les parts et non sur l’actif immobilier directement.
124) Par l’insertion d’une clause répartissant les droits de vote entre usufruitier et nu-propriétaire.
125) Mais à noter qu’un impôt de plus-value sera dû lors de l’apport en l’absence de cas d’exonération.
126) Nous renvoyons au tableau comparatif entre indivision et société ci-dessous.
127) O. Salvador, Démembrement familial de propriété immobilière : quelques techniques de réinvestissement : JCP N 26 avr. 2002, no 17, 1252.
128) Cass. com., 3 oct. 2006, no 04-14.272, Botherel : JurisData no 2006-035454 ; JCP N 2007, no 28, 1216, note P. Fernoux.
129) CADF, avis, séance no 2/2021, 14 janv. 2021, aff. no 2020-17, obs. F. Julienne.
130) R. Gentilhomme, M. Deslandes et H. Hovasse, Apports de droits démembrés : Act. prat. ing. sociétaire 1993, no 10, p. 3 et s., qui conseillent de prévoir que les apporteurs en nue-propriété et en usufruit soient rémunérés par l’émission de droits sociaux en pleine propriété, et de procéder ensuite à un échange : l’apporteur en usufruit échange la nue-propriété de ses droits sociaux contre l’usufruit des droits sociaux dont est devenu propriétaire l’apporteur en nue-propriété. Ceci entraînera toutefois la perception de droits de mutation à titre onéreux au titre de l’échange.
131) F. Roussel, Apport conjoint de l’usufruit et de la nue-propriété : Dr. et patrimoine janv. 1995, hors-série, no 1, p. 31.
132) Rép. min. Chazeaux : JOAN Q 27 nov. 2000, p. 6756.
133) BOI-ENR-DMTG-10-10-40-10, no 250.
134) R. Mortier, Démembrement de propriété-usufruit de droits sociaux, stratégies fondées sur le droit commun : JCl. Ingénierie du patrimoine, Fasc. 930.
135) Cass. com., 10 févr. 2009, no 07-21.806 : JurisData no 2009-046999.
136) Cass. com., 18 déc. 2012, no 11-27.745 : JurisData no 2012-029941.
137) Sachant que si la liberté est suffisamment grande pour opérer une répartition du droit de vote sur mesure (sous réserve de préserver le droit de vote de l’usufruitier sur l’affectation des bénéfices), encore faut-il que la volonté des parties soit exprimée clairement (Cass. com., 13 janv. 2021, no 19-13.399).
138) En application du barème de l’usufruit fiscal de l’article 669 du Code civil.
139) En application du barème des droits de mutation à titre gratuit de l’article 777 du Code général des impôts.
140) En application du barème de l’usufruit fiscal de l’article 669 du Code civil.
141) En application du barème de l’article 777 du Code général des impôts.
142) C. civ., art. 815-3.
143) C. civ., art. 763.
144) C. civ., art. 764.
145) CGI, art. 973, al. 2.
146) CE, 9e et 10e ch., 30 sept. 2019, no 419855 : JurisData no 2019-016700.
147) L. Benoudiz, SCI et évaluation : RFP sept. 2020, no 9.
148) J.-J. Lubin, Évaluation des SCI : les décotes fiscalement admissibles : D.O Actualité 2017, no 35.
149) C. Guilloteau Palisse et S. Richard, Acquisitions indivises : Faut-il vraiment fixer les quotités de propriété dans l’acte d’acquisition ? (1re partie) : Cah. Cridon Lyon mars 2020, cahier no 85.
150) Cf. exemple chiffré dans l’art. préc.
151) Sauf à tenir compte entre coïndivisaires de la réalité des remboursements, si elle peut être prouvée.
152) C. Guilloteau Palisse et S. Richard, Acquisitions indivises : Faut-il vraiment fixer les quotités de propriété dans l’acte d’acquisition ? (1re partie), op. cit.
153) DGFiP Haute-Saône, rescrit 21 déc. 2018.
154) Cass. 1re civ., 13 janv. 2016, no 14-29.746.
155) Cass. 1re civ., 27 janv. 2021, no 19-26.140, FS-P.
156) Rép. min. no 12029, 8 sept. 1979, Rufenacht : JOAN 8 sept. 1979, p. 7151.
157) CA Chambéry, 1re ch. civ., 18 nov. 2003, no 02-926.
158) Sans autre confirmation expresse depuis, ce qui peut être regretté.

159) CGI, art. 676 : « En ce qui concerne les mutations et conventions affectées d’une condition suspensive, le régime fiscal applicable et les valeurs imposables sont déterminés en se plaçant à la date de la réalisation de la condition.

Toutefois, lorsqu’elle ne tient pas lieu des droits d’enregistrement, la taxe de publicité foncière est perçue sur l’acte conditionnel d’après le régime applicable à la date à laquelle la formalité de publicité foncière est requise. Les valeurs imposables sont déterminées en se plaçant à la date de l’acte ».
160) Rapport du 115e Congrès des notaires de France, Bruxelles, 2-5 juin 2019, L’international : Qualifier, Rattacher, Authentifier, no 4167.
161) Cass. 1re civ., 12 janv. 2022, no 20-12.232.
162) C. civ., art. 722 : « Les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d’une succession non encore ouverte ou d’un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi ».
163) D. Montoux : JCP N 10 févr. 2017, no 6-7.
164) Cass. 1re civ., 18 nov. 1997, no 95-20.842 : Bull. civ. 1997, I, no 315, p. 214 et JCP N 1998, p. 1498.
165) D. Montoux : JCP N 10 févr. 2017, no 6-7.

166) C. civ., art. 1304-6 (issu de Ord. no 2016-131, 10 févr. 2016, art. 3) : « L’obligation devient pure et simple à compter de l’accomplissement de la condition suspensive.

Toutefois, les parties peuvent prévoir que l’accomplissement de la condition rétroagira au jour du contrat. La chose, objet de l’obligation, n’en demeure pas moins aux risques du débiteur, qui en conserve l’administration et a droit aux fruits jusqu’à l’accomplissement de la condition.
En cas de défaillance de la condition suspensive, l’obligation est réputée n’avoir jamais existé ».
167) C. civ., art. 1304-6, al. 2.
168) D. Montoux : JCP N 10 févr. 2017, no 6-7.
169) La procédure de probate est celle qui consiste pour les exécuteurs testamentaires ou administrateurs d’une succession à faire une demande d’un grant, auprès du service des successions (Probate Registry) du tribunal compétent, pour obtenir le droit de recueillir la succession et la distribuer aux légataires ou héritiers après le paiement des dettes et droits de succession.
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