CGV – CGU

PARTIE I – Une union éclairée…
Titre 2 – … par des contrats adaptés
Sous-titre 1 – Un contrat pour tous les couples

Chapitre I – Comprendre l’obligation de contribuer aux charges du ménage

Section I – Le juge, défenseur de la contribution aux charges du ménage des époux séparés de biens

30074 – Principe légal. – Selon le premier alinéa de l’article 214 du Code civil : « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ».
Cet article, inclus dans le régime primaire impératif qui gouverne tous les époux, engendre un devoir : celui de contribuer au financement des charges du ménage, quel que soit le régime matrimonial choisi.
La contribution aux charges du mariage peut se définir ainsi : « tout ce qui est nécessaire aux besoins de la vie familiale »70.
La notion de charges du mariage est entendue largement et dépend du train de vie que les époux se sont donné d’un commun accord. Sont concernés les dépenses de nourriture, de logement, de vêtements des époux et des enfants, de transport, ainsi que les frais d’entretien et d’éducation des enfants.
Toutefois, il ne faut absolument pas s’en tenir à l’existence de dépenses nécessaires. Sont aussi des charges du mariage les dépenses ayant pour objet l’agrément de la vie ou l’aménagement de son cadre, notamment les frais d’installation de l’habitation familiale, les frais de vacances ou de loisirs, ainsi que les cotisations de retraite d’une employée de maison. Ces solutions extensives s’expliquent par le fait que, par son fondement et par son but, l’obligation de contribution aux charges du mariage se distingue de l’obligation alimentaire.
30075 – Évolutions jurisprudentielles. – Depuis 2013, les juges de la Haute juridiction, dans plusieurs arrêts remarqués, proposent une définition étendue des charges du mariage (Sous-section I). Aux termes de ces décisions, le régime de la séparation de biens s’est, peu à peu, vu imprégner d’un esprit communautaire.
En parallèle, lesdits juges se sont prononcés sur le caractère simple ou irréfragable de la présomption relative à la contribution aux charges du ménage insérée dans le contrat de mariage des époux séparés de biens (Sous-section II). Ces décisions méritent d’être prises en compte rapidement par la pratique notariale. De bonnes pratiques doivent immédiatement être préconisées.
Sous-section I – Les contours de la contribution aux charges du mariage
30076 – Jurisprudence contemporaine. – Le Code civil ne définissant pas précisément quelles sont ces charges du ménage, autrement appelées les « dépenses de la vie courante », les juges ont été amenés à le faire.
De fait, il est dorénavant possible d’établir une synthèse particulièrement précise de la jurisprudence afférente à la contribution aux charges du mariage. Le doute n’est plus permis.
Depuis l’année 2013, les arrêts de la Cour de cassation ont été attendus de tous afin de savoir quelles dépenses sont considérées comme une contribution aux charges du ménage pour les époux (§ I) et celles qui ne le sont pas (§ II).

§ I – Les dépenses considérées comme une contribution aux charges du mariage

30077 – Décisions jurisprudentielles de l’année 2013. – Deux décisions prises par la première chambre civile de la Cour de cassation au cours de l’année 2013 ont considéré que le remboursement de l’emprunt par un époux séparé de biens au-delà de sa quotité de propriété sur un prix d’acquisition devait être considéré comme une contribution aux charges du ménage.
En pratique, la conséquence est fâcheuse pour lui, puisqu’il ne peut obtenir le remboursement de son surfinancement. Une créance entre les époux ne sera alors pas admise.
Dans la première décision, il était question d’un prêt contracté pour le financement de l’acquisition du logement familial (A). Tandis que dans la seconde décision, il s’agissait d’un prêt contracté pour le financement de l’acquisition d’une résidence secondaire à vocation familiale (B).
A/ Les dépenses d’investissement concernant un logement familial
30078 – Jurisprudence constante. – La Cour de cassation a admis que les dépenses afférentes au financement du logement de la famille, au moyen d’un emprunt, étaient une modalité d’exécution de son obligation de contribution aux charges du mariage par l’époux financeur.
On peut, dans un premier temps, citer un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 14 mars 200671. Dans un second temps, par une décision encore plus marquante du 12 juin 201372, la cour a pris pour acquise la qualification de contribution aux charges du mariage d’une dépense de remboursement de l’emprunt pour l’acquisition du logement familial.
30079
30080 – Exemple chiffré.
B/ Les dépenses d’investissement concernant une résidence secondaire à vocation familiale
30081 – Jurisprudence constante. – La Cour de cassation intègre les dépenses d’agrément, de vacances et de loisirs dans la contribution aux charges du mariage dès lors que la dépense est conforme aux ressources globales du ménage. C’est également le cas du remboursement de l’emprunt d’une résidence secondaire73. La destination du bien immobilier acquis à l’usage de la famille est indispensable, ainsi que le confirme un arrêt de la première chambre civile du 3 octobre 201874.
30082
30083
30084 – Exemple chiffré.

§ II – Les dépenses non considérées comme une contribution aux charges du mariage

30085 – Décisions jurisprudentielles et articles 214 et 815-13 du Code civil. – Des décisions postérieures à celles de 2013 ont posé certaines limites à la contribution aux charges du mariage (A), tandis que d’autres décisions ont précisé les contours de l’article 815-13 du Code civil (B). En effet, si la dépense n’est pas considérée comme une contribution aux charges du mariage au sens de l’article 214 du Code civil, il convient de déterminer la nature de la créance pour l’indivisaire qui a surcontribué par rapport à sa quotité de propriété : créance contre l’indivision de l’article 815-13 du Code civil ou créance entre indivisaires ?
A/ Jurisprudence de l’article 214 du Code civil
30086 – Dépenses exclues de l’article 214 du Code civil. – Les dépenses d’emprunt pour un bien locatif (I) et les dépenses en capital (II) ont été exclues de l’article 214 du Code civil par la jurisprudence.
I/ Les dépenses d’investissement concernant un bien locatif destiné à constituer une épargne
30087 – Jurisprudence constante. – Depuis une décision de sa première chambre civile du 16 octobre 201675, la Cour de cassation indique que le remboursement du prêt n’est pas considéré comme une contribution aux charges du ménage dès lors que le prêt contracté a pour objet le financement de l’acquisition d’un bien locatif destiné à constituer une épargne.
Aucune distinction n’est à opérer en fonction du train de vie des époux. La constitution d’un patrimoine pour l’épargne du ménage n’est pas reconnue comme une contribution aux charges du mariage.
30088
30089 – Exemple chiffré.
II/ Les dépenses en capital
30090 – Jurisprudence constante. – Une décision prise par la première chambre civile de la Cour de cassation au cours de l’année 201976, une deuxième en 202177 et une troisième en 202278 ont déterminé le sort des apports en capital. Une dépense en capital provenant de la vente de biens personnels, effectuée par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l’acquisition d’un bien indivis, n’est pas considérée comme une contribution aux charges du mariage.
30091
30092
30093
30094 – Exemple chiffré.
B/ Jurisprudence de l’article 815-13 du Code civil
30095 – Nature de la créance. – Concernant ces dépenses qui sont exclues de la contribution aux charges du mariage, il convient de vérifier la nature de la créance pour l’indivisaire qui aura financé au-delà de sa quote-part de propriété. Pourra-t-il se prévaloir d’une créance au titre de l’article 815-13 du Code civil ?
Pour rappel, les dispositions de l’article 815-13, alinéa 1er du Code civil visent les seules dépenses de conservation ou d’amélioration d’un bien indivis, à l’exclusion des dépenses d’acquisition. Aussi, la jurisprudence se prononce depuis quelques années sur les contours de ces dépenses, et notamment lorsque la surcontribution résulte d’un apport initial d’une somme d’argent (II) ou du remboursement des échéances de l’emprunt (I).
I/ Lorsque le surfinancement résulte du remboursement des échéances d’emprunt
30096 – Créance contre l’indivision. – Dès lors qu’un indivisaire a financé le bien au-delà de sa quote-part de propriété, et ce par le remboursement des échéances d’un prêt, la Cour de cassation a admis à son profit l’existence d’une créance contre l’indivision sur le fondement de l’article 815-13, alinéa 1er du Code civil79.
Les conséquences pour celui qui a surfinancé sont les suivantes : d’une part, dès qu’est établie une dépense qui excède la quotité, le droit à créance est présumé ; d’autre part, s’agissant d’une créance contre l’indivision et non d’une créance entre indivisaires, l’intégralité des dépenses d’acquisition engagées par chacun des indivisaires doit être portée en compte.
Le calcul de la créance sur le fondement de l’article 815-13, alinéa 1er du Code civil sera égal à la plus forte des deux sommes entre le profit subsistant et la dépense faite, ainsi que l’a confirmé la Haute juridiction80.
30097 – Exemples chiffrés.
II/ Lorsque le surfinancement résulte de l’apport initial d’une somme d’argent
30098 – Créance entre indivisaires. – Dès lors qu’un indivisaire a financé le bien au-delà de sa quote-part de propriété, et ce par un apport personnel initial, la Cour de cassation avait autrefois admis à son profit l’existence d’une créance contre l’indivision sur le fondement de l’article 815-13, alinéa 1er du Code civil81.
Toutefois, par un arrêt du 26 mai 202182, la première chambre de la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en considérant désormais la créance comme une créance entre indivisaires.
Il en résulte que l’apport en capital en vue d’acquérir un bien indivis ne constitue plus une dépense de conservation juridique de ce bien. Me Stéphane David souligne l’intérêt de cette décision en ces termes : la Cour de cassation a « remis l’église au milieu du village »83.
Le calcul de la créance sera égal, par application de l’article 1543 du Code civil, qui renvoie à l’article 1479, lequel renvoie à l’article 1469 dudit Code, s’agissant d’une créance entre époux séparés de biens, à la plus forte des deux sommes entre le profit subsistant et la dépense faite.
Enfin, la prescription sera celle des dettes entre époux, laquelle, en vertu des dispositions spécifiques de l’article 2236 du Code civil, est suspendue tant que dure l’union.
30099
30100 – Exemples chiffrés.
Sous-section II – Les aménagements contractuels de la contribution aux charges du mariage
30101 – Clauses visant la contribution aux charges du mariage. – Les dispositionsde l’article 214 du Code civil concernant la contribution aux charges du mariage, contrairement à toutes les autres dispositions qui régissent le régime primaire, ne sont pas impératives. D’où la possibilité pour les futurs époux (au sein d’un contrat de mariage) ou les époux eux-mêmes (à l’occasion d’un changement de régime) de prévoir conventionnellement comment ils entendent s’acquitter de leur obligation.
30102 – Pratique notariale. – Dès lors, l’analyse de la jurisprudence contemporaine relative à la contribution aux charges du mariage serait incomplète sans l’étude des décisions concernant les aménagements conventionnels issus de la pratique notariale.
Les clauses usuelles (§ I) des contrats de mariage relatives à la contribution aux charges du mariage doivent être réécrites puisque les juges de la Haute juridiction ont soumis leur interprétation à l’appréciation des juges du fond.
Faute de clarté, la responsabilité notariale pourrait être recherchée par l’époux qui s’estime avoir été insuffisamment informé par le notaire rédacteur. Des nouvelles clauses doivent être utilisées (§ II).

§ I – Des clauses usuelles inadaptées pour les époux séparés de biens

30103 – Article 1537 du Code civil. – En vertu de l’article 1537 du Code civil, « les époux [séparés de biens] contribuent aux charges du mariage suivant les conventions contenues en leur contrat ; et, s’il n’en existe point à cet égard, dans la proportion déterminée à l’article 214 ». Cet article confirme le caractère supplétif de l’article 214 du Code civil.
La pratique notariale a, par application de cette disposition, mis en place de façon automatique une clause usuelle dans les contrats de mariage.
30104 – Clause notariale usuelle et son contenu. – La clause issue de la pratique notariale, initialement destinée à éviter tout contentieux liquidatif entre les époux, est devenue de style. Son contenu est le suivant : « Les époux contribuent aux charges du mariage, en proportion de leurs revenus et gains respectifs. Chacun d’eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux, ni à retirer à ce sujet aucune quittance l’un de l’autre ».
Au regard du contentieux relatif à la revendication d’une créance par l’un des époux qui prétend avoir excédé son obligation contributive aux charges du mariage lors de l’acquisition du logement de la famille notamment, cette clause n’a pas eu l’effet escompté. Pire, l’effet dégénère en effet pervers.
30105 – Contentieux de cette clause. – Afin d’éteindre le contentieux afférent au respect de l’obligation de contribution aux charges du mariage, l’outil juridique employé est la présomption. Les juges de la Haute juridiction, dans plusieurs arrêts remarqués, ont considéré la présomption relative à la contribution aux charges du ménage insérée dans le contrat de mariage des époux séparés de biens comme étant une présomption irréfragable84.
Dans tous ces arrêts, la Cour de cassation rappelle que les juges du fond jouissent d’un pouvoir souverain d’appréciation s’agissant du caractère simple ou irréfragable de la présomption prévue par les époux en matière de contribution aux charges du mariage.
La conséquence est évidente en pratique : si la présomption est simple, la démonstration d’une surcontribution est possible ; si elle est irréfragable, elle prive les époux de tout recours, et toute demande de contribution est neutralisée.
Deux décisions prises par la première chambre civile de la Cour de cassation depuis mai 2020 sont allées encore plus loin.
30106 – Première décision. – La première décision prise par la première chambre civile de la Cour de cassation le 13 mai 202085 a considéré que ladite clause, autrement nommée « Clause de présomption d’acquittement des charges du mariage », avait la qualification de clause de non-recours. Celle-ci conduit à une fin de non-recevoir d’origine conventionnelle.
Il en résulte qu’une action d’un époux qui souhaiterait obtenir, rétrospectivement, une indemnité sur le fondement de la contribution aux charges du mariage n’est pas possible.
Néanmoins, pendant la durée du mariage, cet époux peut contraindre en justice son conjoint à remplir, pour l’avenir, son obligation de contribution aux charges du mariage. Une telle clause de présomption d’acquittement des charges du mariage ne constitue aucunement une autorisation à la non-contribution aux charges du mariage.
En somme, cette clause vise uniquement à éviter que des comptes réciproques ne puissent être établis.
30107
30108 – Seconde décision. – La seconde décision, en date du 18 novembre 202086, sans utiliser le terme exact de « clause de non-recours », aboutit au même résultat.
Les juges confirment le caractère irréfragable de la présomption réputant la contribution aux charges du mariage fournie au jour le jour. Il en résulte qu’une action d’un époux qui souhaiterait obtenir, rétrospectivement, une indemnité sur le fondement de la contribution aux charges du mariage n’est pas possible.
30109

§ II – Des nouvelles clauses à adopter

30110 – Ordonnance du 10 février 2016. – En vertu de l’article 1356 du Code civil, « les contrats sur la preuve (…) ne peuvent davantage établir au profit de l’une des parties une présomption irréfragable ». L’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats a donc supprimé la possibilité de conférer un caractère irréfragable à une présomption conventionnelle. La majorité de la doctrine a interprété ce texte en confirmant qu’il s’applique même si cette présomption bénéficie à l’ensemble des parties87.
Il en résulte que, désormais, la présomption d’accomplissement de l’obligation de contribution aux charges du mariage prévue dans le contrat de mariage ne peut être que simple, contrairement à ce que prévoit actuellement la Cour de cassation.
30111 – Constat. – Force est de constater que ce caractère simple de la présomption ne solutionne malheureusement en rien la problématique.
La pratique notariale avait d’ores et déjà tenté d’affiner, au cours des dernières années, cette clause de style afin d’instituer une présomption simple. L’objectif poursuivi par cette nouvelle rédaction était de ne pas empêcher de faire les comptes a posteriori, mais de prévoir que les époux sont censés avoir contribué selon leurs facultés. Celui qui soutient avoir contribué au-delà – ou en deçà, peu importe – de sa part contributive devra en apporter la preuve, de manière factuelle et matérielle.
Quelle que soit la charge de la preuve, finalement, le contentieux aura bien lieu. La présomption simple n’atteint pas l’objectif poursuivi, celui d’éviter les comptes d’apothicaires ; pas plus que la présomption irréfragable.
Ce n’est donc pas sur le terrain de la présomption qu’il faut se positionner pour contrecarrer la construction prétorienne. De nouvelles pratiques doivent être adoptées par notre profession, voire engagées par le législateur.

Section II – Le juge, en faveur d’une contribution aux charges du ménage des partenaires séparés de biens

30112 – Principe légal. – L’article 515-4 du Code civil prévoit, depuis la loi no 2006-728 du 23 juin 2006 publiée au Journal officiel du 24 juin 2006 et entrée en vigueur le 1er janvier 2007, que les partenaires s’engagent à une aide matérielle réciproque, proportionnelle à leurs facultés respectives, si le contrat de Pacs n’en dispose autrement.
30113 – Évolution jurisprudentielle. – Très récemment, les juges de la Haute juridiction, dans un arrêt remarqué, se sont prononcés sur l’interprétation de l’article 515-4 du Code civil. Aux termes de cette décision, se dessinent, dorénavant, les contours de l’aide matérielle réciproque entre partenaires, que l’on pourrait qualifier de « petite sœur » de la contribution aux charges du ménage des époux. Le juge prend, sur ce terrain, le parti d’une « matrimonialisation » du Pacs.
La formule utilisée n’est pas sans faire penser à celle de l’article 214 du Code civil prévoyant la contribution aux charges du mariage. C’est d’ailleurs ce raisonnement par analogie qu’a adopté la Cour de cassation aux termes de l’arrêt du 27 janvier 202188. Les jugent le Pacs teintent d’un esprit communautaire, même si les partenaires ont opté, dans leur contrat, pour le régime de la séparation des patrimoines. L’analogie avec les époux séparés de biens est évidente.
30114
30115 – Création prétorienne : les contours de l’aide matérielle réciproque. – Jusqu’à présent, il semblait acquis que la notion d’aide matérielle réciproque recouvrait l’entraide des partenaires pour faire face aux besoins de la vie du couple, et notamment le paiement du loyer de la résidence commune, des charges y afférentes, le règlement des charges personnelles incompressibles du quotidien et toutes les dépenses de la vie courante des partenaires, telles que les frais de nourriture, de vêtements, de logement, de santé, etc. Aucune décision ne s’était prononcée sur le financement du bien immobilier des partenaires. C’est chose faite : il est désormais admis en jurisprudence que l’aide matérielle réciproque entre partenaires fasse l’objet d’une interprétation extensive puisque le raisonnement est finalement identique à celui qui s’applique aux époux séparés de biens, sur le fondement de la contribution aux charges du mariage.
Les règlements relatifs à l’acquisition en indivision d’un bien immobilier opérés par un partenaire participent de l’exécution de l’aide matérielle dans le couple et n’ouvrent pas droit à une créance pour ce partenaire. La Cour de cassation approuve la cour d’appel, laquelle a souverainement estimé que les paiements effectués par le partenaire l’avaient été en proportion de ses facultés contributives et décidé que les règlements relatifs à l’acquisition du bien immobilier opérés par celui-ci participaient de l’exécution de l’aide matérielle entre partenaires. Elle en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, qu’il ne peut prétendre bénéficier d’une créance à ce titre. L’aide matérielle est donc au Pacs ce que la contribution aux charges entre époux est au mariage.
30116 – Exemple chiffré.

Section III – Le juge, créateur d’une contribution aux charges du ménage des concubins


70) Cass. 1re civ., 22 févr. 1978, no 76-14.031 : Bull. civ. 1978, I, no 75.
71) Cass. 1re civ., 14 mars 2006, no 05-15.980 : Bull. civ. 2006, I, no 160.
72) Cass. 1re civ., 12 juin 2013, no 11-26.748 : Bull. civ. 2013, I, no 126 ; D. 2013, p. 2242, 1er arrêt, obs. V. Brémond ; AJF 2013, p. 449, obs. B. de Boysson.
73) Cass. 1re civ., 18 déc. 2013, no 12-17.420 : Bull. civ. 2013, I, no 249 ; JCP G 2014, 117, obs. F. Vauvillé ; Dr. famille 2014, comm. 61, obs. B. Beignier ; D. 2014 p. 527, obs. Viney ; AJF 2014, p. 129, obs. P. Hilt ; Defrénois 2014, p. 752, obs. Mouly-Guillemaud ; RJPF 2014-2/20, obs. V. Égéa.
74) Cass. 1re civ., 3 oct. 2018, no 17-25.858 : Defrénois flash 29 oct. 2018, no 147s6, p. 17.
75) Cass. 1re civ., 5 oct. 2016, no 15-25.944 : Bull. civ. 2016, I, no 186 ; JCP N 2016, act. 1107 ; Dr. famille 2016, comm. 256, obs. S. Torricelli-Chrifi ; RTD civ. 2017, p. 105, obs. J. Hauser et p. 469, obs. B. Vareille ; AJF 2016, p. 544, obs. J. Casey ; Defrénois 2017, no 6, p. 366, obs. G. Champenois ; ibid. 2018, no 1-2, p. 35, obs. A. Chamoulaud-Trapiers.
76) Cass. 1re civ., 3 oct. 2019, no 18-20.828, publié au bulletin ; JCP G 2019, 1151, obs. V. Bouchard ; JCP N 2019, act. 791, obs. J. Boisson et 1343, obs. J. Vassaux ; Dalloz actualité, 22 oct. 2019, obs. M. Cottet ; AJF 2019, p. 604, obs. J. Casey ; Defrénois 2020, no 3, p. 26, obs. H. Leyrat.
77) Cass. 1re civ., 17 mars 2021, no 19-21.463.
78) Cass. 1re civ., 9 février 2022, no 20-14.272.
79) Cass. 1re civ., 18 oct. 1983, no 82-14.798 : Bull. civ. 1983, I, no 236. – Cass. 1re civ., 4 mars 1986, no 84-15.071 : Bull. civ. 1986, I, no 51 ; JCP G 1986, II, 20701, obs. P. Simler ; RTD civ. 1987, p. 386, obs. J. Patarin. – Cass. 1re civ., 9 juill. 1991, no 89-11.341 : Bull. civ. 1991, I, no 234. – Cass. 1re civ., 7 juin 2006, no 04-11.524 : Bull. civ. 2006, I, no 284 ; JCP G 2006, I, 193, no 23, obs. A. Tisserand-Martin.
80) Cass. 1re civ., 1er févr. 2017, no 16-11.599 : Bull. civ. 2017, I, no 36 ; Defrénois 2018, no 12, p. 18, obs. G. Champenois et I. Dauriac.
81) Cass. 1re civ., 6 déc. 2005, no 03-19.847, non publié au bulletin. – Cass. 1re civ., 14 oct. 2009, no 08-17.943 : AJF 2010, p. 90, obs. P. Hilt et p. 206, obs. S. David. – Cass. 1re civ., 26 sept. 2012, no 11-22.929, non publié au bulletin : RJPF 2013-2/17, obs. F. Vauvillé.
82) Cass. 1re civ., 26 mai 2021, no 19-21.302, FS-P : Sol. Not. 21/2021, inf. 14, obs. A. Chamoulaud-Trapiers ; AJF 2021, p. 435, obs. J. Casey et p. 437, obs. S. David ; Dr. famille 2021, no 7-8, p. 29-30, obs. S. Torricelli-Chrifi.
83) AJF 2021, p. 437, obs. S. David. V. égal., en ce sens : A. Chamoulaud-Trapiers et B. Vareille, L’apport initial en vue d’acquérir en indivision : Defrénois 28 oct. 2021, no 44, art. 203t8.
84) Cass. 1re civ., 25 sept. 2013, no 12-21.892. – Cass. 1re civ., 24 sept. 2014, no 13-21.005. – Cass. 1re civ., 1er avr. 2015, no 14-14.349. – Cass. 1re civ., 22 juin 2016, no 15-21.543. – Cass. 1re civ., 21 sept. 2016, no 15-23.511. – Cass. 1re civ., 7 févr. 2018, no 14-13.276.
85) Cass. 1re civ., 13 mai 2020, no 19-11.444, P : JurisData no 2020-006923 ; Dalloz actualité, 28 juin 2020, obs. Q. Guiget Schiélé ; AJF 2020, p. 362, obs. J. Casey.
86) Cass. 1re civ., 18 nov. 2020, no 19-15.353, FS-P+B : JurisData no 2020-018937.
87) L. Mauger-Vielpeau, Présomptions légales et convention de preuve : LEFP juill. 2016, no 118, p. 7.
88) Cass. 1re civ., 27 janv. 2021, no 19-26.140, FS-P : JurisData no 2021-000808.
89) 106e Congrès des notaires de France, Bordeaux, 30 mai-2 juin 2010, Couples, patrimoine : les défis de la vie à 2, no 1211, p. 142.
90) 106e Congrès des notaires de France, op. cit., no 3232, p. 685.
91) Cass. 3e civ., 2 oct. 2002, no 01-00.002 : JurisData no 2002-015732 ; Dr. famille 2002, comm. 141, note M. Farge. – Cass. 3e civ., 29 avr. 2009, no 08-11.431 : JurisData no 2009-047967 ; JCP N 2009, no 20, act. 369 ; JCP G 2009, doctr. 337, no 3, H. Périnet-Marquet. – Cass. 1re civ., 13 mai 2015, no 14-16.469 : JurisData no 2015-011178. – Cass. 3e civ., 16 mars 2017, no 15-12.384 : JurisData no 2017-004532 ; JCP N 2015, no 13, act. 397. – Cass. 1re civ., 15 juin 2017, no 16-14.039 : JurisData no 2017-011762 ; Dr. famille 2015, comm. 200, note M. Gayet.
92) Cass. 1re civ., 28 mars 2006 : Bull. civ. 2006, I, no 186 ; JCP 2006, I, 178, no 6, obs. H. Périnet-Marquet.
93) V. not. JCl. Notarial Formulaire, fasc. 80, Indivision – Comptes de l’indivision, no 11, part J. Lafond. – E. Buat-Ménard, Liquidation des régimes patrimoniaux : La prescription des créances dans le couple : AJF 2015, 461. – C. Albiges, Indivision : Rép. dr. civ. Dalloz, 2011, no 99.
94) E. Muller, Du renouveau dans le recouvrement des créances patrimoniales : Defrénois 3 févr. 2022, no 5, DEF205j3.
95) F. Chénedé, La gestion d’affaires intéressée : la réforme du droit des quasi-contrats au secours des concubins ? : D. 2017, p. 71.
96) F. Chénedé, Les commutations en droit privé : contribution à la théorie générale des obligations, thèse, Economica, 2008.
97) Cass. 1re civ., 12 mai 2004, no 01-03.909 : Bull. civ. 2004, I, no 131 ; D. 2004, 2928, obs. E. Lamazerolles ; Rev. sociétés 2005, 131, note F.-X. Lucas ; RTD civ. 2004, 487, obs. J. Hauser ; RTD com. 2004, 743, obs. C. Champaud et D. Danet.
98) Cass. com., 20 janv. 2010, no 08-13.200 : Bull. civ. 2010, IV, no 11 ; D. 2010, 323, 522, chron. N. Auroy, 718, chron. F. Chénedé, 2797, obs. E. Lamazerolles ; ibid. 2011, 1040, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau ; AJF 2010, 132, obs. S. Milleville ; Rev. sociétés 2010, 430, note B. Dondero ; RTD civ. 2010, 306, obs. J. Hauser ; RTD com. 2010, 355, obs. C. Champaud et D. Danet. V. déjà Cass. com., 23 juin 2004, nos 01-10.106 et 01-14.275 : Bull. civ. 2004, IV, nos 134 et 135 ; D. 2004, 2969, obs. D. Vigneau ; Justice et cassation 2005, 352, rapp. B. Petit ; AJDI 2004, 659 ; AJF 2004, 324, obs. F. Bicheron ; Rev. sociétés 2005, 131, note F.-X. Lucas ; RTD civ. 2004, 487, obs. J. Hauser ; RTD com. 2004, 740, obs. C. Champaud et D. Danet.
99) F. Chénedé, Les commutations en droit privé : contribution à la théorie générale des obligations, op. cit.
100) F. Chénédé, Pour un affinement de la théorie des quasi-contrats au service de la liquidation patrimoniale du concubinage. À propos de trois arrêts de la première chambre civile du 20 janv. 2010 : D. 2010, p. 718.
101) Cass. 1re civ., 24 sept. 2008, no 06-11.294 : Bull. civ. 2008, I, nos 211 et 212 ; D. 2009, p. 140, note J.-J. Lemouland ; RTD civ. 2008, p. 660, obs. J. Hauser ; Defrénois 2008, p. 2516, obs. E. Savaux ; ibid. 2009, p. 545, obs. J. Massip ; RJPF déc. 2008, p. 19, obs. F. Vauvillé ; AJF 2008, p. 431. – Cass. 1re civ., 11 mars 2014 : RJPF mai 2014, obs. V. Égéa.
102) L. no 2008-561, 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile, art. 26. – C. civ., art. 2222.
103) C. civ., art. 2230, causes énumérées aux articles 2234 à 2239 du Code civil.
104) C. civ., art. 2231, causes énumérées aux articles 2240 à 2244 et 2271 du Code civil.
105) F. Chénedé, La gestion d’affaires intéressée : la réforme du droit des quasi-contrats au secours des concubins ?, op. cit.
106) V. CA Paris, 14 oct. 1997 : Dr. famille 1998, no 19, note H. Lécuyer (financement de travaux d’entretien et d’investissement sur un immeuble appartenant à son concubin). Sur le recours à la gestion d’affaires, V. H. Lécuyer, La théorie générale des obligations dans le droit patrimonial de la famille, thèse, Paris II, 1993, nos 48 et s.
107) Dr. famille 11/2020, comm. 143, S. Ben Hadj Yahia.
108) Cass. 1re civ., 19 mars 1991, no 88-19.400 : JurisData no 1991-000872 ; Bull. civ. 1991, I, no 92 ; RTD civ. 1991, p. 507, note J. Hauser. – Cass. 1re civ., 19 déc. 2018, no 18-12.311 : JurisData no 2018-023841 ; Dr. famille 2019, comm. 40, S. Ben Hadj Yahia.
109) Cass. 1re civ., 13 janv. 2016, no 14-29.746.
110) Cass. 1re civ., 7 févr. 2018, no 17-13.979 : « il existait une volonté commune de partager les dépenses de la vie courante, de sorte que M. X… devait conserver la charge des échéances du prêt immobilier, sans qu’il y ait lieu à l’établissement de comptes entre les concubins sur ce point ».
111) Cass. 1re civ., 2 sept. 2020, no 19-10.477, F-P+B : JurisData no 2020-012469 ; Dr. famille 11 2020, comm. 143, S. Ben Hadj Yahia ; Gaz. Pal. 24 nov. 2020, no 391d8, p. 61, note J. Laurent ; JCP G 2020, doctr. 1233, obs. H. Périnet-Marquet ; D. 2020, p. 2444, note F. Hartman ; Dalloz actualité, 21 sept. 2020, obs. M. Jaoul ; Dr. famille 2020, comm. 9, obs. L. Mauger-Vielpeau ; LEFP oct. 2020, no 0111c0, note L. Mauger-Vielpeau ; LEDIU nov. 2020, no 113s8, p. 2, obs. F. Rouvière ; JCP N 2020, act. 755, obs. F. Gasnier ; AJF 2020, p. 531, obs. M. Saulier ; RD imm. 2020, p. 591, obs. L. Tranchant ; Defrénois 3 déc. 2020, no 166k0, p. 36, obs. I. Dauriac.
112) Dr. famille 11/2020, comm. 143, S. Ben Hadj Yahia.
113) F. Chénedé, La gestion d’affaires intéressée : la réforme du droit des quasi-contrats au secours des concubins ?, op. cit.
114) C. civ., art. 1303-1 et 1303-2.
115) Cass. 1re civ., 24 sept. 2008, no 07-11.928. – Cass. 1re civ., 20 janv. 2010, no 08-13.400 : D. 2010, 325, 718, chron. F. Chénedé ; ibid. 2011, 1040, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau ; AJF 2010, 132. – Cass. 1re civ., 10 juill. 2014, no 13-21.382 : D. 2015, 1408, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau. – Cass. 1re civ., 5 mars 2015, no 13-26.549. – Cass. 1re civ., 18 mars 2015, no 14-11.039.
116) Cass. 1re civ., 20 janv. 2010, no 08-13.400 : Bull. civ. 2010, I, no 14 ; D. 2010, 325, 718, chron. F. Chénedé ; ibid. 2011, 1040, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau ; AJF 2010, 132 ; RTD civ. 2010, 306, obs. J. Hauser.
117) Cass. 1re civ., 18 mars 2015, no 14-11.039.
118) « On retrouve la figure classique de l’obligation naturelle, définie au nouvel article 1100 du Code civil comme un « devoir de conscience envers autrui » : le concubin n’a pas l’obligation de contribuer aux charges de la vie commune, mais, s’il s’en acquitte spontanément, il ne pourra en solliciter le remboursement » (F. Chénedé, La gestion d’affaires intéressée : la réforme du droit des quasi-contrats au secours des concubins ?, op. cit.).
119) Cass. 1re civ., 10 févr. 2016, no 15-10.150.
120) C. civ., art. 1303, issu de l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 : « Celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement ».
121) Cass. 1re civ., 3 mars 2021, no 19-19.000, FS-P.
122) Cass. 3e civ., 18 mai 1982, no 80-10.299 : Bull. civ. 1982, III, no 122. – Cass. 1re civ., 24 sept. 2014, no 13-23.913.
123) Cass. 1re civ., 3 mars 2021, no 19-19.000, FS-P.
124) F. Chénedé, La gestion d’affaires intéressée : la réforme du droit des quasi-contrats au secours des concubins ?, op. cit. Étant ici précisé que cette règle est suggérée par l’avant-projet Catala (art. 1329).
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