CGV – CGU

PARTIE II – Rapprocher les opérateurs publics et privés

Titre 1 – Favoriser les partenariats

10135 – La production de logements a longtemps été répartie en deux grandes familles d’opérations, cloisonnées entre elles : – celles destinées à la production de logements aidés, réalisées sous maîtrise d’ouvrage des organismes de logements sociaux (OLS) et intermédiaires (OLI) dans le cadre des règles de la commande publique, en ce compris la maîtrise d’ouvrage publique ; et celles sous maîtrise d’ouvrage privée destinées essentiellement aux logements libres.
10136 Il faut cependant bien admettre que les ambitions de production de logements sociaux et intermédiaires, portées notamment par le législateur et traduits dans les documents d’urbanisme, ne seront jamais satisfaites par les seules opérations sous maîtrise d’ouvrage publique des OLS et OLI, malgré les outils de maîtrise foncière dont ils disposent. L’appui du secteur privé est nécessaire pour répondre aux enjeux du logement social et intermédiaire. Parallèlement, la nécessaire mixité sociale, imposée notamment au travers des servitudes de mixité sociale et d’usage des opérations, rend indispensable la coopération et l’association des opérateurs privés et des OLS/I. Tout cela provoque nécessairement une offre de logements sociaux et intermédiaires à construire par les opérateurs privés et explique qu’une importante partie des logements produits pour le compte des OLS/I soit aujourd’hui réalisée par la conclusion de ventes d’immeubles à construire (ci-après « VIC », intégrant les ventes en l’état futur d’achèvement (Vefa) et les ventes à terme (VAT) auprès de promoteurs privés)363.
10137 Malgré sa réalité, le recours à la VIC est fréquemment critiqué, par opposition à la maîtrise d’ouvrage directe. En effet, de nombreux OLS/I souhaitent préserver leurs compétences de maîtrise d’ouvrage afin que les logements produits répondent le plus possible à leurs besoins de gestionnaire de parc locatif. En effet, « le développement de la Vefa est (…) présenté comme un élément constitutif de la dégradation de la qualité des logements. En y ayant recours, le bailleur aurait tendance à perdre la main sur le sujet de la qualité alors qu’en tant que maître d’ouvrage il en est seul responsable »364. Le rapport Girometti déjà cité sur la qualité des logements sociaux constate que la pratique des VIC « a pu avoir des effets utiles en terme quantitatifs sur le court terme notamment dans les zones d’aménagement. Mais elle soulève trois difficultés majeures faute d’encadrement : d’abord elle constitue une forme de détournement du droit de la commande publique contestable. Elle est, en effet, de moins en moins le fait d’un ‘’achat d’opportunité’’ pour être de plus en plus l’expression d’un ‘’achat de commande’’, alors même que le foncier support n’est pas encore complètement maîtrisé. Ensuite elle fait primer la logique économique et financière de l’investisseur privé, légitimement soucieux de son taux de marge et de profit à l’occasion de la transaction sur une logique d’intérêt général de long terme qui impose la prise en compte des charges d’exploitation sur plusieurs décennies. Enfin elle ne peut par elle-même répondre aux problématiques de cohésion des territoires notamment en secteur diffus »365. Conserver une maîtrise d’ouvrage directe c’est également se donner les moyens de bien acheter en VIC ; pour ce faire, il faut disposer de compétence interne sur la production directe366. Plus encore, la préservation de la maîtrise d’ouvrage des OLS/I est indispensable pour maintenir leur rôle contracyclique : les OLS/I doivent pouvoir continuer à produire du logement social et intermédiaire, même lorsque le secteur privé ralentit. Le maintien d’une maîtrise d’ouvrage directe apparaît à cet égard d’intérêt général.
Dans ce contexte, il ne s’agit donc pas de prôner une augmentation des partenariats dans lesquels les opérateurs privés assumeraient l’ensemble de la maîtrise d’ouvrage. Il s’agit tout simplement de tenir compte d’une réalité opérationnelle, rendant dans de nombreux cas nécessaires les partenariats entre OLS/I et promoteurs privés. Les juristes sont alors appelés à définir le meilleur montage, permettant de sécuriser dans ces hypothèses le rapprochement de ces acteurs, et favorisant un partenariat équilibré de nature à répondre aux objectifs d’intérêt général liés à la production de logements (prix des logements, qualité architecturale et environnementale). Cela peut se traduire tant dans un cadre contractuel (Sous-titre I) qu’institutionnel (Sous-titre II).

363) La part de la Vefa dans la production de logements sociaux a considérablement augmenté ces dix dernières années, passant de 1 % en 2007 à 39 %, voire 63 % en zone A, en 2017 : V. « La part croissante de la vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) dans la production de logements sociaux », conjoncture 67, Groupe Caisse des dépôts, mai 2017. En 2019, c’est 54 % des logements sociaux qui ont été construits en Vefa (Batiweb, www.batiweb.com/actualites/immobilier/le-logement-social-et-la-vefa-deux-leviers-pour-lutter-contre-la-crise-37526).
364) Cf. Rapport de la mission sur la qualité du logement, référentiel du logement de qualité, L. Girometti et F. Leclercq, sept. 2021, préc., p. 26.
365) Ibid. p. 27.
366) Dans ce sens, « Oui, mais… » à la Vefa HLM, avis no 5 du Conseil social de l’Union sociale pour l’habitat, juill. 2020. 
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