CGV – CGU

PARTIE I – Définir les objectifs
Titre 1 – Organiser la production du logement
Sous-titre 2 – La planification au niveau local

Chapitre III – Faciliter la réalisation des projets de logement : la procédure intégrée pour le logement76

10029 La loi no 2013-569 du 1er juillet 2013 habilitait le gouvernement à adopter des mesures législatives pour accélérer les projets de constructions de logements. Plusieurs ordonnances ont été adoptées dans ce cadre ( notamment pour l’accélération des délais de traitement du contentieux des permis77, ou encore pour permettre des dérogations aux règles des documents d’urbanisme pour favoriser les projets favorisant la densification de l’habitat78 ), dont l’ordonnance no 2013-888 du 3 octobre 2013 relative à la procédure intégrée pour le logement, entrée en vigueur le 1er janvier 2014. Cette procédure est régie par l’article L. 300-6-1 du Code de l’urbanisme et les articles R. 300-15 et suivants du même code, issus du décret no 2015-218 du 25 février 2015 relatif à la procédure intégrée pour le logement.
Selon le communiqué de presse du conseil des ministre du 2 octobre 2013, « cette procédure dédiée a pour objectif de rationaliser et raccourcir les démarches qui doivent être menées par les porteurs de projets et qui sont liées tant à la complexité des législations (environnement, patrimoine, urbanisme) qu’à la pluralité des acteurs et des autorités compétentes. Il arrive en effet que des maîtres d’ouvrages renoncent à des projets complexes compte tenu des obstacles juridiques qu’ils rencontrent, tenant à la nécessité d’évolutions successives des documents d’urbanisme et des schémas de rang supérieur, et surtout, des délais induits par des procédures menées les unes après les autres. La procédure intégrée pour le logement permettra donc de faciliter la réalisation des projets d’aménagement ou de construction comportant principalement des logements, pourvu qu’ils soient qualifiés d’intérêt général, en permettant, en une procédure unique, de mettre en compatibilité les documents d’urbanisme et d’adapter des normes supérieures. Cette procédure aura pour conséquence de diviser jusqu’à deux les délais nécessaires à la réalisation de projets de construction de logements en simplifiant et fusionnant les différentes étapes des procédures applicables, sans remettre en cause leur qualité. Au contraire, en menant les évaluations environnementales et études d’impact requises en amont de la procédure, les recommandations seront mieux prises en compte. »
Cette procédure complète la mise en compatibilité à l’issue d’un délai d’un an, pour permettre la réalisation d’un ou plusieurs programmes de logements prévus dans un secteur de la commune par le PLH79.

Section I – Les projets concernés

10030 Qu’il s’agisse de projets portés par un maître d’ouvrage public ou privé, ce dispositif a vocation à permettre au sein d’une même procédure :

de mettre en compatibilité les différents documents d’urbanisme applicables avec le projet80 ;

d’adapter d’autres règles applicables au projet (V. infra) ;

de permettre, si le projet est suffisamment avancé, de regrouper l’instruction et la délivrance de toutes les autorisations administratives nécessaires à la réalisation du projet, qu’il s’agisse des autorisations d’urbanisme, mais également des autorisations prévues au titre d’autres législations.

10031 Plus précisément, l’article L. 300-6-1 du Code de l’urbanisme dispose que : « Lorsque la réalisation dans une unité urbaine d’une opération d’aménagement ou d’une construction comportant principalement des logements et présentant un caractère d’intérêt général nécessite la mise en compatibilité du schéma directeur de la région d’Île-de-France, du plan d’aménagement et de développement durable de Corse, d’un schéma d’aménagement régional, d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme ou d’un document en tenant lieu, cette mise en compatibilité peut être réalisée dans le cadre de la procédure intégrée pour le logement définie au présent article. L’opération d’aménagement ou la construction bénéficiant de la procédure intégrée pour le logement doit concourir, à l’échelle de la commune, à la mixité sociale dans l’habitat dans le respect de la diversité des fonctions urbaines, conformément aux dispositions du 3° de l’article L. 101-2. Elle peut relever d’un maître d’ouvrage public ou privé. Les unités urbaines sont celles mentionnées au III de l’article L. 5210-1-1 du Code général des collectivités territoriales ».
10032 On voit donc que ce dispositif est réservé aux projets qui réunissent les conditions cumulatives suivantes :

situés au sein d’une unité urbaine81 ;

comportant principalement des logements (une mixité programmatique avec de l’activité demeure possible) ;

présentant un caractère d’intérêt général ;

concourant, à l’échelle de la commune, à la mixité sociale dans l’habitat.

On ressent tout de suite la filiation avec la déclaration de projet (art. L. 300-6 du Code de l’urbanisme), dont l’objet est la mise en compatibilité accélérée des documents d’urbanisme pour permettre la réalisation d’actions ou d’opérations d’aménagement d’intérêt général. La PIL dispose cependant d’avantages comparatifs indéniables :
Quelle que soit la personne publique qui décide d’engager une PIL, le Code de l’urbanisme n’interdit pas, à l’occasion de la mise en compatibilité du document d’urbanisme, de porter atteinte au PADD du SCoT ou du PLU (ce qui n’est possible pour une déclaration de projet que si elle est mise en œuvre par la collectivité compétente en matière de PLU),
La PIL offre par ailleurs la possibilité de réaliser en parallèle – donc dans des délais raccourcis – la mise en compatibilité d’un ou plusieurs documents d’urbanisme ainsi que l’adaptation d’autres plans/programmes de rang supérieur rendues nécessaires par ces mises en compatibilité82. Comme le relève Nathalie Coulaud, « La PIL peut même déclencher la modification d’un plan de prévention des risques, comme à Cahors (19 400 hab.) dans le quartier de la Croix de fer. Ce quartier d’habitat social est situé en zone d’aléa fort, ce qui empêche tout projet de démolition-reconstruction. »83
La PIL permet aussi l’adaptation de différentes normes de rang supérieur84, là où la déclaration de projet rend possible cette adaptation que si elle est adoptée par l’État et sur un nombre de documents d’urbanisme ou de plans/programmes et servitudes d’utilité publique plus limité. Ces adaptations rendues possibles avec la PIL doivent cependant rester exceptionnelles, être justifiées pour permettre la mise en compatibilité du document d’urbanisme en cause, et doivent nécessairement être proposées par l’État.
La comparaison avec la déclaration de projet demeure possible, notamment d’un point de vue des procédures de mise en œuvre de la PIL puisqu’il est renvoyé aux dispositions des articles L. 153-54 à L. 153-59 du Code de l’urbanisme pour fixer les modalités de la mise en compatibilité du PLU.

Section II – Une simplification administrative porteuse d’un partenariat entre les acteurs de la PIL

10033 L’ambition partenariale de la PIL transparait dans la présentation qui en est faite par la fiche produite en janvier 2017 par la DHUP : « Si la PIL ne crée aucune nouvelle contrainte juridique, tant pour les collectivités territoriales que pour les porteurs de projet, mais constitue un outil au service de la production de logements, elle implique un effort de mobilisation et d’organisation des administrations publiques qui doivent en amont se coordonner et apprécier les différentes dimensions du projet pour assurer la mise en œuvre d’une procédure unique, dans des délais resserrés. Il s’agit donc de contribuer à l’émergence d’espaces de négociation entre la règle et le projet ».
Un rôle central est conféré à l’autorité qui engage la PIL. C’est ici que la logique partenariale se développe.
D’abord, comme le note la DHUP, parce qu’« Il est important de souligner que la PIL implique un travail important en amont de négociation et de portage du projet par le maitre d’ouvrage auprès de la commune ou de l’EPCI compétent en matière de PLU ainsi que de l’État dans le cas où la PIL envisagée procède à l’adaptation d’un document de rang supérieur » (fiche précitée).
Ensuite, parce que coopération accélérée entre les administrations compétentes se traduit dans une réunion d’examen conjointe autour de l’autorité qui initie la PIL. En effet, la mise en compatibilité du PLU dans le cadre d’une PIL ne nécessite pas une consultation spécifique des administrations associées. Une simple réunion d’examen conjoint est prévue par le Code de l’urbanisme (art. L. 153-54, 2°). En cas de PIL adaptant un ou des documents de rang supérieur, doivent être conviés les autorités ou services compétents pour élaborer ces documents. En outre, si l’adaptation porte sur un schéma régional de cohérence écologique, l’article L. 300- 6-1 du Code de l’urbanisme précise que le comité régional de la biodiversité (ancien comité régional trames verte et bleue) est obligatoirement convié à la réunion d’examen conjoint.
Concrètement, s’agissant de l’autorité qui prend l’initiative de la PIL, le II de l’article L. 300-6-1 du Code de l’urbanisme prévoit que la procédure est « décidée soit par l’État ou ses établissements publics, soit par les collectivités territoriales ou leurs groupements compétents pour élaborer les documents d’urbanisme à mettre en compatibilité ou compétents pour autoriser ou réaliser l’opération d’aménagement ou de construction ».
L’article R. 300-15 du Code de l’urbanisme précise quelle autorité mène la PIL (organisation de la réunion d’examen conjoint et saisine de l’autorité environnementale pour avis) :
« Sous réserve des dispositions particulières prévues aux sous-sections 2 à 5 de la présente section, la procédure de mise en compatibilité du ou des documents mentionnés au I de l’article L. 300-6-1 mise en œuvre dans le cadre de la procédure intégrée pour le logement est menée : – par le préfet lorsqu’elle est engagée par l’État ; – par l’autorité compétente en vertu des statuts de l’établissement ou, dans le silence de ceux-ci, par l’organe délibérant, lorsqu’elle est engagée par un établissement public de l’État ; – par le président de l’organe délibérant, lorsqu’elle est engagée par une collectivité territoriale ou par un groupement de collectivités territoriales ; – par le président du conseil exécutif, lorsqu’elle est engagée par la collectivité territoriale de Corse ».
Parmi les autres outils d’accélération, on retient que :
(i) Il est prévu qu’une seule enquête publique portant à la fois sur les projets de mise en compatibilité et d’adaptations d’autres règles soit réalisée (v. la fiche de la DHUP pour plus de précisions sur les modalités de l’enquête publique). L’enquête publique dure un mois et le rapport du commissaire-enquêteur est rendu dans le délai d’un mois supplémentaire.
(ii) Il possible de constituer un dossier unique contenant l’étude d’impact du projet de construction et l’évaluation environnementale des dispositions de mise en compatibilité du document d’urbanisme (ainsi que, le cas échéant, des adaptations d’un document de rang supérieur). Une autorité environnementale unique compétente en application de l’article R. 122-6 du Code de l’environnement pour se prononcer sur l’étude d’impact du projet est saisie pour avis par la personne publique chargée de mener la PIL (C. urb., art. R. 300-15) et dispose d’un délai de trois mois pour rendre son avis (C. urb., art. R. 300-17, III).
(iii) Enfin, une mesure facultative visant à accélérer la délivrance du permis de construire ou du permis d’aménager est prévue à l’article R. 300-16 du Code de l’urbanisme : l’autorité qui engage la PIL peut transmettre, dès l’engagement de la procédure, sous réserve que le projet soit suffisamment précis, les pièces nécessaires à l’instruction et à la délivrance des autorisations requises en matière d’urbanisme pour permettre la réalisation du projet faisant l’objet de la PIL. Cette disposition a vocation à être utilisée lorsque l’autorité qui engage la PIL dispose en amont de l’ensemble des pièces du permis (V. fiche no 7 jointe à l’instruction ministérielle du 18 mars 2015) afin d’instruire en temps masqué l’autorisation d’urbanisme et d’accélérer sa délivrance à l’issue de la PIL.
On peut cependant regretter que la PIL ne soit pas suffisamment utilisée, peut-être par méconnaissance85, alors qu’elle permet de lever certains obstacles et de réaliser des opérations qui sans elle n’auraient pu voir le jour.
10034

76) Ordonnance no 2013-888 du 3 octobre 2013 relative à la procédure intégrée pour le logement ; Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance no 2013-888 du 3 octobre 2013 relative à la procédure intégrée pour le logement ; la procédure intégrée pour le logement, nouvelle procédure de modification rapide des normes d’urbanisme, Jean-François Joye dans Droit de l’aménagement, de l’urbanisme et de l’habitat 2014 (2014), p. 81 à 89 ; « Une PIL qui ne s’use que si l’on s’en sert : modalités de mise en œuvre de la procédure intégrée pour le logement », commentaire L. Santoni, Constr.-Urb. no 5, mai 2015, comm. 68. ; Brochure sur la PIL éditée par le ministère : http://outil2amenagement.cerema.fr/IMG/pdf/pil_brochure_web_cle1177b2.pdf
77) Ord. no 2013-638,18 juill. 2013 relative au contentieux de l’urbanisme.
78) Ord. no 2013-889, 3 oct. 2013 relative au développement de la construction de logement.
79) C. urb., art. L. 134-4, 4° sur l’obligation de compatibilité entre les PLU et les PLH ; sur la procédure de mise en compatibilité : V. C. urb., art. L. 153-49 à L. 153-59 et R. 153-13 à R. 153-17.
80) Notons que la mise en compatibilité des documents d’urbanisme dans le cadre de la PIL implique la mise en œuvre d’une concertation préalable du Code de l’environnement ainsi qu’une évaluation environnementale.

Les documents pouvant être mis en compatibilité sont les suivants : schéma directeur de la région d’Île-de-France ; plan d’aménagement et de développement durable de Corse ; schéma d’aménagement régional ; schéma de cohérence territoriale ; plan local d’urbanisme ou document en tenant lieu.
81) Les unités urbaines sont définies à l’article L. 5210-1-1, III du CGCT, lequel renvoie à la définition donnée par l’Institut national de la statistique et des études économiques.
82) Les documents pouvant être mis en compatibilité sont les suivants : schéma directeur de la région d’Île-de-France ; plan d’aménagement et de développement durable de Corse ; schéma d’aménagement régional ; schéma de cohérence territoriale ; plan local d’urbanisme ou document en tenant lieu.
83) N. Coulaud, « La procédure intégrée pour le logement peut donner un coup d’accélérateur à la construction », Gazette des communes, 17 avr. 2019.
84) Les documents pouvant être adaptés sont les suivants : directive territoriale d’aménagement ; schéma directeur d’aménagement et de gestion de eaux ; schéma d’aménagement et de gestion des eaux ; zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ; aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ; plan de prévention des risques naturels prévisibles ; plan de prévention des risques miniers ; schéma régional de cohérence écologique ; plan climat-énergie territorial ; plan de déplacements urbains ; programme local de l’habitat.
85) Cf. propos d’Alexandra Coquillère, de l’IAURIF, rapportés par Nathalie Coulaud, op. cit.
86) V. toute la documentation à cette adresse : www.paris.fr/pages/la-revision-du-plan-local-d-urbanisme-plu-17018
Aller au contenu principal