Régime juridique et fonctionnement du projet urbain partenarial

Régime juridique et fonctionnement du projet urbain partenarial

– Projet urbain partenarial : un contrat administratif d'initiative privée ? – Le projet urbain partenarial (PUP) est un contrat administratif dont le régime est codifié à l'article L. 332-11-3 du Code de l'urbanisme. Il était initialement conçu comme un contrat à l'initiative d'un opérateur ou propriétaire privé qui entendait « librement » négocier avec la personne publique la réalisation d'équipements publics nécessaires à l'opération d'aménagement ou de construction.
La loi no 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a ajouté à ce « PUP unique » un deuxième type de PUP, le « PUP de secteur », d'initiative publique et dont l'esprit se rapproche du programme d'aménagement d'ensemble (PAE). À la différence du PUP unique, qui est théoriquement d'initiative privée, le PUP de secteur constitue un véritable contrat d'adhésion utilisé, après création d'une « zone de PUP », pour assurer le financement et les besoins en équipements publics de plusieurs opérations successives.
– Objet de la convention : le financement des équipements autres que les équipements propres à l'opération. – L'article L. 332-11-3 du Code de l'urbanisme limite l'objet de la convention aux équipements autres que les travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, du terrain aménagé ou du lotissement en renvoyant à l'article L. 332-15 du Code de l'urbanisme. De façon plus prosaïque, le PUP doit nécessairement avoir pour objet le financement de travaux rendus nécessaires par le projet mais non indispensables à la réalisation de son projet par le maître d'ouvrage. La notion d'équipements propres à l'opération peut dans certains cas poser difficulté lorsque le projet est compris dans le périmètre d'une orientation d'aménagement et de programmation (OAP). La situation à laquelle nous pensons est celle d'une voirie interne au projet qui serait à la fois comprise dans l'assiette de l'autorisation et incluse dans une OAP prévoyant son utilité pour la desserte d'un équipement public voire d'une autre opération privée. Cette voirie (et/ou réseaux) doit-elle être dimensionnée pour assurer sa fonction à l'échelle de l'OAP ou bien, s'agissant d'une voirie interne, constitue-t-elle un équipement propre exclu du financement PUP ?
Dans une telle circonstance, l'alternative est la suivante :
Ou bien l'opération voisine est destinée à accueillir une opération privée, et la répartition de la charge est exclue du PUP et relève de la sphère contractuelle privée entre les opérateurs concernés alors même que la voirie et ses réseaux pourraient à terme faire l'objet d'une rétrocession à la collectivité compétente (commune ou EPCI en cas d'intérêt communautaire).
Ou bien l'opération voisine est destinée à un équipement public. Dans ce cas, il apparaît assez clairement que la voirie interne à l'opération a vocation à intégrer le domaine public. Le PUP se limitant à une contribution financière exclusive de la réalisation de travaux pour le compte de la personne publique, il n'est pas envisageable de prévoir une cession de la voirie avant réalisation des travaux par l'opérateur privé. À l'inverse, la réalisation des travaux par la personne publique semble à la fois contraire à l'esprit de l'article L. 332-15 du Code de l'urbanisme et (à supposer que cela puisse être envisagé) incompatible en termes de temporalité avec la réalisation des travaux incombant au porteur de projet dans le cadre de son obligation de délivrance conforme de son programme immobilier.
La solution nous semble être dictée par une cession programmée de la voirie et des réseaux par le porteur de projet. Cette cession sera envisagée dans le cadre d'un permis de construire valant division dont le régime autorise expressément la cession des équipements et voiries à la collectivité (V. infra, nos et s.), cette cession n'étant pas exclusive d'une contrepartie financière.
– Projet urbain partenarial : un contrat exonérant l'opérateur de la part communale de la taxe d'aménagement (TA). – S'agissant d'un mode de financement des équipements publics, le PUP emporte exonération de la part communale de la taxe d'aménagement pendant une durée fixée par le contrat et ne pouvant excéder dix ans pour le « PUP unique » et quinze ans pour le « PUP de secteur ». S'agissant toutefois des « PUP de secteur » institués dans le cadre des grandes opérations d'urbanisme (GOU), leur durée peut être supérieure.
En application du principe de non-cumul des taxes et participations d'urbanisme sur un même équipement il peut en outre emporter exonération de la participation pour le financement de l'assainissement collectif (PFAC) si le PUP prévoit la contribution du maître d'ouvrage au financement d'installations collectives d'évacuation ou d'épuration pour un montant supérieur au maximum légal prévu par l'article L. 1331-7 du Code de la santé publique.
Enfin, la loi ne prévoit pas que la participation PUP doive être au moins égale à la taxe d'aménagement. En effet, au moment de la négociation, les détails de l'opération ne sont pas tous connus et la taxe d'aménagement ne peut donc être calculée. Cependant, outre l'avantage du préfinancement procuré par le PUP, il semble difficilement imaginable d'envisager une participation inférieure à la taxe d'aménagement.

Les taxes et participations d'urbanisme à l'épreuve de la technique contractuelle

Le praticien se trouve régulièrement confronté à la notion « d'économie de l'opération » que doit assurer le porteur d'un projet, bénéficiaire d'une promesse de vente. De façon assez laconique, et donc maladroite, le notaire instrumentaire de la promesse pense traduire la problématique soulevée par son client en prévoyant une condition dont le dénouement peut être source de contentieux ou au mieux de contestation.

<strong>La clause usuellement pratiquée est libellée en ces termes :</strong> « Les présentes sont soumises à la condition suspensive de l'absence de taxes ou participations d'urbanisme autre que la Taxe d'Aménagement (TA) et la Redevance d'Archéologie Préventive (RAP) susceptibles de remettre en cause l'économie générale de l'opération » <strong>ou ceux-ci :</strong> « Les présentes sont soumises à la condition suspensive d'absence de PUP ou de Majoration de la Taxe d'Aménagement »

Ainsi rédigée, une telle condition appelle les observations suivantes :

Nous suggérons donc de substituer à cette rédaction la rédaction suivante :

« L'attention du vendeur est attirée sur la circonstance que le prix convenu a été fixé en fonction de la fiscalité d'urbanisme applicable et connue à ce jour, savoir (<strong>Option 1 : TA de droit commun / Option 2 TA majorée au taux de… % / Option 3 : PUP</strong>) ».

<strong><em>Options 1 ou 2</em></strong>
<em> : </em>Les présentes sont consenties sous la condition suspensive de non-modification du taux de Taxe d'Aménagement avant la réalisation de la vente. À cet égard le BÉNÉFICIAIRE s'oblige à déposer préalablement un certificat d'urbanisme permettant de garantir le maintien du taux de Taxe d'Aménagement connu à ce jour.

<strong><em>Option 3 ou Option 3 bis</em></strong>
<em> (PUP unique) : </em>Ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, le Projet envisagé suppose la prise en charge par le BÉNÉFICIAIRE du coût de certains équipements publics dont le financement est susceptible d'être assuré par la négociation d'un Projet Urbain Partenarial (le cas échéant : le terrain étant situé dans un périmètre de PUP de secteur ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus).

L'institution d'un PUP emporte exonération de la part communale de la Taxe d'Aménagement laquelle est estimée à ce jour à la somme de …… en fonction du Projet. Le PUP ne peut avoir pour objet de négocier une participation pour un montant inférieur à la Taxe d'Aménagement. D'un commun accord entre les Parties, il est ainsi convenu que dans l'hypothèse où la participation d'urbanisme envisagée par la collectivité dans le cadre de la négociation du PUP excéderait de …… % la part communale de la Taxe d'Aménagement, les présentes seront réputées caduques UN MOIS après la tenue de la réunion visée à la Clause de rencontre ci-après. (<strong>Et prévoir une clause de rencontre ainsi que l'effet du non-accomplissement d'une condition suspensive sur la validité et l'existence même du contrat [dérogation conventionnelle aux articles 1304-4 et 1304-6, dernier alinéa, du Code civil]</strong>).

– Projet urbain partenarial : un contrat réservé à certaines zones et exclusif de tout droit à construire. – À la différence du programme d'aménagement d'ensemble (PAE), le PUP ne peut trouver application que dans les zones U et AU des PLU ainsi que dans les plans de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) des sites patrimoniaux remarquables. S'agissant de la contractualisation d'une participation financière, il n'a ni pour objet ni pour effet d'accorder des droits à construire en contrepartie de sa conclusion. Bien que participant d'une contractualisation, il ne saurait constituer une quelconque entorse aux principes développés supra.
C'est certainement l'une des principales sources d'incompréhension de son fonctionnement. Comme le relève Neyla Gonzalez-Gharbi : « Dans l'esprit de ses promoteurs, le PUP devait concrétiser un partenariat entre la collectivité et le « porteur de projet » en vue de la définition commune des aménagements et constructions et des équipements publics nécessaires à leur réalisation. (…) Mais la loi n'a pas établi de manière très claire les rapports entre la signature de la convention de PUP, support matériel de la participation d'urbanisme, et l'autorisation de construire ou d'aménager, d'autant qu'elle a offert la possibilité de signer la convention aux propriétaires fonciers pris en cette seule qualité ».
– Remise en nature de terrains ou ouvrages. – Alors que le paiement de la participation ne peut être converti en une obligation de faire, en l'occurrence la réalisation de travaux pour le compte de la personne publique, la remise en nature de biens bâtis ou non bâtis est expressément prévue par le dernier alinéa de l'article L. 332-11-3 du Code de l'urbanisme. Dans l'hypothèse d'un bien bâti, il est bien entendu indispensable que le bâtiment existe. Tout engagement de réaliser la construction d'un bâtiment en exécution du contrat de PUP viendrait en contravention avec les règles de la maîtrise d'ouvrage publique.
Rappelons qu'avant sa censure par la décision no 2010-33 QPC du Conseil constitutionnel du 23 septembre 2010 pour incompétence négative du législateur, l'article L. 332-6-1 du Code de l'urbanisme autorisait pour l'élargissement des voies publiques la cession d'une partie du terrain d'assiette (au maximum 10 %). Cette participation d'urbanisme « en nature » a été supprimée lors de la réforme de la fiscalité de l'urbanisme, et les tentatives de la ressusciter sont restées vaines. En revanche il pourrait paraître singulier, comme le relevaient les commentateurs au sujet de cette cession, que le porteur du projet, titulaire d'une promesse, puisse convenir d'une telle exécution portant sur un terrain qui ne lui appartient pas encore.
C'est vraisemblablement pour cette raison qu'a dû être exclue du negotium l'instruction de l'autorisation d'urbanisme, tout comme est affirmée la stricte indépendance entre les deux instrumentum que constituent la convention de participation et l'autorisation d'urbanisme.
– Projet urbain partenarial : les règles applicables à la détermination de la participation, de son montant et de son exigibilité. – Le montant de la participation due par le contractant est fixé par la convention. Il doit correspondre au financement d'équipements publics rendus indispensables ou bien en cours de réalisation ou bien à réaliser. En aucun cas (excepté les PUP de secteur qui se rapprochent de la participation ZAC à ce titre) le PUP ne peut avoir pour objet le refinancement d'équipements déjà réalisés. En effet la réalisation d'équipements publics relevant de leur compétence est une obligation des collectivités pour répondre aux besoins de leurs administrés. En théorie, le « PUP unique » étant normalement d'initiative privée, ce n'est que dans l'hypothèse où le porteur du projet considère devoir solliciter la collectivité pour participer au financement d'un équipement non programmé que le PUP trouve toute sa légitimité. Nous pouvons toutefois nous interroger sur l'opportunisme de la personne publique qui, à l'occasion d'un projet, entend « imposer » la conclusion d'un « PUP unique » au porteur de projet. A contrario « la cohérence de l'action publique suppose que (…) le PUP soit appliqué à l'urbanisation de tout un secteur, et non à des opérations ponctuelles ». Ainsi le « PUP de secteur » est nécessairement un « PUP forcé » pour les porteurs de projet intervenant a posteriori de l'institution du PUP.
Le montant de la participation doit être proportionnel et proportionné au projet de l'opérateur. Un lien de causalité entre la réalisation de l'équipement et le projet qui supporte le PUP est indispensable. La participation ne peut excéder un ratio, librement négocié, correspondant au bénéfice relatif de l'équipement envisagé par rapport à son utilité pour l'ensemble de la collectivité. Une attention particulière doit être portée à ces principes sauf pour la commune à s'exposer à une action en répétition de l'indu de la part du porteur de projet comme de la part des acquéreurs ayant supporté indirectement dans leur coût d'acquisition l'impact de cette participation financière.
S'agissant de son exigibilité, le PUP est par nature un outil de préfinancement des équipements publics qui doit permettre à la collectivité d'entamer les travaux imposés par la réalisation d'une opération d'initiative privée. À ce titre, la convention de PUP fixe, outre son montant, l'exigibilité de la participation et ses modalités de règlement. À ce titre, une attention particulière devra être portée aux clauses de la convention, afin d'assurer son adéquation avec la réalisation effective de l'opération et son indissociabilité du permis de construire.

Cas pratique sur la nature des équipements susceptibles d'être financés dans le cadre d'un PUP (Source : Fiche CAUE – )

Un opérateur souhaite déposer un permis d'aménager pour un lotissement d'une vingtaine de lots à bâtir. La municipalité souhaite anticiper le financement des équipements publics que cette opération rend nécessaires. Prévoyant de signer un PUP, elle s'interroge sur l'éligibilité de :

<strong>Équipements propres non finançables par le PUP</strong>

Le transformateur constitue un équipement propre. Il n'a donc pas à être financé par la collectivité et ne doit pas faire l'objet d'un PUP. L'opérateur intègre dans son bilan prévisionnel la totalité de l'investissement.

L'aménagement du cheminement piéton – sous réserve de constituer un équipement propre, donc strictement dimensionné pour les besoins des futurs habitants – est réalisé sur l'emprise foncière de l'opération. Même si cette voie douce a vocation à être rétrocédée ultérieurement à la collectivité comme espace public, et même si elle fait l'objet d'une OAP, son coût est intégralement assumé par l'opération elle-même.

<strong>Équipement public sans lien direct avec l'opération sollicitée</strong>

Il paraît difficile d'établir un lien direct de causalité entre l'opération et la remise en état des sanitaires. S'ils sont dans un état dégradé qui exige une rénovation, ce n'est pas dû à l'arrivée de nouveaux élèves. Ce n'est donc pas à cette opération d'apporter une contribution d'urbanisme particulière pour le financement de ces travaux.

<strong>Équipements publics finançables par un PUP</strong>

En revanche, la création d'une salle de classe et l'aménagement de la voie, deux opérations induites par le lotissement, peuvent – si la municipalité choisit de recourir aux contributions d'urbanisme – être financées par un PUP. La municipalité veillera néanmoins à s'assurer :

Synthèse des contributions d'urbanisme depuis le 1 janvier 2015 auprès des propriétaires fonciers ou des bénéficiaires d'un permis de construire ou d'un permis d'aménager

Document
Source : Christian Gélu, consultant