Les recours collectifs

Les recours collectifs

Les associations

L'intérêt à agir des associations

– Le rôle des associations. – En droit de l'urbanisme, les associations sont très présentes dans la contestation des autorisations d'urbanisme, au point qu'il a été jugé nécessaire de limiter leur activité contentieuse sans pour autant méconnaître le rôle essentiel qu'elles peuvent avoir en matière de protection de l'environnement ou du patrimoine.
Une association, même si elle n'est ni reconnue d'utilité publique ni agréée, est en principe recevable à contester un permis de construire devant la juridiction administrative.
L'association doit être légalement constituée et avoir défini, dans ses statuts, son objet social et ses règles de fonctionnement.
Le Conseil d'État a indiqué qu'en l'absence d'une stipulation statutaire réservant à un autre organe la capacité de former une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l'organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice le groupement. Le juge administratif doit s'assurer de la réalité de l'habilitation du représentant de l'association, mais n'a pas à vérifier la régularité des conditions dans lesquelles cette habilitation a été délivrée.
L'association doit se présenter au recours en une qualité qui confère à l'intérêt qu'elle invoque un caractère urbanistique. Cette condition s'apprécie au regard de la rédaction des statuts de l'association au moins un an avant la date de l'affichage en mairie de la demande de l'autorisation d'urbanisme, à l'exclusion de leur modification ultérieure.
Le juge administratif se montre exigeant sur l'objet de l'association. Ainsi, un objet social trop vague et sans réel rapport avec l'urbanisme ne donne pas intérêt à agir. C'est le cas d'une association ayant pour objet diverses actions « et éventuellement, l'assistance de ses membres auprès de la municipalité ou de toute autre administration » qui n'est pas recevable à attaquer le permis de construire d'un supermarché. Plus largement, c'est le cas des associations qui ont un objet trop vaste sur le plan matériel.
En revanche, une association ayant pour objet la défense du cadre de vie au niveau communal justifie d'un intérêt suffisant pour attaquer tout permis de construire délivré dans la commune, à tout le moins d'une certaine importance, et cela en raison de sa vocation à surveiller l'application correcte des documents d'urbanisme locaux. L'objet doit être limité à la défense d'un site ou en tout cas d'une zone n'excédant pas une commune ou un groupe de communes. Toutefois, un arrêt récent a considéré qu'une association chargée de défendre le cadre de vie à l'échelle d'un département a bien un intérêt à agir pour contester un permis de construire autorisant la construction de plusieurs bâtiments destinés à accueillir des activités commerciales.
– Les associations agréées. – Cette solution ne s'applique pas pleinement aux associations agréées au titre de l'article L. 141-1 du Code de l'environnement qui justifient d'un intérêt à agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément.

La date d'appréciation de l'intérêt à agir des associations

– Des associations enserrées dans des délais. – La loi ENL du 13 juillet 2006, s'inspirant du rapport Pelletier déposé le 25 janvier 2005, a adopté deux mesures tendant à restreindre notablement le recours des associations.
La première concerne les associations agréées : à compter de la loi ENL, leur intérêt à agir n'est plus reconnu que contre les décisions intervenant après la date de leur agrément, en réaction à la jurisprudence du Conseil d'État qui avait reconnu l'intérêt à agir d'une association qui n'avait obtenu son agrément qu'en cours d'instance.
La seconde concerne toutes les associations : à compter de la loi ENL, une association ne sera recevable à agir que si le dépôt de ses statuts en préfecture est intervenu avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire (C. urb., art. L. 600-1-1). La loi ELAN a renforcé le dispositif en imposant un délai d'une année avant l'affichage.
L'idée est de faire obstacle à la possibilité pour des tiers, non voisins immédiats, de créer une association spécifique pour contester l'autorisation devant le juge administratif.
Le Conseil d'État a précisé qu'une modification des statuts ne pouvait être prise en compte pour reconnaître son intérêt à agir que si cette modification avait été déclarée en préfecture avant l'affichage en mairie de la demande de permis.
Des requérants ont invoqué l'incompatibilité de cette disposition limitant le droit au recours avec l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, mais l'argument a été rejeté par la cour administrative d'appel de Bordeaux. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité qui avait été dirigée contre cette disposition, jugeant qu'elle visait à limiter le risque d'insécurité juridique et qu'elle ne « portait pas d'atteinte substantielle au droit des associations d'exercer des recours ».

Les autres personnes morales spécifiques

– La jurisprudence a eu l'occasion de se prononcer sur la qualité pour agir d'autres personnes ou groupements. – Ainsi, le juge administratif a jugé :
  • avant la loi Pinel de 2014, qu'une association de commerçants n'avait, pas plus qu'un commerçant, intérêt à agir contre un permis de construire, même si elle invoquait le fait que l'autorisation commerciale avait été éludée ;
  • qu'une commune n'était pas recevable à attaquer un permis délivré pour la construction d'un parc de stationnement dans la commune voisine, mais elle a intérêt à agir contre un permis de construire, délivré au nom de l'État, dans sa commune ;
  • que l'ordre des architectes n'a pas un intérêt suffisant pour attaquer les permis de construire qui auraient été délivrés en méconnaissance de l'obligation du recours à un architecte ;
  • que le comité d'entreprise d'une entreprise voisine de la construction n'était pas recevable à agir.