La description des mesures pour éviter, réduire, compenser les impacts du projet sur l'environnement

La description des mesures pour éviter, réduire, compenser les impacts du projet sur l'environnement

– Décrire les mesures ERC. – Hormis le fait qu'elles doivent être proportionnées, le maître d'ouvrage est libre de décider des mesures à prendre pour éviter, réduire, voire compenser les impacts négatifs, lesquels découleront de l'analyse des effets du projet sur l'environnement et, depuis 2003, sur la santé.
Quelle est la valeur juridique de ces mesures proposées par le maître d'ouvrage dans son étude d'impact ?
  • Les mesures intégrées dans l'autorisation administrative au moyen de prescriptions et de moyens de suivi deviennent de véritables obligations juridiques.
  • Les mesures promises dans l'étude d'impact mais non reprises dans l'autorisation administrative finale resteront au stade d'un simple engagement moral du pétitionnaire.
– Articulation entre autorisation d'urbanisme et mesures ERC. – Depuis l'arrêt du Conseil d'État Association Koenigshoffen du 30 décembre 2020, les autorisations d'urbanisme ne peuvent plus ignorer les mesures ERC malgré l'indépendance des législations. Désormais, et dès lors que le projet faisant l'objet d'une demande d'autorisation d'urbanisme est soumis à étude d'impact en application du tableau annexé à l'article R. 122-2 du Code de l'environnement, l'autorisation d'urbanisme doit, à peine d'illégalité, contenir les mesures ERC et les modalités de leur suivi.
Cette prérogative accordée à l'autorité d'urbanisme se fonde aujourd'hui sur l'article L. 122-1-1 du Code de l'environnement qui, en son article II, précise que : « Lorsqu'un projet soumis à évaluation environnementale relève d'un régime d'autorisation préalable qui ne répond pas aux conditions fixées au I, l'autorité compétente complète l'autorisation afin qu'elle y soit conforme ». Cette jurisprudence a même anticipé l'entrée des préoccupations environnementales dans le droit de l'urbanisme, car elle a été rendue sur le fondement de cet article dans sa version antérieure à l'ordonnance du 3 août 2016.
La prise en compte par le droit de l'urbanisme du principe de prévention du droit de l'environnement apparaissait déjà dans un arrêt du 9 juillet 2018, en vertu duquel une déclaration d'utilité publique préalable à une expropriation doit comprendre les mesures ERC si elle a été précédée d'une étude d'impact qui conclut à la nécessité de telles mesures.
– Sanctions des mesures ERC et conséquences sur l'autorisation d'urbanisme. – Malgré l'indépendance des législations, les mesures ERC prescrites par l'autorité d'urbanisme dans le cadre d'un permis de construire ou d'aménager peuvent avoir des conséquences non négligeables sur la validité de celui-ci. Différents cas de figure peuvent être envisagés :
  • si les mesures ERC qui ont été prescrites sont excessives, elles pourront être totalement ou partiellement annulées ;
  • si elles sont au contraire insuffisantes, leur irrégularité pourra faire tomber le permis de construire ou d'aménager à l'occasion d'un recours, ou plus certainement être modifiées et/ou complétées pour régulariser le permis ;
  • si les mesures prescrites s'inscrivent dans le temps et qu'elles ne sont plus respectées, l'ouvrage devient irrégulier sans possibilité de faire jouer la prescription décennale de l'article L. 421-9 du Code de l'urbanisme dès lors que les mesures ERC sont considérées comme des prescriptions relevant du droit de l'environnement. En effet, la prescription ne joue que pour « l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme ». Si toutefois les mesures en question ont été intégrées dans les prescriptions du permis de construire, on devrait pouvoir les considérer comme relevant du droit de l'urbanisme.
– La séquence ERC en pratique, évaluation. – Elle est au cœur de l'évaluation environnementale, car c'est précisément la mise en œuvre de ces mesures qui va permettre de limiter les impacts néfastes du projet sur l'environnement et la santé.
Or les rapports d'activité des MRAe ainsi que la synthèse annuelle de la Conférence des autorités environnementales font régulièrement état des faiblesses des études d'impact sur ce point. Les mesures d'évitement sont soit absentes soit floues dans la majorité des études d'impact qui se focalisent sur la démonstration que les mesures destinées à réduire les impacts sont suffisantes.
Les porteurs de projet doivent apporter la démonstration de l'impossibilité de faire de l'évitement et de la réduction, avant de présenter des mesures de compensation qui sont trop systématiques. Et lorsqu'ils présentent de telles mesures, elles doivent être accompagnées des modalités précises de leur suivi dans le temps.
Ainsi le rapport d'activité 2022 de la MRAe Bretagne indique que : « L'évitement qui devrait mobiliser prioritairement la réflexion à partir de scénarios véritablement alternatifs est rarement pris en compte, les grandes options du projet paraissant déjà « actées » avant la mise en œuvre de la démarche ERC, dans la plupart des dossiers ». La rareté du foncier est certainement l'une des raisons de ces manquements, car elle n'incite pas à questionner l'emplacement du projet qui s'avère souvent une opportunité pour l'opérateur.
Ce même rapport fait état d'une évaluation très souvent insuffisante des incidences du projet sur la biodiversité, les zones humides, les nuisances sonores ou les paysages. La MRAe relève également des lacunes importantes en matière de transition énergétique et de changement climatique, avec très peu d'engagements concrets de la part des opérateurs sur le développement des énergies renouvelables, ou encore les économies d'eau potable. Quant aux projets industriels ou d'élevage, l'évaluation des incidences se limite à une vérification du respect des seuils réglementaires.
Le président de la Conférence des autorités environnementales, dans la synthèse de la même année, alerte sur la nécessité de changement de paradigme pour les porteurs de projet qui vont devoir privilégier la sobriété en termes de consommation d'espace mais aussi d'eau et d'énergie et d'émissions de gaz à effet de serre.
Il souligne également la complexité des procédures relatives à l'évaluation environnementale, due à leur combinaison avec les autorisations d'urbanisme nécessaires au projet selon des délais et périmètres différents.