Achat d'unités de compensation

Achat d'unités de compensation

– Compensation dite « par l'offre ». – La compensation dite « par l'offre » est une manière différente de mettre en œuvre des mesures de compensation par rapport à la compensation par la demande.
Son régime a récemment évolué à la suite de l'adoption de la loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte.
– Dispositif applicable avant la loi Industrie verte. – L'article L. 163-3 du Code de l'environnement, introduit par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, a permis aux porteurs de projet de faire l'acquisition d'unités de compensation auprès d'opérateurs de compensation.
Les nouvelles dispositions de la loi du 8 août 2016 donnaient pour mission à l'opérateur de compensation de mener des opérations de restauration ou de développement d'éléments de biodiversité au sein d'un « site naturel de compensation ». Celui-ci devait faire l'objet d'un agrément délivré sur la base de deux critères, qui concernaient en réalité l'opérateur de compensation lui-même. Il devait, d'une part, disposer des capacités techniques et financières nécessaires à la mise en œuvre des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité, et, d'autre part, justifier des droits sur les terrains d'assiette du site naturel de compensation permettant la mise en œuvre des mesures de compensation.
Le Commissariat général au développement durable a publié en février 2023 un excellent guide pour la mise en place des sites naturels de compensation. Un certain nombre de préconisations devraient continuer à s'appliquer dans le cadre des nouvelles dispositions issues de la loi relative à l'industrie verte.
Mais, comme on a pu le souligner à l'Assemblée nationale, « ce dispositif s'est très faiblement développé à la suite de la loi « Biodiversité ». En 2023, seul un site naturel de compensation avait fait l'objet d'un agrément ministériel : le SNC Cossure dans les Bouches-du-Rhône, porté par la Caisse des dépôts et consignations Biodiversité et agréé en 2021 ».
Ce manque d'engouement s'explique par trois séries de difficultés :
  • premièrement, la démarche d'agrément préalable a été jugée trop complexe par les acteurs. Elle nécessitait en particulier d'anticiper précisément les gains écologiques théoriques attendus à l'issue des opérations de restauration ;
  • deuxièmement, l'opérateur de compensation a été confronté à des incertitudes techniques, par rapport à la réussite des opérations de restauration écologique, et également économiques, liées à la future demande de compensation par les acteurs territoriaux ;
  • troisièmement, l'opérateur de compensation ne pouvait pas vendre d'unités de compensation à des personnes qui souhaitaient s'engager de façon volontaire en faveur de la biodiversité. Ces unités pouvaient seulement être vendues dans le cadre réglementaire des mesures de compensation résultant des autorisations administratives délivrées aux porteurs de projet.
Au vu de ces difficultés, il est apparu nécessaire de réformer le dispositif.
– Dispositif issu de la loi Industrie verte. – La loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte a modifié le dispositif de la compensation par l'offre en abrogeant notamment l'article L. 163-3 du Code de l'environnement et en ajoutant un nouvel article L. 163-1-A.
Il s'agit en réalité plus d'une évolution que d'une révolution.
Il convient d'examiner le nouveau régime des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (I), celui des unités de compensation, de restauration ou de renaturation (II), et la place de la compensation au titre de la séquence ERC dans ce nouveau dispositif (III). Il convient pour finir d'évoquer la question de l'entrée en vigueur et du droit transitoire (IV).

L'instauration de sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation

– SNCRR. – L'article L. 163-1-A du Code de l'environnement prévoit la possibilité de créer des « sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation » (SNCRR).
De la même manière que les sites naturels de compensation du dispositif antérieur, ces nouveaux SNCRR ont vocation à accueillir des actions de restauration ou de développement d'éléments de biodiversité pouvant être réalisées par des personnes publiques ou privées.
Les opérateurs devront assurer la maîtrise foncière des SNCRR. À ce sujet, le texte n'impose pas d'être propriétaire. Il est donc possible d'envisager d'autres formes de maîtrise du foncier, pour autant qu'elles permettent de garantir le principe de pérennité rappelé précédemment. Nous renvoyons pour cela aux développements qui précèdent à propos des différents outils contractuels disponibles.
– Agrément. – Avant leur mise en œuvre, les SNCRR doivent faire l'objet d'un agrément préalable de l'autorité administrative compétente.
La délivrance de l'agrément prend notamment en compte le gain écologique attendu, l'intégration du site dans les continuités écologiques, la superficie du site, les pressions anthropiques s'exerçant sur ce site.
Un décret est attendu afin de préciser les modalités d'agrément des SNCRR.
On peut cependant d'emblée constater que les critères portent sur les caractéristiques du site et le potentiel de gain écologique que les actions de restauration ou de développement d'éléments de biodiversité permettraient d'atteindre.
L'agrément n'est donc plus attaché, comme il l'a été précédemment, à des critères personnels.
De surcroît, à la différence du dispositif des sites naturels de compensation, l'agrément ne prendrait donc plus en compte « l'état écologique final visé » des opérations de restauration et de renaturation, mais seulement le gain escompté. Cette modification vise à assouplir les conditions de l'agrément d'un site et répondre aux difficultés rencontrées pour qualifier précisément des gains écologiques, par définition incertains.
Reste à savoir si cela sera suffisant pour permettre le développement des SNCRR à l'avenir.
Enfin, si le texte ne le dit pas explicitement, et sous réserve du décret à venir, on peut penser que les SNCRR pourront être créés par toute personne détenant un foncier dès lors qu'il répond aux caractéristiques énoncées ci-dessus.

Les unités de compensation, de restauration ou de renaturation

– UCRR. – Les actions de restauration ou de développement d'éléments de biodiversité, dès lors qu'elles génèrent un gain écologique, sont converties en « unités de compensation, de restauration ou de renaturation » (UCRR).
Ces UCRR peuvent être vendues par les personnes qui ont été à l'origine des actions de restauration ou de développement d'éléments de biodiversité.
Il ne s'agit pas de vendre un terrain correspondant à un certain nombre d'unités de compensation, mais plus d'un service lié aux mesures compensatoires imposées au demandeur.
Elles ne sont pas réservées aux porteurs de projet soumis à une obligation légale de compensation : elles peuvent être vendues à toute autre personne publique ou privée.
Cela explique, nous semble-t-il, que le législateur ait pris soin de distinguer les termes de « compensation », de « restauration » et de « renaturation » dans le texte.
À titre de rappel, la restauration écologique peut être définie comme une action mise en œuvre sur un milieu dégradé pour faire évoluer le milieu vers un état plus favorable à son fonctionnement ou à sa biodiversité.
La renaturation se définit quant à elle comme un ensemble d'actions d'amélioration de la fonctionnalité d'un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé. C'est ainsi une forme incomplète de restauration ne portant que sur le sol.
Autrement dit, la compensation au titre de la séquence ERC peut prendre la forme d'actions de restauration ou de renaturation, mais à l'inverse il peut y avoir restauration ou renaturation sans nécessairement que de telles actions soient entreprises dans le cadre de mesures de compensation imposées par l'autorité administrative en contrepartie de l'accord de réaliser un projet immobilier.
– Avantages du nouveau dispositif. – Ce nouveau dispositif présente un double avantage pour le porteur de projet.
D'une part, ses besoins en termes de compensation peuvent être anticipés.
D'autre part, une mutualisation des besoins de compensation est permise. Une même unité de compensation ne peut cependant pas servir à deux projets distincts. Mais il est désormais possible de regrouper un ensemble de mesures de compensation relevant de plusieurs porteurs de projet différents sur un même site. Par ailleurs, une même UCRR peut répondre à un besoin de compensation faisant appel à des mesures de différentes natures.
De la même manière que pour l'agrément d'un SNCRR, un décret est attendu pour préciser la nature et les modalités de vente des UCRR.
Certaines améliorations du dispositif seront les bienvenues.
En particulier, il serait utile de créer une bourse des UCRR afin que tout porteur de projet puisse utilement et rapidement solliciter l'opérateur du SNCRR.
Il serait également intéressant que les cessions d'UCRR soient soumises à une forme de publicité dans un registre tenu à la disposition du public.
Outre le fait de participer à la bonne information du public, cela permettrait aux porteurs de projet de disposer de référentiels sur un même SNCRR.
La question se posera du sort des UCRR non consommées par le porteur de projet : ce dernier ne devrait pas avoir la possibilité de les céder à un tiers, afin d'éviter une surenchère qui serait selon nous un moyen trop simple de contourner les objectifs du Code de l'environnement. Toutefois, les UCRR dont le porteur de projet n'a plus besoin devraient faire retour automatiquement au porteur du SNCRR, afin que ce dernier puisse les remettre sur le marché.
Enfin, le Comité national de l'expérimentation d'offre de compensation a été mis en place par le ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie en 2009. Espérons qu'il sera maintenu et son rôle de régulateur précisé afin d'assurer un contrôle de ce dispositif et des opérateurs de SNCRR.

Les unités de compensation, de restauration ou de renaturation et compensation au de la séquence ERC

– Compensation ERC – Acquisition d'UCRR. – Le texte prévoit que le porteur de projet débiteur d'une mesure de compensation au titre de la séquence ERC peut mettre en œuvre celle-ci en se portant acquéreur d'UCRR ou en utilisant ces dernières s'il en possède déjà.
Il convient de rappeler que dans tous les cas, le maître d'ouvrage reste seul responsable à l'égard de l'autorité administrative qui a prescrit les mesures de compensation. Par conséquent, le porteur de projet se devra d'être vigilant dans le choix du SNCRR. À ce propos, le porteur de projet se doit de vérifier en vertu de quel titre l'opérateur de SNCRR intervient : propriétaire, locataire, etc. La solidité de son titre sera un gage de respect du principe de pérennité.
Il conviendra également d'entourer les opérations de certaines garanties financières afin de sécuriser l'utilisation des fonds par les opérateurs de SNCRR. La consignation serait une solution possible, mais il en existe d'autres.
Enfin, se posera la question de savoir quelles mesures devront être envisagées en cas de non-atteinte des gains écologiques attendus.
À cet effet, les porteurs de projet devront s'intéresser à l'idée de souscrire une assurance. Nous ne connaissons pas de dispositif existant aujourd'hui, mais ne doutons pas que les compagnies d'assurance développeront des produits dédiés pour couvrir les risques associés.

Entrée en vigueur du nouveau dispositif

– 25 octobre 2023. – La loi relative à l'industrie verte est entrée en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 25 octobre 2023.
Un décret est attendu pour définir les modalités d'agrément des SNCRR et de cession des UCRR. Son absence rend, d'après nous, impossible l'application du nouveau dispositif. Mais l'abrogation de l'article L. 163-3 du Code de l'environnement est bien effective. En l'état des textes, tant que le décret ne sera pas publié, la compensation par l'offre semble ainsi devoir être écartée pour tout nouveau projet.
– Sort des anciens sites naturels de compensation. – Le sort des projets ayant conduit à l'acquisition d'unités de compensation sous l'empire de l'ancien dispositif est réglé par l'article 15, III, de la loi relative à l'industrie verte selon lequel : « Les sites naturels de compensation dont l'agrément a été délivré en application de l'article L. 163-3 du code de l'environnement dans sa rédaction antérieure à la présente loi sont considérés comme des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation au sens du présent article ».
C'est ainsi que certaines demandes d'agrément qui sont encore en cours d'instruction pourront donner lieu à la naissance de nouveaux SNCRR.