– Une politique qui considère l'aménagement du territoire et la protection des sols par le petit bout de la lorgnette. – Arrêt de la dégradation de la biodiversité, préservation de la porosité des sols et de leur capacité de séquestrer du carbone, défense des terres arables et lutte contre l'étalement urbain, tels sont les objectifs environnementaux assignés à la politique du ZAN. À cet égard, le dispositif mis en place par la loi Climat et Résilience souffre trois grandes critiques.
Une politique comptable focalisée sur quelques parcelles au détriment de l'aménagement global du territoire et de la santé des sols ?
Une politique comptable focalisée sur quelques parcelles au détriment de l'aménagement global du territoire et de la santé des sols ?
– Le ZAN ne cible qu'une partie très marginale du territoire. – L'artificialisation ne concerne que 20 000 à 25 000 hectares par an dans un pays vaste de 55 millions d'hectares. Précisément, le ZAN appréhende « une faible quantité de flux et oublie tout le stock des terres sur lesquelles il est possible d'agir ». À quoi sert de sauver 1 000 hectares de la bétonnisation si, dans le même temps, les prairies sont labourées et les haies arrachées pour permettre des cultures intensives ?
– Le ZAN ne s'intéresse pas à la santé des sols. – La recherche de l'équilibre prévu par l'article L. 101-2-1 du Code de l'urbanisme entre sols artificialisés et non artificialisés sur la base de la nomenclature paraît trop binaire. En effet, le sol fournit des services écosystémiques essentiels : production d'aliments, réservoir de biodiversité, stockage du carbone, régulation des flux d'eau… Et le professeur Philippe Billet de s'interroger à l'occasion d'une table ronde organisée au Sénat le 13 décembre 2023 sur la manière de concilier « une altération immédiate et durable des fonctions d'un sol avec une renaturation qui peut prendre plusieurs années ». Selon lui, la faiblesse viendrait de l'absence « de définition du sol en droit français, ni d'ailleurs à l'échelle de l'Union européenne ». En l'état actuel du droit, le ZAN ne se soucie que trop peu de la qualité biologique des terres. Cette critique, fréquente, doit être nuancée. En effet, l'appréciation de l'artificialisation engendrée par un projet commercial ne relève pas de la distinction opérée entre les catégories de surfaces artificialisées et non artificialisées de la nomenclature, mais des critères du neuvième alinéa de l'article L. 101-2-1 du Code de l'urbanisme. Or, cet article fait référence aux atteintes portées aux fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que de son potentiel agronomique. Il semble donc bien que le ZAN, appliqué au projet, c'est-à-dire aujourd'hui au projet commercial et en 2050 à tous les projets, s'intéresse à la fonction écologique des sols.
– Le ZAN se focalise sur la parcelle. – En témoigne jusqu'à la caricature le feuilleton de la nomenclature, du polygone et des jardins pavillonnaires. Une politique ambitieuse de préservation de l'environnement devrait davantage s'appuyer sur les trames vertes et bleues, véritables corridors écologiques franchissant les propriétés. Au contraire, « hectare par hectare, la logique comptable du ZAN rive l'œil sur la parcelle ».