Producteurs, détenteurs et propriétaires du déchet

Producteurs, détenteurs et propriétaires du déchet

– Principe de responsabilité solidaire du producteur et du détenteur. – En matière de déchets, le producteur et le détenteur sont définis par le Code de l'environnement comme les deux acteurs responsables de la gestion des déchets.
L'article L. 541-2 du Code de l'environnement dispose que : « Tout producteur ou détenteur de déchets est responsable de la gestion de ces déchets jusqu'à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers. Tout producteur ou détenteur de déchets s'assure que la personne à qui il les remet est autorisée à les prendre en charge».
Les notions de producteur et de détenteur sont quant à elles définies par l'article L. 541-1-1 susvisé :
« Producteur de déchets : toute personne dont l'activité produit des déchets (producteur initial de déchets) ou toute personne qui effectue des opérations de traitement des déchets conduisant à un changement de la nature ou de la composition de ces déchets (producteur subséquent de déchets) ;
Détenteur de déchets : producteur des déchets ou toute autre personne qui se trouve en possession des déchets (...) ».
On constate ainsi que le producteur ou détenteur peut remettre les déchets à un tiers chargé de les traiter, mais cette remise ne l'exonère pas : il reste responsable des déchets jusqu'à leur élimination, ou valorisation finale . Notons que la notion de détenteur des déchets est plus large que la notion d'exploitant que l'on retrouve en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement – outre qu'elle n'a que peu à voir avec la notion civile de « détenteur » opposé au « possesseur » en droit des biens. Il faudra attirer l'attention de nos clients sur ce sujet, en raison du parallèle qui est fréquemment fait à tort avec le principe du « pollueur-payeur ».
– Principe de responsabilité élargie du producteur. – Ce principe est repris à l'article L. 541-10 du Code de l'environnement. Il consiste à faire supporter au producteur le parcours complet des déchets : de leur collecte jusqu'à leur élimination, en passant par leur valorisation. Ce principe exonère en certaines hypothèses la collectivité (donc le contribuable) de ces coûts de gestion. Pour ce faire, le producteur peut mettre en place des systèmes individuels de collecte et de traitement, soumis à agrément, depuis le décret no 2020-1455 du 27 novembre 2020. Un regroupement desdits producteurs à responsabilité élargie peut également s'opérer sous forme de systèmes collectifs, et d'éco-organismes .
– Responsabilité subsidiaire du propriétaire. – Au-delà du principe de responsabilité des producteurs et détenteurs, le Conseil d'état a pu juger que « le propriétaire d'un terrain sur lequel ont été entreposés des déchets peut, en l'absence de détenteur connu de ces déchets, être regardé comme leur détenteur au sens de l'article L. 541-2 du Code de l'environnement, notamment s'il a fait preuve de négligence à l'égard d'abandons sur son terrain » .
On note donc un principe de responsabilité subsidiaire du propriétaire, dès l'instant où les responsables par principe que sont le producteur et le détenteur ne sont pas identifiables, et dès l'instant où le propriétaire du terrain a fait preuve de négligence . En l'espèce, la société avait laissé sur le terrain plusieurs milliers de tonnes de pneus usagés.
Le Conseil d'état a également reconnu la responsabilité du propriétaire du terrain, dans une hypothèse où l'identification du producteur initial n'était pas possible ; dès lors que ledit propriétaire ne pouvait ignorer, à la date de son acquisition, la présence de ces déchets . Le critère ici retenu était non la négligence, mais le constat de l'impossible ignorance.

Conseil

Conséquences notariales

Dès lors, une grande vigilance s'impose dans nos actes. Le notaire doit interroger le vendeur, et l'alerter tant sur les analyses prétoriennes que sur les sanctions encourues. Concrètement, les coûts de traitement peuvent être très onéreux et remettre en cause l'équilibre de l'opération pour l'acquéreur.
Il sera opportun de rappeler aux parties les critères de négligence et de non-ignorance retenus par le juge ainsi qu'il a été expliqué plus haut, et d'insister sur ce comportement auprès de nos clients, en invitant par exemple à signaler l'acte d'abandon de son locataire futur à l'autorité compétente
Dans les baux, il sera utilement rappelé que les déchets ne doivent pas être abandonnés, que le preneur en conserve la garde et la propriété, et que leur élimination procède d'une certaine méthode. Une garantie bancaire pourrait même être envisagée. Dans les actes de vente, il faudra également prévoir le « qui fait quoi », et s'assurer de la solvabilité des parties . Le rappel des sanctions ci-dessous sera également persuasif. En effet, l'article L. 541-16 du Code de l'environnement sanctionne de peines lourdes de quatre ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende le fait d'abandonner, déposer ou faire déposer des déchets dans des conditions contraires au Code de l'environnement.