Les outils techniques

Les outils techniques

– évolution historique des outils. – La politique française en matière de sols pollués s'est attachée dès les années 1990, sous l'égide du ministère en charge de l'environnement, à cerner l'ampleur des enjeux par une succession d'inventaires de sites. Afin de réaliser cet inventaire et de le hiérarchiser, la circulaire ministérielle du 23 avril 1996 a présenté les premières versions des outils méthodologiques élaborés sur lesquels s'appuyer, à savoir les études historiques, le diagnostic initial et l'évaluation simplifiée des risques (ESR). L'objectif était alors une réhabilitation systématique des sites concernés.
S'inspirant de la pratique de nos voisins, la politique française de réhabilitation et de traitement des sites s'est infléchie à la fin des années 1990 vers une politique de gestion des risques en fonction de l'usage. Les objectifs de dépollution furent alors fixés par la quantification des risques sanitaires. à cet effet, la circulaire du 10 décembre 1999 a introduit des outils méthodologiques tels que le diagnostic approfondi et les évaluations détaillées des risques (EDR).
Les circulaires du 8 février 2007 ont quant à elles retenu une méthodologie de prise en compte des mesures de gestion et du bilan environnemental global. Il s'est agi de gérer par une approche « coûts – avantages » et de supprimer l'ESR.
Une note ministérielle du 19 avril 2017 révise la méthodologie de 2007. Elle réaffirme les principes fondateurs de la gestion des sites et sols pollués, et en particulier la réhabilitation des sites suivant leurs usages et les projets d'aménagement. La priorité est donnée à la suppression de la pollution à la source.
– Présentation des outils. – Les principaux outils de gestion des sites et sols pollués que doit conna ître le notaire sont les suivants . Notons que la présentation participe d'une démarche étape par étape, s'adaptant au gré des cas d'espèce :
  • la première étape est l'étude historique et documentaire suivant la norme NFX31-620-2 : cet outil traite des trois composantes du site « pollué » en recherchant, sous son aspect historique, les sources de pollution (activités exercées, produits contaminants) ; et, sous son aspect documentaire, les modes de contamination des milieux (voies de transfert) et la vulnérabilité de l'environnement ;
  • les diagnostics. Il s'agira d'investiguer davantage lors de cette deuxième étape afin de préciser et compléter les informations déjà recueillies au stade de l'analyse historique, caractériser l'impact de la pollution sur les différents milieux et évaluer le comportement des polluants présents, mesurer les teneurs desdits polluants, cartographier les zones polluées et quantifier les volumes concernés.
Si aucune pollution n'est détectée, la démarche s'arrête. à l'inverse, elle se poursuit avec les études suivantes :
  • l'évaluation quantitative des risques sanitaires (EQRS), étape facultative en fonction du projet, qui calcule les indices de risques pour la santé humaine provenant de la pollution trouvée ;
  • le plan de gestion de la pollution : il s'agit de savoir comment les pollutions seront gérées et d'étudier les différents scénarios permettant de définir la stratégie à adopter en vue de la réalisation des travaux de réhabilitation ;
  • l'analyse des risques résiduels (ARR) : elle peut intervenir soit en amont des travaux de réhabilitation, auquel cas on parle d'ARR prédictive, cas dans lequel elle valide les objectifs attendus ; soit en aval des travaux, auquel cas on parle d'ARR post-travaux ou finale, cas dans lequel elle détermine l'acceptabilité des risques liés aux expositions résiduelles, le tout en cohérence avec les objectifs de réhabilitation retenus.
– Les outils spécifiques ICPE. – Les procédures de cessation d'activités ICPE ont été revues par le décret no 2021-1096 du 19 août 2021, pris en application de l'article 57 de la loi no 2020-1525 du 7 décembre 2020 (loi dite « ASAP »). Désormais, pour les cessations d'activités notifiées depuis le 1er juin 2022, les exploitants des ICPE (autorisation, enregistrement et déclaration) doivent attester de la bonne mise en œuvre de la cessation d'activité, en faisant appel à une entreprise certifiée dans le domaine des sites et sols pollués. Ces attestations viennent en réalité compléter les outils étudiés au point précédent, et valent quitus de l'administration lorsque celle-ci gardera le silence suite à leur réception.
Aussi, cette entreprise certifiée délivrera notamment les :
  • ATTES-SECUR, relatives à la mise en œuvre des mesures de sécurité pour les ICPE mises à l'arrêt définitif ;
  • ATTES-MéMOIRE, relatives à l'adéquation des mesures de gestion proposées pour la réhabilitation des ICPE mises à l'arrêt définitif ;
  • ATTES-TRAVAUX, relatives à la conformité des travaux réalisés par rapport aux objectifs de réhabilitation pour les ICPE mises à l'arrêt définitif.
– Réaliser une étude des sols ? – De la même façon que l'étude géotechnique est devenue obligatoire dans certaines hypothèses, ne pourrait-on pas formuler ici le vœu de rendre systématique et obligatoire dans certains cas un audit environnemental ? Les développements du 104e Congrès des notaires de France traitaient déjà de la question en 2008 , en soulignant l'intérêt évident de cette mesure pour notre pratique, tout en rappelant les obstacles majeurs qui sont un frein à sa réalisation (coût et délais de réalisation). De lege ferenda, était alors formulé le souhait de réserver l'étude des sols aux terrains ayant supporté une activité relevant de la législation sur les ICPE. De lege lata, la jurisprudence ne raisonne pas selon ce critère administratif, mais en fonction du risque de pollution, et de l'étude qui aurait pu lever l'incertitude au moment de l'opération .
L'étude des sols est obligatoire en cas d'une ICPE dont l'activité a cessé, régulièrement réhabilitée, dans l'hypothèse d'un changement d'usage envisagé. Dans un tel cas, cette étude de sol doit permettre de définir les mesures de gestion de la pollution afin d'assurer la compatibilité entre l'état des sols et l'usage futur. Une attestation de prise en compte doit être jointe au dossier de permis de construire ou de permis d'aménager . à cette hypothèse, la loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte vient en ajouter une autre. Désormais, dans le cas où le ma ître d'ouvrage à l'initiative d'un projet de construction ou d'aménagement sur un terrain ayant accueilli une installation classée ne dispose pas d'éléments montrant que l'installation classée a été régulièrement réhabilitée, l'étude des sols devient également obligatoire afin de s'assurer de la compatibilité entre l'état des sols et l'usage .
L'étude de sol est très vivement conseillée dans les hypothèses suivantes : ancien site industriel avec travaux de changement d'usage envisagés, ancien site ICPE non remis en état et, de manière générale, pour toute opération comportant un risque de déterrer les « cadavres » du passé .