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2021 – Rapport du 117e congrès – Commission 2 – Chapitre II – Les enjeux juridiques du BIM

PARTIE II – Le patrimoine immobilier
Titre 1 – L’impact du numérique sur les différents cycles de vie de l’immeuble
Sous-titre 1 – La conception numérique de l’immeuble

Chapitre II – Les enjeux juridiques du BIM

2319 – Le BIM, un nouvel objet juridique – Le BIM est devenu une nouvelle donnée d’un nombre croissant de projets de construction, et ce pour l’ensemble des acteurs de la construction (maîtres d’ouvrage privés ou publics, architectes, constructeurs, bureaux d’études, ingénieurs, contrôleurs techniques, etc.), mais également pour les conseils (notaires, avocats, cabinets de conseil), qui doivent innover dans un contexte de quasi-vide juridique.
L’approche collaborative du BIM vient heurter notre approche actuelle du droit de la construction, qui est très sectorisée pour chaque métier ou corps d’état, eux-mêmes spécialisés (architectes, ingénieurs, entreprises, bureaux d’études, etc.) avec leur propre régime d’assurance et de responsabilité, et selon un mode d’organisation séquentiel. Avec le BIM, c’est une démarche presque opposée qui est mise en œuvre. La valeur créée repose sur la mise en commun de l’expertise et le partage de données, ce qui amoindrit les frontières des missions associées à chaque compétence.
Pour ces raisons, il n’est pas possible pour un acteur désirant se lancer dans le BIM de simplement superposer un processus digital à ses procédures actuelles, sans repenser son mode de fonctionnement et consécutivement les charges et obligations auxquelles il va se soumettre vis-à-vis des autres acteurs du projet.
2320 – Une terre juridique vierge. – Dans l’attente d’un cadre réglementaire spécifique, il est impératif d’accompagner le BIM de contrats adaptés prévoyant les normes volontaires applicables, les régimes de propriété de la maquette numérique, les qualités et assurances requises pour les acteurs traditionnels, mais aussi les nouveaux métiers de la filière BIM (assistant maître d’ouvrage BIM, BIM Manager, bureau de contrôle BIM, etc.), ou encore traitant la question de responsabilité des acteurs du BIM. S’appuyant sur des logiciels spécialisés et des bases de données numériques, la démarche BIM pose également la question de la relation aux éditeurs de logiciels et des supports de conservation des données. Ce nouvel outil interroge à moyen terme sur sa capacité à survivre dans le temps face aux évolutions technologiques et au quasi-monopole de certains logiciels.
Ces questions sont très importantes, mais n’ont pour le moment généré aucun contentieux notable en jurisprudence en France. Cela peut s’expliquer par le faible recul par rapport aux projets en BIM qui se sont développés récemment en France et par l’acceptation générale d’une technologie balbutiante et encore mal maîtrisée. Ce statu quo pourrait rapidement disparaître en même temps que l’adoption généralisée du BIM et une meilleure maîtrise de la procédure par les acteurs.
2321 Les enjeux juridiques du BIM seront abordés, dans un premier temps, sous l’angle du droit de la commande publique (Section I) qui en pratique dicte la séquence et le mode de conduite des travaux également dans le secteur privé. Le BIM sera ensuite analysé à travers les contrats ayant pour objet ou qui sont impactés par le BIM (Section II) et les droits détenus par chacun des acteurs sur le BIM et ses livrables (Section III). Après une présentation des enjeux associés à la certification de la maquette BIM pour la conduite des travaux (Section IV), la question primordiale de la responsabilité et des assurances de construction avec le BIM sera analysée (Section V). En conclusion, une réflexion prospective sera menée sur l’impact du BIM sur l’activité notariale (Section VI).

Section I – Le BIM dans la commande publique

2322 – Le BIM : un outil vecteur d’économies pour les acteurs publics – Le BIM s’adresse tout particulièrement aux maîtres d’ouvrage publics qui en sont les premiers utilisateurs afin non seulement de réduire les coûts de construction, mais également d’améliorer la performance des ouvrages, notamment en réduisant les consommations d’énergie. Le marché public de travaux représente plus de 60 % de la commande publique (47,7 milliards sur un total de 78,4 milliards d’euros en 2018)479, et les collectivités assument une grande partie de ces dépenses (58 % des dépenses effectuées dans ce secteur sont ainsi assumées par les communes).
Les normes contraignantes imposant le BIM adoptées à l’étranger et citées supra480 s’imposent le plus souvent à des maîtres d’ouvrage publics, qui ont l’obligation d’expérimenter la technologie. Avant de présenter les différents contrats et leur objet qui ont globalement la même architecture pour les acteurs privés et les acteurs publics, il faut s’intéresser aux contraintes des travaux commandés par un maître d’ouvrage public en France.
2323 – Le BIM optionnel pour les acteurs publics en France. – En France, les acteurs publics peuvent employer le BIM de manière discrétionnaire, mais cette démarche innovante doit composer avec les règles propres à la passation des marchés de travaux, qui sont régis non seulement par les règles habituelles de la mise en concurrence dans la phase de passation des marchés, mais également par les règles particulières aux contrats de maîtrise d’œuvre privée. Ces deux dispositifs se retrouvent aujourd’hui au sein du même Code de la commande publique qui remplace le Code des marchés publics, depuis la codification de la loi « MOP »481 intégrée aux règles de la commande publique.
Sous-section I – La définition des besoins du maître d’ouvrage public en BIM
2324 La définition de la programmation par le maître d’ouvrage public est particulièrement importante dans le domaine de la construction et précède nécessairement l’ouverture d’une procédure de mise en concurrence. Il n’est en effet pas souhaitable de permettre aux acteurs publics d’ouvrir à la concurrence des marchés en blanc sous peine de rendre la procédure de mise en concurrence totalement arbitraire, faute de cahier des charges précis. La loi MOP impose notamment que le maître d’ouvrage public soit à l’origine de la programmation, le maître d’œuvre et subséquemment les entreprises du chantier ne faisant qu’apporter une réponse à un besoin et une stratégie clairement exprimée. Cet impératif d’impartialité et la charge de la programmation qui pèse sur les acteurs publics les contraignent dans leur capacité à innover et à faire innover leurs prestataires482. Mais qu’en est-il des marchés en BIM ?
2325 Le BIM en phase programmation n’impacte pas directement la nature et la qualité de l’objet à construire, mais la maquette constitue déjà en tant que tel un objet. Aussi un maître d’ouvrage qui souhaite commander un ouvrage à édifier en BIM doit se soucier de la construction de deux ouvrages, l’immeuble à construire et son avatar numérique en BIM. L’impact du BIM va dépendre du niveau du BIM mis en œuvre483. Si le BIM n’est employé qu’à un faible niveau de collaboration et/ou de détails, notamment en niveau 0/1, il n’y a pas d’impact organisationnel significatif sur la séquence. Mais à partir du niveau 2, le BIM devient une procédure collaborative et un outil de conception et de représentation de l’ouvrage qui doit être pensé dès la programmation afin que la conception puisse traiter en BIM la réponse aux besoins du maître d’ouvrage.
2326 La maquette BIM doit être très précise dès le stade de conception, ce qui déplace une grande partie du travail en amont du projet. Le BIM impacte également la manière de construire l’ouvrage en brouillant la séquence habituelle d’intervention des acteurs et du maître d’œuvre, tout en faisant émerger de nouveaux acteurs tels que le BIM Manager.
C’est cet impact particulier du BIM qui pose le plus de difficultés au regard de la loi MOP qui délimite le rôle, la responsabilité et les missions respectives du maître de l’ouvrage et du maître d’œuvre, en définissant des périmètres et séquences de missions qui n’ont pas évolué depuis sa promulgation en 1985, malgré sa récente codification à droit constant. Avec l’emploi du BIM, il est encore plus difficile de dessiner la frontière entre ce qui relève de la programmation, ce qui pèse sur le maître d’ouvrage, et ce qui relève de la mise en musique par la maîtrise d’œuvre.
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2328 – La loi MOP, un dispositif ancien, avant informatisation. – Bien qu’aucune disposition de la loi MOP, rédigée avant adoption de l’informatique dans la construction, n’interdise l’utilisation du BIM, elle semble aujourd’hui inadaptée au BIM en distinguant de manière étanche programmation, conception et réalisation des constructions. La phase programmation repose sur le maître d’ouvrage. La phase conception pèse sur le maître d’œuvre avec la séquence obligatoire de la mission du maître d’œuvre (ESQ, APS, APD, PRO, ACT, DET, AOR), qui se veut progressive dans la définition de l’objet et des prestations, mais qui ne correspond pas à l’enchaînement des tâches dans un projet en BIM. Ainsi, l’emploi du BIM bouleverse une séquence légale dont le maître d’ouvrage public et le maître d’œuvre ne peuvent pas sortir en confiant une mission particulière, même optionnelle, car elle ne figure pas dans le Code de la commande publique qui est exhaustif. Faute de texte particulier, le recours au BIM ne justifie pas à lui seul une rémunération supplémentaire. Aussi le maître d’œuvre se trouve-t-il dans la situation de ne pas pouvoir être payé spécifiquement pour cette mission, qui peut toutefois être incluse dans sa mission globale. Cette situation explique en partie la réticence des architectes à adopter la technologie BIM sans une refonte des modalités de fixation et de facturation de leur mission pour les contrats soumis à la loi MOP.
2329 – Le problème du format des livrables en BIM. – Le support même du BIM, qui est une base de données informatique représentée par une maquette, ne correspond pas du tout aux livrables obligatoires prévus par l’annexe 20497 du Code de la commande publique. À titre d’exemple, l’annexe 20 prévoit des « plans des niveaux significatifs établis au 1/500 » ou encore « des plans établis au 1/200, avec certains détails significatifs au 1/100 », ce qui semble avoir peu de sens par rapport au bénéfice d’une représentation complète en trois dimensions. La codification de la loi MOP n’a pas donné lieu à une évolution de la matière, et il semble impératif d’intégrer la possibilité d’un rendu exclusivement numérique et d’une maquette numérique BIM pour éviter, à terme, de devoir doubler les livrables BIM d’un rendu papier pour les opérations de constructions publiques.
2330 – La séparation entre maîtrise d’œuvre et entreprise. – La séparation stricte entre la maîtrise d’œuvre et les entreprises imposée par la loi MOP rend encore plus difficile la collaboration en amont autour d’une même maquette498. À ce titre, toute intervention de l’entreprise en phase de conception est formellement prohibée. Ce qui fait peser sur le maître d’ouvrage la responsabilité d’organiser la transition entre la maquette BIM élaborée en phase de conception à celle élaborée en phase de réalisation par les entreprises, sauf à imposer cette mission à la maîtrise d’œuvre avec le problème de la rigidité des missions et de la facturation de la loi MOP. En l’état actuel, les entreprises devront très souvent effectuer un travail de ressaisie de leur propre maquette BIM construction/réalisation, sauf à avoir une parfaite confiance dans la maquette de conception, ce qui semble ne pas être le cas actuellement.
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2332 – Le cumul des missions conception-réalisation dans le cadre du BIM. – En préambule, il faut rappeler que l’emploi d’un marché de conception-réalisation est un régime d’exception qui n’a pas pour effet de modifier la charge et la responsabilité de la programmation, qui pèsent toujours sur la maîtrise d’ouvrage et dont elle ne peut se défaire. Ainsi le marché de conception-réalisation ne permet pas une association en amont du projet entre le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre et des entreprises ; cette collaboration n’étant possible qu’en matière de marché privé de travaux. L’intérêt du recours à un contrat global de conception-réalisation est certain pour favoriser une approche homogène de la conception-réalisation des travaux.
En dehors des contrats sectoriels et des ouvrages d’infrastructures visés supra499, le maître d’ouvrage public ne peut recourir au marché global « que si des motifs d’ordre technique ou un engagement contractuel portant sur l’amélioration de l’efficacité énergétique ou la construction d’un bâtiment neuf dépassant la réglementation thermique en vigueur rendent nécessaire l’association de l’entrepreneur aux études de l’ouvrage ». Un usage erroné du contrat marché de conception-réalisation peut entraîner la nullité du contrat500. Le BIM pourrait-il être un motif de recours au marché global ?
2333 – Recours au marché global, critère de technicité en BIM. – Le juge administratif fait une interprétation très stricte des critères d’application du marché global, qui est un contrat d’exception. Concernant le critère de technicité, ne peuvent pas faire l’objet d’un marché de conception-réalisation :

la réalisation d’un complexe multisport qui, malgré une superficie très importante, « ne présente toutefois pas des dimensions exceptionnelles pouvant être regardées comme constituant un motif d’ordre technique au sens des dispositions du Code des marchés publics »501 ;

la réalisation d’un centre de secours hospitalier « dont les spécifications ne diffèrent en rien des contraintes auxquelles est assujetti tout bâtiment de même importance »502.

Le BIM n’est pas en lui-même le témoignage d’une technicité particulière d’un projet de construction. Même si le BIM en tant qu’outil présente une certaine technicité, il ne préjuge pas d’un besoin technique sur le projet de construction justifiant une approche globale de la conception-réalisation.
2334 – Recours au marché global, critère de performance énergétique en BIM. – Concernant le critère de la performance énergétique, le juge exige également une forme de spécificité particulière du projet au-delà même de l’ambition énergétique du projet. Ainsi la cour administrative d’appel de Nantes, aux termes de trois arrêts du 9 novembre 2018, a annulé trois marchés de conception-réalisation au motif notamment que l’objectif de performance énergétique supérieure de 10 % à la norme thermique RT 2012 invoqué par le département n’était pas, « au regard de la nature de la construction envisagée comme du procédé constructif retenu et des matériaux dont l’emploi était prévu », « une contrainte ou une complexité telle qu’elle exigeait d’associer nécessairement les opérateurs de maîtrise d’œuvre et les entreprises de construction dès le stade de l’établissement des études ».
Même si cette jurisprudence a été rendue avant la loi Elan503, il semble que le juge recherche toujours si l’ouvrage justifie objectivement une coopération des entreprises dès le stade des études. Le BIM ne participe pas directement en phase de construction à la réglementation thermique et ne semble pas à ce titre justifier en lui-même le recours au marché global. Toutefois, s’il accompagne un projet avec des procédés constructifs novateurs reposant sur le BIM exploitation, comme par exemple des bâtiments à énergie positive (parfois abrégé en « Bepos »)504, il nous semble que le maître d’ouvrage pourrait avoir un intérêt à passer un contrat groupé avec la maîtrise d’œuvre et des entreprises spécialisées.
2335 – La loi MOP, un frein au développement du BIM ? – Le maître d’ouvrage privé est libre de définir sa démarche BIM comme il l’entend, avec le séquençage, la répartition et la rémunération des tâches qui lui sembleront à propos, sans aucune contrainte réglementaire. Le maître d’ouvrage public est soumis à la loi MOP qui lui impose un formalisme particulier dans la conclusion, la conduite et le périmètre des marchés qu’il peut passer avec ses conseils, la maîtrise d’œuvre et les entreprises.
Compte tenu de la rigidité actuelle de la loi MOP et de l’incapacité pour le maître d’ouvrage d’associer la maîtrise d’œuvre à la programmation, ou de mieux associer la maîtrise d’œuvre aux entreprises, des auteurs appellent à une évolution de la loi MOP505 afin de tenir compte de l’évolution de la filière et du BIM. Dans certains cas, des marchés de conception-réalisation peuvent être envisagés pour faire collaborer en amont maître d’œuvre et entreprise.
2336 La loi MOP fait peser sur la maîtrise d’ouvrage public la responsabilité de l’initiation de la démarche BIM, le plus souvent avec un maître d’ouvrage délégué et/ou un assistant au maître d’ouvrage ayant la compétence en matière de BIM, de manière indépendante de la maîtrise d’œuvre et des entreprises. Il serait souhaitable d’initier une réflexion sur une atténuation circonstanciée de la délimitation entre ces trois phases de programmation/ conception/ réalisation et leurs acteurs respectifs afin de permettre un emploi collaboratif et plus efficient du BIM. L’incitation au BIM pourrait passer par un assouplissement ciblé des règles de la loi MOP et des dérogations ponctuelles pour permettre une intervention plus en amont du maître d’œuvre et de l’entreprise, en prévoyant par exemple qu’un projet en BIM niveau 2506 avec un objectif précis de BIM exploitation bénéficie automatiquement de dérogations, comme l’accès au marché de conception-réalisation avec des entreprises spécialisées.
Il serait également souhaitable de prévoir une nouvelle mission de BIM Management / maquette BIM dans le dispositif de la loi MOP, qui pourrait être une mission optionnelle pour la maîtrise d’œuvre ou les entreprises, afin d’y associer une rémunération et d’encadrer en annexe du Code de la commande publique une liste de livrables adaptés aux opérations en BIM.
Sous-section II – La procédure de passation des marchés en BIM
2337 – La question du BIM dans les marchés publics de travaux. – Les maîtres d’ouvrage publics ont pu s’interroger sur la possibilité de lancer un projet en BIM et d’exiger de leur prestataire l’emploi de la technologie, sans contrevenir aux règles de mise en concurrence de la commande publique (ancienne appellation du Code des marchés publics).
En effet, l’ancien article 6, III du Code des marchés publics, dans sa version applicable avant son abrogation le 1er avril 2016, stipulait que : « Les spécifications techniques mentionnées au I permettent l’égal accès des candidats et ne peuvent pas avoir pour effet de créer des obstacles injustifiés à l’ouverture des marchés publics à la concurrence ». Aussi le fait pour un adjudicataire d’obliger les candidats à restituer leur proposition au moyen d’une maquette BIM soulevait la question de savoir si cet outil était discriminant pour les candidats et un obstacle à la libre concurrence. Toutefois, aucun contentieux sur le terrain de la commande publique d’un projet en BIM n’a été médiatisé alors même que de nombreux maîtres d’ouvrage ont pris l’initiative et ont imposé le BIM507 avant tout dispositif particulier.
2338 – La consécration européenne du BIM dans les marchés publics de travaux. – Par suite de la transposition de la directive du 26 février 2014 par l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et son décret du 25 mars 2016508, les maîtres d’ouvrage publics se sont vu officiellement octroyer la capacité de mener une opération de construction en BIM, dès la mise en concurrence pour l’attribution des marchés publics de travaux ou de maîtrise d’œuvre. Ce dispositif se retrouve aujourd’hui aux articles R. 2132-10 et R. 2132-14 du Code de la commande publique509.
Le Code de la commande publique s’applique à tous « contrats conclus à titre onéreux par un acheteur ou une autorité concédante, pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, avec un ou plusieurs opérateurs économiques » (CCP, art. L. 2).
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2340 – La mise en concurrence dans les marchés publics de travaux en BIM. – Quelle que soit la procédure d’allotissement des marchés mise en œuvre par le maître d’ouvrage public, avec ou sans appel d’offres réglementé, elle est soumise à des principes généraux de respect du « principe d’égalité de traitement des candidats à l’attribution d’un contrat de la commande publique », et de la mise « en œuvre les principes de liberté d’accès et de transparence des procédures » (CCP, art. L. 3).
L’emploi du BIM ne permet pas de déroger à ces principes et l’article R. 2132-10 du Code de la commande publique dispose que : « L’acheteur peut, si nécessaire, exiger l’utilisation d’outils et de dispositifs qui ne sont pas communément disponibles, tels que des outils de modélisation électronique des données du bâtiment ou des outils similaires ». Ainsi afin de ne pas fausser l’accès au marché, l’acheteur qui initie une procédure en BIM « offre un ou plusieurs des moyens d’accès mentionnés à l’article R. 2132-14, jusqu’à ce que ces outils et dispositifs soient devenus communément disponibles aux opérateurs économiques ».
2341 L’article R. 2132-14 du Code de la commande publique détaille les trois moyens d’accès alternatifs, en mettant à disposition une solution technique gratuite ou d’autres voies de présentation électronique. Ce texte, qui date de mars 2016 et transpose une directive européenne de 2014, était assez prudent en obligeant la mise à disposition des outils nécessaires au candidat dans l’attente que « ces outils soient communément disponibles ». Cinq ans après la promulgation de ce texte, il semble difficile d’affirmer que les outils du BIM ne sont pas devenus aujourd’hui communément disponibles. Il y a certes une barrière technologique et économique d’appropriation du BIM, mais les logiciels sont facilement accessibles à des niveaux de prix divers. À admettre que cette réserve soit toujours justifiée en 2021, il est raisonnable d’affirmer qu’un opérateur économique n’ayant pas l’expérience du BIM et non outillé d’un logiciel spécialisé ne sera pas retenu dès le stade de la candidature à une commande publique en BIM compte tenu de l’impact que cela pourrait avoir sur l’organisation du projet.
2342 – Les candidatures en BIM. – Au stade des candidatures, l’acquéreur doit jauger la capacité professionnelle, technique et financière des candidats et sélectionner les candidats qui seront admis à présenter une offre. Ainsi le maître d’ouvrage projetant de développer son projet en BIM mettra généralement en place une procédure de mise en concurrence restreinte afin de s’assurer que les candidats justifient de compétences et références en BIM. Pour le moment, les formations diplômantes en BIM ne sont pas assez nombreuses pour que l’acheteur puisse exiger des diplômes spécifiques des candidats sans être discriminant. Suite à la création officielle des métiers de « coordinateur BIM du bâtiment » et de « BIM modeleur du bâtiment », il semble que l’acquéreur puisse exiger qu’un membre au moins de l’équipe du candidat justifie d’un de ces titres. S’agissant du BIM Manager, son rôle n’est à l’heure actuelle pas légalement défini ; aussi, si l’acquéreur exige une telle compétence, il devra parfaitement en définir le rôle et les missions dans le règlement de consultation.
2343 – Le BIM, un critère à préciser dès le stade des candidatures. – Au stade de l’appréciation des offres, l’acheteur ne peut pas retenir des critères relatifs à la capacité des candidats eux-mêmes, qui relève de la sélection des candidats et non de la sélection des offres, qui sont deux étapes et deux taches différentes de la procédure526. C’est la raison pour laquelle il est fortement déconseillé de recourir à une procédure ouverte d’analyse des candidatures et des offres en commande de travaux BIM.
En pratique, l’acheteur va exiger du candidat qu’il produise une liste de références de projets conduits en BIM, et qu’il présente les moyens techniques qu’il utilise. L’acheteur ne peut pas exiger la consultation d’une maquette antérieure. L’absence de référence ou des outils BIM ne doit pas, à elle seule, justifier le rejet des candidatures.
2344 – La remise des offres en BIM. – Au stade de la remise des offres, dès lors que le maître d’ouvrage exige un rendu en BIM, il devra déterminer dans le règlement de consultation les règles imposées aux candidats, en précisant le niveau de définition de la maquette et des objets y figurant, ainsi que des informations qui y sont attachées. L’exigence d’un rendu sous forme de maquette BIM implique que l’acquéreur, et le jury en cas de concours, disposent d’un outil de visualisation BIM. Dans le cadre des procédures de concours où la maquette BIM semble la plus pertinente, les maquettes et bases de données devront être anonymes.
La remise d’une candidature et d’une offre en BIM ne bénéficie pas d’une rémunération dédiée ; aussi, il est renvoyé au dispositif de droit commun de l’article R. 2172-4 du Code de la commande publique susvisé s’agissant des contrats de maîtrise d’œuvre.
2345 – Les formats des offres en BIM. – L’acquéreur ne peut en principe pas exiger le recours à un logiciel ou une marque pour la remise de la maquette. La mention d’une marque n’est autorisée, à titre dérogatoire, que si une description suffisamment précise et intelligible du produit est impossible et doit, dans ce cas, être accompagnée de la mention « ou équivalent »527 et sous réserve de justifier que ce logiciel est le seul capable de remplir les fonctions assignées. Pour les mêmes raisons, il n’est pas possible de demander un rendu propre à une marque de logiciel, et le maître d’ouvrage ne peut pas exiger la remise de la maquette en format revit même s’il utilise Autodesk. Il semble préférable d’exiger la remise des offres au format IFC qui est reconnu en tant que norme ISO (16739 :2013) et est universel et interopérable.
En revanche, n’a pas été jugée illégale la référence à une solution logicielle dès lors qu’elle est libre, accessible et gratuite à tous les candidats qui disposent des compétences techniques pour l’adapter aux besoins de l’acheteur public528. Il ne semble pas exister de solution BIM performante entièrement gratuite répondant à ces critères. Certains maîtres d’ouvrage précisent que le rendu sera effectué au sein de l’« écosystème éditeur » qui traduit pudiquement l’obligation de proposer un « équivalent ».
Enfin, en cas de recours à un dictionnaire d’objets, ces objets doivent être neutres et ne pas être rattachés à un industriel, ce qui reviendrait à privilégier un fournisseur.
2347 – Le BIM et les contrats d’entreprise. – S’agissant spécialement des marchés des entreprises, l’emploi du BIM pose la difficulté des modalités de mise à disposition de la maquette BIM de conception aux entreprises candidates. Le maître d’ouvrage va devoir choisir la diffusion d’une maquette informative, non utilisable par les opérateurs, qui vont devoir ressaisir leur propre maquette pour émettre une offre en BIM, ou une maquette BIM directement opérable par les entreprises, qu’elles devront remplir. Les deux solutions ont leurs avantages et inconvénients, et dans les deux cas les entreprises devront être vigilantes sur la qualité des données qu’elles vont faire figurer dans la maquette.
2348 – La sélection des offres dans les marchés publics de travaux. – Pour la sélection des offres, l’acheteur doit classer les offres par ordre décroissant et retenir « l’offre économiquement la plus avantageuse » en appliquant les critères d’attribution rendus publics, qui doivent garantir « la possibilité d’une véritable concurrence ». Seuls les critères fixés et publics dès l’initiation de la procédure, éventuellement affectés d’une pondération, ou à défaut hiérarchisés, peuvent fonder le jugement des offres émises par les candidats. Le maître d’ouvrage doit procéder au classement des offres, et l’offre économiquement la plus avantageuse est celle qui est la mieux classée aux termes de cette procédure.
Ces critères peuvent être uniques ; dans ce cas, ce critère ne peut être que le prix du marché public ou son coût, « déterminé selon une approche globale qui peut être fondée sur le coût du cycle de vie défini à l’article R. 2152-9 ». L’utilisation du critère de prix uniquement est réservée à des contrats simples, ce qui doit pouvoir être justifié par l’acheteur529, et qui semble donc exclure les marchés publics de travaux.
L’article R. 2152-7 du Code de la commande publique530 énonce une pluralité de critères non exhaustifs sous réserve qu’ils soient « non discriminatoires et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution ». Compte tenu de la diversité des critères d’attribution autorisés et de la jurisprudence nationale ou communautaire, l’offre économiquement la plus avantageuse n’est pas nécessairement celle qui semble économiquement la plus rentable pour l’acheteur, mais celle qui répond le mieux aux critères d’attribution fixés par le pouvoir adjudicateur.
2349 – Le BIM dans la sélection des offres. – Le maître d’ouvrage en BIM pourra ériger la maîtrise du BIM comme un critère à part entière ou au travers de différents critères techniques de passation du marché de travaux. Ainsi, bien que les qualités techniques du candidat ne puissent pas être un critère d’appréciation des offres, le critère de la valeur technique des offres peut conduire le pouvoir adjudicateur à analyser les moyens techniques et humains proposés par les candidats pour exécuter la prestation objet du marché531. Par ailleurs, dès lors que le cahier des charges est suffisamment précis et le critère justifié, il semble que la qualité de la réponse en maquette BIM puisse également être un critère532. La capacité à produire une maquette directement opérable en exploitation devrait également devenir un critère de sélection pour l’amélioration des performances énergétiques et la diminution des coûts de l’immeuble.
La référence à un label ou à une technique brevetée est également légale dès lors qu’elle est connue de tous les professionnels du secteur et qu’il est justifié par l’objet du marché533. À l’heure actuelle, il n’existe pas de label dans le BIM, traduisant par exemple le respect des normes ISO. De tels labels auraient le mérite de traduire une méthodologie particulière et des critères de notation de performance comme en matière environnementale.
La légalité du choix des critères d’attribution opéré par le pouvoir adjudicateur peut faire l’objet d’un contrôle du juge. Mais l’illégalité d’un critère n’entraîne pas automatiquement la nullité de la procédure. Une telle illégalité ne provoque la nullité que si le critère illégalement retenu a pu avoir un effet sur la mise en concurrence et a lésé le candidat requérant, par exemple en dissuadant certains candidats potentiels de faire acte de candidature534.

Section II – Les contrats du BIM

2350 – L’importance des contrats en BIM face au vide réglementaire. – En France, le BIM est actuellement dépourvu de cadre normatif et son utilisation repose exclusivement sur des contrats passés entre les différents acteurs de la construction. Le recours au contrat est la voie aujourd’hui retenue par les pouvoirs publics535.
L’utilisation du BIM dans une opération de construction suppose de définir comment va se construire la maquette et comment elle va influencer la construction de l’immeuble, et ce dès la phase de préparation de l’opération. Pour accompagner les maîtres d’ouvrage dans cette initiative, le Plan transition numérique dans le bâtiment (PTNB)536 a diffusé un guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage qui présente, principalement du point de vue du maître d’ouvrage, les différents contrats et leurs enjeux/objet537. La préparation de ces contrats implique de nouveaux acteurs du BIM avec lesquels le maître d’ouvrage va contracter en vue de préparer, négocier et mettre en œuvre les contrats du BIM avec les acteurs traditionnels de la construction.
2351 – Les nouveaux contrats du BIM – Le BIM ne s’appuie pas uniquement sur les contrats habituels de la construction analysés, et de nouveaux contrats ou de nouvelles annexes spécifiques au BIM accompagnent son adoption. Seront successivement analysés les contrats passés avec les nouveaux acteurs associés au BIM (Sous-section I), et les nouveaux contrats passés pour mettre en place le BIM. Ces nouveaux contrats suivent la chronologie de la séquence de construction, en partant de la programmation par le maître d’ouvrage avec la charte BIM (Sous-section II), précisée dans un cahier des charges BIM propre au projet de construction (Sous-section III), permettant de conclure un protocole BIM (ou convention BIM) avec la maîtrise d’œuvre et les acteurs du BIM (Sous-section IV), aboutissant à l’exécution de la construction au moyen d’un protocole BIM réalisation avec les entreprises et acteurs du BIM (Sous-section V).
Synthèse des contrats et documents de mise en œuvre BIM
PHASE
CONTRAT
PRODUCTEURS
STRATÉGIE / PROGRAMMATION
CHARTE BIM
MOA avec AMO
CAHIER DES CHARGES BIM
MOA avec AMO projet
OPÉRATIONNELLE
CONVENTION / PROTOCOLE BIM
BIM Manager, MOE et acteurs BIM
PLAN D’EXÉCUTION BIM
MOE, entreprises, BE, etc.
Sous-section I – Les contrats avec les nouveaux acteurs du BIM
2352 – Le contrat de l’assistant maîtrise d’ouvrage (AMO) BIM. – Le maître d’ouvrage qui désire mettre en place un projet en BIM aura vraisemblablement besoin d’un assistant à maîtrise d’ouvrage spécialisé en BIM, qui détient les compétences techniques pour mettre en place la trame générale de la base de données BIM d’un projet. Ce nouvel acteur, avec lequel le maître d’ouvrage va contracter un contrat de service, qualification importante en matière de commande publique, va intervenir en phase de programmation et assister le maître d’ouvrage dans la préparation du cahier des charges BIM. Au cours de cette étape, l’AMO BIM va aider le maître d’ouvrage à choisir parmi les différents outils utilisables, définir ses besoins, les guider éventuellement vers tel ou tel logiciel, proposer des formations si nécessaire et préconiser des méthodes de travail.
Sa mission peut être prolongée pendant les phases de conception et de réalisation afin de conseiller le maître d’ouvrage dans le suivi de l’exécution/ la construction de la maquette, au même titre qu’un AMO en matière de construction d’un immeuble. Cette prolongation semble prudente dans la mesure où très souvent le maître d’ouvrage n’est pas équipé et formé pour suivre un projet BIM, et il est préférable qu’il puisse assurer un contrôle « du chantier de construction » de la maquette. Plus rarement, il semble qu’un AMO BIM puisse également endosser la qualité de BIM Manager à la demande du maître d’ouvrage.
2353 – Les contrats du BIM Management. – Le BIM Management est constitué de la maîtrise d’ouvrage, d’un BIM Manager et des coordinateurs BIM de chaque contributeur du projet (les BIM modeleurs).
Le BIM Management consiste538 à :

l’élaboration de la convention/charte BIM et son suivi ;

la consolidation de la maquette aux points d’étape ;

la conversion des objectifs BIM du projet en usages BIM ;

le contrôle qualité du respect de la réalisation des cas d’usage.

Les missions de BIM Management vont évoluer au fur et à mesure du projet, et chaque étape peut avoir son BIM Manager. Aujourd’hui, le métier de BIM Manager n’est pas défini légalement et ne fait pas nécessairement consensus dans son acception, contrairement au métier de BIM coordinateur ou de BIM modeleur qui sont l’échelon inférieur.
2354 – Le BIM Management de programmation. – En phase de programmation, il n’y a pas à proprement parler de BIM Management, dans le sens où il n’est pas en principe nécessaire de manager une équipe de production de la maquette BIM, sauf à produire une maquette BIM de programmation. Au cours de cette phase interne au maître d’ouvrage, c’est l’AMO BIM qui fera office de manager des équipes et du projet. La mission de l’AMO BIM sera définie dans son contrat ou marché.
2355 – Vers la base BIM de programmation. – Partant du constat qu’aujourd’hui le programme est élaboré sur des plateformes diverses (traitement de texte, tableur, logiciel de dessin…) non reliées entre elles et qui ne permettent qu’un contrôle manuel de la cohérence des données, le PTNB539 préconise aux maîtres d’ouvrage d’initier eux-mêmes la maquette BIM. La maîtrise d’ouvrage pourrait ainsi initier un véritable BIM de programmation, indexant toutes les études initiales et documents sur le projet et traduisant informatiquement les performances et spécifications techniques qui sont aujourd’hui rédigées dans des cahiers des charges. Cette architecture du projet BIM aurait l’avantage de permettre de repérer plus facilement les éventuels conflits avec le contenu des maquettes de conception et d’exécution, et de réserver définitivement au maître d’ouvrage les droits d’auteur sur la base BIM.
2356 – Le BIM Management en phase conception. – En phase de conception, le rôle du BIM Manager est de structurer le projet pour respecter la stratégie décidée et énoncée dans le cahier des charges BIM. Cela implique que le BIM Manager ait une compréhension poussée des acteurs, de leurs besoins, et des spécificités du projet. À ce titre le BIM Manager fait en quelque sorte partie de l’équipe de maîtrise d’œuvre, et il est possible que la mission soit intégrée à la convention signée avec le maître d’œuvre ou le groupement de la maîtrise d’œuvre, en adjoignant aux missions classiques de leurs marchés ou contrats des missions complémentaires. Dans ce cas, les marchés passés avec le maître d’œuvre incluront un volet dédié au BIM Management. Il n’est pas exclu que le maître d’œuvre sous-traite tout ou partie du volet BIM Management à une entreprise spécialisée rémunérée par la maîtrise d’œuvre et n’ayant pas de lien contractuel avec le maître d’ouvrage. S’agissant des marchés de travaux de la commande publique, la sous-traitance devra respectée les dispositions de la loi MOP.
2357 – Le BIM Management en phase réalisation. – En phase réalisation, le BIM Management entre dans une phase opérationnelle d’orchestration de la construction de la maquette par les entreprises et la maîtrise d’œuvre. Il semble que certaines entreprises de construction dites « major » intègrent une cellule dédiée et proposent d’absorber la mission de BIM Manager pour la phase conception dans leur marché. Dans ce cas, les marchés intégreront un volet BIM Management précisant la mission de la ou des entreprises concernées. La phase de réalisation en BIM, dont l’issue est la remise d’une maquette BIM finale en phase de DOE (dossier des ouvrages exécutés), est possiblement la plus importante pour le maître d’ouvrage. Une mission spéciale de contrôle et de suivi des livrables de DOE pourra être confiée à un AMO BIM ou à la maîtrise d’œuvre.
2358 – L’indépendance du BIM Manager. – De plus en plus de maîtres d’ouvrage vont demander à ce que le BIM Manager soit parfaitement indépendant de l’équipe de maîtrise d’œuvre et des entreprises. Toutefois en pratique le BIM Management est souvent assuré par une cellule de la maîtrise d’œuvre, qui peut être intégrée aux équipes de l’architecte ou indépendante. Dans ce cas, les fonctions, rôles et responsabilités du BIM Manager devront être clairement identifiés et distincts de ceux de la maîtrise d’œuvre traditionnelle. Cette délimitation contractuelle de la mission du BIM Manager de conception est essentielle compte tenu de l’absence de norme, notamment en cas de cotraitance du groupement de maîtrise d’œuvre. Dans cette configuration le BIM Manager s’apparenterait à un nouveau corps de l’équipe de maîtrise d’œuvre.
Sous-section II – La charte BIM
2359 – La charte BIM, expression d’une stratégie globale. – L’engagement de la maîtrise d’ouvrage dans une démarche BIM conduit, au-delà de l’optimisation de la construction, à une meilleure prise en compte dès l’amont des conditions d’exploitation et de maintenance des équipements construits, afin de raisonner en coût global du cycle de vie de l’immeuble540. Cette approche anticipative implique un rapprochement entre des services en charge de la construction et ceux en charge de la gestion de l’équipement, éventuellement avec des conseils spécialisés.
2360 – Le BIM comme vecteur d’optimisation des process internes. – Avant d’initier un projet BIM, il est souhaitable de mener une première étude interne, éventuellement avec un conseil spécialisé AMO BIM, afin de définir en amont les besoins et la stratégie d’utilisation de la maquette BIM, éventuellement à l’échelle du patrimoine du maître d’ouvrage. Ces ateliers métiers avec les différents services doivent permettre de retracer le parcours et la nécessité des données utiles à chaque cycle de vie de l’immeuble. Cet exercice doit notamment permettre de répondre aux questions suivantes : quelles sont les attentes du maître d’ouvrage ? Quels livrables sont attendus ? Comment faire fructifier la base de données ? Comment organiser la prise en gestion de la base de données sur un format « standard » ? Comment utiliser les données de la maquette dans les logiciels de gestion du maître d’ouvrage ? Autant de réflexions qu’il faut livrer en amont des projets, au risque que la base de données BIM soit reléguée à un simple outil de visualisation 3D, et que chaque maquette soit différente d’un projet à l’autre selon les équipes impliquées. Les conclusions de ces réflexions peuvent se traduire par la préparation d’une charte BIM énonçant notamment les principes généraux de production de la maquette numérique, les livrables, les spécifications de la maquette numérique, les règles de dénomination, les classifications ou encore les rôles et missions relatifs aux usages de la maquette numérique.
2361 – La charte BIM utile à tous les acteurs. – L’édition d’une charte BIM devrait être menée par tous les maîtres d’ouvrage qui font construire, même si la construction est effectuée par un maître d’ouvrage délégué, par exemple par un promoteur en vente en l’état futur d’achèvement ou en contrat de promotion immobilière, afin de bénéficier pleinement du BIM. À défaut, il y a un risque que la base de données BIM du promoteur, orientée construction et non pas exploitation, tombe en désuétude après l’achèvement. Les promoteurs ont également intérêt à unifier leur pratique du BIM au sein d’une charte, en gardant toutefois une forme de souplesse pour adapter les conventions BIM aux besoins de l’investisseur/exploitant ou du futur occupant.
2362 – La préparation de la charte BIM. – Pour conduire ces réflexions et rédiger la charte BIM, il est aujourd’hui préconisé de recourir aux conseils d’un professionnel spécialisé en BIM, qualifié d’assistant à maîtrise d’ouvrage BIM (AMO BIM). La passation d’un tel contrat d’AMO BIM par le maître d’ouvrage public sera soumise aux règles de passation des marchés publics de services. Aujourd’hui de nombreux modèles de charte sont disponibles en ligne541. La charte est un document interne au maître d’ouvrage qui n’a pas en tant que tel une valeur contractuelle vis-à-vis des acteurs de la conception-réalisation. Toutefois, ce document peut servir de support aux contrats conclus avec un AMO BIM en vue d’établir le cahier des charges BIM de l’opération, et sera en tant que tel opposable dans les relations entre le maître d’ouvrage et son assistant.
Sous-section III – Le cahier des charges BIM
2363 – Le cahier des charges BIM traduit la charte BIM pour un projet déterminé. – À partir de la charte BIM, le maître d’ouvrage va pouvoir construire un cahier des charges spécifique à une opération, souvent avec l’assistance d’un AMO BIM dédié à l’opération. Le cahier des charges BIM va exprimer les exigences et objectifs des intervenants successifs du projet, en traduisant la charte BIM spécifiquement au projet. Le cahier des charges BIM constitue le volet BIM du programme, et est à ce titre un document obligatoire en matière de commande publique pour exprimer la programmation et permettre la mise en concurrence. Dans ce cas, le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) inclut un chapitre particulier sur le BIM, précisant les dispositions techniques nécessaires à l’exécution des prestations du marché concerné en BIM.
2364 – Le contenu du cahier des charges BIM. – Le cahier des charges BIM va notamment permettre à la maîtrise d’œuvre d’émettre une offre en BIM. Ainsi, le cahier des charges pourra notamment comporter :

un lexique des termes spécifiques au BIM qui n’ont pas de définitions légales ou réglementaires afin que tous les acteurs du projet confèrent le même sens à chaque notion ;

un exposé des attentes du maître d’ouvrage ;

les spécifications générales de la maquette et les méthodes de production des maquettes numériques, telles que les formats de fichiers, les méthodes d’indexation et de classement des informations, le mode de définition des objets, la nomenclature des pièces ;

les caractéristiques techniques (ou « prescriptions techniques ») de la maquette BIM, incluant le tableau de bord des livrables attendus par la maîtrise d’ouvrage (maquette unique/ maquettes métiers, etc.), les bibliothèques d’objets ;

les conditions de mise à disposition de la maquette de conception au stade de l’exécution des travaux ;

la définition des livrables du dossier des ouvrages exécutés (DOE) et leur contenu ;

la définition des attentes de la maîtrise d’ouvrage relativement à la base de données en phase d’exploitation.

2365 – Les limites du cahier des charges BIM dans la commande publique. – En matière de commande publique, le cahier des charges BIM ne peut pas prescrire une méthode de conception / réalisation, qui incombe au maître d’œuvre et aux entreprises au titre de la loi MOP. Par ailleurs, le maître d’ouvrage public ne peut pas imposer un éditeur ou un format de logiciel natif. Le cahier des charges peut être mis à jour pour la consultation des entreprises et/ou la convention BIM de conception jointe au dossier de consultation des entreprises. Le maître de l’ouvrage pourra imposer dans le cahier des charges l’emploi d’un cadre de convention BIM, par exemple la convention type du PTNB542, avec des exigences spécifiques de présentation et de contenu.
2366 – La portée du cahier des charges BIM. – Le cahier des charges BIM fera partie intégrante du dossier de consultation et des marchés passés avec les entreprises et la maîtrise d’œuvre, et à ce titre aura une valeur contractuelle tant en matière de commande publique543 que de marchés privés de travaux. Bien qu’il n’existe pas de document imposant une liste des pièces constitutives du marché privé, en pratique il est fait application de la norme NF P03-00544 qui définit les livrables des marchés de travaux et confère une valeur contractuelle au cahier des charges. La maîtrise d’œuvre et les entreprises s’engagent à respecter et mettre en œuvre le cahier des charges, dont l’application pratique sera précisée dans le protocole BIM.
Sous-section IV – Le protocole-convention BIM de conception
2367 – Le protocole BIM du projet. – Le protocole ou convention BIM est le document opérationnel appliquant le cahier des charges BIM à un projet donné. Ce document est généralement désigné sous le vocable de « protocole BIM », dans le sens où il traduit les engagements réciproques des contributeurs de la maquette, mais il est également désigné sous le vocable de « convention BIM » dans la mesure où il s’agit d’un document contractuel signé par tous les intervenants. Dans la conduite du projet, la convention BIM va devenir le support des engagements réciproques des parties pour l’alimentation de la base de données, précisant le cahier des charges en phase conception, puis en phase réalisation.
2368 – La préparation du protocole BIM. – La convention BIM est un contrat complexe qui va s’additionner aux cahiers des charges habituels, dont la compréhension est déjà réservée aux initiés, en y ajoutant la composante BIM. La préparation de cette convention implique ainsi une bonne maîtrise à la fois du monde de la construction et du monde de l’informatique, ce qui justifie le recours à un BIM Manager pour sa préparation, mais également à des spécialistes du BIM (coordinateurs ou modeleurs) au sein de chaque contributeur pour en faire la négociation et l’alimentation. Il faut appliquer la même logique à la construction qu’à sa maquette BIM, qui en est le jumeau numérique, en distinguant la programmation, la conception et la réalisation.
À partir du cahier des charges BIM élaboré par le maître d’ouvrage, le BIM Manager va concevoir la maquette BIM à construire par les différents acteurs et les entreprises. Là où le cahier des charges donne les grandes lignes de la future maquette, et en constitue en quelque sorte sa colonne vertébrale, le protocole BIM va définir la procédure d’alimentation de la maquette et d’échange des informations par les différents intervenants comme une forme de dossier de consultation des contributeurs fixant la règle du jeu et les besoins en matière de construction de la maquette.
Il est primordial que toute l’équipe de maîtrise d’œuvre (architecte, bureau d’études structure, BET fluides, AMOE BIM, etc.) participe à l’élaboration du protocole BIM et y souscrive pleinement afin que la maquette BIM de conception réponde parfaitement au cahier des charges et soit opérationnelle. Le protocole BIM n’a de sens que s’il est opposable à tous les acteurs ayant à intervenir sur la maquette ; il doit donc être signé par le maître d’ouvrage et tous les intervenants du projet et rendu opposable aux sous-traitants.
2369 – La rédaction quasi obligatoire d’un protocole BIM détaillé. – Le protocole BIM peut renvoyer en partie aux normes ISO545, mais l’application des normes volontaires est facultative et ne peut résulter que d’une volonté non équivoque exprimée dans le contrat. Le terme de « convention BIM » fait partie du corpus documentaire constituant le plan d’exécution BIM (BEP) défini par la norme ISO 19-650. Il semble que la pratique n’ait pas assez de recul pour renvoyer aux normes ISO, et il paraît impératif de rédiger entièrement les contrats traduisant ces normes sans pour autant les contractualiser dans l’attente d’une forme de standardisation.
2370 – Un contrat type de protocole BIM. – Mediaconstruct a diffusé un guide méthodologique des conventions de projet en BIM à jour des normes ISO et notamment la NF EN ISO19650546, et le PTNB a diffusé une convention type547 construite en quatre chapitres : dispositions communes et générales relatives au projet ; organisation et processus BIM ; organisation et processus BIM et engagement des membres de l’équipe BIM. La convention BIM est ainsi une forme de manuel de construction détaillant notamment les spécificités du projet, ses acteurs, les rôles et responsabilités de chacun, fixant aussi les dates jalons des livrables, le niveau de développement attendu à chaque étape, les formats d’échange des informations, la propriété de la maquette, les responsabilités, la gestion des données ou encore les assurances.
Sous-section V – Le protocole ou plan BIM de réalisation
2371 – L’adaptation du protocole BIM à la phase réalisation. – Au stade de l’exécution des travaux, quel que soit leur mode de réalisation (entreprise générale ou par lots séparés), la convention BIM doit être mise à jour du résultat de la consultation des entreprises et des études d’exécution par l’entreprise qui sont soumises à la synthèse et au visa du maître d’œuvre (visa architectural et technique). Les entreprises répondent au cahier des charges BIM incluant la convention BIM, par un plan de mise en œuvre du BIM du projet.
Ainsi le BIM Manager, en lien avec la maîtrise d’œuvre, devra obligatoirement mettre à jour la convention BIM couvrant la phase de réalisation avec les entreprises (entreprise de gros œuvre, entreprise de second œuvre, etc.). Il peut s’agir d’une évolution du protocole BIM existant, avec une annexe corrective ou des compléments, ou véritablement d’une nouvelle convention négociée avec les entreprises. Le BIM Management peut évoluer à chacune des étapes de conception-réalisation et, à ce titre, la convention peut également évoluer sensiblement dès lors qu’elle traduit fidèlement le cahier des charges BIM du maître d’ouvrage.

Section III – La question des droits détenus par les acteurs du BIM

2372 – Le BIM en tant qu’objet de droits. – Le BIM est un objet protéiforme entièrement informatique qui pose la question des droits issus des créations immatérielles. Habituellement, la création numérique est abordée sous l’angle des droits de la propriété intellectuelle ou industrielle impliquant notamment le donneur d’ordre, les éditeurs de logiciels ou encore les créateurs et artistes participant à la conception de « l’œuvre ». Mais le BIM, en tant qu’avatar numérique d’un immeuble, rejoint sensiblement la question des droits sur l’immeuble lui-même, notamment en tant que création et œuvre d’un architecte, qui peuvent amoindrir les droits du maître d’ouvrage qui pense légitimement avoir les pleins pouvoirs sur sa « propriété ». À côté des droits intellectuels classiques, le BIM en tant que « base de données » bénéficie de certaines protections au titre de la propriété intellectuelle et d’un droit sui generis protégeant les créateurs de bases de données. Enfin, le BIM est également une forme de savoir-faire, et à ce titre peut bénéficier de la protection du secret des affaires.
2373 – Le BIM l’antithèse de la propriété individuelle ? – L’approche collaborative du BIM et l’échange régulier de données qu’il met en œuvre décloisonnent l’organisation séquentielle et parfois « individualiste » du secteur de la construction. Une donnée, tout en possédant une finalité propre à son concepteur (par ex., architecte) pourra être utilisée par un autre acteur dans un autre but (par ex., ingénieur), sans que la donnée de base en soit altérée548. Ainsi la délimitation des droits propres à chaque partie prenante sera de plus en plus difficile à dessiner, brouillant l’approche individualiste des droits, à mesure que l’ouvrage deviendra réellement collectif, traduisant l’usage optimal du BIM jusqu’à son niveau 3.
Sous-section I – La propriété des données
2375 – Le BIM, support de données informatiques susceptibles de propriété ? – Le BIM se présente comme l’avatar numérique de l’immeuble et devrait logiquement à ce titre conférer une forme de propriété à son détenteur. Toutefois, la notion de BIM est protéiforme et difficile à rattacher aux catégories traditionnelles des biens immatériels549. En effet, le BIM est une démarche entièrement numérique qui peut renvoyer alternativement à une méthode de construction digitale collaborative, à une base de données ou encore à une maquette 3D de l’immeuble. Comme réceptacle d’un ensemble d’informations, dont la propriété est débattue compte tenu de leur hétérogénéité et de leur impersonnalité550, le BIM semble difficilement pouvoir être qualifié de bien551. La reconnaissance d’un droit de propriété sur les données, parfois présentée comme une mesure de nature à favoriser leur circulation, soulèverait en revanche de multiples difficultés, notamment dans la définition de son champ et de ses titulaires, ainsi que dans son articulation avec le droit de la propriété intellectuelle552.
2376 – Qualification des informations ou des données. – Le BIM a recours au numérique et donc au système d’information (SI) qui désigne un ensemble organisé de ressources permettant de collecter, stocker, traiter et distribuer de l’information. Pour autant, les notions de « donnée » et d’« information », ou de « contenu numérique », qui sont souvent employées comme synonymes, ne bénéficient d’aucune définition légale même si elles sont l’objet de nombreux textes nationaux et internationaux553. La donnée renverrait à « un fait, une notion ou une instruction représentée sous la forme conventionnelle convenant à une communication, à une interprétation ou à un traitement soit par l’homme, soit par des moyens informatiques »554, et pourrait être décrite comme « … un message porteur de signification dont la valeur patrimoniale est fonction de sa densité informative »555.
2377 – La donnée renvoie à la notion d’information. – La définition et la qualification de l’information posent question depuis les premières lois traitant de la donnée, et notamment la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés556. Le Sénat avait proposé la définition suivante : « Ensemble composé d’une ou plusieurs unités de traitement automatisé de mémoire, de logiciel, de données, et d’organes d’entrée sortie et de liaisons qui concourent à un résultat déterminé, cet ensemble étant protégé par un dispositif de sécurité »557. On peut également citer la définition issue de la Convention sur la cybercriminalité (dite aussi « convention de Budapest ») signée le 23 novembre 2001, aux termes de laquelle l’expression « données informatiques » caractérise « toute représentation de faits, d’informations ou de concepts sous une forme qui se prête à un traitement informatique, y compris un programme de nature à faire en sorte qu’un système informatique exécute une fonction ».
L’absence de définition légale de la donnée se comprend cependant au regard du but poursuivi ; elle permet d’embrasser large et ainsi de mieux servir la finalité des textes et suivre l’évolution rapide des technologies numériques558. En pratique, la notion de donnée ou d’information répond à des qualifications « spéciales » dotées d’effets propres à chaque catégorie. Nous retiendrons ainsi que toute information renseignée dans la base BIM pourra, selon les circonstances et sa finalité, être une donnée appropriable et susceptible de droits.
2378 – Les attributs d’une propriété sur la base BIM. – Dans l’attente d’une avancée notable des débats théoriques sur la qualification du BIM en tant que bien sous un concept unitaire de propriété, la question est de savoir si le propriétaire d’un BIM bénéficie des attributs d’une propriété qui lui ferait défaut559 et qui prend souvent la forme d’une réservation. Du point de vue du maître d’ouvrage qui pense détenir le BIM de son immeuble, la base BIM consiste en un ensemble d’informations ou de données sur un immeuble au format numérique, pouvant être visualisées sous forme d’une maquette. Ce sentiment de propriété est-il corroboré par un exercice plein et véritable des droits associés à la propriété, à savoir l’usus, droit d’user de la chose, le fructus, droit d’en récolter les fruits et l’abusus, droit de disposer de la chose ?
2379 – La contractualisation des attributs de la propriété sur la base BIM. – Le droit d’user, de récolter les fruits et de disposer de la chose va résulter des contrats passés avec les producteurs de la base BIM, tel que le BIM Manager et tous les contributeurs tels que la maîtrise d’œuvre, les entreprises, bureaux d’études, etc. Aussi, il est indispensable de prévoir la cession de tous les droits patrimoniaux de toutes sortes détenus par les contributeurs et créateurs du BIM, et de fixer l’étendue des effets de la cession. La nature de ces droits et les modalités de cession seront analysées plus loin560. Le droit d’user de la chose va également résulter du support logiciel qui est l’outil de visualisation et d’utilisation des données en format natif (par opposition aux formats ouverts et universels tels que l’IFC). Il est donc indispensable de maîtriser parfaitement les contrats d’éditeurs de logiciels qui seront conclus en vue d’en garantir la pérennité d’accès, la sécurité et l’interopérabilité. Les fruits de l’utilisation et de l’exploitation des données issues du BIM seront en principe attribués au détenteur de la base de données dans les mêmes conditions que l’utilisation du BIM, sauf à tirer des revenus particuliers de la maquette non prévus par les parties.
2380 – La protection des données du BIM. – Il appartient à l’équipe de BIM Management d’organiser la sécurité de la base de données, pendant la période de production de la maquette, et jusqu’à sa remise au maître d’ouvrage dans sa version finalisée. Le maître d’ouvrage devra ensuite, éventuellement avec tous conseils spécialisés, organiser l’hébergement, l’entretien de la maquette, les logiciels et leur sécurité, antivirus, firewalletc. Ces mesures visent à assurer la détention pérenne de la maquette et à protéger contre des intrusions et des extractions frauduleuses des données.
Bien qu’elles soient immatérielles et insusceptibles d’appropriation en dehors de mécanismes de défense et de cryptographie, les données informatiques sont aujourd’hui protégées contre une appropriation frauduleuse, par les dispositions de l’article 323-1 du Code pénal qui réprime le fait « d’extraire, de détenir, de reproduire, de transmettre » frauduleusement les données d’un système de traitement automatisé de données (STAD)561.
Pour la jurisprudence, « l’accès frauduleux, au sens de l’article 323-1 du Code pénal, vise tous les modes de pénétration irréguliers d’un système, que l’accédant travaille déjà sur la même machine mais à un autre système, qu’il procède à distance ou qu’il se branche sur une ligne de télécommunication »562. Le vol de données est plus sévèrement sanctionné que le vol classique d’un bien. Le risque pénal d’un mauvais usage ou d’un usage frauduleux de la base de données remise ou cédée au maître d’ouvrage doit conduire les parties prenantes à définir précisément les droits et modalités de consultation/alimentation de la maquette aux différentes étapes et après achèvement.
Sous-section II – La relation avec l’éditeur de logiciels BIM
2381 – Logiciel au format propriétaire ou libre. – L’utilisation du BIM repose sur des logiciels563 dont les propriétaires (éditeurs) vont bénéficier de la protection des droits d’auteur564, incluant des droits patrimoniaux et des droits moraux. Les éditeurs de logiciels vont consentir aux utilisateurs du logiciel des droits d’utilisation qui prennent la forme d’une licence d’exploitation, et plus rarement des cessions emportant transfert de tout ou partie des droits patrimoniaux sur le logiciel. La mise à disposition au profit de l’utilisateur peut se faire au format « propriétaire », de manière strictement encadrée par une licence qui définit l’étendue des droits, limite les copies, et restreint son exécution pour des usages donnés. Le logiciel peut également être diffusé en format « libre ». Dans ce cas, son utilisation, sa modification et sa duplication par autrui en vue de sa diffusion sont autorisées, techniquement et légalement, soit parce que les droits font partie du domaine public, soit parce que le logiciel est mis à disposition sous un format de licence dite « libre ». Les principaux éditeurs de logiciels en matière de BIM565 fonctionnent dans un format de licences propriétaires au moyen d’un abonnement annuel payant.
2382 – Le contrat de licence. – Dans le cadre d’une licence, l’éditeur ne se destitue pas de ses droits patrimoniaux, mais permet simplement l’utilisation de son logiciel dans les conditions prévues par la licence, sauf exceptions de l’article L. 122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle566. Le droit d’utilisation du logiciel est ainsi limité par les stipulations du contrat de licence, qui fixe notamment les droits des utilisateurs selon le nombre de postes ou d’utilisateurs déterminé, le volume d’utilisation, le type de droit concédé, l’étendue géographique et/ou la durée, les responsabilités, les garanties, la confidentialité, etc. Le Code de la propriété intellectuelle confère toutefois un certain nombre de droits intangibles aux utilisateurs d’un logiciel, nonobstant toute rédaction contraire au sein du contrat de licence :

le droit de réaliser une copie de sauvegarde (CPI, art. L. 122-5) ;

le droit d’accomplir les actes nécessaires à l’utilisation du logiciel ;

le droit d’étudier le fonctionnement du logiciel ;

le droit de décompiler le logiciel à des fins d’interopérabilité (CPI, art. L. 122-6-1, IV).

2383 – La négociation illusoire du contrat de licence. – En principe, c’est la maîtrise d’œuvre ou le BIM Manager qui contracte avec l’éditeur du logiciel et qui, dès lors, négocie les garanties et engagements de service ainsi que le droit de sous-licencier aux autres acteurs de la maquette. En pratique, les logiciels du BIM impliquent des multinationales567 avec lesquelles il semble illusoire de vouloir négocier tout ou partie du contrat de licence, qui se présente comme une forme de contrat d’adhésion en ligne, sauf à justifier d’un volume d’affaires significatif. La situation de quasi-monopole de certaines firmes ne les incite pas nécessairement à jouer pleinement le jeu de la concurrence entre les différents formats. L’utilisation du format IFC, qui se présente comme un langage universel, ne permet pas à l’heure actuelle de répondre entièrement à la difficulté d’interopérabilité entre logiciels propriétaires, ce qui incite à l’utilisation du même logiciel par tous les opérateurs.
2384 – La maîtrise technique et juridique des logiciels par le BIM Manager. – Dans la mesure où les logiciels sont édités via des contrats d’adhésion, le BIM Manager devra parfaitement maîtriser les conditions d’utilisation des logiciels employés sur le projet et organiser informatiquement la base de données BIM afin que les droits conférés à chaque acteur et au maître d’ouvrage puissent être exercés (alimentation, extraction, copie). A minima le BIM Manager devra s’assurer que l’éditeur s’engage sur la sécurité et la fiabilité des données transitant par le logiciel, et garantisse la perte, l’altération ou la destruction des données du logiciel568. Le BIM Manager devra également se préparer à un plan B en cas d’indisponibilité de la solution logicielle, de mise à jour conflictuelle, de dysfonctionnement ou d’erreurs de traduction des IFC et formats concurrents qui lui seront délivrés par les acteurs du projet. Dès lors que l’organisation d’un projet de construction s’appuie sur le BIM, il est impératif de prévoir un plan de continuation dans l’hypothèse de dysfonctionnements informatiques, le chantier ne pouvant pas être mis à l’arrêt à cause d’une défaillance de la maquette BIM ou des logiciels.
2385 – L’effet des clauses d’exonération de responsabilité des éditeurs. – Il est fréquent que le contrat de licence limite sa responsabilité en cas de dysfonctionnement du logiciel, d’erreur de traduction des IFC dans le langage objet, de problème de mises à jour, d’interopérabilité des fonctions, ou encore en cas d’arrêt ponctuel du service. En principe, les clauses limitatives de responsabilité ne peuvent pas produire effet dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur (réservés aux personnes physiques) ou un « non-professionnel » (toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles)569.
La jurisprudence a reconnu que le Code de la consommation ne s’appliquait pas « aux contrats de fournitures de biens ou de services informatiques qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant »570. Cette solution a été confirmée en matière de fourniture d’un logiciel571. Les juges du fond ont un pouvoir souverain d’appréciation du caractère de rapport direct du logiciel avec l’activité du cocontractant. En matière de construction BIM, les contrats souscrits par le BIM Manager, la maîtrise d’œuvre et les entreprises ont un lien direct avec leur activité de conseil ou de constructeur, ce qui pourrait être discuté s’agissant du maître d’ouvrage (selon son activité). Pour ces raisons, il semble raisonnable de ne pas compter sur l’application du droit de la consommation pour rééquilibrer les contrats et s’en tenir au contrat passé avec l’éditeur, négocié on non.
Sous-section III – La propriété intellectuelle dans le BIM
2386 – Le BIM, objet de propriété intellectuelle. – Le BIM signe l’entrée de l’immobilier dans l’univers immatériel et, par là, dans les problématiques de la propriété intellectuelle572 qui était jusqu’alors réservée à la protection des droits d’auteur de l’architecte. Le BIM, en tant que procédure de construction d’un avatar numérique de l’immeuble, pose la question des droits des créateurs et contributeurs de la base BIM créée à l’occasion d’un projet. Les données alimentant le BIM proviennent des participants à l’acte de construire, notamment la maîtrise d’œuvre de conception, les entreprises et bureaux d’études, et vont être agrégées sous la responsabilité d’un BIM Manager qui peut être l’un des acteurs susvisés ou une tierce personne.
La finalité de la construction de la maquette BIM est bien, en dernier lieu, de remettre au maître d’ouvrage une maquette BIM complète de la construction exécutée. Aussi il est naturel de prévoir la cession de tous les droits des contributeurs à la maquette. Cet exercice implique de circonscrire et de qualifier les droits potentiellement constitués au profit des différents intervenants, au titre de la propriété intellectuelle, des droits voisins ou encore du secret d’affaires. Sous l’angle de la propriété intellectuelle, le BIM pourrait être protégé en ce qu’il forme pour tout ou partie une œuvre ou qu’il constitue une base de données573.
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2388 – Les droits sur les œuvres incluses dans la base BIM. – Le processus BIM ne bouleverse pas les rôles des acteurs et en principe la titularité des droits de propriété intellectuelle sur les livrables échangés au sein du processus BIM595. Pour autant, le BIM en tant que base de données va être le réceptacle d’une multitude de documents, informations, données, produits par les intervenants à l’acte de construire. Bien que le contenu des informations échangées par les acteurs du projet reste inchangé sur le fond, le BIM modifie les modalités de remise et le format des rendus qui doit donc être adapté sur la forme. Par ailleurs, le concept même du BIM implique de fusionner différents livrables afin de créer une seule et même maquette. Aussi, il faut tenir compte des droits d’auteur de l’architecte sur ces livrables tels que plans, croquis ou encore maquettes qui seraient inclus dans la base BIM, en préservant toute modification ou altération illicite sans empêcher toutefois la démarche collaborative du BIM. Étant rappelé que la diffusion d’un contenu numérique, lorsqu’il est une œuvre, constitue un acte de communication au public et doit en principe être autorisée par l’auteur. La convention BIM et le plan d’exécution doivent impérativement intégrer cette composante « droit d’auteur » des différents contributeurs et veiller à la traçabilité des interventions et modalités d’évolution du projet au sein de la base BIM.
2389 – La base BIM en tant qu’objet de droit de propriété intellectuelle. – En principe, l’adaptation technique d’une œuvre sur un autre support ne se traduit pas par la création d’une œuvre distincte596. Sous cet angle technique, le BIM ne serait pas l’objet de droits particuliers au titre de la propriété intellectuelle. Pour autant, la procédure du BIM et la base BIM constituée par les acteurs du projet semblent dépasser une simple reproduction technique pour devenir un ouvrage distinct qui n’interdit pas des choix créatifs. D’ailleurs, l’objet de la maquette BIM dépasse la seule construction de l’immeuble et a vocation à organiser les différents cycles de vie de l’immeuble et son exploitation. En cela, la base BIM va disposer d’une architecture propre et d’un contenu augmenté par rapport aux livrables traditionnels, et pourrait constituer en soi une création nouvelle distincte de l’œuvre architecturale. Chaque maquette BIM est conçue spécifiquement pour chaque opération sans être générique ; elle remplit en ce sens un critère d’originalité susceptible de bénéficier de la protection par le droit d’auteur.
2390 – La question de l’originalité en BIM. – La principale condition constitutive d’une œuvre597 est son originalité. Mais cette originalité n’est pas évidente à établir intrinsèquement en dehors de l’immeuble dont la base BIM est l’objet. La distinction entre la base BIM et l’œuvre architecturale s’établit matériellement, mais la capacité de distinguer ce qui relève de la création sur la maquette et ce qui relève des créations habituelles relatives à l’immeuble est complexe.
En soi, une maquette est une forme de livrable objet d’un processus de création au même titre que des plans598, et rien ne semble s’opposer à ce qu’une maquette BIM soit elle-même sujette à de tels droits. Il semble que le principal critère de distinction entre la création et la simple exécution soit la nature de prestation technique ou non599. Sur ce champ, une autre difficulté naît d’une forme de standardisation du processus créatif au travers de logiciels, le BIM étant le vecteur d’une forme d’industrialisation de l’immobilier600. Pour autant, la jurisprudence considère que les logiciels n’excluent pas l’apport intellectuel de l’auteur sous réserve de la « subsistance de la condition de l’originalité »601.
2391 – Le régime des droits des contributeurs du BIM, en tant qu’œuvre collective – La base BIM et les maquettes qui en sont la traduction visible constituent une combinaison originale des différents éléments et données la composant produits par différents contributeurs, tels que le BIM Manager, les BIM coordinateurs, BIM Modeler, maîtrise d’œuvre, entreprises, etc., pouvant constituer une œuvre. Cette situation de collaboration et d’œuvre construite collectivement pose la question de l’identité du ou des auteurs et titulaires des droits d’auteur sur la base BIM ainsi créée. Le Code de la propriété intellectuelle prévoit trois régimes de détention des droits d’auteur alternatifs : l’« œuvre collective », l’« œuvre de collaboration » ou encore l’« œuvre composite » (CPI, art. L. 113-2) qui sont susceptibles de s’appliquer au BIM.
2392 L’œuvre collective est celle « créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé » (CPI, art. L. 113-2). Cette qualification semble la plus adaptée dès lors que la base BIM et la maquette sont gérées par une seule et même personne qui jouerait un rôle d’administrateur, tel que le BIM Manager. En ce sens, l’œuvre pourrait être créée à l’initiative du BIM Manager, en son nom et sous sa direction pour être ensuite livrée et cédée au client maître d’ouvrage. L’œuvre collective serait alors la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée ; cette personne serait investie des droits d’auteur.
2393 L’œuvre de collaboration est celle « à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques » (CPI, art. L. 113-2). C’est en principe l’œuvre sur laquelle plusieurs auteurs ont travaillé sans qu’il soit possible de déterminer avec précision les apports des différents auteurs. Cette cotitularité non individualisable de l’œuvre se traduit par un régime d’exercice des droits proche de l’indivision, l’exploitation de l’œuvre dans sa globalité étant réservée à l’obtention du commun accord de toutes les parties. Il ne semble pas que la séquence actuelle de construction d’une base BIM soit qualifiable d’œuvre de collaboration dans la mesure où chaque contributeur exerce une mission déterminée, et qu’en principe la contribution de chacun suit un objectif propre. Toutefois, en BIM de niveau 3602, la base de données deviendra une seule et même œuvre dans laquelle toutes les contributions seront collectivement apportées, possiblement simultanément.
2394 L’œuvre composite est « l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière » (CPI, art. L. 113-2). Cette qualification pourrait également convenir à partir du BIM de niveau 2 dans lequel une seule et même maquette serait alimentée successivement par plusieurs contributeurs. Dans ce cas, le travail de chaque contributeur va s’incorporer dans une nouvelle œuvre s’appuyant sur l’œuvre précédente. L’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur s’appliquant à l’œuvre préexistante. Ce régime impliquerait de définir une chaîne de contributeurs, et de garder trace de l’objet de leur contribution à chaque œuvre, ce qui pourrait se concevoir par exemple pour le passage du BIM conception au BIM réalisation, et enfin au BIM exploitation. Lorsque la maquette passe d’une phase à une autre et évolue du fait de l’intervention d’autres acteurs (maquette de base, de conception, interventions des entreprises puis interventions des exploitants), on peut envisager la qualification d’œuvre composite ou dérivée.
2395 – L’importance de l’encadrement des droits sur la base BIM dans le contrat. – Faute de précision dans les contrats, l’application de la notion d’œuvre collective ou de collaboration ou encore d’œuvre composite s’appliquerait selon qu’un seul ou plusieurs intervenants sont à l’origine (concomitamment ou consécutivement) de la conception de la maquette. Le régime de l’œuvre de collaboration qui pourrait exister, notamment en BIM de niveau 3, ne semble pas souhaitable du fait de sa proximité avec une indivision rigide603. Il est donc impératif d’organiser contractuellement le régime de propriété de l’œuvre, en le traduisant dans le mode d’organisation et de création de la base BIM pour ne pas dénaturer la qualification retenue. Afin d’accompagner la transformation et le passage au BIM de niveau 3, des auteurs préconisent de faire évoluer le droit immobilier et de la propriété intellectuelle604.
2396 – Le BIM est par essence un objet destiné à évoluer. – Le BIM est un objet mouvant dont l’objet même est d’évoluer au fur et à mesure des contributions en vue d’aboutir à la maquette finale, sous la direction ou la diligence du BIM Manager. Il serait totalement contre-productif et antinomique au BIM collaboratif de devoir stopper le processus de modification faute d’accord de l’un des contributeurs. Par ailleurs, une fois la maquette BIM livrée au maître d’ouvrage à la fin des travaux, il est indispensable qu’il puisse utiliser sa maquette et la faire évoluer raisonnablement vers une base BIM d’exploitation. Pour toutes ces raisons, il semble indispensable de prévoir le régime de droit des auteurs sur la base BIM avec le BIM Manager, en fonction des modalités d’intervention sur le projet, et la cession des droits patrimoniaux de tous les contributeurs de la maquette au maître d’ouvrage dans les formes les plus larges, en respectant le formalisme de la cession (étendue et destination de la cession, lieu et durée)605.
2397 – La cession des droits d’auteur. – Le Code de la propriété intellectuelle ne distingue pas entre cession et licence en matière de droit d’auteur, ce qui fait douter de la pertinence d’opposer un transfert de droit réel (la cession) et une concession de droit personnel (la licence)606 dans ce domaine. Le terme de « cession » sera utilisé pour désigner tout transfert des droits patrimoniaux de l’auteur qui peuvent être démembrés indéfiniment (droit de représentation et/ou droit de reproduction, durée de l’exploitation, forme d’exploitation autorisée, lieu, etc.). Cette granularité des contrats de cession qui sont adaptés à chaque situation explique que « les contrats par lesquels sont transmis des droits d’auteur doivent être constatés par écrit » (CPI, art. L. 131-2), et que la cession de tel ou tel attribut ne se présume pas607. D’ailleurs, « le consentement personnel et donné par écrit de l’auteur est obligatoire », ce qui renforce cette obligation d’un écrit et exclut en principe la représentation de l’auteur, sauf incapacité. Toutefois, certains auteurs considèrent que l’écrit ne serait requis qu’ad probationem et non pas ad validitatem608, en reconnaissant toutefois que l’exploitant qui n’arriverait pas à démontrer son droit risque d’être poursuivi pour contrefaçon609 ce qui est très dissuasif.
2398 La transmission des droits de l’auteur peut être consentie à titre gratuit ou onéreux et est subordonnée à certaines mentions. Ainsi l’article L. 131-3, alinéa 1er du Code de la propriété intellectuelle dispose que : « La transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ». La clause de rémunération de la cession doit être explicite et non équivoque, son absence ou sa mauvaise rédaction pouvant conduire à la nullité du contrat dans son ensemble610. Par exemple, beaucoup de contrats d’architecte font le choix de la gratuité, au regard de la mission globale de l’architecte qui est rémunérée, mais cela doit être écrit de manière détaillée. Il est donc obligatoire de lister les droits cédés, de préciser le prix de cession et les modalités d’exercice des droits et de circonscrire le lieu d’exploitation et la durée. Le contrat qui omettrait une partie de ces mentions serait privé d’efficacité et encourrait la nullité pour absence d’objet611. Les contrats relatifs aux droits d’auteur ne donnent lieu en général à aucune formalité de publicité.
2399 S’agissant des effets de la cession, la jurisprudence énonce que « les contrats portant sur les droits d’auteur sont gouvernés par le principe de l’interprétation stricte, d’où il découle que l’auteur est supposé s’être réservé tout droit ou mode d’exploitation non expressément inclus dans un contrat de cession »612, la « cession du droit de reproduction d’une œuvre de l’esprit est limitée aux modes d’exploitation prévus au contrat »613. Le contrat s’interprète strictement, et en faveur de l’auteur lorsque la convention est ambiguë. La cession des droits patrimoniaux de l’auteur sur des œuvres non identifiées qu’il n’aurait pas encore créées est frappée de nullité (CPI, art. L. 131-1). Par exception, la jurisprudence valide la cession d’œuvres non créées, mais qui peuvent être identifiées et individualisées à la conclusion du contrat614.
L’article L. 131-6 du Code de la propriété intellectuelle tolère l’insertion d’une clause tendant « à conférer le droit d’exploiter l’œuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat », ce qui permettrait de tenir compte des évolutions technologiques.
2400 – La cession des droits d’auteur en BIM. – La maquette BIM et les livrables qu’elle contient (maquettes, plans, schémas, calculs, etc.), peut être le résultat d’une forme d’originalité susceptible de bénéficier des droits d’auteur. Si les contrats du BIM et/ou les marchés de travaux ne prévoient aucune cession des droits patrimoniaux ni l’autorisation d’utiliser et de diffuser les données insérées dans la base au titre des droits sur l’œuvre, il est en théorie possible aux contributeurs justifiant d’un droit d’auteur de faire exercice de leur droit.
Pour la passation des marchés publics de travaux, les adjudicateurs peuvent recourir au CCAG PI615 qui prévoit deux options d’utilisation des droits de reproduction et de présentation, sous forme de concession ou de cession des droits patrimoniaux de l’auteur.
2401 – L’enjeu de la juste rétribution des architectes en BIM. – Le BIM est en phase d’adoption et génère un travail supplémentaire, notamment pour l’architecte ou les ingénieurs qui peuvent exposer un investissement particulier sur la base BIM de conception au-delà de leurs missions traditionnelles. Aussi il n’est pas impossible qu’un architecte, un bureau d’études ou un ingénieur qui aurait exposé un travail considérable sur la maquette puisse invoquer son droit pour s’opposer à l’utilisation de ces données ou à la modification de la maquette (par ex. en cas d’évolution du projet). Des auteurs considèrent que la fréquence de la problématique d’établissement des droits sera faible, avec toutefois un risque d’une forte intensité si rien n’a été prévu par les conventions616.
Sous-section IV – La protection des bases de données
2402 – Le BIM protégé en tant que base de données. – Le BIM met en œuvre une base de documents et informations indexés et classifiés dans la finalité d’obtenir plusieurs résultats issus de la réunion de ces données, tels que des visualisations 3D selon différentes requêtes, des calculs de surface, de matériaux, etc. Cette acception du BIM en tant que base de données peut donner lieu à deux formes de protection particulières : la première au titre du droit d’auteur, qui protège le contenant de la base et son architecture originale, et la seconde au titre du droit sui generis, qui protège le contenu de la base de données, en tant que masse de données constituant une valeur pour son producteur.
Le droit d’auteur porte sur le contenant de la base de données lorsque sont caractérisés des choix originaux et une forme de classification originale, constituant ainsi une forme d’œuvre de la part de son auteur. Le droit sui generis du producteur porte sur le contenu de la base de données lorsque sa constitution, son entretien ou sa représentation attestent d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Ces deux dispositifs bénéficient de textes spéciaux au sein du Code de la propriété intellectuelle.
2403 – Les bases de données protégées par le droit d’auteur. – Le droit d’auteur sur les bases de données protège la « structure de la base »617, à savoir les « choix ou la disposition des matières » qui « constituent des créations intellectuelles » (CPI, art. L. 112-3, al. 1er), et qui forment l’architecture intellectuelle et technique de la base de données. Le critère déterminant de la protection est l’originalité de la structure de la base de données.. Le droit communautaire précise que ce droit naît lorsque « son auteur exprime sa capacité créative de manière originale en effectuant des choix libres et créatifs, et imprime ainsi sa « touche personnelle » »618.
2404 – Le critère d’originalité, fondement du droit d’auteur. – L’originalité suppose un certain degré d’autonomie ou de pouvoir d’initiative du créateur qui va au-delà d’une simple réponse à des contraintes techniques. L’appréciation de l’originalité relève des juges du fond et la Cour de cassation exerce en la matière un contrôle restreint à l’existence d’une motivation. Le juge a, par exemple, pu retenir au sujet de la base du Guide Michelin que la disposition des données était « strictement fonctionnelle », pour conclure que le choix ou la disposition des matières « sont banals et ne constituent pas une expression originale de la liberté créatrice de son auteur »619.
2405 – Les bases BIM protégées par le droit d’auteur. – Le processus d’alimentation et d’indexation de la base BIM n’est actuellement pas standardisé malgré l’émergence des normes ISO620, de telle sorte que sa création pourrait remplir la condition d’originalité et donner lieu au droit d’auteur. Il semble toutefois que la marge d’originalité se réduit à mesure que les guides et trames de charte BIM (cités supra, no 2359) sont diffusés et utilisés par les acteurs.
2406 – L’originalité d’une base BIM. – Sur la condition d’originalité de la base BIM, le processus créatif pourrait avoir lieu en amont du projet au niveau de la maîtrise d’ouvrage lors de l’écriture de la charte BIM qui va exprimer la stratégie BIM et éventuellement préciser une forme d’architecture type. Dans ce cas, il n’est pas certain que, prise individuellement, la base BIM d’un projet donné soit l’objet d’un droit d’auteur dans la mesure où la base serait générique, mais la base BIM type pourrait bénéficier d’un tel droit.
2407 – Un processus créatif plus ou moins important sur la finesse de programmation. – Si la charte BIM n’est pas renseignée sur les modalités d’alimentation et la trame de la base BIM, ce processus créatif pourrait être repoussé à la phase de programmation quand le maître d’ouvrage va préciser ses atteintes sur un projet donné telles que précisées dans le cahier des charges BIM. Dans ce cas, la base BIM pourrait naître en tant qu’œuvre dès l’écriture suffisamment précise du cahier des charges énonçant la méthodologie de la base BIM, qui pourra éventuellement se traduire dans une base BIM de programmation. Dans ce cas, il semble que la capacité créative des acteurs de la conception et de la réalisation sera difficile à rétablir, sauf à démontrer des modifications originales substantielles imputables à un ou plusieurs auteurs.
2408 – Un processus créatif souvent reporté en phase conception. – Dans l’hypothèse fréquente où la documentation de programmation ne serait pas assez précise sur l’organisation future de la base BIM, la création de la base BIM sera reportée en phase de conception impliquant le BIM Manager et la maîtrise d’œuvre classique (architecte, bureau d’études, etc.), et le droit d’auteur existera si une originalité particulière est mise en œuvre pour construire la base BIM. Il semble que chronologiquement les entreprises ne soient pas impliquées dans le processus créatif de la base, qui doit intervenir avant la phase de réalisation. Il n’est pas exclu qu’une nouvelle base soit constituée avec le passage en phase exploitation, traduisant de nouveaux objectifs traditionnels et de nouvelles données propres à la vie de l’immeuble.
2409 – Titulaire du droit éventuel sur l’œuvre. – La qualité de titulaire d’un droit sur la base BIM au titre de la protection des bases de données reviendra à un ou plusieurs auteurs dans les mêmes conditions que celles en matière de cession de droits d’auteur621. Il est donc essentiel d’organiser la cession des droits patrimoniaux du ou des auteurs et de qualifier les droits (œuvre collective, composite ou de collaboration) si plusieurs auteurs sont susceptibles d’en bénéficier. Si le processus créatif original intervient chez le maître d’ouvrage, cette cession devra éventuellement s’organiser avec l’AMO BIM missionné pour assister le maître d’ouvrage. En phase conception, la cession s’organisera avec le maître d’ouvrage, le BIM Manager et la maîtrise d’œuvre. Concernant la base BIM exploitation, le processus créatif impliquera le maître d’ouvrage, l’exploitant s’il est différent, éventuellement un locataire et tous conseils spécialisés en BIM exploitation. Le cas échéant la cession des droits devra être organisée dans le bail et les contrats avec l’exploitant ou tous conseils spécialisés.
2410 – Les bases de données protégées par le droit sui generis. – La protection des bases de données trouve sa justification dans un « investissement financier, matériel ou humain substantiel » consenti par son propriétaire en vue de l’exploiter. Ainsi le droit sui generis sur les bases de données se justifie par une approche purement économique visant à encourager les investissements dans des bases de données622, sans qu’il soit nécessaire de démontrer une quelconque originalité. Le droit sui generis est attribué au producteur ou « fabricant », selon la directive 96/9/CE623, qui est « la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants ». Ce droit peut faire l’objet d’une cession ou d’une licence (CPI, art. L. 342-1).
2411 – Preuve de l’existence d’un droit sui generis. – Il appartient à celui qui revendique un droit sui generis sur la base de données de démontrer l’investissement et sa finalité directement liée à la constitution, la vérification ou la présentation des données. La jurisprudence européenne distingue l’investissement pour la constitution des données qui « doit s’entendre comme désignant les moyens consacrés à la recherche d’éléments existants et à leur rassemblement dans ladite base »624, de l’investissement en vue de créer des données, l’activité de création n’étant pas prise en compte. Les juges français ont repris cette distinction, et ont par exemple reconnu que le « droit sui generis n’est (…) pas destiné à stimuler la création de données, mais à rentabiliser l’investissement affecté à la constitution d’un ensemble informationnel »625. Ainsi par exemple, en matière de BIM, les investissements exposés par le maître d’ouvrage pour créer les données, tels que le coût de la maîtrise d’œuvre ayant produit les plans ou encore le coût d’installation et d’entretien d’objets connectés pour un BIM exploitation, ne doivent pas être pris en compte.
En ce qui concerne l’ampleur de l’investissement « substantiel », les jurisprudences les plus connues la chiffrent en millions d’euros, mais le juge a pu reconnaître le droit sur la base de données en considération d’investissements s’élevant à quelques centaines de milliers d’euros626.
2412 – Le contenu des droits sui generis sur la base de données. – Le droit sui generis ne confère pas d’exclusivité sur une donnée en particulier, mais il organise une forme de réservation sur une « masse » de données, se traduisant par les droits d’extraction et de réutilisation. Ainsi, « Le producteur de bases de données a le droit d’interdire : 1o l’extraction, par transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support, par tout moyen et sous toute forme que ce soit ; 2o la réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu’en soit la forme » (CPI, art. L. 342-1)627.
2413 – Les critères qualitatifs et quantitatifs formant un investissement considérable. – L’investissement substantiel dans une base de données peut se quantifier selon une approche qualitative (valeur) ou quantitative (volume relatif), qui est le reflet de l’ampleur de l’investissement requis pour l’obtention d’un droit sui generis628.
Concernant le critère quantitatif, à savoir à partir de quel volume critique une extraction se révélerait frauduleuse, le juge a par exemple retenu que constituait une extraction quantitativement substantielle, l’extraction de 36 000 artistes sur les 184 000 artistes référencés dans une base de données du marché des œuvres d’art629.
Le critère qualitatif est peu exploité en jurisprudence, car il requiert une approche plus subjective en tenant compte de l’importance ou de l’intérêt des données630. Une des rares décisions jurisprudentielles porte sur une base de données sur les performances des enseignes de la grande distribution dont quelques graphiques uniquement avaient été reproduits, mais ces graphiques traduisaient en réalité un investissement substantiel sous-jacent631.
Les droits du producteur de la base de données sont protégés pénalement et civilement contre la contrefaçon par des textes spéciaux (CPI, art. L. 343-1 et s.) de la même manière que le droit d’auteur, avec le bénéfice d’un dispositif particulier de saisie-contrefaçon comme en matière de logiciel.
2414 – Les bases BIM protégées par le droit sui generis. – La base BIM peut constituer une base de données ayant donné lieu à un investissement important, et le groupe de travail du PTNB a considéré qu’à partir du niveau 2 le BIM est une base de données pouvant être protégée par le droit sui generis632. Pour autant, il semble qu’en phase construction, les investissements en vue de la constitution et l’alimentation de la base BIM ne sont pas nécessairement individualisables de l’investissement dans la construction de l’immeuble lui-même. Le critère d’investissement substantiel spécial pourrait ainsi être difficile à établir à cette étape.
2415 – L’objet d’un éventuel droit sui generis sur la base BIM. – En ce qui concerne l’objet même de la protection sui generis des bases de données, il n’est pas certain qu’une base BIM déterminée soit susceptible d’une extraction qualitative ou quantitative pertinente, car les données en tant que telles ne sont pas génériques et portent sur un projet donné. Dans ce cas, c’est plutôt la méthode ou l’architecture de la base qui ont une valeur, ce qui relève des droits d’auteur. Toutefois, si le projet est d’une très grande importance, justifiant une base BIM exceptionnellement importante, ou si l’extraction porte sur plusieurs bases BIM d’un même exploitant/maître d’ouvrage, une part quantitative ou qualitative des données pourrait être extraite et bénéficier de la protection des bases de données. En phase d’exploitation, la base BIM devient une véritable base de données qui va moissonner des informations en vue de rendre l’exploitation plus efficiente et moins coûteuse. D’ailleurs, l’alimentation et l’entretien de la base BIM exploitation peuvent avoir un coût substantiel facilement individualisable. Aussi la base BIM exploitation pourrait plus naturellement bénéficier du droit sui generis.
En cas de soustraction par un tiers, la nécessité de recourir au droit des bases de données n’est pas évidente dans la mesure où, en principe, les bases BIM n’ont pas vocation à être rendues publiques, et ainsi toute extraction frauduleuse pourrait être pénalement sanctionnée633. Si la soustraction provient d’une personne ayant un accès licite à la base, il semble également que la responsabilité contractuelle (s’il y a un contrat) et délictuelle du soustracteur puisse être recherchée.
Sous-section V – La protection du secret des affaires
2416 – La nouvelle protection du secret des affaires. – Si certaines créations ne sont pas directement protégeables par un droit de propriété intellectuelle, elles peuvent être protégées par des accords de confidentialité, et il en va de même pour le savoir-faire industriel qui ne fait pas l’objet d’un brevet634. Au-delà du cas de violation d’un accord de confidentialité qui impliquerait la responsabilité contractuelle ou délictuelle des acteurs, le savoir-faire industriel, technique ou organisationnel en tant que tel peut également bénéficier d’une protection spécifique au titre du secret des affaires qui a été reconnu en tant qu’actif des entreprises, et comme tel protégeable par le nouvel article L. 151-1 du Code de commerce635.
2417 – Les critères de la protection d’une information par le secret des affaires. – Aux termes de ce nouveau dispositif, une information protégée par le secret des affaires doit répondre aux trois critères cumulatifs suivants :
« 1o Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ; 2o Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ; 3o Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret » (C. com., art. L. 151-1).
La définition légale est assez proche de la reconnaissance du « savoir-faire » par le droit de l’Union européenne au titre de la réglementation concurrentielle des accords de transfert de technologie636, dont l’objet est d’encadrer les concessions de licences de droits sur technologie, et dont il est connexe.
2418 – Le secret des affaires dans le BIM. – L’organisation du BIM et les méthodologies appliquées par les acteurs du processus de création de la maquette peuvent illustrer le savoir-faire particulier de certains d’entre eux. Cette nouvelle protection vient compléter les éventuels droits d’auteur et protections contractuelles et techniques qui auront été mises en œuvre pour protéger les données. Pour cette raison, il est fondamental pour les contributeurs de la base BIM, et notamment le BIM Manager, mais également le maître d’ouvrage qui aura conçu la programmation avec une charte BIM et un cahier des charges BIM, éventuellement avec l’aide d’un AMO BIM, de circonscrire les méthodes ou données susceptibles d’être protégées par le secret des affaires, en précisant, par exemple, leurs conditions d’utilisation.
2419 – Les sanctions de la violation du secret des affaires. – La violation du secret des affaires est sanctionnée par les mesures judiciaires prévues aux articles L. 152-1 et suivants du Code de commerce, permettant au juge de prévenir, faire cesser et réparer une atteinte au secret des affaires, avec notamment des mesures d’injonction et d’interdiction, indemnité, dommages et intérêts. Ce qui est intéressant, c’est que le juge peut octroyer, a posteriori, une forme d’indemnité correspondant au prix que l’utilisateur du secret des affaires aurait dû verser pour en faire usage, organisant une forme de licence ponctuelle.

Section IV – La certification de la maquette BIM

2420 – Peut-on certifier le contenu d’une base BIM ? – Dès lors qu’un projet est initié en BIM, se pose la question de la qualité et de la véracité des informations incluses dans la maquette BIM existante. C’est également un enjeu de confiance dans l’intégrité des échanges et des livrables produits par chaque acteur du projet, qui est renforcé par l’approche collective de la base BIM. Chaque acteur risque de devoir s’appuyer sur une partie du travail d’un autre acteur du projet. Cette situation est problématique dans les appels d’offres initiés en BIM, dans lesquels les architectes et entreprises peuvent préférer reconstruire leur propre maquette au lieu d’utiliser la maquette officielle de programmation, pour s’assurer de sa bonne conception et de son intégrité par rapport au projet. Aussi, les acteurs sont confrontés à un dilemme de productivité, qui s’apparente à une appréciation du bénéfice/risque du remploi de la maquette existante par rapport à la reconstruction d’une maquette nouvelle, plus sûre mais plus coûteuse et souvent à risque dans un contexte d’appel d’offres.
2421 – Le géomètre-expert, certificateur traditionnel des plans. – Traditionnellement, les acteurs de la construction conçoivent leur projet à partir de livrables certifiés par géomètre-expert, que ce soit des plans en 2D ou une maquette en 3D. Outre la confiance accordée aux géomètres-experts et leur expertise reconnue, ces derniers bénéficient d’assurances obligatoires et d’un régime de garantie/responsabilité qui rassurent les acteurs du projet. En effet, selon l’étendue de leur mission, les géomètres-experts supportent une responsabilité contractuelle, avec souvent une obligation de résultat, et délictuelle de droit commun, mais ils sont également soumis à la responsabilité des constructeurs. À ce titre, ils doivent souscrire une police d’assurance en raison des responsabilités découlant de l’exercice de leur profession637.
2422 – Un régime de responsabilité renforcé. – Les géomètres-experts, techniciens liés au maître d’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage, sont directement visés par l’article 1792-1 du Code civil et peuvent à ce titre relever de la garantie décennale. Le géomètre-expert faisant fonction de maître d’œuvre est responsable de la même façon que des architectes (C. civ., art. 1792-1, 1o), ainsi qu’il a été jugé à propos d’un accident de chantier638. Les polices doivent couvrir non seulement l’activité de géomètre-expert, mais éventuellement l’activité de constructeur, dans la mesure où le géomètre-expert exerce des missions relevant des articles 1792 et suivants du Code civil sur la responsabilité biennale et décennale (principalement en matière de voirie et réseaux divers [VRD]). Bien entendu cette dernière police doit couvrir les activités de maître d’œuvre ou collaborateur des constructeurs, même si la responsabilité décennale du géomètre-expert n’est pas engagée639.
2423 La responsabilité contractuelle du géomètre-expert peut également être engagée à l’encontre du géomètre-expert mandaté pour établir un plan dans le cadre d’une mission d’implantation d’ouvrage. Il est soumis à une obligation de résultat dès lors qu’il y a mentionné un point qui s’est avéré inexact et qui est la cause du désordre. Ainsi la jurisprudence considère que l’erreur d’implantation découverte après réception relève du régime de la responsabilité décennale lorsqu’elle rend nécessaires la démolition et la reconstruction de l’ouvrage641.
2424 – Le géomètre-expert pourrait-il certifier une maquette BIM ? – La maquette BIM constitue une base de données dont les logiciels vont permettre une multitude de visualisations selon les acteurs et critères définis, et dont on peut extraire des livrables tels que des plans, des mesurages, des calculs, etc. Cet outil symphonique est bien plus complexe à appréhender qu’une simple maquette 3D d’un bâtiment existant, et un même ouvrage pourrait être représenté par différentes maquettes BIM selon des méthodologies et/ou des logiciels différents. Est-il possible d’en certifier et d’en garantir le contenu pour être utilisé par d’autres acteurs, sur le même modèle que les certifications actuelles par géomètre-expert ?
À l’heure actuelle il est techniquement et en pratique impossible de faire certifier une maquette entière ; seuls les livrables issus de la maquette, en 2D ou 3D, peuvent être certifiés par un géomètre-expert.
Afin de pallier cette difficulté, il semble que les praticiens s’orientent vers des labels par des organismes de certification, comme en matière de performance énergétique642.

Section V – Les questions de responsabilité et d’assurances dans le BIM

2425 – L’enjeu de la responsabilité et des assurances dans le BIM. – La construction est une source importante de contentieux et de responsabilité, ce qui a justifié des régimes de responsabilités particuliers et des obligations d’assurances fortes afin de prémunir les personnes lésées contre l’impécuniosité d’une personne fautive et d’offrir des solutions dans un temps plus court que celui du système judiciaire643. Le BIM, en tant que nouvel outil mais également en tant que méthode de travail collaborative, induit une adaptation des modalités d’exécution des prestations et des fonctions complémentaires dans la conduite des travaux. La jurisprudence a déjà eu l’occasion de consacrer un devoir de collaboration entre les intervenants à l’acte de construire644, mais le processus BIM va bien au-delà. Ces modifications sont-elles de nature à bouleverser un droit de la responsabilité et des assurances en matière de construction ?
Cette question sera successivement abordée sous l’angle des régimes de responsabilité des acteurs de la construction (Sous-section I) et des assurances de construction (Sous-section II).
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Sous-section I – La responsabilité des acteurs de la construction en BIM
2427 En phase de conception/construction et jusqu’à la livraison, la responsabilité contractuelle de droit commun permet au maître d’ouvrage d’actionner la maîtrise d’œuvre ou les entreprises dès lors qu’il subit un préjudice. L’emploi du BIM pourra durant cette phase être source de responsabilité en cas de mauvais usage de la maquette par rapport aux contrats BIM (cahier des charges, conventions BIM), de retard de livraison ou encore d’erreurs dans la maquette, comme cela est déjà le cas pour les outils et livrables traditionnels du processus de construction. Sauf rédaction particulière, les architectes et conseils sont tenus à une obligation de moyens, là où les entreprises sont tenues à une obligation de résultat. Aussi le maître d’ouvrage pourrait poursuivre les entreprises sans faute, en cas de mauvaise exécution des contrats BIM, et devrait prouver une faute de l’architecte. Le BIM, dans la mesure où il présente des garanties de traçabilité des échanges, pourrait aider à caractériser facilement les fautes de l’architecte.
2428 Post livraison, les garanties légales de construction couvriront les dommages à l’ouvrage et les malfaçons, sans que le BIM ne semble impacter la nature des garanties et les responsabilités. En tant que tel, le BIM est un outil qui ne peut pas être l’objet d’un vice de construction au sens du Code civil, et donc objet direct de la garantie décennale. Toutefois, le mauvais usage du BIM pourrait conduire à des non-conformités, malfaçons ou dommages concrets sur l’ouvrage, qui engageront à ce titre la responsabilité traditionnelle de leurs auteurs. Pour le moment, la base de données BIM ne constitue pas le référentiel contractuel des prestations qui demeurent exprimées dans des plans et notices littéraires annexés aux contrats (marchés, vente en l’état futur d’achèvement, contrat de promotion, etc.), et elle ne devrait pas à ce titre être source de défaut de conformité. Toutefois, il faut s’interroger sur la responsabilité associée à une publicité trompeuse de la maquette BIM qui ne se traduirait pas dans les documents contractuels signés. Le maître d’ouvrage devra être vigilant à ce sujet.
2429 La responsabilité de droit commun pourrait également trouver à s’appliquer en cas d’erreur ou de dysfonctionnement de la maquette finale remise à la livraison, ou en cas de contre-performance objective du modèle par rapport aux prévisions de la conception, notamment pour défaut de conseil. L’enjeu est de déterminer s’il s’agirait dans ce cas d’une responsabilité sans faute sanctionnant une obligation de résultat ou une obligation de moyens nécessitant de démontrer une faute.
2430 Du point de vue du maître d’ouvrage, l’effet des garanties légales et obligations contractuelles de résultat conduit à ce qu’un constructeur soit reconnu coupable pour l’intégralité du dommage. Le BIM ne semble pas impacter significativement la couverture des risques inhérents à la construction, et devrait en principe améliorer sa situation en ajoutant possiblement de nouvelles garanties et en optimisant le processus de construction, avec une meilleure traçabilité des échanges et des éventuelles fautes.
2431 – Le BIM présente un enjeu de responsabilité fort pour les constructeurs. – En tant que nouveau support des échanges, impactant la séquence habituelle de la construction, le BIM peut être source de nouvelles responsabilités pour les constructeurs dont ils ne mesureront pas toujours la portée663. Les garanties légales ne sont pas directement impactées dans la mesure où elles concernent les dommages post-livraison sur l’ouvrage construit, sans lien direct avec le BIM et la maquette, même si une faute commise dans la procédure BIM peut induire une malfaçon véritable sur l’ouvrage. Le véritable enjeu du BIM en matière de responsabilité pour les constructeurs semble ainsi se reporter sur les responsabilités contractuelles et délictuelles ou quasi délictuelles, et subséquemment le jeu des assurances de responsabilité. Ces responsabilités ont vocation à être engagées en phase de conception-réalisation, réception et post-achèvement.
2432 En phase de conception-réalisation de l’ouvrage, les intervenants à l’acte de construire seront liés au maître d’ouvrage par des contrats incluant des contrats BIM (cahier des charges, convention BIM, etc.), sanctionnés vis-à-vis de leur cocontractant par une action en responsabilité contractuelle. Ainsi, concernant le BIM, le non-respect des délais, le mauvais format des fichiers, les erreurs dans les livraisons de maquettes ou encore la défaillance pourraient fonder une action en responsabilité contractuelle du maître d’ouvrage dès lors qu’un dommage et un lien de causalité sont établis. Selon que l’on considère que l’obligation du constructeur est de résultat ou de moyens, ce qui pourra être précisé dans le contrat, le maître d’ouvrage devra démontrer, ou non, la faute de son cocontractant. Les constructeurs devront donc parfaitement maîtriser la portée des engagements qu’ils souscrivent au regard de la démarche BIM.
2433 Il n’existe souvent pas de lien contractuel entre les constructeurs, qui peuvent quand même souffrir d’un préjudice lié à une mauvaise exécution par un autre acteur du projet, ou partager la responsabilité d’un dommage causé au maître d’ouvrage, leur permettant d’exercer entre eux des actions récursoires au titre de la responsabilité quasi délictuelle, qui nécessitent la démonstration d’une faute. Cela pourrait par exemple être le cas si une entreprise ne délivre pas sa maquette et que cela bloque l’ensemble du processus BIM, ou si de mauvaises données sont diffusées, pouvant causer une majoration de coût, des pénalités ou un retard d’une autre entreprise qui pourra l’actionner en responsabilité délictuelle. De ce point de vue, la démarche BIM semble être un enjeu fort de responsabilité entre les constructeurs entre eux, dès lors qu’ils ont vis-à-vis du maître d’ouvrage une forme de responsabilité collective. Les représentants des filières devraient ainsi se concerter pour convenir d’un socle de régime de responsabilité ou pratique de marché.
2434 En phase de réception et post-réception, le régime de responsabilité de droit commun sera résiduel et ne trouvera à s’appliquer qu’à défaut d’application des garanties légales. Il a été établi que le BIM ne serait possiblement pas une source de garantie décennale/biennale, faute d’être relié à un dommage sur l’ouvrage au sens du Code civil. Comment seraient alors sanctionnés les erreurs ou le dysfonctionnement de la base BIM remise au maître d’ouvrage, et quel serait le délai du maître d’ouvrage pour agir ? Les enjeux de cette question ne seront pas les mêmes selon que le contrat prévoit ou non la remise d’un dossier des ouvrages exécutés en BIM. Actuellement la jurisprudence considère que le maître d’œuvre est tenu à une obligation de résultat au titre de l’élément de mission « Dossier des ouvrages exécutés (DOE) »664, qui sera porté par l’architecte en matière de commande publique, et pourra éventuellement être déporté sur un coordonnateur ou un prestataire spécialisé (comme un BIM Manager) hors commande publique. Il semble donc que le maître d’ouvrage pourra dans ce cas agir en responsabilité, sans faute, en vue d’obtenir le DOE en BIM complet et fonctionnel. Si la base BIM constitue un des livrables hors DOE, la responsabilité éventuelle des contributeurs dépendrait du contrat, et serait sans doute une responsabilité pour faute.
2435 Concernant le délai d’action, s’agissant d’une prestation contractuelle contemporaine à la livraison/réception, la Cour de cassation a admis que la responsabilité de droit commun de l’entrepreneur et de l’architecte ne subsisterait concurremment avec la garantie de parfait achèvement que jusqu’à la fin de cette période de garantie et la levée des réserves665. En appliquant cette solution, le maître d’ouvrage ne pourrait plus agir en responsabilité au titre d’erreur ou de mauvais fonctionnement de la maquette au-delà de cette période. Il est donc primordial que le maître d’ouvrage attache une attention particulière à la conformité de la base BIM, éventuellement avec une mission spéciale pour un AMO BIM.
2436 – La responsabilité des nouveaux acteurs du BIM. – La démarche BIM implique de nouveaux acteurs endossant un rôle de conseil, pour l’AMO BIM ; une mission de coordination de la construction de la base BIM, pour le BIM Manager ; et enfin des fonctions d’alimentation et de synthèse des contributions, pour le BIM modeleur et le BIM coordinateur. Ces deux derniers métiers, qui sont les seuls définis réglementairement à ce jour, sont intégrés dans les équipes en interne, cotraitance ou sous-traitance de la maîtrise d’œuvre ou des entreprises et sont donc sujets aux responsabilités classiques des métiers auxquels ils s’intègrent. S’agissant de l’AMO BIM, il s’agit d’un conseiller qui n’intervient pas dans la conception et la réalisation et ne constitue pas un constructeur au sens du Code civil, sujet uniquement de responsabilité contractuelle de droit commun. Le BIM Manager pose plus de difficulté de qualification et a très vite interrogé les praticiens quant à l’application des garanties légales666.
2437 Le BIM Management n’est pas défini par des textes, et l’étendue des missions de BIM Manager est purement contractuelle et pourra varier d’un projet à l’autre. Selon Mediaconstruct France667, le BIM Management consiste :

à l’élaboration de la convention et son suivi ; [la préparation des conventions BIM] ;

à la consolidation de la maquette aux points d’étape ;

à la conversion des objectifs BIM du projet en usages BIM [passage de la charte BIM/cahier des charges BIM à la convention BIM] ;

au contrôle qualité du respect de la réalisation des cas d’usage.

Cette définition très large traduit plus la finalité de la mission que sa consistance. L’enjeu de la qualification du BIM Manager au regard des questions de responsabilité et d’assurance est de savoir s’il constitue un constructeur au sens de l’article 1792-1 du Code civil.
2438 – Les missions du BIM Management déterminent l’étendue de sa responsabilité. – Tout d’abord, si la mission de BIM Management est intégrée dans le marché des acteurs classiques de la maîtrise d’œuvre ou des entreprises et exercée par eux directement ou en sous-traitance668, il ne fait aucun doute qu’ils seront redevables des garanties légales des constructeurs dans l’exercice de la mission. L’enjeu concerne donc les acteurs du BIM Management exerçant au titre d’un contrat avec le maître d’ouvrage, en direct et seul dans un contrat séparé, ou en cotraitance avec les entreprises ou la maîtrise d’œuvre.
2439 Le BIM Manager n’est pas architecte ou entrepreneur, mais pourrait être considéré comme un « technicien ou autre personne liée au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage » au sens du Code civil. La Cour de cassation a déjà reconnu cette qualité à un coordinateur de travaux chargé, en cours de chantier, d’assurer la coordination temporelle et spatiale des actions des différents acteurs de la construction669, ou à un fabricant qui a donné des instructions techniques670 mais refuse cette qualité au contrôleur technique671, même s’il reste par ailleurs tenu à la garantie décennale au titre du Code de la construction et de l’habitation672.
2440 Dans les contrats de BIM Management, il semble que la pratique courante soit d’écarter toute décision technique à la charge du BIM Manager, le rôle de ce dernier restant limité à la mise à disposition d’un savoir-faire informatique pour la conception de la base BIM (une sorte d’architecte de la maquette BIM), et au contrôle de l’alimentation de la maquette sous la responsabilité exclusive des constructeurs (sorte de bureau de contrôle des contributions), sans exercer aucune mission de synthèse ou de détection des conflits ou anomalies avec le chantier. Dans ce contexte, on pourrait raisonnablement penser que le rôle du BIM Manager est assez proche du contrôleur technique, avec pour rôle de contrôler formellement les contributions de la maquette sans se substituer au maître d’œuvre, aux entrepreneurs, ou autres techniciens intervenant sur le chantier, qui l’alimentent sous leur responsabilité, et donc non redevable des garanties légales.
2441 D’autres contrats du BIM Management incluent des missions de synthèse et de détection des conflits, en proposant éventuellement des solutions pour les interférences identifiées. Dans ce cas, le BIM Manager est très proche des professionnels chargés des missions de synthèse qui sont sujets à la garantie décennale. La question est alors de savoir si sa mission est susceptible de générer un dommage de nature décennale. Le demandeur n’a pas à faire la preuve d’une faute du constructeur débiteur de la garantie décennale, mais doit en revanche établir l’imputabilité du dommage décennal aux travaux réalisés par le constructeur. Dans la mesure où le BIM Manager aura en principe un rôle très résiduel sur la conception et la réalisation des travaux, le lien entre le dommage et sa mission pourrait être délicat à établir. Il semble que le plus souvent, la responsabilité du BIM Manager devra être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle ou délictuelle, avec la démonstration d’une faute.
2442 – La base BIM, un équipement soumis à la garantie de bon fonctionnement ? – Les objets connectés et la domotique prennent une place de plus en plus importante dans la gestion et l’exploitation des immeubles673. Le juge a déjà eu l’occasion de reconnaître que la défaillance du système de domotique pouvait constituer un désordre soumis à la garantie de bon fonctionnement prévue à l’article 1792-3 du Code civil, en écartant la garantie décennale674.
La base BIM exploitation, dès lors qu’elle sert de support à la gestion de l’immeuble, pourrait-elle constituer un équipement de l’immeuble ? À ce jour, aucune décision de jurisprudence n’a reconnu la qualification d’équipement dissociable à un objet entièrement numérique et immatériel. Mais concrètement, un maître d’ouvrage qui perdrait toute sa base BIM et ne pourrait plus gérer les énergies et l’entretien de l’immeuble se trouverait dans une situation assez proche d’une défaillance physique des équipements en eux-mêmes. La maquette BIM pourrait devenir le support des techniciens devant intervenir sur l’immeuble en phase d’exploitation, et devra donc refléter à tout moment une vision exacte de l’immeuble existant, ou encore pourrait être l’outil privilégié des techniciens lors d’audits techniques de l’immeuble, à l’occasion d’une acquisition par exemple675.
Dès lors que le numérique deviendra un outil obligatoire, notamment pour les bâtiments tertiaires avec l’obligation de réduction des consommations et de gestion numérique de l’énergie676, ne faut-il pas admettre qu’une base de données puisse devenir un équipement à part entière de l’immeuble, sujet à la garantie de bon fonctionnement ? Il semble que la question mérite d’être posée.
Sous-section II – Les assurances construction et le BIM
2443 – Le BIM, un objet à identifier par les assureurs. – Le BIM intervient dans un contexte de déploiement de techniques, procédés et matériaux innovants qui, par définition, ne bénéficient pas d’un retour d’expérience suffisant pour en appréhender précisément les risques.
2444 D’un côté, le BIM devrait permettre une meilleure traçabilité677 des échanges et contributions à l’acte de construire, que ce soit en phase de conception ou en phase de réalisation. À ce titre, le BIM est un puissant vecteur de maîtrise du risque et de gestion des coûts globaux d’une opération de construction, et offre au secteur de l’assurance la possibilité d’anticiper la maîtrise des risques et des coûts de leurs propres offres assurantielles678. Dans l’hypothèse d’un sinistre, l’expert devrait pouvoir consulter la base BIM comme un élément permettant, le cas échéant, de déterminer les responsabilités, l’accès et le maintien de la base BIM devant être organisés dans les contrats, au moins pour la durée des garanties.
2445 D’un autre côté, le BIM transporte de nouveaux risques en cas de dysfonctionnement de la base BIM (risques de détérioration, perte ou piratage des données numérisées, erreurs de conception ou d’alimentation de la maquette, etc.), dont la portée sur le chantier et l’exploitation sont difficilement appréciables à l’heure actuelle, mais qui ne semblent pas relever de la garantie légale des constructeurs soumis à assurance obligatoire.
En tant qu’outil futur d’exploitation de l’immeuble, la question d’un dysfonctionnement de la base BIM pourrait se traduire par une mauvaise performance énergétique de l’immeuble. Ce risque a été, de fait, écarté de la responsabilité décennale par le législateur dans sa rédaction de l’article L. 111-13-1 du Code de la construction et de l’habitation, qui subordonne le dommage à « une surconsommation énergétique ne permettant l’utilisation de l’ouvrage qu’à un coût exorbitant ». En pratique, il ne semble pas que l’outil informatique puisse être source d’une contre-performance aussi excessive du bâtiment en dehors d’autres facteurs externes. D’ailleurs, à ce jour, aucune compagnie d’assurance n’accepte de couvrir le contrat de performance énergétique.
2446 – L’impact du BIM sur les obligations d’assurance des acteurs traditionnels de la construction. – Pour les acteurs traditionnels de la construction, reconnus comme constructeurs au sens du Code civil, l’utilisation du BIM ne semble pas devoir être assimilée à la situation où l’assuré exercerait une activité qui ne relèverait pas du secteur d’activité déclaré au sens qu’en retient la jurisprudence679. Le BIM resterait à ce titre un simple outil dont l’information ne serait pas obligatoire pour l’assuré. Il semble toutefois prudent que les constructeurs le mentionnent dans les contrats pour éviter toute difficulté à ce sujet, surtout s’ils endossent des missions de BIM Management.
La Mutuelle des architectes français, assureur historique de la profession d’architecte, a intégré dans ses polices d’assurance les missions BIM de ses sociétaires, des contrats qui fixent les définitions, les rôles, les responsabilités, avec des outils pour formaliser cette nouvelle acception du risque. Les architectes devront vérifier l’adéquation de leurs contrats avec ces dispositions.
Afin de couvrir les risques du numérique pendant la phase de construction, la Société mutuelle d’assurances du bâtiment et travaux publics (SMABTP) a lancé en mai 2018 le contrat « tous risques chantier cyber » (TRC cyber), qui couvre le risque de poursuite du chantier après une cyberattaque, en prenant en charge ses conséquences financières, y compris les pertes d’exploitation.
2447 – Les assurances du BIM Management. – Dans l’hypothèse où le BIM Manager exerce une activité permettant de le qualifier de constructeur, il doit être titulaire d’une assurance permettant de couvrir sa responsabilité décennale. En revanche, dans l’hypothèse où le BIM Manager n’exerce pas d’activité permettant de le qualifier de constructeur, il est alors responsable sur le fondement du droit commun de la responsabilité. Certains auteurs recommandent, par défaut, d’intégrer cette garantie systématiquement dans les contrats d’assurance des BIM Managers680. Le support informatique de la prestation pose également la question d’une assurance spécifique couvrant la responsabilité du BIM Manager au titre de ses activités de prestations de services informatiques. Compte tenu du caractère relativement récent du BIM, cette question reste ouverte.
2448 – La pratique des assureurs et BIM Managers. – Il semble que les assureurs ont dans un premier temps eu un positionnement prudentiel, en imposant aux spécialistes du BIM Management de souscrire une assurance dommages ouvrage et responsabilité civile. Aujourd’hui, avec plus de recul, des assureurs acceptent de moduler l’assurance professionnelle des BIM Manager, en excluant les assurances décennales, dès lors que le BIM Manager s’interdit toute intervention à l’acte de construire et d’effectuer des activités de synthèse et de détection des erreurs. Il est primordial que les contrats passés avec le maître d’ouvrage et les autres contrats tiennent compte de cette exclusion. Faute de respecter cet engagement, le BIM Manager qui participerait activement à l’acte de construire, en offrant spontanément des services de synthèse ou des conseils sur les techniques constructives, engagerait sa responsabilité pénale et ne serait pas assuré pour les éventuels dommages dont il serait l’auteur. Par ailleurs, il semble que la maîtrise d’œuvre, qui assistera le maître d’ouvrage dans la conclusion des contrats, aura le devoir d’alerter le maître d’ouvrage sur l’absence d’assurance décennale du BIM Manager.

Section VI – Le BIM dans l’activité notariale

2449 – Le notaire dépositaire de contenu numérique. – Les notaires offrent depuis de nombreuses années la capacité aux parties de déposer du contenu numérique au rang de leurs minutes, conférant ainsi date certaine et garantie d’intégrité aux données déposées. Cette offre s’exerce principalement dans ses actes authentiques, avec toutefois des limites quant au format des fichiers, en PDFA681 et au poids maximal actuellement de 35 mégaoctets, ce qui limite les cas d’usage à des fichiers simples. Ce service peut aussi prendre la forme d’une convention de dépôt au coffre-fort électronique auprès de la Chambre des notaires de Paris682. Cette seconde offre, méconnue du public, permet de déposer de nombreux formats sans limite de taille, mais son principal défaut est qu’il n’est pas directement accessible par le déposant et fait l’objet d’un formalisme de requête/délivrance ponctuelle, qui rend ce service proche d’une forme de coffre-fort à n’utiliser qu’en cas de conflits sur un contenu numérique.
2450 – Les limites techniques actuelles du service notarial. – Les deux services que nous venons d’évoquer ne sont d’aucun secours pour celui qui souhaiterait héberger une base de données BIM directement accessible et modifiable. Au mieux, le notaire pourrait déposer à une certaine étape formelle, par exemple la base BIM de livraison au format de dossier des ouvrages exécutés, qui pourrait être restituée au client en cas de demande, ce service faisant office de sauvegarde payante « de luxe » avec date certaine, permettant possiblement une traçabilité accrue des modifications postérieures. Mais actuellement, le notaire n’offre aucun service d’hébergement vivant d’un contenu numérique. Il semble indispensable que le notariat mène une réflexion en vue d’accompagner la transformation du format des livrables échangés par les parties à l’acte, qui dépasse la simple numérisation d’un document simple.
2451 – La place du notaire dans la démarche BIM actuelle. – Le notaire n’a généralement pas d’information sur le contenu des marchés de travaux, le support des échanges pendant les travaux ou encore les livrables remis par les différents intervenants à l’acte de construire. À ce titre, on peut s’interroger sur le fait de savoir si le notaire est réellement sollicité, voire même informé de la mise en œuvre d’une démarche BIM par un maître d’ouvrage et les acteurs d’un projet de construction.
Tant que la base BIM ne constituera pas le vrai référentiel contractuel d’un contrat reçu habituellement par acte authentique (on pense principalement aux ventes en l’état futur d’achèvement, contrats de promotion immobilière ou bail en l’état futur d’achèvement), il semble que le notaire n’aura pas à accompagner techniquement ou juridiquement la démarche BIM.
Les marchés de travaux eux-mêmes continuent à se référer à des livrables classiques, plans, notices, cahiers des charges pour définir les charges et obligations des parties. Il en résulte que les vendeurs en état futur d’achèvement, promoteurs, ainsi que leurs clients, continuent de s’engager contractuellement sur la base des plans et notices, même si une démarche BIM est engagée par ailleurs. Il semble donc peu probable que le notaire soit sollicité pour héberger une base ou maquette BIM contractualisée en annexe d’un acte authentique dans l’immédiat.
2452 – L’exemple des états descriptifs de division en volumes. – L’amélioration des techniques ne se traduit pas nécessairement dans les référentiels, ainsi qu’en témoigne la pratique des divisions en volumes, qui repose toujours sur des plans en deux dimensions et une notice littéraire avec des référentiels de cotes altimétriques.
Aujourd’hui les géomètres auraient la capacité d’émettre des maquettes en 3D avec du contenu numérique décrivant les coordonnées et caractéristiques d’objet, à mi-chemin entre le BIM et la simple représentation graphique. Pour autant, il n’y a pour le moment aucune demande pour utiliser ce genre d’instruments dans les états descriptifs de division en volumes, tant du côté des géomètres, qui devraient s’engager sur un contenu numérique et donc pratiquer des délais et coûts très importants, que du côté des clients qui n’ont pas forcément intérêt à définir parfaitement les volumes dans l’espace en bénéficiant généralement de tolérances d’exécution. Sauf erreur grossière, les clauses de tolérance et engagements de régularisations permettent aujourd’hui de régler les erreurs d’emprise des constructions. Le couple coût/opportunité semble à l’heure actuelle déséquilibré, mais à moyen terme il ne paraît pas exclu que le coût de la 3D intelligente modifiera la pratique des états descriptifs de division en volumes actuels.
2453 – L’impact du BIM sur le contenu des actes du notaire et le conseil. – Dès lors que le notaire est informé que l’acte authentique qu’il reçoit (principalement les ventes en l’état futur d’achèvement ou les ventes à terme) implique une démarche BIM du constructeur, il faut s’interroger sur le devoir d’information du notaire et sur les clauses à insérer éventuellement dans l’acte.
Actuellement les actes ne contiennent aucune information relative aux outils informatiques du projet de construction, et le fait que le projet soit construit avec des logiciels d’architectes en 2D, en 3D ou en BIM ne semble pas impacter le contrat, sauf éventuellement la liste des pièces remises par le vendeur/promoteur qui peut contenir des fichiers et formats spéciaux. Il semble souhaitable d’insérer a minima une clause informant de la démarche BIM et indiquant les obligations du vendeur/promoteur au regard de la base BIM remise à l’acquéreur, en renvoyant éventuellement aux contrats/marchés avec les acteurs du projet.
2454 Dès lors que le BIM deviendra une annexe des engagements des parties, support des engagements des parties à l’acte comme les notices et plans, le notaire devra être en mesure d’accompagner technologiquement cette évolution, ce qui pose le problème du format et de la taille des annexes. À ce sujet, les contraintes actuelles ne permettent pas d’envisager d’annexer une maquette 3D à un acte authentique, sauf à renvoyer à un acte de dépôt électronique.
Le dépôt électronique concomitamment à l’acte ne semble possible que dans le cas où les documents ne sont pas des annexes obligatoires directes de l’acte authentique, aux fins d’informations683. Ainsi, pour les constructions à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation dites du « secteur protégé »684, le contrat de vente en l’état futur d’achèvement doit revêtir un certain formalisme et contenir en annexe « un plan coté du local vendu et une notice indiquant les éléments d’équipement propres à ce local »685. Ainsi, la dissociation entre l’acte de vente en l’état futur d’achèvement et ses annexes dans un acte séparé de dépôt électronique ne serait possible qu’en dehors de l’habitation, dans le secteur tertiaire et secondaire. Dans ce cas, il faudrait que le service soit simplifié et adapté afin de répondre à l’enjeu des parties, offrir une base contractuelle fiable et traçable, avec une facilité d’accès (par clés login/mot de passe) sans avoir à passer par le notaire.
L’aspect « droit d’auteur » est abordé sous le prisme des droits patrimoniaux de l’architecte afin d’assurer à l’acquéreur qu’il aura les droits nécessaires à son projet Le cas échéant, les clauses BIM des contrats et marchés pourront être reproduites pour assurer l’information à l’acquéreur et éventuellement négocier des avenants.

479) Baromètre de la commande publique : résultats 2018, ADCF/CDC : https://medias.amf.asso.fr/upload/files/Barometre-cdc-adcf_resultats_2019.pdf
480) V. supra, no 2303.
481) L. no 85-704, 12 juill. 1985, relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée désormais codifiée aux articles L. 2410-1 à L. 2432-2 du Code de la commande publique (Livre IV : « Dispositions propres aux marchés publics liés à la maîtrise d’ouvrage publique et à la maîtrise d’œuvre privée »).
482) À contre-courant, la ville de Paris a innové avec l’appel à projets urbains innovants « Réinventer Paris » – lancé en mai 2017 par la ville de Paris et sept partenaires (Efidis, Paris Habitat, RATP, Renault, la RIVP, SNCF et Gares & connexions), qui implique des fonciers publics, mais destinés à être vendus et portés par des maîtres d’ouvrage privés, donc sans commande publique de travaux. Ils sont donc d’inspiration publique, mais sans la contrainte des marchés publics.
483) Niveaux du BIM décrits supra, nos 2287 à 2292.
484) Loi MOP, art. 2 ; CCP, art. L. 2421-1.
485) CE, 17 juin 2009, no 297509, SAEMN Bibracte : JurisData no 2009-075623.
486) CE, 25 nov. 1987, nos 50179 et 50620, Sté pour l’incinération des résidus de l’agglomération caennaise.
487) CAA Nantes, 7 févr. 1996, no 95NT00163.
488) Loi MOP, art. 3, 4 et 5 ; CCP, art. L. 2422-5 et s.
489) CAA Nancy, 27 janv. 2005, no 98NC02300, Cne d’Amnéville.
490) Les entreprises liées sont celles couvertes par la notion « d’influence dominante ».
491) CCP, art. 7 à 11-1, nouveau titre III (CCP, art. L. 2430-1 et s.).
492) Loi MOP, art. 8 ; CCP, art. R. 2431-3.
493) CCP, art. R. 2431-4 : « 1o Les études d’esquisse ; 2o Les études d’avant-projet ; 3o Les études de projet ; 4o L’assistance apportée au maître d’ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux ; 5o La direction de l’exécution des marchés publics de travaux ; 6o L’assistance apportée au maître d’ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement ; 7o L’examen de la conformité au projet des études d’exécution et leur visa lorsqu’elles ont été faites par un opérateur économique chargé des travaux et les études d’exécution lorsqu’elles sont faites par le maître d’œuvre ».
494) Les missions non obligatoires pour les constructions neuves sont les études préliminaires, les études de diagnostic ainsi que l’ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier.
495) CE, 29 sept. 2010, no 319481, Sté Babel : Rec. CE 2010, tables p. 851.
496) CAA Lyon, 26 nov. 2009, no 06LY00786, Sté Pygmalion SA : JurisData no 2009-018197 ; Contrats-Marchés publ. 2010, comm. 71 et 75, obs. F. Llorens.
497) A. 22 mars 2019, ann. 20, précisant les modalités techniques d’exécution des éléments de mission de maîtrise d’œuvre confiés par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé.
498) CCP, art. L. 2431-1 : « La mission de maîtrise d’œuvre est distincte de celle confiée aux opérateurs économiques chargés des travaux, sous réserve des dispositions relatives aux marchés globaux du chapitre Ier du titre VII du livre Ier ».
499) V. supra, no 2327.
500) CAA Lyon, 29 mai 2008, no 06LY01546, Ville de Lyon : Contrats-Marchés publ. 2008, comm. 185, note G. Eckert.
501) CAA Nancy, 5 août 2004, no 01NC00110, M. Delrez c/ Cne de Metz.
502) TA Orléans, 28 juill. 1994, no 94413, Conseil régional de l’Ordre des architectes de la région centre.
503) L. no 2018-1021, 23 nov. 2018, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, JORF no 0272, 24 nov. 2018. V. infra, no 2459.
504) La spécificité de tels ouvrages a pu justifier le recours à la procédure de dialogue compétitif dans le cas d’une cité municipale (cf. CAA Bordeaux, 15 sept. 2015, relatée infra, no 2402).
505) P. Devillers, in Contrats-Marchés publ. janv. 2019, no 1, dossier 10 : « Critiquée aussi en raison de sa rigidité, inadaptée à des petits projets telles la mise en accessibilité ou l’amélioration de la performance énergétique. En raison encore du bouleversement des pratiques induit par la nouvelle méthodologie du « Building Information Model » (BIM), méthode de travail collaborative de modélisation électronique des données du bâtiment, susceptible d’être exigée des pouvoirs adjudicateurs pour les marchés publics de travaux (Dir. 2014/24/UE, art. 22.4) ».
506) V. supra, no 2290.
507) V. étude du Conseil national de l’Ordre des architectes (CNOA) analysant le pourcentage de recours au BIM dans les avis de concours de maîtrise d’œuvre publiés depuis avril 2016 jusqu’à février 2018. L’étude conclut que le niveau était de 0,49 % en 2013-2014, et qu’au mois d’avril 2016, moment de l’entrée en vigueur du décret, le chiffre était tout de même déjà de 5,72 %.
508) V. supra, no 2304.
509) V. supra, no 2304.
510) CCP, art. R. 2121-5 : « La valeur estimée du besoin est déterminée, quels que soient le nombre d’opérateurs économiques auquel il est fait appel et le nombre de marchés à passer, en prenant en compte la valeur totale des travaux se rapportant à une opération ainsi que la valeur totale estimée des fournitures et des services mis à la disposition du titulaire par l’acheteur lorsqu’ils sont nécessaires à l’exécution des travaux ».
511) D. no 2019-1344, 12 déc. 2019, modifiant certaines dispositions du Code de la commande publique relatives aux seuils et aux avances, aux termes duquel le seuil de publicité et mise en concurrence passe à 40 000 € hors taxe (CCP, art. R. 2122-8).
512) Annexe no 2, Avis relatif aux seuils de procédure et à la liste des autorités publiques centrales en droit de la commande publique – I. – Seuils de procédure formalisée pour les marchés publics : les seuils mentionnés aux articles L. 1321-1, L. 2100-2, L. 2123-1, L. 2124-1, L. 2324-1, L. 3126-1, R. 2122-2, R. 2123-1, R. 2124-1, R. 2172-8, R. 2172-16, R. 2172-17, R. 2183-1, R. 2184-1, R. 2184-7, R. 2194-8, R. 2323-1, R. 2324-1, R. 2383-1 et R. 2384-1 du Code de la commande publique.
514) CJCE, 10 nov. 1998, aff. C-360/96, Gemeente Arnhem et Gemeente Rheden c/ BFI holding BV.
515) CJCE, 7 déc. 2000, aff. C-324/98, Telaustria.
516) CE, avis, 29 juill. 2002, Sté MAJ Blanchisseries de Pantin.
517) CE, 22 janv. 2007, no 294290, Synd. des transports d’Île-de-France.
518) CE, sect., 30 janv. 2009, no 290236, ANPE : JurisData no 2009-074852 ; Contrats-Marchés publ. 2009, comm. 121, note W. Zimmer.
519) CE, 6 mars 2009, no 314610, Cne d’Aix-en-Provence : Dr. adm. 2009, comm. 69 ; JCP A 2009, 343.
520) CCP, art. R. 2181-1.
521) CE, 7 oct. 2005, Région Nord-Pas-de-Calais.
522) 1) La nécessité d’adapter les solutions immédiatement disponibles ; 2o) le caractère innovant de la solution ; 3) le marché de prestations de conception ; 4o) l’impossibilité d’attribuer le marché sans négociation préalable en raison de circonstances particulières liées à sa nature, à sa complexité ou au montage juridique et financier ou encore en raison des risques qui s’y rattachent ; 5) l’impossibilité de définir les spécifications techniques avec une précision suffisante, ou encore ; 6) l’échec d’un appel d’offres suite à la remise d’offres irrégulières ou inacceptables.
523) CAA Paris, 3 avr. 2014, no 13PA02769, Assoc. « La Justice dans la Cité » : JurisData no 2014-006600 ; JCP G 2014, 458 ; JCP A 2014, act. 356.
524) CAA Bordeaux, 15 sept. 2015, no 15BX01208, Cité municipale de Bordeaux : JurisData no 2015-022913.
525) CE, 5 juill. 2017, no 401940, Cne de La Teste-de-Buch.
526) CE, 29 déc. 2006, no 273783, Sté Bertele SNC : JurisData no 2006-071223 ; BJCP 2007, p. 97, concl. N. Boulouis, obs. R. Schwartz ; Contrats-Marchés publ. 2007, comm. 75.
527) Est ainsi illégal le fait pour l’acheteur public d’avoir mentionné dans le cahier des clauses techniques particulières (CCTP), des références à des marques, sans être accompagnées de la mention « ou équivalent » comme le prévoit maintenant l’article R. 2111-7 du Code de la commande publique (TA Strasbourg, 24 juill. 2001, Préfet du Bas-Rhin c/ Dpt du Bas-Rhin et Sté SMAC Aciéroïd : Contrats-Marchés publ. 2001, comm. 184).
528) CE, 30 sept. 2011, no 350431, Région Picardie : JurisData no 2011-020388 ; Contrats-Marchés publ. 2011, comm. 316, note J.-P. Pietri.
529) CE, 24 avr. 2007, no 298584, Dpt de l’Isère : JurisData no 2007-071748 ; Contrats-Marchés publ. 2007, comm. 171, note J.-P. Pietri.
530) CCP, art. R. 2152-7 : « 2o Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. Il peut s’agir des critères suivants :

a) La qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l’accessibilité, l’apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, la garantie de la rémunération équitable des producteurs, le caractère innovant, les performances en matière de protection de l’environnement, de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture, d’insertion professionnelle des publics en difficulté, la biodiversité, le bien-être animal ;
b) Les délais d’exécution, les conditions de livraison, le service après-vente et l’assistance technique, la sécurité des approvisionnements, l’interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ;
c) L’organisation, les qualifications et l’expérience du personnel assigné à l’exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d’exécution du marché.
D’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché ou ses conditions d’exécution. Les critères d’attribution retenus doivent pouvoir être appliqués tant aux variantes qu’aux offres de base ».
531) CE, 11 mars 2013, no 367706, Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) : JurisData no 2013-004770 ; Contrats-Marchés publ. 2013, comm. 137, obs. M. Ubaud-Bergeron.
532) En ce sens A. Blandin et A.-M. Bellenger, Le BIM sous l’angle du droit, Eyrolles, 2e éd., 2019, p. 23.
533) CE, 10 févr. 2016, no 382153, SMC2 : JurisData no 2016-002222.
534) CE, 28 mai 2014, no 375941, Cne de Dijon c/ Sté Carrard Services : JurisData no 2014-011815 ; Contrats-Marchés publ. 2014, comm. 189, note W. Zimmer.
535) D. Richard, Construction – BIM : analyse et perspectives de l’immeuble numérique : Constr.-Urb. déc. 2017, no 12, étude 11.
536) V. supra, no 2301.
537) Le Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage, V. infra, no 2362.
538) Définition donnée par buildingSMART France-Mediaconstruct dans Le BIM Book L’essentiel, (accessible ici : www.fr.mum.ch/wp-content/uploads/2019/05/BIM-Book-mars-2019-1).
539) Le Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage, préc., p. 11.
540) Le coût du cycle de vie du bâtiment après achèvement représenterait 75 % de son coût total. Ces chiffres sont issus de l’étude Ouvrages publics et Coût global réalisée par la Mission interministérielle de qualité des constructions publics (MIQCP) en janvier 2006 (www.ecologie.gouv.fr/economie-construction).
541) Le Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage met à disposition un exemple de « Charte Maquette numérique » et de « Cahier des charges BIM » accessibles ici : http://bit.ly/29VRKMW et là : http://bit.ly/29Tn9Tk
542) Convention BIM type élaborée par le Cerema et BIM in Motion, accessible sur le site du plan BIM 2022 (https://plan-bim-2022.fr/actions/ptnb-axe-c-les-conventions-bim-types/les-conventions-bim-types).
543) CE, 31 juill. 1996, no 124065, Canac : JurisData no 1996-050710. – CAA Paris, 19 déc. 2002, nos 98PA03302 et 98PA03332, Sté Bernard et a.
544) Norme des marchés privés de travaux NF P03-001 révisée le 20 octobre 2017 disponible sur le site de l’Afnor, qui vise le cahier des clauses techniques particulières comme un document contractuel du marché.
545) V. supra, contenu Web « Présentation des principales normes et prénormes régissant le BIM » nos 2301 à 2307.
546) buildingSMART France-Mediaconstruct, Guide Convention BIM v2, mars 2018, téléchargeable gratuitement : https://buildingsmartfrance-mediaconstruct.fr/travailler-en-bim/pratiques/
547) V. supra, no 2365.
548) D. Richard, Construction – BIM : analyse et perspectives de l’immeuble numérique : Constr.-Urb. déc. 2017, no 12, étude 11.
549) D. Richard, Le BIM à l’épreuve du droit des biens : RD imm. 2018, p. 484. Si l’on se cantonne au BIM, une des notions les plus pertinentes a été développée par le doyen Carbonnier. Il s’agit du concept de biens incorporels absolus. Ces derniers se définissent comme « (…) des droits absolument détachés de tout support matériel ».
550) J. Frayssinet, A. Lucas et J. Devèze, Droit de l’informatique et de l’Internet, PUF, 2001, § 472, p. 271. – P. Catala, Ébauche d’une théorie juridique de l’information, in Le droit à l’épreuve du numérique : Jus ex machina 1998, § 31, p. 242.
551) J.-C. Galloux, Ébauche d’une définition juridique de l’information : D. 1994, 229 : « L’information entre donc dans la catégorie des choses avant de pouvoir être considérée comme bien car toutes les choses qui existent ne sont pas des biens pour le droit ».
552) V. Rapport « Droit de la propriété littéraire et artistique, données et contenus numériques » présenté au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) qui dépend du ministère de la Culture, 11 oct. 2018, Mission présidée par V.-L. Benabou.
553) Exemple avec la loi no 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, qui utilise le mot « donnée » cent quarante-deux fois sans en donner une quelconque définition.
554) Selon la définition de l’Afnor.
555) E. Daragon, Étude sur le statut juridique de l’information : D. 1998, p. 63.
556) P. Catala, Ébauche d’une théorie juridique de l’information : D. 1984, 98, « l’information est un bien en soi, immatériel certes, mais constituant un produit autonome et antérieur à tous les services dont elle pourra être l’objet (…). L’information est un bien créé et non pas donné. C’est un produit de l’activité humaine (…). Mais les éléments régulièrement captés ne deviennent information véritable qu’à travers le deuxième terme de l’appropriation : la formalisation qui les rend communicables ».
557) Définition proposée par le Sénat lors de l’élaboration du nouveau Code pénal, V. Rapp. Sénat no 3, 1987-1988, J. Thyraud, p. 52).
558) Rapport « Droit de la propriété littéraire et artistique, données et contenus numériques » présenté au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) qui dépend du ministère de la Culture, 11 oct. 2018, Mission présidée par V.-L. Benabou.
559) O. de Maison Rouge, La donnée, enjeu cardinal de la cybersécurité : Dalloz IP/IT 2018, p. 170 : « C’est pourquoi il convient ensuite de la qualifier, de manière à la soumettre à un régime juridique ad hoc, et à la préserver, en l’absence de tout droit de propriété. En l’espèce, la préservation prime sur le défaut de réservation ».
560) V. infra, nos 2402 à 2415.
561) Le « système de traitement automatisé de données » n’est pas défini par une loi, mais la jurisprudence a déjà pu reconnaître cette qualification pour :

un disque dur (CA Douai, 7 oct. 1992) ;

un radiotéléphone (CA Paris, 18 nov. 1992) ;

le réseau Carte bancaire (T. corr. Paris, 25 févr. 2000).

562) Paris, 11e ch., 5 avr. 1994 : LPA 1995, no 80, p. 13, obs. V. Alvarez ; JCP E 1995, I, no 461, obs. M. Vivant et C. Le Stanc ; D. 1994, inf. rap. 130.
563) Le droit français ne définit pas les logiciels. On retrouve dans le droit communautaire (Dir. 2009/24/CE, 23 avr. 2009, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur) une définition du « programme d’ordinateur » qui vise « les programmes sous quelque forme que ce soit, y compris ceux qui sont incorporés au matériel. Ces termes comprennent également les travaux préparatoires de conception aboutissant au développement d’un programme, à condition qu’ils soient de nature à permettre la réalisation d’un programme d’ordinateur à un stade ultérieur ».
564) CPI, art. L. 112-2 qui prévoit, que « sont considérés comme œuvres de l’esprit au sens du présent code : (…) les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire ».
565) Les logiciels BIM les plus connus sont notamment Revit édité par Autodesk, qui est le plus utilisé, Archicad édité par Graphisoft ou encore Allplan édité par le groupe Nemetschek.
566) La doctrine considère que le contrat de licence n’est pas un contrat de vente, mais un contrat de louage lorsqu’il est conclu à titre onéreux (C. civ., art. 1709) et un contrat de prêt lorsqu’il est conclu à titre gratuit (C. civ., art. 1875).
567) Le logiciel major est Revit, édité par la société américaine Autodesk (capitalisée à 31 921 millions USD [oct. 2019]) actuellement disponible en version 2020.2 (Source : Wikipédia).
568) Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 27-28.
569) C. consom., art. liminaire.
570) V. Cass. 1re civ., 24 janv. 1995, Sté Héliogravure Jean Didier c/ EDF : JCP E 1995, pan. 335 ; D. 1995, jurispr. p. 327-330, note Plaisant.
571) Cass. 1re civ., 30 janv. 1996, SA Crédit de l’Est c/ Sté André Bernis « Latitude 5 » et a. : JCP E 1997, I, 657, obs. M. Vivant et C. Le Stanc ; D. 1996 somm. p. 325-326, note D. Mazeaud ; Bull. civ. 1996, I, no 55 ; Contrats, conc. consom. 1996, comm. 56, obs. L. Leveneur ; JCP G 1996, I, no 3929, obs. F. Labarthe.
572) V., D. Richard, Le BIM à l’épreuve du droit des biens : RD imm. 2018, 484.
573) Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 14-15.
574) L’article L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle précise que seul le dessin ou modèle nouveau et présentant un caractère propre peut être protégé.
575) Rapport « Droit de la propriété littéraire et artistique, données et contenus numériques », préc., p. 17.
576) JCl. Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1134, Objet du droit d’auteur. – Œuvres protégées. Notion d’œuvre.
577) CA Douai, 27 oct. 2009 : RTD com. 2009, p. 105, obs. F. Pollaud-Dulian. À propos du jardin et des serres d’Auteuil dont l’originalité n’est pas démontrée : TGI Paris, 3e ch., 10 nov. 2016, no 15/17625 : LEPI févr. 2017, 110j2, obs. C. Bernault.
578) Guide des marchés publics et droits de propriété intellectuelle réalisé par le Groupement français de l’industrie de l’information à la demande du ministère de l’Équipement, des Transports et du Logement, Direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction, sept. 2003, p. 101.
579) CPI, art. L. 113-1. La même présomption figure à l’article 15.1 de la convention de Berne et à l’article 5 de la directive du 29 avril 2004 sur le respect des droits de propriété intellectuelle.
580) V. infra, nos 2466 à 2470.
581) Cass. 1re civ., 7 janv. 1992, no 90-17.534 : JurisData no 1992-000123 ; Bull. civ. 1992, I, no 7 ; RIDA 2/1992, p. 194 ; RJDA 1992/2, p. 210 ; D. 1993, p. 522, note B. Edelman ; RTD com. 1992, p. 376, obs. A. Françon.
582) Cass. 1re civ., 1er déc. 1987, no 86-12.983.
583) Cass. 1re civ., 11 juin 2009, no 08-14.138 : JurisData no 2009-048691 ; RIDA 4/2009, p. 395 ; Comm. com. électr. 2009, comm. 75.
584) CA Aix-en-Provence, 7 janv. 2016, no 13/08411 : Dalloz IP/IT 2016, p. 302, note Ph. Mouron. – Pourvoi rejeté par Cass. 1re civ., 20 déc. 2017, no 16-13.632, Musée d’Arles : JurisData no 2017-026961 ; Comm. com. électr. 2018, comm. 17, obs. C. Caron.
585) CE, 11 sept. 2006, no 265174 (www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000008220276/) – TGI Paris, ord. réf., 20 mai 2019, no 19/53926, Béguin c/ Ville de Paris : Légipresse 2019, no 372, p. 336.
586) Cass. 1re civ., 16 mars 2004 : RIDA juill. 2004, p. 209, no 2010.
587) CA Paris, 4e ch., 15 déc. 2004 : D. 2005, no 41.
588) Le juge pénal utilise « largement à titre préalable les concepts civils et institutions de la propriété littéraire » (P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, PUF, 11e éd. 2019, no 745, p. 814).
589) L’article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle assimile à la reproduction servile « la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque ».
590) CA Paris, 13e ch., 20 janv. 2000, no 99/03854 : JurisData no 2000-111542 ; Comm. com. électr. 2000, comm. 87, note C. Caron.
591) « Si la matérialité des faits de contrefaçon rend vraisemblable la volonté de commettre l’infraction, le prévenu conserve en toutes circonstances la faculté de démontrer sa bonne foi, exclusive du caractère intentionnel nécessaire à la caractérisation du délit » (Cass. crim., 24 sept. 2019, no 19-82.252).
592) Cass. crim., 24 sept. 1997 : JurisData no 1997-005582 ; Bull. crim. 1997, no 310.
593) CA Paris, 1re ch. A, 23 oct. 1990, Sté Fotogram-Stone et a. c/ La Cité des sciences et de l’industrie : JCP G 5 juin 1991, no 23, II, 21682.
594) CE, 5 janv. 1977, no 00261.
595) En ce sens, A. Blandin et A.-M. Bellenger, Le BIM sous l’angle du droit, préc., p. 118-119 (V. supra, no 2349).
596) Cass. 1re civ., 1er déc. 2011, no 09-15.819 : JurisData no 2011-026679 : « Même si elle conservait la trace de l’œuvre, la plaque de zinc, simple moyen technique utilisé pour permettre la production des lithographies qui sont seules des œuvres originales, ne pouvait être elle-même qualifiée d’œuvre de l’esprit ».
597) V. supra, no 2387.
598) M. Quiniou et D. Richard, Construction – Droit d’auteur, droits voisins et secret d’affaires dans le process BIM : Constr.-Urb. nov. 2018, no 11, étude 11.
599) TI Nîmes, 26 janv. 1971, Gout c/ Colombo : JCP G 1971, II, 16767 ; Gaz. Pal. 1971, 1, 306 : « Dès lors que l’ouvrage d’un ingénieur-conseil constitue un travail technique, établi sur des projets d’architecture simples, conçus par un architecte, dont les plans ne sont que la traduction graphique des calculs théoriques et l’application simple de règles techniques et de lois physiques, les héritiers de l’ingénieur-conseil ne sauraient revendiquer (…), un droit de reproduction… ».
600) V. supra, no 2297.
601) A. R. Bertrand, Droit d’auteur, Dalloz Action, 2010, « Subsistance de la condition d’originalité pour la création assistée par ordinateur », § 103.23 et s.
602) V. supra, no 2292.
603) En ce sens, Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 12 et 16 : « Les membres du groupe de travail ont pris conscience des risques liés au régime de copropriété sur une œuvre et ainsi de l’œuvre de collaboration ».
604) En ce sens, Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 16 : « Les membres du groupe de travail ont trouvé un consensus sur la nécessité de l’évolution du droit immobilier en raison de l’apparition des nouveaux outils auxquels il devra s’adapter avec les règles de propriété intellectuelle classiques. Cette évolution du droit immobilier et plus largement de ce secteur a d’ores et déjà été vécue par d’autres secteurs tels que la défense ou l’automobile ».
605) Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 16 : « C’est la raison pour laquelle l’importance particulière de définir le régime de propriété de l’avatar de l’œuvre dès sa création a été soulignée par les membres du groupe de travail tout comme la question de l’utilisation de l’œuvre après la fin du projet de conception-réalisation ».
606) V., sur la controverse doctrinale, A. Lucas, A. Lucas-Schloetter et C. Bernault, Traité de la propriété littéraire et artistique, LexisNexis, 5e éd. 2017, nos 630 et 631.
607) V. TGI Paris, 17 oct. 2019, no 16/01008 : JurisData no 2019-018156 ; Propr. intell. 2020, no 74, p. 58, obs. J.-M. Bruguière.
608) JCl. Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1310, Droit d’auteur. Exploitation des droits, par A. Maffre-Baugé et A. Lucas.
609) Cass. 1re civ., 27 nov. 2001, no 00-11.506 : JurisData no 2001-011882 ; Comm. com. électr. 2002, comm. 41, note C. Le Stanc.
610) V. TGI Paris, 30 nov. 1999, Benhaddou c/ Sté librairie Éd. l’Harmattan : Comm. com. électr. 2001, comm. 87, note Caron ; RIDA juill. 2000, p. 435.
611) V. Cass. 1re civ., 16 déc. 1992, no 91-11.480, Gouy c/ Nortène : JurisData no 1992-002868 ; RIDA avr. 1993, p. 193, note P. Sirinelli.
612) CA Versailles, 13 févr. 1992 : D. 1993, jurispr. p. 402, note B. Edelman.
613) V. Cass. 1re civ., 30 sept. 2010, no 09-15.091 : JurisData no 2010-017136 ; Comm. com. électr. 2010, comm. 119, note C. Caron.
614) V. Cass. 1re civ., 6 nov. 1979 : Bull. civ. 1979, I, no 271 ; RIDA juill. 1980, p. 167 ; JCP G 1980, IV, p. 25 ; D. 1982, inf. rap. p. 207.
615) Cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles approuvé par arrêté du 16 sept. 2009 (NOR: ECEM0912503A) : JO no 0240, 16 oct. 2009.
616) M. Quiniou et D. Richard Construction – Droit d’auteur, droits voisins et secret d’affaires dans le process BIM : Constr.-Urb. nov. 2018, no 11, étude 11.
617) PE et Cons. UE, dir. 96/9/CE, 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de donnée, considérants 15, 35 et 58.
618) CJUE, 1er mars 2012, aff. C-604/10, Football Dataco Ltd et a. c/ Yahoo ! UK Ltd et a., pt 38 et 45 : RIDA avr. 2012, p. 337, obs. P. Sirinelli ; Comm. com. électr. 2012, comm. 47, note C. Caron.
619) V. CA Paris, pôle 5, ch. 1, 27 oct. 2015, no 14/14239, SAS Michelin Travel Partner et SCA Manufacture française des pneumatiques Michelin c/ SAS La Fourchette : Propr. intell. 2016, p. 69, note J.-M. Bruguière.
620) V. supra, no 2298.
621) V. supra, no 2395.
622) JCl. Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1410, Droits voisins du droit d’auteur. – Nature des droits voisins, par X. Daverat. Avec l’article L. 341-1, il est clairement dit que les droits voisins assurent principalement la sauvegarde de l’exploitation commerciale. Avec le droit du producteur de bases de données, nous ne sommes pas très éloignés de la seule défense des investissements ».
623) V. supra, no 2403.
624) V. CJCE, 9 nov. 2004, aff. C-46/02, Fixtures Marketing Ltd.
625) V. CA Paris, pôle 5, ch. 2, 23 mars 2012, no 10/11168 : JurisData no 2012-011871 ; D. 2012, p. 1060, obs. C. Manara.
626) V. TGI Paris, 3e ch., 1re sect., 13 avr. 2010, no 09/03970, Sté Optima on Line : JurisData no 2010-010806 – « Ainsi, la société demanderesse démontre investir chaque année la somme de 600 000 euros dans la présentation, la mise à jour et la vérification de sa base de données France Prospect et répond ainsi aux conditions fixées par l’article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle ».
627) CPI, art. L. 342-1.
628) V. CJCE, 9 nov. 2004, aff. C-203/02, The British Horseracing Board Ltd, qui énonce que l’appréciation du caractère substantiel s’opère en contemplation de l’investissement opéré.
629) V. CA Paris, 4e ch., sect. B, 18 juin 2003, no 2002/03195 : JurisData no 2003-223155 ; Comm. com. électr. 2003, comm. 106, note C. Caron ; D. 2003, p. 2756, obs. P. Sirinelli.
630) V. JCl. Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1650, Droits des producteurs des bases de données.
631) V. CA Paris, pôle 5, ch. 1, 22 juin 2011, no 09/17015 : JurisData no 2011-017515.
632) Rapport Mission « Droit du numérique et bâtiment », préc., p. 13 à 16.
633) V. supra, no 2387.
634) Rapport « Droit de la propriété littéraire et artistique, données et contenus numériques », préc., p. 13.
635) L. no 2018-670, 30 juill. 2018, relative à la protection du secret des affaires.
636) Comm. UE, règl. (UE) no 316/2014, 21 mars 2014, relatif à l’application de l’article 101, § 3, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d’accords de transfert de technologie, art. 1er « Définitions ».
637) L. no 46-942, 7 mai 1946, instituant l’Ordre des géomètres-experts, art. 9-1.
638) Cass. 2e civ., 6 janv. 2000 : Resp. civ. et assur. 2000, comm. 71 ; JurisData no 2000-000029.
639) La Cour de cassation considère qu’une police d’assurance couvrant la responsabilité décennale légale ne couvre pas pour autant la responsabilité contractuelle du droit commun (Cass. 1re civ., 13 mars 1996 : RGAT 1996, p. 663, note H. Périnet-Marquet).
640) Cass. 3e civ., 28 févr. 2007 : RD imm. 2007, p. 274.
641) Cass. 3e civ., 4 mai 2016, no 15-15.899. – CA Lyon, ch. 8, 19 juill. 2016, no 14/02950.
642) Par ex : certifications Haute Qualité Environnementale (HQE) via Certivea, BRE Environmental Assessment Method (BREEAM) par le Building Research Establishment (BRE), ou encore la certification Leadership in Energy and Environmental Design (LEED) par l’US Green Building Council.
643) Pour une présentation synthétique de la garantie V. JCl. Responsabilité civile et Assurances, Synthèse Construction, par S. Bertolaso.
644) V. Cass. 3e civ., 2 juin 2016, no 15-16.981, publié au bulletin ; Constr.-Urb. 2016, 28, note M.-L. Pagès-de Varenne.
645) Le quasi-délit est un acte dommageable dont la responsabilité incombe à une personne qui n’a pas eu l’intention de nuire (c’est le cas de l’imprudence ou de la négligence). L’engagement de la responsabilité quasi délictuelle est très fréquent en matière de construction, car elle implique de nombreux acteurs qui peuvent commettre des fautes impactant d’autres acteurs du processus, sans lien contractuel.
646) Cass. 3e civ., 9 févr. 2011, no 09-71.498 : Constr.-Urb. 2011, comm. 59, obs. M.-L. Pagès-de Varenne.
647) Cass. 3e civ., 19 sept. 2019, no 18-19.687.
648) C. civ., art. 1792-1 : « Est réputé constructeur de l’ouvrage : 1o Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage ; 2o Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire ; 3o Toute personne qui, bien qu’agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l’ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d’un locateur d’ouvrage ».
649) Cass. 3e civ., 29 sept. 2016, no 15-21.839 : JurisData no 2016-022003 ; Constr.-Urb. 2016, comm. 148, obs. M.-L. Pagès-de Varenne.
650) Cass. 3e civ., 16 janv. 2020, no 18-22.748 : JurisData no 2020-000459.
651) Cass. 3e civ., 2 févr. 2017, no 15-29.420 : JurisData no 2017-001547 ; Constr.-Urb. 2017, comm. 56, obs. M.-L. Pagès-de Varenne.
652) Cass. 3e civ., 19 mars 2020, no 19-13.459 : JurisData no 2020-003958 ; JCP G 2020, 420 ; Constr.-Urb. 2020, comm. 70, obs. M.-L. Pagès-de Varenne.
653) Cass. 3e civ., 19 mars 2020, no 19-13.459 : JurisData no 2020-003958 ; Constr.-Urb. 2020, comm. 70, obs. M.-L. Pagès-de Varenne.
654) L. no 78-12, 4 janv. 1978, relative à la responsabilité et à l’assurance dans le domaine de la construction, codifiée s’agissant des assurances dans le Code des assurances (art. L. 241-1 à L. 243-9).
655) V. JCl. Construction-Urbanisme, Synthèse Assurances construction, 1er oct. 2019, par H. Périnet-Marquet.
656) C. assur., art. L. 243-1-1 : « Les obligations d’assurance ne sont pas applicables aux ouvrages existants avant l’ouverture du chantier à l’exception de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles ».
657) Cass. 3e civ., 15 sept. 2016, no 15-21.630.
658) C. assur., art. L. 241-1 :« Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du Code civil, doit être couverte par une assurance ».
659) C. assur., art. L. 243-3 : « Quiconque contrevient aux dispositions des articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code sera puni d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 75 000 euros ou de l’une de ces deux peines seulement (…) ».
660) C. assur., art. L.243-2 : « Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent justifier qu’elles ont satisfait auxdites obligations (…) ».
661) C. assur., art. L. 243-2 : « Lorsqu’un acte intervenant avant l’expiration du délai de dix ans prévu à l’article 1792-4-1 du Code civil a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance du bien, quelle que soit la nature du contrat destiné à conférer ces droits, à l’exception toutefois des baux à loyer, mention doit être faite dans le corps de l’acte ou en annexe de l’existence ou de l’absence des assurances mentionnées au premier alinéa du présent article. L’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée ».
662) Cass. 3e civ., 2 mars 2011, no 09-72.576 : JurisData no 2011-002602 ; RD imm. 2011, p. 290, obs. Malinvaud ; Constr.-Urb. 2011, comm. 76, obs. Pagès-de Varenne.
663) V. X. Pican, président du Plan transition numérique dans le bâtiment, mission « Droit du numérique et bâtiment » : « La principale inquiétude du groupe de travail a été celle de la répartition de la responsabilité entre les contributeurs de la maquette. Le BIM est un outil favorisant le gain d’efficacité et de temps, permettant en principe de limiter les retards et les erreurs. Cependant, le numérique n’empêche pas la reproduction et la systématisation des erreurs, au contraire ».
664) CAA Paris, 15 déc. 2008, no 06PA00229, Yovan X.
665) Cass. 3e civ., 28 janv. 1998, no 96-13.460 : JurisData no 1998-000233 ; Bull. civ. 1998, III, no 19 ; JCP G 1998, I, 187, no 30, note G. Viney ; RD imm. 1998, p. 257, note Ph. Malinvaud.
666) V. not. J. Roussel, BIM, maquette numérique et assurance construction : RD imm. 2017, p. 515.
667) Définition par buildingSMART-MediaConstruct France dans le guide « Le BIM et la transformation numérique du secteur de la construction » (www.buildingsmartfrance-mediaconstruct.fr).
668) L’article 1792-1, 1o du Code civil écarte implicitement les sous-traitants du domaine de la responsabilité spécifique des constructeurs et des assurances obligatoires – Cass. 3e civ., 10 janv. 2001, nos 99-11.374 et 99-13.897 : JurisData nos 2001-007715 et 2001-007717 ; Bull. civ. 2001, III, no 3 ; Resp. civ. et assur. 2001, comm. 85 ; RD imm. 2001, p. 166, note H. Périnet-Marquet.
669) Cass. 3e civ., 26 mai 2010, no 08-19.925 : RD imm. 2010, p. 491, note F. de Béchillon-Boraud.
670) Cass. 3e civ., 28 févr. 2018, no 17-15.962 : JurisData no 2018-002741 ; Constr.-Urb. 2018, comm. 59, M.-L. Pagès-de Varenne.
671) Cass. 3e civ., 22 mai 2012, no 11-11.945.
672) CCH, art. L. 111-24, al. 1er : « Le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l’ouvrage à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792,1792-1 et 1792-2 du Code civil (…) ».
673) V. supra, nos 2500 et s.
674) Cass. 3e civ., 26 févr. 2003, SMABTP c/ Assoc. Aful Foncière Urbaine Libre Îlot 2.1 Zac Front de Seine : JurisData no 2003-017909.
675) V. M. Pastier-Mollet et J. Guinot-Déléry, Le BIM : contrats et responsabilité : Act. prat. ing. immobilière avr. 2018, no 2, 2.
676) V. infra, no 2471.
677) L’utilisation de la technologie blockchain pourrait servir à assurer la traçabilité de chaque opération réalisée sur la maquette BIM, et pourrait donc être de nature à garantir cette traçabilité.
678) V. S. Rome, Assurance et construction durable : où en est-on ? : Opérations Immobilières mars 2018, no 103, 35381695.
679) V. Cass. 1re civ., 29 avr. 1997, no 95-10.187 : Bull. civ. 1997, I, no 131 ; D. 1997, 121 ; adde J. Roussel et S. Becqué-Ickowicz, op. cit., p. 240 et s.
680) V. A.-C. Navarro, BIM, objets connectés… les défis de l’assurance pour demain : Opérations Immobilières juin 2019, no 116, 36832167.
681) Le PDF/A est une version normalisée ISO (19005) du format PDF (Portable Document Format) spécialisée pour l’archivage et la conservation à long terme des documents numériques (www.pdfa.org).
682) V. infra, nos 3644 et s.
683) Sur cette question, le Cridon (Réponse Dossier : 843676, 29 sept. 2015) a confirmé en matière de diagnostics que : « L’esprit des textes prévoyant l’annexion de certains documents est la perfection de l’information donnée à l’acquéreur : l’annexion de ces documents à la promesse est constitutive d’un formalisme informatif susceptible d’être sanctionné (absence d’exonération de la garantie des vices cachés visée à l’article L. 271-4 CCH ; mise en cause de la responsabilité du rédacteur d’acte ou vice du consentement s’agissant du nouvel article L. 721-2 CCH). En conséquence, les documents à annexer à un acte de vente, pour l’information de l’acquéreur, conformément aux articles L. 271-4 à L. 271-6 et L. 721-2 du CCH, ne peuvent efficacement faire l’objet d’un acte de dépôt à la place d’une annexion. Un tel acte de dépôt ne serait pas constitutif d’une annexe à l’acte : il ne permettrait pas de considérer que les documents nécessaires à l’information de l’acquéreur lui ont été communiqués ».
684) V. CCH, art. L. 261-10.
685) V. CCH, art. R. 261-13.


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