Garantir le maintien des ambitions de performance énergétique dans le temps en cas d'immeubles soumis au statut de la copropriété

Garantir le maintien des ambitions de performance énergétique dans le temps en cas d'immeubles soumis au statut de la copropriété

– Le règlement de copropriété peut comprendre des dispositions spécifiques permettant d'atteindre l'objectif de sobriété énergétique du bâtiment en cours d'exploitation. – Les règles obligatoires pour l'utilisation des immeubles soumis au régime de la copropriété sont rassemblées dans le règlement de copropriété, lequel définit l'organisation et le fonctionnement de l'immeuble, et notamment :
  • les conditions de jouissance des parties privatives ;
  • les conditions d'utilisation des parties communes ;
  • la destination de l'immeuble : usage d'habitation, usage professionnel ou usage mixte, limites éventuelles à certaines activités ;
  • la répartition des charges entre copropriétaires et la méthode de calcul pour établir les quotes-parts de chacun ;
  • les règles relatives à l'administration des parties communes ;
  • l'état descriptif de division de l'immeuble, lequel peut être indépendant du règlement de copropriété et, le cas échéant, lui être annexé.
Les règles prévues dans le règlement de copropriété initial puis dans ses éventuels modificatifs s'imposent à l'ensemble des copropriétaires et aux copropriétaires successifs, et ce, durant toute la vie de la copropriété.
Par ailleurs, la loi ALUR du 24 mars 2014 consacre la pratique consistant – lorsque le bien vendu se situe dans une copropriété – à remettre à l'acquéreur copie du règlement de copropriété et ses éventuels modificatifs, au moment de la signature de la promesse ou de la vente (en l'absence de promesse). Ainsi lors de son acquisition d'un lot de copropriété, l'acquéreur adhère également aux règles existantes, relatives à la copropriété. Il sera en outre tenu de les imposer à ses éventuels locataires.
Sous réserve qu'elles soient conformes à la destination de l'immeuble et qu'elles ne portent pas atteinte aux droits des copropriétaires, le règlement de copropriété peut ainsi comprendre des dispositions spécifiques permettant d'atteindre l'objectif de sobriété énergétique du bâtiment en cours d'exploitation.
Dans la mesure où ces dispositions répondent à un enjeu collectif et écologique, il ne nous semble pas y avoir de raison pour que celles-ci puissent être considérées par le juge comme portant atteinte aux droits des copropriétaires et, par suite, comme pouvant être jugées non écrites.
Sur la question de la force contraignante de ces dispositions, la jurisprudence considère que « le règlement de copropriété ayant (…) un caractère contractuel, il en a été déduit qu'il était possible, comme dans tout contrat, d'y insérer des clauses pénales pour en garantir le respect ». Son montant est toutefois susceptible de modération par le juge.
Dans le même sens, une réponse ministérielle de 1976 indique que : « Le règlement de copropriété, comme toute convention, peut comporter des clauses pénales aux termes desquelles le préjudice occasionné par la méconnaissance ou la mauvaise exécution d'obligations contractuelles, dont la nature et le contenu doivent être déterminés avec précision, est réparé par le paiement des sommes fixées parfaitement à l'avance. Les sommes dues par le copropriétaire fautif doivent être assimilées à des dommages-intérêts acquis au syndicat ».
Toutefois, la doctrine précise que ces clauses « sont réputées non écrites si elles [ont] pour effet de sanctionner l'exercice par les copropriétaires de leurs droits légitimes ».
Par ailleurs, il serait également possible de faire référence à la sobriété énergétique directement dans la destination de l'immeuble, avec par exemple la précision suivante : « un bâtiment à usage de logements s'inscrivant dans une volonté de sobriété énergétique » afin d'assurer la pérennité de cet objectif environnemental, étant précisé que :
  • la modification de la destination de l'immeuble nécessite l'unanimité des copropriétaires ;
  • la modification des règles d'usage des parties communes doit être approuvée par les copropriétaires à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 (majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix) ;
  • la modification des conditions de jouissance des parties privatives nécessite l'unanimité des copropriétaires.
Enfin, pour garantir l'application et le respect des dispositions prévues au règlement de copropriété, il peut être confié au syndic de la copropriété, en sus des missions qui lui sont confiées par la loi, un rôle de « leader énergétique ».
– Le syndic doit être un – leader énergétique. – Élu par l'assemblée générale, le syndic est le personnage clé de la copropriété. La loi lui confie en effet la tâche d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci (L. 10 juill. 1965, art. 18).
En cela, le syndic doit être choisi avec soin, que ce soit parmi les copropriétaires ou en dehors d'eux. Le syndic est le garant de la bonne application des dispositions fixées dans le règlement de copropriété et, par suite, le garant de la bonne application des dispositions relatives à la sobriété énergétique. Par ailleurs, concernant le sujet de la dynamique collective et de la capacité à mobiliser les copropriétaires, le syndic pourrait également endosser le rôle de « leader énergétique », soit au titre de missions annexes à ses missions légales, soit en tant qu'AMU (conformément aux développements supra).
Dans une première hypothèse, il serait possible d'envisager une convention de prestations annexe qui serait jointe au contrat de syndic, ce dernier faisant l'objet d'une rédaction réglementée. Dans une deuxième hypothèse, il y aurait lieu de lui confier une mission d'AMU distincte de sa mission de syndic. Dans une dernière hypothèse, la mission d'AMU pourrait être confiée à un tiers, distinct du syndic.
Dans ces trois hypothèses, le recours à un AMU peut être prévu dès la rédaction du règlement de copropriété. Toutefois, la régularisation de la convention d'AMU et la rémunération y afférente nécessiteront une autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires à la majorité de l'article 25.
Il est à noter qu'en dehors de l'hypothèse prévue par l'article L. 443-15 du Code de la construction et de l'habitation, la durée des fonctions du syndic ne peut excéder trois années, tandis que la convention d'AMU n'a pas de durée spécifique. Toutefois, s'agissant d'une convention, celle du syndic comme celle de l'AMU restent révocables par les copropriétaires réunis en assemblée générale.
À ce titre, le sujet de la rémunération de l'AMU, en sus de celle du syndic, peut être un motif de révocation de cette convention.
– Des organismes de gestion garants de la sobriété et la performance énergétiques. – Dans le cadre du développement d'un projet de sobriété énergétique d'immeubles sur un espace plus important, savoir à l'échelle d'un quartier ou d'un îlot, les outils juridiques existants que sont l'association syndicale libre et l'union de syndicats permettent également de traduire cet objectif de sobriété énergétique.
Les ASL et les unions de syndicats sont des structures de gestion constituant sur le plan juridique l'élément fédérateur nécessaire à la bonne administration de plusieurs immeubles lorsque ces derniers génèrent des éléments d'équipements collectifs ou poursuivent des objectifs communs.
Dans le cadre de la réalisation de projets nouveaux, l'ASL apparaît particulièrement adaptée. Le promoteur impose à chaque acquéreur l'adhésion à l'ASL dont les statuts, déjà rédigés, sont annexés à l'acte de vente. L'ASL a pour avantage de grouper des propriétés et non pas des propriétaires : elle a un statut réel. Les obligations entraînées par l'adhésion suivent les immeubles en quelque main qu'ils passent. L'ASL a ainsi l'avantage de la stabilité. Une fois créée, elle ne peut être dissoute que dans les conditions prévues dans ses statuts. De plus, aucun propriétaire ne dispose de droit de retrait unilatéral.
En revanche, en présence d'une copropriété déjà existante, l'union de syndicats est mieux adaptée. En effet, l'adhésion à l'union de syndicats n'est pas individuelle, comme pour l'ASL, mais résulte d'une décision d'assemblée générale de la copropriété prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires. Le regroupement avec d'autres immeubles est ainsi plus souple.
Par ailleurs, l'ASL comme l'union de syndicats s'appuient, pour leur fonctionnement, sur un cahier des charges régissant les règles de fonctionnement du quartier ou de l'îlot. Le cahier des charges a un caractère contractuel et oblige tous les propriétaires. Il comprend notamment les droits et obligations pesant sur eux (à cet égard, une action en exécution forcée des obligations incombant aux propriétaires peut être engagée par le président de l'ASL ou de l'union de syndicats). Le cahier des charges de droit privé de l'ASL ou de l'union de syndicats pourrait ainsi comprendre des dispositions spécifiques relatives à la sobriété énergétique devant être respectées par l'ensemble des propriétaires compris dans le périmètre de l'ASL ou de l'union de syndicats.
– Le déploiement du droit privé au service de l'environnement. – Les développements qui précèdent montrent combien le droit privé peut être force d'impulsion sur les grands enjeux environnementaux. Le rôle des notaires sera essentiel en la matière. Par ailleurs, la formation des acteurs de l'immobilier sur ces questions est fondamentale. Enfin, il est important que les acteurs de l'immobilier comprennent que le droit privé peut être au service de l'environnement.