– Des bonnes pratiques portées par un professionnel plutôt que des obligations contractuelles. – Dans l'hypothèse où l'acquéreur d'un bâtiment est un investisseur dont les logements doivent faire l'objet d'un bail consenti par le propriétaire-investisseur au profit d'un locataire (qui deviendra par conséquent un usager du bâtiment), la création d'un document annexé aux baux et applicable au bâtiment peut être une solution pour fixer à l'égard des usagers dudit immeuble des règles relatives à la sobriété énergétique.
Dans l'hypothèse de l'acquéreur-investisseur, il est possible d'envisager la création d'une charte dite de « bonnes pratiques » ou un règlement intérieur, entre le promoteur et l'investisseur-acquéreur avec un engagement de ce dernier de le respecter. Par « bonnes pratiques », on peut entendre des actions réalisées plus ou moins fréquemment et facilement, renvoyant à différents degrés de pratiques : de l'usage (changeant) aux habitudes (ancrées).
Outre les prescriptions de bonnes pratiques, ce document pourrait avoir vocation à sensibiliser les usagers sur la question des économies d'énergie.
Cette proposition peut faire écho au « bail vert » que l'on retrouve dans les baux commerciaux et dont l'objectif est de définir un cadre pour le propriétaire et le locataire de locaux commerciaux à communiquer « mutuellement toutes informations utiles relatives aux consommations énergétiques des locaux loués ».
Toutefois, il convient de préciser que la possibilité de contraindre le locataire-usager avec le versement d'amende ou d'une pénalité sur le fondement d'une clause pénale est à exclure.
En effet, l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que :
« Est réputée non écrite toute clause : (…) i) Qui autorise le bailleur à percevoir des amendes ou des pénalités en cas d'infraction aux clauses d'un contrat de location ou d'un règlement intérieur à l'immeuble ».
La limite à cette proposition reste ainsi la mobilisation des usagers autour de la charte ou du règlement intérieur mis en place.
À cet égard, et en s'appuyant sur les recherches menées en copropriété sur la question de l'enjeu du collectif dans la rénovation énergétique qui ont démontré tout l'intérêt d'avoir un acteur mobilisé sur le terrain aux côtés des usagers, il pourrait être envisagé, dans l'hypothèse présentement visée, que l'assistant à maîtrise d'usage, développé par la pratique, puisse être cet acteur.
L'assistance à maîtrise d'usage (ci-après « AMU ») est une approche qui place les usagers utilisateurs, habitants, citoyens, au centre du processus d'élaboration d'un projet.
L'objectif du contrat d'assistance à maîtrise d'usage est de confier à une personne, l'assistant à maîtrise d'usage, une mission consistant à dialoguer avec les usagers ou futurs usagers d'un bâtiment afin de cerner leurs habitudes et leurs besoins, et les accompagner dans le changement et le développement de comportements plus vertueux, notamment en matière de sobriété environnementale. Les objectifs poursuivis par l'assistant à maîtrise d'usage peuvent toutefois être très variés, et comprendre notamment la création d'habitats intergénérationnels ou d'écoquartiers.
Le contrat d'assistance à maîtrise d'usage est donc un outil qui pourrait permettre de faciliter la prise en compte des objectifs de sobriété environnementale dans le cadre d'un montage avec des investisseurs.
En effet, la sensibilisation des occupants et responsables techniques des bâtiments aux comportements écologiques pourrait conduire à des réductions de factures d'énergie de l'ordre de 10 à 20 %.
Il est précisé que le contrat d'AMU n'est pas réglementé par les textes. Dès lors, la mission et le champ d'intervention de l'AMU peuvent être librement déterminés contractuellement, avec pour seules limites celles imposées par le droit commun des contrats. Un assistant à maîtrise d'usage peut ainsi être mandaté à tout moment lors de la conception, de la réalisation et/ou de l'exploitation d'un immeuble. Il sera néanmoins précisé qu'en pratique, le contrat d'AMU semble surtout être utilisé au stade de la conception ou de la réalisation des projets. Si certains AMU accompagnent les usagers dans la prise en main des immeubles dans les premières années suivant la livraison, il semble que le contrat soit peu utilisé à la date de ce jour dans le cadre de l'exploitation à long terme des bâtiments. Cependant, le fait de mandater un AMU uniquement pendant les premières années d'exploitation n'est peut-être pas suffisant pour pérenniser les bonnes pratiques apprises. À cet égard, rien ne semble interdire la conclusion de contrats d'AMU en phase d'exploitation de l'immeuble et pour une durée plus longue, d'autant plus eu égard aux avantages que cela peut présenter.
Dans le cadre d'un montage avec des investisseurs, un assistant à maîtrise d'usage pourrait ainsi être mandaté par les investisseurs en phase d'exploitation de l'immeuble, afin qu'il puisse établir des liens avec les habitants du bâtiment, écouter leurs besoins et les accompagner dans l'adoption de pratiques plus sobres d'un point de vue énergétique. L'AMU interviendrait alors comme un relais entre l'investisseur et les habitants, afin d'humaniser et de personnaliser leurs rapports.
Il pourrait en outre constituer un levier pour mobiliser le collectif autour de la question de la sobriété énergétique dans leur consommation quotidienne. Par exemple, il pourrait sensibiliser les habitants à l'importance de consentir à la collecte de données des compteurs installés dans leurs logements à des fins d'analyse et d'amélioration de la consommation.
Au titre des missions qui peuvent être confiées à l'AMU, ce dernier peut notamment animer des réunions et entretiens individuels avec les habitants de l'immeuble, afin de les interroger sur leurs usages et besoins. L'AMU peut également concevoir avec les occupants un guide d'usage conforme à la fois aux objectifs de performance environnementale et aux habitudes des usagers, définir les réglages de référence des équipements de l'immeuble avec les usagers et mettre en place un affichage des données de consommation au sein de l'immeuble qui soit accessible à l'ensemble des habitants. En outre, l'AMU peut former les habitants à des pratiques vertueuses, les accompagner dans le développement de ces pratiques et faciliter la création de comités d'habitants, avec des référents, afin que ceux-ci continuent à encourager leurs pairs à poursuivre leurs comportements vertueux. Ces missions peuvent ensuite être adaptées en fonction des particularités de chaque immeuble.
Il sera néanmoins précisé que le bon fonctionnement des contrats d'AMU repose sur un engagement des investisseurs de nommer des AMU et de reconduire leur mission le cas échéant. Dès lors, il conviendra de s'assurer que les investisseurs qui acquièrent les immeubles sont engagés envers le vendeur à cet égard, notamment aux termes de l'acte de vente.