CGV – CGU

PARTIE II – Repenser l’accession en pleine propriété
Titre 2 – En partageant le poids de l’accession
Sous-titre 1 – Le partage « vertical » de la valeur du logement : techniques de démembrement par création de droits réels

Chapitre I – L’usufruit comme outil d’accession progressive à la propriété

20357 – Présentation. – Un ménage accédant achète l’usufruit (ou un droit d’usage et d’habitation)590 pour une durée fixe (disons vingt ans pour les besoins de la réflexion), la nue-propriété restant appartenir à une société d’investissement. En termes économiques, on dit que la société assure le « portage » d’une partie de la valeur du logement. Dans un premier temps, l’accédant n’a donc à financer que l’usufruit du logement, auquel il accède à un prix décoté, contrepartie du fait que son droit est limité dans le temps, l’usufruit ayant vocation à s’éteindre au terme de sa durée. Cependant, dès l’origine, cet accédant usufruitier a été investi d’une option d’achat de la nue-propriété qui peut lui permettre, dans un second temps, de consolider sur sa tête la pleine propriété, à un prix déterminé ou déterminable dès le départ. Cette formule suscite trois types d’interrogations que nous envisagerons successivement : celles relatives à la durée de l’usufruit (Section I), celles relatives à la valorisation et au régime de l’usufruit, notamment aux causes d’extinction (Section II) et celles relatives à la fiscalité (Section III).

Section I – Durée de l’usufruit

Sous-section I – La durée viagère de l’usufruit, un obstacle financier

20358 – Rappel : définition de l’usufruit. – L’usufruit est défini comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance »591. L’usufruitier d’un immeuble a le droit de l’occuper ou de le louer592 mais non celui d’en disposer. Il peut seulement disposer de son usufruit593.
20359 – Extinction légale de l’usufruit. – L’article 617 du Code civil, auquel il est également renvoyé en matière de droit d’usage et d’habitation, dispose que l’usufruit s’éteint :

par la mort de l’usufruitier ;

par l’expiration du temps pour lequel il a été accordé ;

par la consolidation ou la réunion sur la même tête, des deux qualités d’usufruitier et de propriétaire ;

par le non-usage du droit pendant trente ans ;

par la perte totale de la chose sur laquelle l’usufruit est établi.

L’article 619 du Code civil dispose que l’usufruit qui n’est pas accordé à des particuliers ne dure que trente ans. L’article 620 dispose quant à lui qu’il est possible d’accorder un usufruit jusqu’à ce qu’un tiers ait atteint un âge fixe, cet usufruit durant alors jusqu’à cette époque même si le tiers meurt avant l’âge fixé. Cet article ne permet pour autant pas de déroger au caractère viager de l’usufruit qui s’éteint en tout état de cause au décès de l’usufruitier594.
Ainsi, par principe, l’usufruit ne peut pas être constitué de manière absolue, « détachée » de son titulaire. Si l’acquéreur est une personne morale, l’usufruit ne peut durer plus de trente ans. Si l’acquéreur est un particulier, l’usufruit est soit viager, soit d’une durée fixe plus courte. Or, ce caractère viager de l’usufruit affecte le dispositif étudié d’une difficulté financière.
20360 – Difficulté liée au caractère viager de l’usufruit consenti à une personne physique. – L’acquéreur d’un usufruit temporaire doit bien avoir à l’esprit que même lorsqu’il est constitué pour une durée fixe, l’usufruit est toujours un droit viager. Il ne survivra pas à l’accédant en cas de décès prématuré.
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Sous-section II – Éléments de solution

20362 Des éléments de solution se présentent en droit positif (§ I) tandis que des suggestions ont été formulées en droit prospectif (§ II).

§ I – Les solutions du droit positif

20363 Elles peuvent résider en la stipulation d’usufruits successifs (A), ou en la constitution d’une société (B).
A/ Constitution d’usufruits successifs
20364 – Une parade possible. – À cet inconvénient est la constitution ab initio d’usufruits successifs. Si le premier usufruitier veut éviter que l’usufruit acquis s’éteigne avec lui dans l’hypothèse où il décéderait avant l’écoulement de la période « acquise », il lui faudra faire acquérir simultanément un ou plusieurs usufruits successifs sur la tête de tiers tels que son conjoint, ses enfants ou des proches. Cela suppose cependant l’identification immédiate de tous les acquéreurs.
B/ Constitution d’une société
20365 – Une solution aux effets limités. – Faire constituer aux accédants une société pour acquérir l’usufruit permet de s’affranchir du caractère viager de ce droit, qui est propre aux personnes physiques. L’accédant serait alors titulaire de parts sociales librement cessibles et transmissibles. Mais, outre une complexité accrue, cette solution se heurte à deux autres limites : d’une part, la limite temporelle des trente ans, fixée à l’article 619 du Code civil ; d’autre part, la restriction au seul usufruit, le droit d’usage et d’habitation ne pouvant avoir pour titulaire qu’une personne physique, seule apte à utiliser et habiter le bien qui en fait l’objet. Elle implique enfin l’intervention de deux associés au moins lors la constitution de la société.

§ II – Les suggestions du droit prospectif

20366 Une brève réflexion prospective fait entrevoir deux possibilités d’évolution, l’une sur un fondement jurisprudentiel (A), l’autre pouvant résulter d’une adaptation de la législation (B).
A/ Évolution possible en direction du droit réel de jouissance spéciale
20367 – Fondement jurisprudentiel. – Dans un arrêt du 28 janvier 2015595, la Cour de cassation indique : « Lorsque le propriétaire consent un droit réel, conférant le bénéfice d’une jouissance spéciale de son bien, ce droit, s’il n’est pas limité dans le temps par la volonté des parties, ne peut être perpétuel et s’éteint dans les conditions prévues par les articles 619 et 625 du Code civil ». Cet arrêt a été suivi du fameux arrêt dit Maison de Poésie II596 qui pose quant à lui qu’un droit réel de jouissance spéciale consenti à une fondation est doté d’une durée déterminée et donc valable dès lors qu’il est prévu précisément pour la durée de la fondation. Il en résulte que, par le biais des droits réels de jouissance spéciale, il serait possible de déroger, par une clause claire, aux principes posés par les articles 619 (usufruit) et 625 (droit d’usage et d’habitation) du Code civil, mais à condition toutefois, si ce droit réel de jouissance spéciale octroie des utilités proches de celles d’un usufruit (et non d’une servitude), que ce droit reste limité dans le temps.
20368 – Un usufruit à durée fixe mais non viagère. – Il convient d’être prudent quant à la portée de cette jurisprudence. Elle signifie clairement que lorsque le titulaire du droit de jouissance spéciale est une personne morale, la durée de ce droit n’est pas enfermée dans la limite de trente ans imposée par l’article 619 du Code civil dans le cas d’un usufruit. La question se pose alors en doctrine de savoir s’il serait possible d’aller au-delà, et d’imaginer, par exemple, un droit réel de jouissance stipulé au profit d’une personne physique, pour une durée fixe (dans notre exemple, de vingt ans) et non viagère. L’avantage résiderait évidemment dans la transmissibilité du droit de jouissance spéciale ainsi créé aux héritiers, pour la durée restant à courir, en cas de décès prématuré de son titulaire. Certains auteurs597 ouvrent la porte à la validation de telles conventions. Pour autant, la doctrine majoritaire reconnaît que la question présente encore d’importantes incertitudes dont la pratique ne peut guère se satisfaire, puisque c’est là le point clé du dispositif envisagé… et de son financement !
B/ Création, par la loi, d’un usufruit sans caractère viager
20369 – Institution d’un usufruit non viager. – Reste une possibilité, peu étudiée à ce jour. Il s’agirait, au prix d’une réforme du Code civil, de permettre la constitution d’un usufruit à durée fixe, mais dépourvu de caractère viager. Les parties devraient, par une clause claire et précise, écarter conventionnellement cette caractéristique de l’usufruit, qui deviendrait alors transmissible à titre gratuit ou onéreux, pour la durée restant à courir au jour de la transmission.

Sous-section III – L’option d’achat de la nue-propriété

20370 – Schéma à l’attention des rédacteurs. – Dans la logique de notre réflexion, destinée à favoriser l’accession progressive à la propriété, une option d’achat de la nue-propriété viendra compléter l’usufruit constitué. Le délai de rétractation accordé aux acquéreurs non professionnels n’est pas à nouveau applicable, les modalités de levée d’option ayant été prévues dès le contrat initial, seul à donner lieu à leur application.
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Section II – Valorisation et régime de l’usufruit

Sous-section I – Valorisation de l’usufruit et de la nue-propriété

20372 – Libre valorisation, inopposable à l’administration fiscale. – La valeur d’un usufruit peut être fixée conventionnellement en utilisant toute formule financière choisie par les parties. Cependant, cette fixation amiable n’est pas opposable à l’administration fiscale par application de l’article 669 du Code général des impôts selon lequel :

1. pour la liquidation des droits d’enregistrement et de la taxe de publicité foncière, la valeur de la nue-propriété et de l’usufruit est déterminée par une quotité de la valeur de la propriété entière, conformément au barème fiscal ;

2. l’usufruit constitué pour une durée fixe est estimé à 23 % de la valeur de la propriété entière pour chaque période de dix ans de la durée de l’usufruit, sans fraction et sans égard à l’âge de l’usufruitier (sauf quand son usufruit viager a une valeur inférieure).

20373 – Assiette de taxation de la nue-propriété en cas de levée d’option. – Dans l’hypothèse de travail qui est la nôtre, prévoyant une option d’achat de la nue-propriété, une attention particulière doit être portée sur l’assiette des droits de mutation de celle-ci. Pour les mutations de droits démembrés, la documentation fiscale précise que : « Les parties demeurent libres de fixer le prix de l’usufruit et de la nue-propriété comme elles l’entendent (…) En revanche, pour la liquidation des droits de mutation dus à cette occasion, l’administration fiscale retiendra la valeur telle qu’elle résulte de l’application du barème non seulement lorsque le prix stipulé sera inférieur à la valeur vénale, mais aussi lorsqu’il sera supérieur »598. Ce principe doit, à notre avis, être combiné avec celui selon lequel les droits sont liquidés sur le prix exprimé dans l’acte constatant la mutation, ou sur la valeur vénale réelle de l’immeuble (par hypothèse au jour de la cession) si elle est supérieure599. Ainsi, en cas de levée d’option pour l’acquisition de la nue-propriété, il nous semble que les taxes devront être perçues non pas sur le prix exprimé dans l’acte, mais par application du barème de l’article 669 du Code général des impôts à la valeur vénale du bien telle que déclarée par les parties.
20374 – Valorisation d’un droit réel de jouissance spéciale. – Cette question n’est pas traitée par la documentation fiscale. En réalité, tout dépendra précisément du contenu du droit réel de jouissance spéciale et des utilités que ce droit conférera à son titulaire. La valorisation de ce droit pourra alors s’effectuer par comparaison avec la valorisation prévue par le barème fixé par l’article 669, II du Code général des impôts, lequel ne pourra toutefois pas être appliqué complètement, dans la mesure où, sauf risque de requalification, le droit réel de jouissance spéciale qui serait ainsi créé ne constituerait précisément pas un usufruit.

Sous-section II – Autres causes d’extinction de l’usufruit

20375 Deux autres causes d’extinction de l’usufruit ou du droit réel doivent en outre être étudiées.
20376 – Perte de la chose. Assurance. – S’agissant d’un droit réel, la perte de la chose est une cause de son extinction. Se pose la question de l’assurance et de la valeur d’indemnisation de l’usufruit en pareil cas de destruction. L’obligation d’assurance pèse sur l’usufruitier et à travers lui sur la copropriété.
20377 – Déchéance de l’usufruit. – Le démembrement de propriété impose à l’usufruitier diverses obligations, et notamment celle de conserver la substance de la chose. À défaut de s’y conformer, l’usufruitier encourt la déchéance de son droit prononcée par les tribunaux (C. civ., art. 618). Même si elle est relativement théorique, cette hypothèse doit être prise en considération par le rédacteur. Il faut tout d’abord prévoir la possibilité pour l’usufruitier de lever l’option d’achat de la nue-propriété en cas de mise en cause au titre de l’article 618 du Code civil. On a également rencontré des conventions ménageant en pareil cas à l’investisseur nu-propriétaire la faculté de mettre fin au démembrement par la mise en œuvre obligatoire de la cession de nue-propriété aux usufruitiers. Financièrement, la convention manque de réalisme : comment les usufruitiers qui n’ont pas eu les moyens d’entretenir correctement leur appartement trouveront-ils les ressources nécessaires pour procéder à cette acquisition ?

Sous-section III – Droits de l’usufruitier. Clauses restrictives à la location

20378 – Sur-rentabilité de la location. – Bien que le mécanisme ait vocation à permettre l’accession à la propriété en vue d’y installer sa résidence principale, la question de la mise en location doit être posée, car un usufruitier peut louer le bien démembré. Contrairement aux opérations d’usufruit locatif social (ULS), il y a là le gisement d’un fort effet d’aubaine.
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20380 – Clauses restrictives du droit de louer. – Peut-on alors, conventionnellement, restreindre le pouvoir de location de l’usufruitier ? Plusieurs solutions ont été évoquées. La manière la plus simple d’interdire la mise en location est de ne conférer à l’accédant qu’un droit d’usage et d’habitation. On pourrait aussi concevoir un mécanisme contractuel de limitation des loyers et/ou l’obligation de ne louer qu’à des locataires respectant certains plafonds de ressources. Reste une solution qui semble à la fois la plus simple et la plus conforme au but recherché : sanctionner la mise en location par la déchéance de l’option d’acquisition de la nue-propriété, plaçant de ce fait l’accédant devant une alternative : sacrifier la rentabilité de l’opération à la consolidation, sur sa tête, de l’entière propriété ; ou obtenir temporairement une rentabilité plus forte des capitaux investis, mais en sacrifiant sa mise de départ. Ce mécanisme aura, naturellement, pour conséquence immédiate d’inciter fortement l’usufruitier à exercer son option d’acquisition de la nue-propriété avant toute mise en location. Quelle que soit la solution adoptée, pareilles conventions, restrictives du droit de propriété (ou plus précisément de l’exercice de l’un de ses attributs, le fructus), devront faire l’objet d’une rédaction attentive pour justifier d’un intérêt légitime.
20381 – Sort des baux. – Il est souhaitable, en cas de location, et à défaut de levée d’option pour acquérir la nue-propriété, de prévoir conventionnellement l’application du mécanisme mis en place en matière d’usufruit locatif social par les articles L. 253-3 et suivants du Code de la construction et de l’habitation, qui ne sont d’ordre public que pour les logements sociaux et intermédiaires600.

Sous-section IV – Garantie hypothécaire

20382 – Difficile financement hypothécaire. – Le financement bancaire de l’acquisition de l’usufruit posera inévitablement la question de la garantie. Certes, une hypothèque conventionnelle ou légale peut être inscrite sur un usufruit (mais non sur un droit d’usage et d’habitation), mais les droits du créancier inscrit seront limités par les conditions du droit hypothéqué. La question posée n’est donc pas celle de la possibilité juridique, mais de l’acceptabilité du mécanisme par les banques601. Or, l’établissement financeur souhaite le plus souvent pouvoir saisir et faire vendre l’intégralité du bien financé, et non seulement un usufruit dont la valeur décroît inexorablement avec le temps. Deux solutions sont alors suggérées.
20383 – Autoriser la levée d’option en cas de défaillance de l’emprunteur. – On peut, tout d’abord, autoriser dès l’origine la levée de l’option d’achat de la nue-propriété au profit du financeur saisissant et de tout adjudicataire désigné sur ses poursuites.
20384 – Affecter hypothécairement la nue-propriété. – On peut aussi affecter hypothécairement la nue-propriété au profit du financeur, ce qui implique qu’en cas de vente sur saisie, celui-ci soit payé en premier en rang. Viendront ensuite le nu-propriétaire, puis, à concurrence du solde éventuel, l’usufruitier. Il en coûtera à l’emprunteur une taxe de publicité foncière (0,715 %) sur le montant garanti en capital et accessoires.

Sous-section V – Absence de droit de préemption urbain

20385 La cession d’un immeuble est soumise au droit de préemption, sauf exceptions légales, mais pas la cession d’un droit réel. Ainsi, la vente de la nue-propriété est soumise au droit de préemption, car il s’agit de la vente d’un immeuble grevé d’un droit réel d’usufruit et non de la cession d’un droit réel. En revanche, la cession de l’usufruit ou d’un droit réel de jouissance spéciale n’est pas soumise à ce droit.

Sous-section VI – Démembrement et copropriété

20386 Quel que soit le montage retenu (droit réel de jouissance spéciale ou usufruit), le rédacteur de la convention pourra utilement renvoyer aux articles L. 253-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation qui, dans notre cas, ne sont pourtant pas d’ordre public602. Pour la répartition des droits de vote, il pourra aussi renvoyer à la règle fixée par la loi Elan pour les opérations en bail réel solidaire (BRS)603.

Section III – Fiscalité

20387 – L’assiette des droits d’enregistrement. – La question a déjà été traitée, au sujet de la valorisation des droits concernés. Il y est donc fait renvoi (V. supra, no 20372).
20388 – L’article 13, 5° du Code général des impôts. – Dans une logique de lutte contre les montages abusifs, l’article 13, 5° du Code général des impôts a été réformé en 2012 et dispose dorénavant que le prix de cession d’un usufruit temporaire par une personne soumise à l’impôt sur le revenu est imposé dans la catégorie du type de revenus générés par le bien concerné. Il est donc, en l’espèce, imposé dans la catégorie des revenus fonciers. La règle est, certes, compréhensible lorsqu’il s’agit de ventes à soi-même ou de vente d’usufruit temporaire avec réserve de nue-propriété. Mais pourquoi taxer un vendeur qui vendrait simultanément l’usufruit temporaire et la nue-propriété à deux acquéreurs distincts ? Cette disposition fiscale supprime tout intérêt au montage envisagé en présence de vendeurs personnes physiques.
20389 – L’absence d’impact au titre de l’impôt sur le revenu de l’usufruitier. – L’usufruitier, s’il a la possibilité de louer le logement, sera imposé sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers, sauf location en meublé soumise aux BIC non professionnels ou professionnels selon la situation fiscale des intéressés. De ce point de vue, ce montage ne présente aucune particularité.
20390 – L’impôt sur la fortune immobilière. – Le premier alinéa de l’article 968 du Code général des impôts prévoit que les actifs mentionnés à l’article 965 du même code et grevés d’usufruit sont, sauf exceptions, compris, au titre de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), dans le patrimoine de l’usufruitier pour leur valeur en pleine propriété. Le BOFiP commente la disposition en ces termes : « Le principe énoncé par l’article 968 du CGI tire les conséquences des règles du droit civil selon lesquelles l’usufruitier est tenu d’assumer les charges afférentes aux biens dont il a la jouissance. Le nu-propriétaire qui ne tire pour sa part aucun revenu ou avantage immédiat des biens qu’il possède n’a en contrepartie, rien à déclarer au titre de l’IFI (sous réserve des cas mentionnés au I-B § 60 et suivants) ». En revanche, lorsque l’usufruitier d’un bien immobilier est une personne morale, la fraction imposable de la valeur des parts ou actions de cette personne que détient le redevable est déterminée en retenant la seule valeur de l’usufruit du bien immobilier ainsi détenu par la société ou l’organisme. De la même manière, la nue-propriété d’un bien immobilier détenue par une personne morale est prise en compte pour la détermination de la valeur de la fraction imposable de ses parts ou actions. On notera, à titre complémentaire :

que la règle posée par l’article 968 du Code général des impôts comporte un certain nombre d’exceptions prévues à ce même article, mais elles ne nous concernent pas ;

et qu’au titre de l’IFI, la loi traite le droit d’usage ou d’habitation comme l’usufruit.


590) D’une manière générale, tous nos propos relatifs à l’usufruit s’appliquent également au droit d’usage et d’habitation, sauf lorsqu’il sera spécifiquement question de ce dernier droit consistant en un usus sans fructus.
591) C. civ., art. 578.
592) Le titulaire d’un droit d’usage et d’habitation ne peut, lui, que l’occuper personnellement.
593) C. civ., art. 595 ; un droit d’usage et d’habitation, lui, n’est pas cessible (C. civ., art. 634).
594) P. Veaux-Fournerie, D. Veaux, et L. Tranchant, JCl. Civil Code, Art. 617 à 624, Fasc. unique, Usufruit. Fin de l’usufruit, no 7 : « En raison du caractère viager de l’usufruit, qui n’atteint pas le tiers – ce qui explique la solution de l’article 620 du Code civil – mais qui rattrape toujours l’usufruitier, la mort de ce dernier éteindrait l’usufruit si elle survenait avant la date fixée ».
595) Cass. 3e civ., 28 janv. 2015, no 14-10.013 : JCP N 2015, no 6, act. 230.
596) Cass. 3e civ., 8 sept. 2016, no 14-26.953, sur renvoi, JCP N 2016, no 37, act. 1009.
597) J. Dubarry et V. Streiff, Vade-mecum du droit réel de jouissance spéciale : JCP N 2016, no 41, 1294.
598) Rép. min. Grosskost no 55175 : JOAN 28 juin 2005, p. 6466. – BOI-ENR-DMTOI-10-10-10, 8 mars 2017, § 125.
599) CGI, art. 683, I et LPF, art. L. 17.
600) CCH, art. L. 253-8.
601) En pratique, ces montages innovants nécessitent un accord de principe avec un établissement financier partenaire.
602) CCH, art. L. 253-1-1 : I. – La convention d’usufruit précise la répartition des dépenses de l’immeuble entre nu-propriétaire et usufruitier. L’usufruitier supporte seul, pendant la durée de la convention, le paiement des provisions prévues aux articles 14-1 et 14-2 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis qui lui incombent au titre de la convention.

II. – Par dérogation à l’article 23 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, si la convention d’usufruit porte sur un ou plusieurs lots dépendant d’un immeuble soumis au statut de la copropriété, l’usufruitier est de droit le mandataire commun prévu au second alinéa du même article. Il bénéficie d’une délégation de vote pour prendre les décisions mentionnées à l’article 24, et à l’article 25, à l’exclusion du n, et au c de l’article 26 de cette même loi et dont, au titre de la convention d’usufruit, il assume seul la charge financière définitive. Il doit obtenir un mandat exprès pour les autres décisions. Par dérogation au troisième alinéa du I de l’article 22 de ladite loi, il peut recevoir plus de trois délégations de vote des nus-propriétaires. Lorsque la convention d’usufruit porte sur l’intégralité des lots, l’usufruitier ne bénéficie pas de délégation de vote pour prendre la décision mentionnée au c de l’article 25.
III. – La convention d’usufruit précise la répartition des charges à son expiration, le sort des avances et provisions appelées pendant la durée de la convention ainsi que les régularisations de charges intervenant après l’extinction de l’usufruit. Ces clauses sont inopposables au syndicat des copropriétaires.
603) CCH, art. L. 255-7-1.
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