Les risques climatiques
– La réminiscence du Déluge. –
Les plus grands textes littéraires traitent du mythe du grand cataclysme. Pour ne citer que les plus
célèbres, au sein d'une profusion : le Déluge est évoqué (notamment) par l'épopée de Gilgamesh et par le
livre de la Genèse au sein de la Bible ; la disparition de l'Atlantide est mentionnée par le Timée
et le Critias de Platon ; la submersion de la légendaire Ys est chantée dans le folklore
breton
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.
Personne n'aurait aujourd'hui la naïveté de lire ces textes au pied de la lettre. Il n'empêche qu'ils
sont, bien probablement, un écho des catastrophes des temps jadis
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. Ainsi une hypothèse scientifique, pas encore consensuelle mais sérieusement débattue à partir de l'étude
des sédiments marins, formule l'idée que le « Déluge » biblique correspond à un événement réel du passé :
la mer Noire serait devenue un lac d'eau douce à l'époque glaciaire, avant d'être brutalement réunie à la
mer Méditerranée aux temps préhistoriques, via le détroit du Bosphore, provoquant ainsi
l'inondation de 100 000 km² en deux ans et la fuite précipitée de tous les peuples alentour
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.
En tout cas, les mythologies renvoient à une réalité, démontrée par la climatologie et la géologie : le
niveau de la mer a considérablement changé, par le passé. Le trait de côte est à peu près stable depuis 4
000 ans environ. Mais, au pic de la dernière glaciation, il y a environ 20 000 ans, le niveau de la mer
était 125 mètres plus bas qu'aujourd'hui
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. La fonte des glaciers de jadis a progressivement conduit, au cours de plusieurs milliers d'années, au
dessin actuel du littoral – avec une stabilité depuis la Haute Antiquité.
Les marégraphes, installations fixes à terre, ainsi que l'altimétrie satellitaire montrent que la mer
continue de monter : environ 20 centimètres de plus entre 1901 et 2018. à certains endroits, cette hausse
est indétectable à l'œil nu, surtout si l'on ne regarde pas au même moment de la marée : ainsi quand on
compare des clichés de la statue de la Liberté entre la fin du
XIX
e
siècle et aujourd'hui. En revanche, sur un littoral relativement plat, la variation est saisissante. En
France, le cas topique est celui de l'immeuble « Le Signal », à Soulac-sur-Mer (Gironde), construit au
milieu des années 1960 à 200 mètres de l'océan, et aujourd'hui victime de l'érosion côtière : depuis
l'époque de la construction, la plage y a avancé de 4,5 mètres par an.
Le GIEC a établi un rapport spécial de près d'un millier de pages sur le sujet de la montée des eaux
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. Pour cet organisme, la fonte des glaciers est corrélée avec le réchauffement climatique, mais avec une
très grande inertie. Ce qui veut dire que même si le réchauffement cessait à cet instant, la fonte des
glaciers perdurerait un très long moment encore. En tout cas, le phénomène s'accélère puisque le niveau de
la mer monte trois fois plus vite aujourd'hui qu'il y a un siècle. Toute la question est de savoir comment
l'océan va continuer de progresser dans les années à venir. Pour des raisons physiques, cette hausse ne
peut être infinie. Histoire de fixer les idées, le GIEC calcule que, au « pire du pire », la fonte de la
totalité des glaces du globe conduirait à une hausse de 65 mètres de la mer par rapport à l'existant
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