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2021 – Rapport du 117e congrès – Commission 1 – Titre 2 – La survie numérique après la mort

PARTIE III – La mort dans le monde numérique

Titre 2 – La survie numérique après la mort

1470 « Il n’est probablement pas loin le jour où, en accompagnement de l’urne funéraire qui recèle les cendres du défunt, sera proposé aux familles l’ensemble des données numériques accumulées au cours de sa vie, comme l’historique indigeste de son existence contenant son dossier médical, ses émotions, ses habitudes de consommation, ses préférences sexuelles et intellectuelles »765.
S’éloigne inversement le temps où les ayants droit d’un défunt s’interrogeaient sur le sort, incinération ou conservation, de ses papiers de famille, à l’occasion du déménagement de son logement. Avec la perte de la matérialité de ces données, la question porte aujourd’hui, pour ceux des ayants droit qui s’en préoccupent, sur le sort numérique de ces données.
Au niveau mondial, ces préoccupations interrogent les législateurs et les juges766.
1471 La loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 a organisé ce sort767. En effet, l’article 63 de cette loi est venu d’abord modifier l’article 40-1 de la loi informatique et libertés du 6 janvier 1978 pour permettre aux personnes de donner des directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de leurs données après leur décès. La loi du 20 juin 2018768 a ensuite modifié certaines dispositions de la loi informatique et libertés pour les mettre en concordance avec la lettre du RGPD, et c’est finalement une ordonnance du 12 décembre 2018769 qui a achevé, d’un point de vue législatif, la mise en conformité du droit national avec le RGPD, en abrogeant l’article 40-1 et en créant un nouveau chapitre intitulé « Dispositions régissant les traitements de données à caractère personnel relatives aux personnes décédées ». C’est ce chapitre codifié aux articles 84 à 86 de la loi informatique et libertés qui organise la question spécifique de la mort numérique et les modalités de son anticipation.
Classiquement, les articles 84 à 86 de la loi informatique et libertés prévoient des règles différentes selon que la personne concernée a pris des dispositions de dernières volontés (Chapitre II) ou n’en a pas pris (Chapitre I).
Comme en droit successoral général, rares sont les circonstances où des dispositions sont prises par les personnes concernées. Le plus souvent, elles sont restées simplement silencieuses. Le cas le plus courant est donc l’absence de dispositions.

765) M. Dugain et C. Labbé, L’homme nu, la dictature invisible du numérique, Robert Laffont, Plon, 2016, p. 12.
766) Pour une évocation du traitement des données des défunts dans divers pays, L. Castex et al., Défendre les vivants ou les morts ? Controverses sous-jacentes au droit des données post mortem à travers une perspective comparée franco-américaine : Réseaux 2018/4, no 210, p. 120. – C. Bordes, Prévoir sa mort numérique. Le devenir des données numériques post mortem : RDLF 2020, chron. 9, II.
767) L. no 2016-1321, 7 oct. 2016, pour une République numérique : JO 8 oct. 2016, no 0235.
768) L. no 2018-493, 20 juin 2018, relative à la protection des données personnelles et portant modification de la loi no 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
769) Ord. no 2018-1125, 12 déc. 2018, prise en application de la loi no 2018-493 du 20 juin 2018, préc.


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