Une réalité humaine

Une réalité humaine

– L'image de la personne âgée se transforme. – L'image traditionnelle du doux vieillard rendu sage par l'expérience est, de plus en plus, une image d'Épinal. On lui substitue la vision d'un être traversé d'inquiétudes : peur de manquer financièrement, peur de voir sa santé décliner ou d'être victime d'un accident, peur de la mort, peur d'être privé de ses capacités, peur d'être un poids, peur de la solitude, en considération de liens familiaux devenus plus lâches qu'à l'époque où lui-même observait ses aïeux.

Instant poésie

Michel Billé
Le vieillard et ses liens
Un homme avait vécu longtemps !
Il voyait s'ajouter les ans
Mais ne comptait plus les années…
À quoi bon toujours calculer
Le temps qui passe et qui vous lasse
Qui vous inquiète et vous angoisse ?
Notre homme avait, sa vie durant,
Travaillé dur, donné son temps,
Aimé sa femme et ses enfants,
Ses amis, ses proches, ses parents…
Il avait su tisser des liens
Nombreux, des liens qui font du bien.
Il s'était donc beaucoup lié,
Relié, allié, attaché,
Il avait noué tant de liens
Les avait cultivés si bien
Qu'il en avait vécu heureux
Du moins souvent, du moins un peu.
En vieillissant, la maladie
Avait bouleversé sa vie,
Alzheimer et la dépendance
Semblaient lui enlever toute chance
De vivre encore, de savourer
Ces liens qu'il avait tant aimés.
Ses enfants, bien intentionnés,
Avaient voulu le faire entrer
Dans un lieu de soins protégé
Où la vie est sécurisée
Où tous risques sont écartés
Pour vivre et mourir rassuré. (…)
– L'isolement s'accroît… – La taille des ménages a tendance à se réduire. Selon l'Insee, ils comportent en moyenne 2,2 personnes en 2013, contre 2,4 en 1999. Un tiers à peine est constitué de trois personnes ou plus, un tiers de deux personnes ; le dernier tiers ne comprend qu'une seule personne. Cette situation trouve en partie son origine dans l'accroissement du nombre des séparations et la raréfaction des familles nombreuses. Mais elle découle aussi du vieillissement de la population. En vieillissant, on perd son conjoint (réalité qui concerne majoritairement les femmes, du fait d'une espérance de vie plus longue), souvent le dernier compagnon d'une existence où les relations sociales se sont raréfiées.
– … contribuant au sentiment général d'anxiété. – Ces constats alimentent un sentiment général d'anxiété qui, succédant à la colère observée avant la pandémie, découle aussi, pêle-mêle, de la pauvreté, de l'inégalité sociale, du chômage, de l'inflation… toutes choses qui favorisent, entre autres, de nouvelles difficultés d'accession au logement.