La mise en œuvre du droit de préemption

La mise en œuvre du droit de préemption

Évoquer la mise en œuvre du droit de préemption conduit à étudier successivement la notification (§ I), la réponse donnée par le locataire (§ II) et la purge d’un droit de préemption subsidiaire en cas de vente à des conditions ou prix plus favorables (§ III).

La notification

– Destinataires. – La notification est faite « à chacun des locataires ou occupants de bonne foi » (L. 31 déc. 1975, art. 10-1, I, A, al. 1er). Comme pour le droit de préemption de la loi de 1989, la notification est opposable au conjoint ou au partenaire pacsé dont l’existence n’a pas été portée à la connaissance du bailleur. Dans le cas contraire, le bailleur doit notifier l’offre de vente au locataire et à son conjoint ou partenaire pacsé.
– Modalités et contenu de la notification. – La notification doit être faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. En raison des difficultés que connaît la pratique lors d’une notification en recommandé (non retrait ou refus de la lettre, contestation du contenu), il semble plus prudent de recourir systématiquement à l’exploit de commissaire de justice. La notification, qui vaut offre de vente, doit indiquer le prix et les conditions de vente de l’immeuble dans sa totalité et en une seule fois, ainsi que ceux du local loué. Elle s’accompagne (L. 1975, art. 10-1, I, A, al. 2) du projet de règlement de copropriété et des résultats du diagnostic technique portant constat de l’état apparent de la solidité du clos et du couvert, de l’état des conduites et canalisations collectives ainsi que des éléments communs et de sécurité. La notification doit reproduire les termes de l’article 10-1, I A de la loi de 1975, ceci « à peine de nullité ». À défaut de reproduire cet article, la notification est nulle sans que le locataire soit contraint de démontrer l’existence d’un grief.
– Sanction de l’absence de notification. – L’omission de la notification à chacun des locataires est sanctionnée par la nullité de la vente de l’immeuble en bloc (et non seulement celle du logement dont le droit de préemption n’a pas été purgé). L’action en nullité est prescrite au bout de cinq ans à compter du jour où son titulaire a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action.

La réponse à la notification

Contrairement à la notification de l’article 10 de la loi de 1975 (V. supra, no ) qui n’est valable que deux mois, l’offre de vente notifiée sur le fondement de l’article 10-1, I, A est valable pendant une durée de quatre mois à compter de sa réception. Le locataire ou l’occupant de bonne foi qui accepte l’offre de vente dispose d’un délai de quatre ou deux mois pour régulariser l’acte de vente selon qu’il notifie ou non au bailleur son intention de recourir à un prêt. Passé ce délai, l’acceptation de l’offre de vente est caduque. Mais si le locataire refuse expressément ou tacitement l’offre de vente, il reste locataire en place et l’immeuble sera vendu occupé.

Le droit de préemption subsidiaire

– Un schéma désormais classique. – L’article 10-1, I, A, alinéa 5 de la loi de 1975 ouvre un nouveau droit de préemption lorsqu’en « raison de la vente d’au moins un logement à un locataire ou un occupant de bonne foi, l’immeuble fait l’objet d’une mise en copropriété et que le bailleur décide de vendre les lots occupés à des conditions ou à un prix plus avantageux à un tiers ». La notification incombe au bailleur et, à titre subsidiaire, au notaire. Elle doit reproduire, à peine de nullité, les dispositions de l’article 10-1, I, A. La notification, qui vaut offre de vente, est valable pendant un mois à compter de sa réception. Si elle n’est pas acceptée dans ce délai, elle est caduque. Le locataire ou l’occupant de bonne foi qui l’accepte dispose d’un délai de deux mois pour signer l’acte de vente. Le délai de régularisation est porté à quatre mois si le locataire a informé le bailleur de son intention de recourir à un prêt. Si la vente n’est pas conclue dans le délai convenu, l’acceptation de l’offre de vente est nulle de plein droit.

Simplifier les droits de préemption du locataire

Le champ d’application et le régime des droits de préemption applicables au locataire sont particulièrement complexes. Ce mécanisme vertueux gagnerait en lisibilité et en efficacité si certains de ces modes de préemption fusionnaient. On pourrait imaginer un droit de préemption applicable au locataire d’un logement, meublé ou nu, en cas de projet de vente par son bailleur du logement ou de l’immeuble dans lequel se trouve le logement. En cas de renonciation à l’offre de vente, le locataire resterait en place et le bien serait vendu occupé. Le régime du droit de préemption résultant de la loi Aurillac serait maintenu pour permettre les ventes en bloc en cas d’engagement de prolongation des baux.

Synthèse des droits de préemption applicables au locataire

Vente après division Congé pour vente Vente d’un immeuble en entier
TextesL. no 75-1351, art. 10L. no 89-482, art. 15 IIL. no 75-1351, art. 10-1
1/ Champ d’application « Chacun des locataires ou occupants de bonne foi », c’est-à-dire une personne physique, titulaire d’un contrat de location pour un usage d’habitation ou mixte professionnel et d’habitation (L. 1989, L. 1986, L. 1948 ou Code civil).Le titulaire d’un contrat de location en cours soumis à la loi no 89-482 du 6 juillet 1989. Idem L. 1975, art. 10 : « Chacun des locataires ou occupants de bonne foi ».
Les opérations Principe : les ventes stricto sensu. Principe : les ventes. Principe : les ventes stricto sensu.
Conditions spécifiques– vente d’un ou plusieurs locaux d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel.Volonté de vendre un logement libre et d’éviter la reconduction du bail en cours.Vente dans sa totalité et en une seule fois d’un immeuble à usage d’habitation ou mixte d’habitation et professionnel de plus de 5 logements ou cession de la totalité des titres de la société portant attribution en propriété ou en jouissance d’un immeuble de plus de 5 logements.
2/ Mise en œuvre du droit de préemption Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, par l’exploit de commissaire de justice ou par remise en main propre contre récépissé ou émargement (L. 1989 uniquement).
La notification préalable au locataire (mentions obligatoires)– Prix.– Motivation du congé (intention de vendre).– Indication du prix et conditions de la vente de l’immeuble dans son entier.
La réponse du locataire Délai de réponse du locataire : 2 mois (sauf L. 1975, art. 10-1 : 4 mois) à compter de la réception de l’offre du bailleur.
L’ouverture d’un second droit de préemptionSi le locataire a refusé l’offre de vente et que le bailleur décide de vente à un tiers à des conditions ou à un prix plus avantageux, le bailleur, ou à défaut le notaire, doit notifier les nouvelles conditions.
SanctionsNullité de la vente conclue avec un tiers.Sanction du congé frauduleux : nullité et amende pénale (max. 6 000 € pour une personne physique ; 30 000 € pour une personne morale).Nullité de la vente en bloc conclue avec un tiers.