Fiscalité

Fiscalité

Cette sous-section concerne la fiscalité des actes à signer pour mettre en place un montage en BRS au regard de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Cette fiscalité est relativement simple dès lors que l’on raisonne acte par acte et que l’on comprend bien la nature du contrat auquel elle doit s’appliquer : acquisition par l’OFS (sujet déjà traité ; V. supra, nos et s.), contrat de BRS qui crée les droits réels (§ I), ou contrat de cession des droits réels déjà créés (en ce compris les résiliations de BRS) (§ II).

Le régime fiscal du BRS

Il convient de distinguer la TVA (A) des DMTO (B), et d’évoquer la taxe foncière (C).

TVA : exonération des BRS, sauf option

L’article 261 D, 1° bis du Code général des impôts exonère tous les BRS de TVA dans les termes suivants : « Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 1° bis Les locations d’immeubles résultant d’un bail conférant un droit réel ».
Sauf option prévue par l’article 260, 5° du Code général des impôts : « Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 5° Les personnes qui consentent un bail visé au 1° bis de l’article 261 D ».
À notre connaissance, aucun OFS n’a trouvé intérêt à opter pour la TVA dans la mesure où cela aurait pour effet d’y soumettre les redevances foncières pour toute la durée du montage, et ses rechargements successifs.

DMTO : TPF uniquement pour les BRS L. 255-2 et L. 255-4

L’article 742 du Code général des impôts soumet tous les baux à durée limitée d’immeubles faits pour une durée supérieure à douze années à la taxe de publicité foncière au taux de 0,70 % (ce qui donne 0,71498 % avec les frais d’assiette et de recouvrement). Cette taxe est liquidée « sur le prix exprimé, augmenté des charges imposées au preneur, ou sur la valeur locative réelle des biens loués si cette valeur est supérieure au prix augmenté des charges. Elle est due sur le montant cumulé de toutes les années à courir ».
L’article 743, 5° du même code exonérant expressément « 5° Les baux réels solidaires conclus en application de l’article L. 255-3 du code de la construction et de l’habitation », la taxe de publicité foncière ne s’appliquera qu’aux BRS L. 255-2 et L. 255-4 sur une assiette formée de l’ensemble des contreparties stipulées, savoir :
  • prix des droits réels donnant accession à la propriété du logement ;
  • cumul des redevances foncières sur la durée initiale du BRS.

Taxe foncière

– TFPB à la charge du preneur. – Lorsqu’un immeuble est loué par bail réel solidaire, la taxe foncière est établie au nom du preneur du bail réel solidaire.
– Exonération possible. – La loi de finances pour 2021 a aménagé le dispositif d’abattement facultatif de 30 % de la TFPB, instauré depuis 2017 à l’article 1388 octies du Code général des impôts, au profit des logements faisant l’objet d’un BRS. Le texte permet dorénavant aux collectivités territoriales qui le souhaitent d’instaurer un abattement pouvant aller jusqu’à 100 % sur la base d’imposition à la TFPB des logements faisant l’objet d’un BRS.
L’administration a mis à jour ses commentaires : les communes et EPCI à fiscalité propre peuvent, pour la part qui leur revient, fixer librement à concurrence de 30 %, 40 %, 50 %, 60 %, 70 %, 80 %, 90 % ou 100 %, le taux de l’abattement facultatif de TFPB en faveur des logements en BRS.
Cet abattement s’applique pendant toute la durée du BRS restant à courir à compter de la délibération, sous réserve du respect des conditions et des obligations déclaratives prévues à l’article 1388 octies du Code général des impôts.
Depuis 2021, la TFPB est entièrement perçue par les communes et EPCI à fiscalité propre : il n’y a plus de part départementale. Par conséquent, l’exonération ou l’abattement est accordé pour la seule et entière part revenant à la commune ou à l’EPCI à fiscalité propre ayant pris une délibération en ce sens.
Conformément au I de l’article 1639 A bis du Code général des impôts, les délibérations doivent intervenir avant le 1er octobre pour être applicables à compter de l’année suivante. Les délibérations demeurent valables tant qu’elles n’ont pas été modifiées ou rapportées.

Fiscalité des cessions des droits réels (et des résiliations de BRS)

Les cessions des droits réels, auxquelles sont assimilées les résiliations de BRS, sont considérées tant juridiquement que fiscalement comme des ventes d’immeuble, et sont donc soumises à la TVA (A) et aux DMTO (B).

En matière de TVA

Si le logement concerné est en état futur d’achèvement ou neuf, la cession des droits réels est de plein droit soumise à la TVA, le taux applicable étant le taux réduit de 5,5 %.
La TVA ne s’applique pas dans les cessions de droits réels portant sur des immeubles anciens.
Dans les opérations de réhabilitation avec un opérateur réalisant des Clir (cessions de droits réels soumises à la réglementation de la VIR), l’option à la TVA peut être intéressante pour récupérer la TVA ayant grevé les travaux.

En matière de DMTO

Les Clefa et cessions de droits réels portant sur des logements neufs soumis de plein droit à la TVA sont uniquement soumises à la taxe de publicité foncière (arrondie dans les présentations à 0,715 %) sur le prix hors taxes de cession, comme en matière de Vefa.
Les cessions de droits réels entre particuliers ou portant sur des logements anciens sont soumises aux DMTO au taux de droit commun (soit 5,80665 %, arrondi dans les présentations à 5,80 %, dans la plupart des départements).

Aspects opérationnels : le BRS dans les opérations de construction / réhabilitation – BRS et commande publique

1. Généralités introductives
Montage avec opérateur. Le Code de la construction et de l’habitation envisage clairement la possibilité que le BRS impose au preneur opérateur une obligation de construire ou réhabiliter.
Autres montages : Vefa. Maîtrise d’ouvrage directe. Pour autant, rien ne semble interdire à l’OFS d’assurer lui-même la maîtrise d’ouvrage de la construction ou de la réhabilitation, ou encore d’acquérir en état futur d’achèvement les logements devant donner lieu à BRS : comme expliqué en tête de cette section, sa mission de mise en place de montages en BRS suppose qu’il s’approprie un immeuble identifié comme un lot de copropriété pour le grever des droits réels de BRS dont la définition est de donner accès à la propriété d’un logement.
Seule nécessité : l’appropriation de l’immeuble par l’OFS. Dès lors, tous les modes d’appropriation de l’immeuble par l’OFS nous semblent compatibles :
  • acquisition classique d’un terrain, bâti ou non, en vue de construire, réhabiliter, rénover, ou simplement commercialiser ;
  • échanges, apports ou tout autre mode d’acquisition ;
  • acquisition en état futur d’achèvement.
Mettre en place un montage en BRS suppose d’avoir en tête cette phrase initiale du montage : « l’OFS s’approprie un immeuble pour le grever d’un droit réel », et le fait que dans les immeubles collectifs les droits réels ne peuvent que grever un lot de copropriété. La présentation de ces montages sera faite dans le cas simple d’un programme 100 % BRS (1.) avant d’évoquer la question du montage en tantièmes lorsque seulement quelques logements d’une opération sont concernés (2.), puis quelques autres montages plus complexes (3.).
Copropriété. Comme nous l’avons dit, une copropriété contenant quelques ou tous les logements en BRS reste une copropriété classique, dont le sol figure parmi les parties communes. Les droits réels issus du BRS sont, eux, individuels et ne peuvent donc être classés que dans les parties privatives.
Reste, à l’article L. 255-7, une particularité que le praticien ne devra pas omettre d’évoquer lors de la rédaction du règlement de copropriété : l’OFS peut confier au syndic un mandat de recouvrement des redevances, si le règlement de copropriété le prévoit.
C’est la seule modulation pouvant être introduite dans le règlement de copropriété lors d’un montage en BRS.
L’article L. 255-7-1 du Code de la construction et de l’habitation pourvoit à tout le reste en disposant :
  • que la signature d’un BRS est assimilée à une mutation, qu’il faudra donc notifier au syndic. La précision apportée par le texte est « le preneur est subrogé dans les droits et obligations du bailleur », ce qui signifie bien que l’OFS ne perd pas sa qualité de copropriétaire ;
  • qu’à la manière d’un démembrement, chaque partie peut assister à l’assemblée générale pour y formuler toutes observations, même en étant privée du droit de vote ;
  • que le droit de vote appartient par principe au preneur, à l’exception des cas où le vote est réservé à l’OFS, à savoir :
i) les décisions prises en application :
  • de l’article 25, d : actes de disposition sur les parties communes ou sur des droits accessoires à ces parties communes, lorsque ces actes résultent d’obligations légales ou réglementaires,
  • de l’article 25, n : ensemble des travaux comportant transformation, addition ou amélioration,
  • de l’article 26, a : actes d’acquisition immobilière et les actes de disposition autres que ceux visés à l’article 25, d,
  • de l’article 26, b : modification, ou éventuellement l’établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l’usage et l’administration des parties communes,et ii) les décisions concernant la modification du règlement de copropriété, dans la mesure où il concerne les spécificités du bail réel solidaire.
L’OFS exerce également les actions qui ont pour objet de contester les décisions pour lesquelles il dispose du droit de vote ;
- Qu’aucune charge ne peut être appelée auprès de l’OFS y compris pour des frais afférents aux décisions prises par lui ou pour son compte.
C’est finalement cette dernière disposition qui est la plus surprenante : on ne voit pas pourquoi il ne serait pas possible de convenir d’une répartition des charges, notamment pour les conséquences des votes réservés à l’OFS, et pour le financement par les OFS sur des longues périodes d’importants travaux de copropriété. Ce point fera certainement l’objet d’une future adaptation législative.
2. Schémas de montages 100 % BRS
Les schémas dans une opération 100 % BRS pourront donc être les suivants :
2.1 Montage avec opérateur en BRS L. 255-3 :
  • Acquisition du terrain à bâtir ou de l’immeuble à réhabiliter.
  • Signature par l’OFS de l’état descriptif de division – règlement de copropriété.
  • BRS L. 255-3 au profit de l’opérateur qui construit/réhabilite et commercialise.
  • La commercialisation par l’opérateur prend la forme d’avant-contrats conformes à la réglementation VIR ou Vefa (donc promesse ou contrat de réservation) en vue de la signature d’une Clir ou d’une Clefa.
2.2 Montage en Vefa à l’OFS :
  • Acquisition par le promoteur.
  • Signature par le promoteur de l’état descriptif de division – règlement de copropriété.
  • Vefa par le promoteur à l’OFS sur l’ensemble des lots concernés.
  • BRS L. 255-2 consentis par l’OFS directement aux ménages, emportant transmission du contrat de Vefa en tant qu’il porte sur le logement concerné par le BRS, précédés d’une promesse de BRS.
2.3 Montage en maîtrise d’ouvrage directe par l’OFS :
  • Acquisition par l’OFS.
  • Signature par l’OFS de l’état descriptif de division – règlement de copropriété.
  • BRS L. 255-2 en EFA consentis par l’OFS directement aux ménages, emportant obligation de construire pour l’OFS, précédés d’un contrat de réservation respectant la réglementation de la Vefa à la charge de l’OFS.
L’OFS devra, selon le cas, respecter les règles de la commande publique auxquelles il devrait généralement être soumis conformément à l’article L. 1211, 2° du Code de la commande publique, aux termes duquel : « Les pouvoirs adjudicateurs sont : (…) 2° Les personnes morales de droit privé qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial, dont :
  • Soit l’activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur ;
  • Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur ;
  • Soit l’organe d’administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur ; ».
3. Opérations partiellement soumises à des BRS : acquisition des tantièmes de lots de logement
3.1 Principe des tantièmes à acquérir par l’OFS. Dans une opération dite « mixte », comprenant soit d’autres locaux que des logements dans la copropriété, soit une partie seulement de logements en BRS, le montage est identique sous une seule réserve : l’OFS ne peut pas s’approprier l’ensemble du terrain.
Il doit donc s’approprier la quote-part du terrain formant l’assiette des futurs logements, ce qui se traduit dans les actes par les tantièmes de copropriété du sol (devenue une partie commune par la signature de l’EDD-RCP) attachés aux lots de copropriété formant les futurs logements à soumettre au régime de BRS.
Pour reprendre la chronologie ci-dessus en l’adaptant :
  • Acquisition du terrain à bâtir ou de l’immeuble à réhabiliter par le promoteur futur opérateur.
  • Signature par le promoteur de l’état descriptif de division – règlement de copropriété : le terrain devient à cet instant une « partie commune », dont le promoteur détient 100 % des tantièmes, car il reste propriétaire de l’ensemble des lots.
  • Vente par le promoteur à l’OFS des tantièmes du terrain et des droits de construire correspondant aux quotes-parts de parties communes des futurs lots devant donner lieu à un BRS (l’obligation de délivrance du promoteur devra être aménagée par une convention claire indiquant qu’il ne s’agit pas de vendre les lots tels que désignés dans leur état futur, mais seulement les tantièmes qui y sont attachés).
  • BRS L. 255-3 par l’OFS au profit de l’opérateur qui construit/réhabilite et commercialise.
  • La commercialisation par l’opérateur sous forme de Clir ou de Clefa, comme déjà expliqué.
3.2 L’acquisition simultanée : une idée difficile à mettre en œuvre. Certains montages raffinent la solution en faisant en sorte d’éviter la revente entre le promoteur futur opérateur à l’OFS (étape c) dans le schéma précédent) : dans cette hypothèse, il faut que le propriétaire initial (privé ou aménageur) signe lui-même l’état descriptif de division / règlement de copropriété pour éclater la vente initiale en deux ventes concomitantes :
  • la vente au promoteur des tantièmes correspondant aux lots autres que des logements et aux lots de logements devant donner lieu à de l’accession libre ou à des ventes en bloc de logements locatifs (sociaux le cas échéant) ;
  • la vente à l’OFS du reste des tantièmes correspondant aux lots de logements devant donner lieu à des BRS (avec les lots accessoires le cas échéant).
Cette solution plus fine et moins onéreuse (car elle évite un acte) est souvent impossible à mettre en œuvre pour des raisons liées :
  • soit à la qualité des vendeurs initiaux : lorsque ce sont des propriétaires privés, en secteur diffus, la solution est difficile à mettre en place et le promoteur préférera souvent acheter tout le foncier ;
  • soit de consolidation entre les mains du promoteur d’une assiette globale provenant de plusieurs vendeurs ;
  • soit à des problèmes plus politiques d’affichage des prix : le prix de la part portée par l’OFS n’est pas forcément cohérent avec le prix du reste du foncier, ce qui suppose parfois une mutualisation qui passe entre les mains du promoteur opérateur ;
  • soit enfin au calendrier : à l’expérience, la mise en place du prêt Gaïa est parfois plus longue que prévu et oblige dans de nombreux cas le promoteur à initier seul l’acquisition de départ puis à rétrocéder les tantièmes à l’OFS.
En tout état de cause, après signature du BRS Opérateur, le promoteur est bien maître d’ouvrage de l’intégralité de l’opération, partie en qualité de plein propriétaire, partie en qualité de titulaire du droit réel de BRS, la répartition étant celle des tantièmes des futurs logements.
Ainsi, dans ces montages, comme dans celui 100 % BRS, le sol est une partie commune, la copropriété est toujours classique, le BRS porte toujours sur les logements donc les lots de copropriété correspondent aux futurs logements à soumettre au BRS. Le lot de copropriété est « l’immeuble » que l’on grève du droit réel donnant accession à la propriété du logement. On peut donc mettre en place un montage en BRS sur un seul lot d’une copropriété, plusieurs lots ou tous les lots.
3.3 Question d’un éventuel risque fiscal lié à la rétrocession par une SCCV des tantièmes de terrain à l’OFS. Dans de nombreux montages, le promoteur doit donc acheter l’intégralité du terrain via une société civile de construction-vente pour procéder à la réunion foncière entre ses mains, avant de revendre des tantièmes à l’OFS qui lui confère un instant après les droits de BRS sur les mêmes tantièmes fonciers correspondant aux logements concernés. Certains s’interrogent donc sur le risque fiscal de cette cession à l’OFS par la SCCV, au motif que cette rétrocession ne serait pas conforme à son objet, tant juridique que fiscal, résultant des articles L. 211-1 du Code de la construction et de l’habitation et 239 ter du Code général des impôts.
Notre avis est que de toute évidence, dès lors que l’OFS n’est pas en mesure d’acquérir ab initio sa part foncière, et bien que l’on ne respecte pas la lettre de ces textes sur l’objet d’une SCCV qui n’a pas été adaptée au BRS, la SCCV réalise bien son objet fiscal et social en procédant à cette revente, car c’est une condition indispensable pour exécuter son objet de construction-vente en présence de BRS. Un autre raisonnement consiste à expliquer que la « vente » visée dans l’objet de la SCCV est démembrée dans le cas du BRS entre la valeur foncière cédée à l’OFS et la valeur bâtie cédée aux termes des Clefa aux accédants.