Dans une approche économique de la monnaie, les cryptomonnaies peuvent trouver des points de rencontre avec les monnaies « classiques », ou dépasser leur conception habituelle.
Pour une assimilation des cryptomonnaies à une monnaie
Pour une assimilation des cryptomonnaies à une monnaie
Une pure monnaie privée
– Un usage communautaire basé sur la confiance. – La « communauté » des utilisateurs de cryptomonnaies considère implicitement que la cryptomonnaie, comme moyen de paiement, est une monnaie comme une autre, nonobstant ses caractéristiques singulières
Preuve en serait que des ICOs sont réalisées grâce à elles ; sur ces opérations, V. infra, nos
et s.
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Certes, elles se créent et circulent indépendamment de toute banque et sont détachées de tout compte bancaire. Finalement, ne seraient-elles pas des monnaies purement privées, sans cours légal, non convertibles en aucune monnaie légale, dénuées de soutien public ?
Leur déconnexion d'avec une monnaie existante les fait échapper, semble-t-il, aux traits singuliers des monnaies étatiques.
Mais est-ce une raison pour ne pas les qualifier de monnaie ? Les utilisateurs la considèrent comme telle, d'une catégorie à part, ce qui interpelle les auteurs sur le plan de son sous-jacent
N. Barbaroux, Un exemple de blockchain à la frontière du droit et de l'économie, in Blockchain et droit, ss dir. F. Marmoz, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2019, p. 19.
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Nous sommes en présence d'une monnaie intégrée à son système de paiement. En quelque sorte, elle est « plateformisée », et sa valeur tient à la confiance de ses utilisateurs. Cette approche rejoint une définition plus comportementale de la monnaie. Pour certains auteurs
G. Bourdeaux, Propos sur les « cryptomonnaies » : RD bancaire et fin. 2016, dossier 39. – N. Mathey, La nature juridique des monnaies alternatives à l'épreuve du paiement : RD bancaire et fin. 2016, dossier 41.
en effet, la nature juridique de monnaie serait caractérisée sur un plan plus psychologique que juridique : tout découlerait de la croyance privée en son acceptation en tant que monnaie.
– Une émission privée. – Dans cette perspective, il faudrait s'affranchir de la règle selon laquelle l'émission d'une monnaie serait nécessairement une prérogative uniquement régalienne.
Ce ne serait pas le premier cas d'une monnaie d'un nouveau type ; la monnaie scripturale elle-même dans l'histoire n'a pas été d'évidence immédiatement assimilée à une monnaie.
Pour reprendre les termes de Dominique Legeais : « Après le coquillage, la pièce, le billet, la monnaie scripturale, c'est peut-être une nouvelle étape ! Dans cette perspective, la cryptomonnaie peut apparaître comme étant la monnaie de la nouvelle économie en voie de gestation »
JCl. Commercial, Fasc. 535, préc., no 83, par D. Legeais.
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En définitive, le passage de l'étape de la stabilité, de la régulation, pourrait conférer aux monnaies virtuelles le statut de véritable monnaie.
Un moyen de paiement acceptable
– Une monnaie complémentaire. – Dans son acception classique, la monnaie représente une créance que son détenteur particulier tient contre son émetteur banque centrale d'un État ou d'une union monétaire d'États. Or, l'économie du bitcoin et de ses dérivés ou successeurs réside dans la croyance d'une communauté dans un mode de paiement, via des valeurs communes, dont la matrice en quelque sorte réside dans la libre émancipation des intermédiaires des États. Est-on en présence d'une monnaie d'un type nouveau ou d'une catégorie existante ?
Pour essayer d'y répondre, il faut se rappeler qu'une cryptomonnaie réalise la confusion entre unité de valeur et unité de paiement. Or la doctrine, au-delà de chacun de ses développements particuliers, distingue en général le support des fonctions de la monnaie
R. Libchaber, Recherches sur la monnaie en droit privé, préf. P. Mayer, t. 225, LGDJ, 1992.
. La cryptomonnaie à cet égard bouscule le raisonnement, ce qui ne doit pas pour ses détenteurs conduire à lui dénier le rôle d'une monnaie.
Dans ce cas, le paiement en cryptomonnaie obéirait aux règles relatives au paiement de sommes d'argent.
Si l'on admet que les cryptomonnaies sont bel et bien des monnaies n'ayant pas cours légal – dès lors les créanciers ne sont pas obligés de les accepter comme telles –, elles ont cependant un pouvoir libératoire lorsqu'elles sont acceptées comme mode de paiement par les créanciers
V. S. Benilsi, Paiement – Règles particulières aux paiements de sommes d'argent : Rép. dr. civ. Dalloz, no 166. Exception en question : le paiement en cryptomonnaie.
. La blockchain, par définition non rattachée à un territoire donné, échapperait à l'obligation de payer en euros.
– Le cas du bitcoin. – De surcroît, l'envolée régulière du cours par exemple du bitcoin (le dimanche 27 décembre 2020, son cours a franchi quelques instants la barre des 28 000 $ – soit 22 840 €) et la souscription de plus en plus massive de ses unités plaident pour sa crédibilité comme valeur d'échange ou de paiement, voire comme une valeur refuge, à l'instar de l'or, compte tenu de la rareté du nombre de ses unités programmée par son fondateur
Soit vingt et un millions de bitcoins, montant estimé atteint autour de 2140.
. Le bitcoin en effet s'institutionnalise malgré son caractère décentralisé à taille géante ; certains fonds d'assurance s'y intéressent
V. Le Monde 31 déc. 2020, relatant qu'une vénérable mutuelle américaine née en 1851, la Massachusetts Mutual Life Insurance Company, a acheté le 10 décembre 2020 pour cent millions d'euros de bitcoins pour l'un de ses fonds.
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Au-delà du seul bitcoin d'ailleurs, des plateformes mettent en place des services d'achat en cryptomonnaies
En octobre 2020, la société de services de paiement en ligne PayPal a annoncé la création d'un service d'achat, vente et paiement en plusieurs cryptomonnaies : bitcoin, ethers, lirecoin, pour courant 2021.
, ce qui serait un autre signe de leur acceptabilité comme monnaie de paiement.
Une nouvelle valeur refuge.
Le bitcoin serait valeur d'échange ou de paiement, voire une valeur de refuge, à l'instar de l'or, compte tenu de la rareté du nombre de ses unités.