L’intégration de la trajectoire ZAN dans les documents territoriaux de planification et d’urbanisme

L’intégration de la trajectoire ZAN dans les documents territoriaux de planification et d’urbanisme

La stratégie mise en place par le gouvernement pour assurer l’effectivité de l’application de la trajectoire ZAN par les acteurs territoriaux est connue et efficace : l’irrigation descendante et successive de la norme depuis l’échelon territorial le plus large (la région au travers du SRADDET) (Sous-section I), en passant par l’échelon intermédiaire (s’il existe, le SCoT) (Sous-section II), pour arriver jusqu’à l’échelon local des PLU, PLUi ou cartes communales (Sous-section III).
Cette méthodologie est parfaitement fondée puisque le ZAN implique que sa trajectoire soit appliquée de manière différenciée et territorialisée .

L’échelon régional – le SRADDET, « chef d’orchestre » de la « zanification »

La trajectoire ZAN étant nationale, il est tout à fait cohérent de s’appuyer en premier lieu sur un document de planification applicable sur l’ensemble de son territoire : le SRADDET.
Un décret du 29 avril 2022 a précisé les modalités d’utilisation des SRADDET dans leur participation au ZAN et leur portée normative à l’égard des documents infrarégionaux (SCoT ou, à défaut, PLU). Ce texte invite à la révision des SRADDET pour y intégrer les objectifs ZAN d’après les critères dégagés par la Conférence des SCoT.

Le SRADDET en détails

1. Le SRADDET (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires) est un document de planification stratégique à l’échelle de la région. Chacune d’elle dispose de son propre document. L’Île-de-France, la Corse et les DROM disposent de documents spécifiques que sont respectivement le SDRIF (schéma directeur d’Île-de-France), le PADDuC (plan d’aménagement et de développement durable de Corse) et les SAR (schémas régionaux d’aménagement).
2. Les SRADDET doivent désormais décliner leurs objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols au niveau infrarégional en considérant :
« 1° Les enjeux de préservation, de valorisation, de remise en bon état et de restauration des espaces naturels, agricoles et forestiers ainsi que des continuités écologiques ;
2° Le potentiel foncier mobilisable dans les espaces déjà artificialisés, en particulier par l’optimisation de la densité, le renouvellement urbain et la réhabilitation des friches ;
3° L’équilibre du territoire, en tenant compte des pôles urbains, du maillage des infrastructures et des enjeux de désenclavement rural ;
4° Les dynamiques démographiques et économiques prévisibles au vu notamment des données disponibles et des besoins identifiés sur les territoires ».
3. Ils pourront prendre en compte des projets d’envergure nationale ou régionale dont l’artificialisation induite sera décomptée au niveau régional afin d’éviter d’amputer les possibilités d’artificialisation au niveau de la commune d’implantation dudit projet.
4. Ils pourront également, au titre des objectifs infrarégionaux fixés, prendre en compte les efforts de réduction du rythme d’artificialisation des sols déjà réalisés au niveau infrarégional. L’objectif est ici de ne pas pénaliser « les bons élèves », ce à quoi aboutirait l’édiction d’une règle de répartition infrarégionale purement mathématique.
5. Les SRADDET évolués (sur la base des propositions de la conférence des SCoT du ressort territorial de chaque région) comporteront un rapport d’objectifs, qui s’imposera avec un lien de prise en compte aux documents infrarégionaux et, un fascicule de règles générales, qui s’imposera, lui, avec un lien de compatibilité.

L’échelon infrarégional – le SCoT

– Modalités de prise en compte de l’objectif. – Le Schéma de cohérence territoriale, lorsqu’il existe, constituera le document support servant de lien entre les objectifs fixés par le SRADDET de la région et les normes devant être édictées dans les documents locaux d’urbanisme.
Il s’appuiera en cela d’une part sur le PAS (projet d’aménagement stratégique) qui fixera l’objectif de réduction du rythme d’artificialisation de chaque PLU, et, d’autre part, sur le DOO (document d’orientation et d’objectifs) qui pourra décliner les objectifs du PAS par secteur géographique selon les situations particulières énoncées à l’article L. 141-8 du Code de l’urbanisme. Les PLU étant soumis à un rapport de comptabilité avec le DOO, il aura donc valeur contraignante à leur égard.
Délai imparti et sanctions. Par principe les SCoT devront avoir intégré la trajectoire ZAN au plus tard le 22 août 2026, soit 18 mois après les SRADDET au moyen d’une procédure de modification, le cas échéant simplifiée. À défaut, sur certains territoires, il ne pourra plus être prévu d’ouverture à l’urbanisation .

L’échelon local – les PLU, PLUi et cartes communales

– Modalités de prise en compte de l’objectif. – Le dernier échelon territorial impacté par la trajectoire ZAN sera celui de la commune. Leurs PLU, PLUi ou cartes devront être modifiés ou révisés afin d’être rendus compatibles soit avec les objectifs du SCoT s’il existe, ou à défaut, directement avec ceux du SRADDET. Cela s’effectuera au travers d’objectifs chiffrés définis au sein de leurs PADD (projet d’aménagement et de développement durable).
Notons que le PADD, pour justifier de l’ouverture à l’urbanisation d’un nouvel espace NAF, sera soumis à la condition de réaliser une étude établissant que la capacité d’utiliser les espaces déjà urbanisés est déjà mobilisée au travers de leur densification, des locaux vacants et des friches.
– Délai imparti et sanctions. – Les documents locaux d’urbanisme devront avoir été « zanifiés » au plus tard le 22 août 2027, soit douze mois après le SCoT s’il existe. À défaut, plus aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans les zones à urbaniser des PLU/PLUi ou secteurs dits constructibles des cartes communales, jusqu’à l’entrée en vigueur du document rendu compatible.
Le suivi du ZAN. Enfin, l’article L. 223-1 du Code général des collectivités territoriales, instauré par la loi Climat et Résilience, impose aux communes ou EPCI de rendre un rapport et de tenir un débat tous les trois ans pour rendre compte de leurs efforts en matière de limitation de l’artificialisation et des résultats obtenus.
– Observations conclusives. – Le ZAN est désormais une réalité qui doit s’ancrer définitivement dans la gestion urbanistique du territoire. La mécanique étant mise en place et lancée, il ne peut, en principe, y avoir de retour en arrière, comme l’a indiqué, le 13 septembre 2022, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires. S’il admet la nécessité de revoir l’écriture de certaines dispositions des décrets, le calendrier restera, selon lui, inchangé.
L’effet « d’onde de choc » créé par la loi était souhaitable et nécessaire, même si, à n’en pas douter, un rééquilibrage dans sa mise en application interviendra nécessairement en concertation avec les élus locaux.
C’est d’ailleurs en ce sens que le même jour (14 décembre 2022), à la fois l’Association des Maires de France (AMF) éditait un recueil de vingt propositions pour la mise en œuvre du ZAN et la mission sénatoriale conjointe de contrôle de la mise en application du ZAN remettait une proposition de loi visant à l’en faciliter ; proposition de loi depuis adoptée en première lecture au Sénat et en cours de lecture à l’Assemblée nationale à l’heure où nous mettons sous presse.
Le ZAN est indubitablement un beau roman, qui n’en est pour l’instant qu’à ses premiers chapitres. Il inspirera néanmoins nos’ prochains développements, relatifs aux outils permettant la production de logements.